LART D U MENUISIER ÉBÉNISTE. Far M. Ro uBo fils. Maître Menuifier. ÎIK SECTION DE LA IIK PARTIE DE l'Art du Menuisier^] M. D c c. L X X I V. — — — L ART D U MENUISIER ÉBÉNISTE- Par M. RouBo le fils. Maître Menuifier. TROISIEME SECTION DE LA TROISIEME PARTIE DE l'Art du Menuisier. L' F, s p E c E de Menuiferie dont je vais traiter, quoique d'une moindre confé- quence que celle de bâtiment (autrement dite d'afremblage),eft cependant celle ' qui demande le plus de propreté & de précifion de la part de l'Ouvrier , ou pour mieux dire de l'Artifte , qui pour bien faire cette efpece de Menuiferie , doit joindre à beaucoup d'expérience dans la pratique , une infinité de connoiflàncos théoriques ; de forte qu'un bon Menuifier-Ebénifte doit non-feulement être en état de bien faire la Menuiferie ordinnîre , mnb cncuie de favoir coller Se polir toutes les différentes efpeces de bois , tant François qu'Etrangers ; il doit auffi favoir teindre les bois & les brunir , & travailler diverfes fortes de matières , comme l'yvoire , l'écaillé , la nacre de perle , l'étain , le cuivre , l'argent , & même l'or & les pierres précieufes ; ce qu'il ne peut faire fans connoître parfaitement toutes ces différentes matières , qui toutes s'emploient & fe travaillent différemment. La teinture des bois demande auffi quelques no- tions de Chimie pour la cofflpofition de ces teintures. A ces connoiffances théorie-pratiques, les Menuifiers-Ebéniftes doivent joindre celles de goût qui s'acquièrent par le DelTein de tous les genres , comme l'Architeaure & la Perfpeaive , l'Ornement , le Payfage & même la Figure , afin d'être en état de repréfenter toutes fortes de fujets avec toute la précifion dont leur Art peut être fufceptible. Il faut auffi qu'ils fâchent graver au burin , tant fur le bois que fur les métaux , foit pour y former des ombres , foit pour détailler les parties qui feroient trop fines, pour qu'ils puffent le faire avec la fcie à découper. Men uisier , m. Pan. III. Sec% 1 9 7^4 MENU ISIE R,IU. Part. SeB. III. Les Mcnuifiers-Ebéniftes doivent avoir quelques connoiflânces de l'Art du Tour , afin d'être en état de faire eux-mêmes les parties de leurs ouvrages qui doivent être tournées, comme les pieds de tables , de guéridons & autres. Ils ont auflî befoin de favoir limer pour ferrer leurs ouvrages eux-mêmes ( ce qu'ils font toujours ) , & pour y ajufter les ornements de bronze qui y font néceflâires ; ce qui m'obligera à donner quelques notions élémentaires de l'Art du Tour & du Serrurier , dont la connoiflânce eft abfolument néceflîdre aux Ebéniftes. D'après l'expofé que je viens de faire des connoiflânces néceflâires aux Menuifiers-Ebéniftes , il eft facile de voir que leur Art eft très-étendu , quoiqu'il foit prefque tout de pratique ; mais cette même pratique tient à tant de chofes, que quelque fuccinte que foit la defcription de l'Art de l'Ebénifterie , elle ne peut être que très-confidérable , vu la grande quantité d'objets qui doivent y être traités , & dont on ne pourroit retrancher aucun làns faire tort à tout l'ouvrage , lequel eft plutôt fait pour les Ouvriers & les Curieux, que pour les demi-Savants , qui regardent comme inutile tout ce qu'ils n'entendent pas , ou ce qu'ils n'ont pas le courage de vouloir apprendre ; ce qui leur fait préférer des abrégés qui ne leur enfeignent que des mots , dans la connoifllmce defquels ils font confifter toute loui r^ieiiv-i- , fi «.tpcaJdiiL C'en eft une que celle qui ne fort qu'à furcharger la mémoire fans éclairer l'elprit , & qui fait plutôc des ignorants orgueilleux que de vrais Savants. Comme dans la delcription des Arts , l'intention de l'Académie eft d'élever un monument à l'induftrie humaine , ceux qui travaillent à la defcription de ces mêmes Arts ne doivent rien négliger de ce qui peut concourir à la perfection d'un monument fait pour illuftrer notre fiecle , & éclairer l'avenir. Quant à moi je n'épargnerai rien pour donner à la defcription de cette Partie de mon Art toute la perfeélion polTible , du moins félon mes forces ; cfpérant c^u'en faveur de mon zélé on voudra bien excufer les fautes de mon Ouvrage , qui auroit peut-être été moins prolixe , <Sc certainement mieux écrit , s'il étoit tombé dans des mains plus habiles que les miennes. L'Art de l'Ebénifterie eft très-ancien, & a pris nailTance en ACe, d'où il fut apporté en Grèce , & de-là en Italie , lorfque les Romains après avoir vaincu une partie de l'Univers le furent à leur tour par le luxe des peuples vaincus. A ce qui paroît par les Auteurs anciens , cet Art étoit très-eftimé à Rome où l'Ebé- nifterie , ou pour mieux dire la Marqueterie , foit en bois , foit en marbre & en métaux, étoit recherchée des plus riches Citoyens , &faifoit un très-grand objet de luxe ( * ^. A la chute de l'Empire Romain , cet Art, ainfî que tous les autres. ( ^ ) Il n'eft pas poiïible de favoir au jufte jufqu'à quel degré de perfeftion les Anciens ont pouffé rArr de l'Ebénifterie , vu qu'il ne nous refte aucun monument de ces temps ; cependant fi on peut en juger par les belies Mofaïques de marbre qu'on a retrouvées à Borne & ailleurs j il y a tout à croire qu'ils excelloient autant dans l'Art de la Mofaïque en bois ; de plus , tous les Auteurs s'accordent à parler de la magnificence des Maifons tant des grands que des particuliers dont les murailles &ies plafonds, & même les planfihecs, ctoieot iiictudés de lames d'or, d'argent De l'Ëbénisterie ek GÉNiRAL. 75 J fut oublié & même prefque anéanti dans Jes fiecles d'ignorance qui fuivirent & ce ne fut que dans le quinzième lîecle que Jean de Vérone , contemporain de Raphaël , remit cet Art en honneur , & qu'il inventa , ou pour mieux dire renouvella l'ufage de teindre le bois de diverfes couleurs , & d'y donner des ombres , par le moyen du feu ou des acides ; de forte que l'Arc de i'Ebé- nifterie , qui de fon temps ne confiftoit qu'en des compartiments de noir & de blanc , devint fufceptible de repréfenter divers objets , & fur-tout des bâtiments en perfpeétive. Cet Art paffii en France du temps de François premier , & avec les deux Reines Catherine & Marie de Médicis , & il y fut cultivé avec fuccès ; mais ce ne fut que dans le dix-feptierae fiecle qu'on fît non-feulement des meubles , mais encore des revêtiffements d'appartements j & même des planchers d'Ebénifterie , & que cet Art fut porté à fa perfedion , ipécialemenc dans le temps du Miniftere & fous la proteflion de M. Colbert, qui établit aux Gobelins une Manufadurc d'où font fortis quantité de beaux Ouvrages , qui ont fait & feront toujours l'admiration des connoilTeurs , fur- tout ceuxfaits parle nommé Bo«/f. Depuis quelques années les progrès de cet Art fe font ralentis , foit que les Ouvrages d'Ebénifterie coûtent trop cher , ou bien que la mode en foitpaflee; de forte qu'on ne fait plus maintenant que des petits meubles couverts de bois de placage , foit teint , foit naturel , & h plupart peu fblidement faits. Il y a trois fortes d'Ebénifterie : favoir , celle de Placage , laquelle confîfte en des compartiments de bois refendu en feuilles très-minces , collé fur un fond de bois uni , ce que l'on appelle ordinairement Menuiferte de placage ou Marqueterie: la féconde efpece eft celle ou l'on repréfente des fleurs, des fruits Se même des animaux & des figures humaines par le moyen des bois teints ou de couleurs naturelles , appliqués flir un fond de bois uni ou incrufté dans d'autres bois précieux : cette fccunde elpece d'Ebénifterie fe nomme Mofaique ou Peinture en bois : la troifieme efpece d'Ebénifterie eft celle où , avec les bois précieux , on emploie l'écaillé , l'yvoire , les métaux , les pierres précieufès, &c. Les Ebéniftes font non - feulement leurs ouvrages de bois de rapport & d'yvoire. Le Palais ou la Maifon dorée de Néron , ne portoit en partie ce nom que par rapporc anx incrullations & aux rcvcriflements d'or dont elle écoit ornée ; les chaires curules des Sénateurs Romains quiétoient d'yvoire , n'c- toienc vraifemblablemcnc que de marqueterie , n'étant gueres pofTible qu'on puiiTe les faire toutes d'yvoire Les Anciens revêtiffbient auffi leurs Temples d'Lbéniflerie, comme le prouve un paiïage d'Horace, qui demandant une grâce à Vénus de la part de Maximus , lui promet une Statue dans un Temple boifé de bois de Citron- nier cjui éroit un bois des plus rares qu'on em- ployât à Rome dans ce temps. Tout l'avantage que les Modernes peuvent avoir fur les Anciens par rapport i l'Ebéniaeiie , c'eft l'ufage des bois précieux & aromatiques , que le commerce des [ndes Orientales & la découverte du nouveau Monde leur ont procurés , ce qui les met dans le cas de donner beaucoup d'éclat à leurs ouvra- ges en y employanr des bois d'une excellente qualité, & dont la couleur naturelle ne fauroit beaucoup changer: au relie tout paroît égal des deux côtés. Les Anciens avoient trois efpeces de Marqueterie ou Peinture en bois , une qui repréfenroit les Dieux & les Hommes , qu'ils uomnioient Sculpture en Mofaique, c'ert-à-dirc, ouvrage trcs-prccieux ou bien infpiré par les Mufes; la féconde efpece qui repréfenroit les Animaux , Se la troifieme les Fleurs &: les Fruits, Se qui étoit ornée de divers compartiments. Voye\ V Encyclopédie, 756 ME NU IS lE R,IIL Pan. SeÛ. III. Chap. X. plaqués fur des fonds unis , mais encore ils les font en bois plein , foit de France ou des Indes , qu'ils aflemblent & ornent de moulures , & dans lefquels ils incruftent quelquefois d'autres bois ou des métaux. Des trois efpeces d'Ebé- nifterie , la première eft la plus ufitée , comme étant celle qui demande le moins de foin & de travail , & qui coûte par conféquent moins cher ; la féconde l'eft un peu moins , & la troifieme prefque point du tout , quoique ce foit la plus belle , & à mon avis la feule digne de décorer les Appartements des Princes , ou du moins leurs meubles. CHAPITRE DIXIEME. Des différents Bois propres à l'ÉbéniJierie. L ES bois propres à l'Ebénifterie font de deux efpeces; favoir, cèux quî fervent à la conftruélion des bâtis , & ceux qui fervent à leurs revêtiffements : les bois propres aux bâtis font le chêne tendre , le fapin , le tilleul & tout autre bois tendre & pan fuier à fp mnrnnpnrpr , qn'nn pmploip le plus fec poffible , comme je l'expliquerai en parlant de la cunftruélion des bâtis des ouvrages d'Ebénifterie. Il y a deux fortes de bois fervant aux revêtiffements des ouvrages d'Ebénifte- rie favoir, ceux de couleur , qui la plupart nous viennent des Indes , & les bois de France, dont quelques-uns ont d'afTez belles couleurs , mais dont le plus grand nombre a befoin d'être teint pour être employé à ces fortes d'ouvrages. Les bois des Indes font préférables à ceux de France , tion-feulement par leur grand nombre , mais encore par leurs belles couleurs & leurs bonnes qualités qui les rendent très-propres à recevoir le poli ; c'cfl, pourquoi je vais commencer par la defcription des bois des Indes , comme étant la plus compliquée & la plus intérelTante , vu que ce font ceux qui font le plus en ufage à préfent. Les bois des Indes propres à l'Ebénifterie font en grand nombre & très- dilïerents les uns des autres , foit pour la couleur , foit par les différents noms qui font propres à chacun d'eux, ou qui leur ont donnés par rapport aux différents pays où ils croifTent. Cependant on peut en général les confidérer, par rapport à leurs couleurs , comme faifant cinq efpeces différentes qu'on connoilToit ancien- nement fous le nom d'Ebenes, favoir, l'Ebene noire proprement dite, lesEbenes rouges , les violettes , les jaunes & les vertes , C cependant on peut donner ce nom à des bois dont la couleur eft plutôt jaune fale, ou brun olivâtre que verte. Cette maniera de confidérer les différentes efpeces de bois des Indes eft affez naturelle ; mais comme chacun de ces bois n'eft pas exaétement de couleur rouge ou violette , &;c. mais plutôt nuancé de ces différentes couleurs ( du moins Des différents Bois propres à l'Ebéniflerie. 7(^7 moins pour la plupart ) ; j'ai préféré de fuivre l'ordre alphabétique dans la defcription que j'en vais faire , comme étant le plus en ufage , & celui qu'ont fuivi ceux qui ont déjà écrit fur cette matière. (*) Section Première. Defcription des Bois des Indes & de leurs qualités , relativement à l'Ebéniflerie, Avant que de faire la defcription de chaque elpece de bois des Indes , j'ai cru devoir donner la Table fuivante , afin que d'un feul coup d'œil on puide connoître leurs noms , leurs couleurs , leurs qualités dures ou tendres , ou aroma- tiques, & le pays on ils croiflènt , ce qui aidera beaucoup à l'intelligence de la "defcription de ces mêmes bois. C) En travaillant à la defcription des bois des Indes , je ne me fuis pas flatte de le pouvoir faire avec toute la perfeftion dont cette matière pourroit être fufceptible , vu que prefque tous les Auteurs qui ont écrit à ce fujet , ou ne s'ex- pliquent pas d'une manière aifez cxaLle , ou font en contradidion les uns avec les autres en trai- tant des mêmes fujets , foit par rapport aux noms ou à la qualité & à la couleur des bois. Les Marchands & les Ouvriers ne font guère plus inftruits à ce fujet , s'embarraffant fort peu iorf- qu'ils achètent un morceau de bois , quel eft fon vrai nom & de quel pays il vient. Je n'ai donc pu faire mieux pour rendre ma defcription la moins défeiîlueule qu'il m'a été poflible , que d'acquérir la plus grande partie des bois des Indes , avec les noms que leur donnent les Marchands & les Ouvriers ; enfuite j'ai comparé les defcriptions des différents Auteurs entr'elles, & avec les bois qui m'appartiennent, à ceux qui font au Cabinet d'Hiftoirc Naturelle du Jardin du Roi ; ce qui m'a mis en état de faire une defcription ,du moins exempte de fautes groffie- res , laquelle de plus n'a pour objet que de faire connoîcrc les dift'crcnts bois des Jndes, relative- ment à l'Ebénifterie , & confidérés comme mar- chandife ou matière propre à être employée par les Menuifiers , fans entrer dans aucun détail de ce qui a rapport i l'Hidoire Naturelle de ces bois; ce qui eft non-feulement au-delà de mes forces , mais encore abfolument étranger au fujet dont je traite. Menuisier. , 111. Pan. 111. SeB. TABLE ALPHABÉTIQUE des Bois étrangers connus fous le nom de Bois d Indes, se qui font propres à l'EbéniJlerie ; leurs couleurs , leurs qualités , dures ou tendres , ou aromatiques y ÔC le nom des Pays où ils croiffent. Noms des Bc Pays où croissent les Bois. N-'. I. Acaja \ I£le de Ceylan.lHtfejOrienwiw., 2. Acajou ■ I Malabar. Indes Orkntaks Couleurs. Rouge. . . . Roufsâtre . Qualités. Tendre. Tendre & dur. Odeurs. r Aloës ou Agalochum nCochinchine. Indes Orienîales. \ Alocs ou Bois d'Aigle, du Agalo- \ ^.J chum fauvage .^CochincKînc, Cambaye & Sumatra.. ^ ÎAlocs Oit Ca'.ambour oii Calam- 1 Indes Orientales ^ bourc f^iflcs de Soloi- & de Timoï, Ind. Or ^. Amaranthe | Guyane. Indes Occidentales 5. Amourette j Ifies Antilles. Indes Occidentales .. . 6. AnisouAnilàTEtolle j Chine , Philippines. Ina'ej Orientales. {Afphalate ou Bois de Rhode. K.i jn j t?- j o » ^j^^j^ J.Ifles de Knode&: Chipre. ^jie. De plufîeurs couleurs.i Tendre l Aromatique. jRoux. f VerdSti atre.. . , . Violet-brun. Rouge-brun , Gris. S. Brefil eu Sapar f De Fern J deSaii I & à jj.Canelle ou SafTafras ,10. Cayenne ï I. Cèdre Ï2. CpHip 1 3 , Chine ou Bois de Lettre . :rnambouc , Ifies de Lamon & î Sainte-Marthe, Ifles Antilles, 5 à la Jamaïque. Indes Occident.) Ifle de Ceyian. Indes Orientales. . . . Ifle de Cayenne. Iniles Occidentales. Rouge. Syrie & Amérique A[îe,Améi-ique Se Sibérie en Europe Blanc Jaune^rouge, veiné Rougeâtre Se veiné, Blanc-roux Plein \ A romatique. Tendre .f Aromatique, Dur. Dur. Plein. Dur. Plein. Plein,incorruptible. Mou i Odeur forte J douce. Odeur, comme {De !a Chine , Jn^/ej OrierjwZer ;& de"J Rouge - brun , ^"^"11), la Guiane. Indes Occidentales J cheté de noir. . . j i^. Citron ou Bois de Chandelle. . 1 5. Citronier 16. Ifles de l'Amérique D'Afie 5c Midi de l'Europe Jaune-roux.. , Blanc-veiné. . Copaïba ï^"^«l'/.f ^'If "^"-tRcge tacheté. . ^ \ gna.n. Indes Occidentales J ° 17. Corail Des Ifles du Vent en Amérique.--. . . Rouge, vif, veiné 1 8. Cyprès D'Afie Jaunâtre rayé, i_tî. Ebene Madagafcar. Ifle Maurice, j^friqiie. 20. Ebene de Portugal Indes Orientales 21. Ebene rouge owGrenadille. Noir. .- Noir & blanc , ta-l l 'Odeur de citr Ferme \ de mufcade i f la canelle. cheté. Ferme & incorrupt. Plein. Poreux, Dur, incorruptible. Très- dur. Dur, Madagafcar. Afrique. . 1 ^ 1 jBrun -^rougeatre, ^-^^^^ "{ rayé de noir, . . . , 22. Ebene verte. Madagafcar, ifle Saiut-Maurlce. Afri-C-r, ,■ ^ a A^-x ,.,e De Tabafco & des Mes ^nP^^ 'Z , }^'>'- tilles. Amérique,, îbeiic blanche. Epi de Bled. . . Fereol Des différents Bois propres à VEbéniflerie. Aux Ifles Molucqucs. Indes Orient. . . ! Blanc 1 Dur. ufec îayac ouBoîs-Sainc. Chine. Indes O rientales . Iflede Caycnne |BIanc tadietc de|p,j,j„_ Mes de l'Amérique fFauve.brun & no!r,i Xrèj.dur L un peu tayé. . . . / A la Jamaïque. Indes Occidentales,. \ Jaune veiné J-Verd & noir, rayé. Ifle de Saint-Domingue & du Port de Paix. Indes Occidentalis. ... Tendre. Très-dur. Gommier AlaGuadaloupe. Jnii 0«iA™/£j î^'"'"': ''4du I l no'r J f Inde ou Campêche ou Laurier \ Aromatique f Campêche , Mes de Sainte-Croix 7n i - 4 • < de la Martinique, & de la Grenade, i ^^ ë^^"" '^H Dur & très-lourd . I Indes Occdemales.... \ )^""^ "', Jacaranda. Indes Orientales jBlanc & noir mar- bré ■{" Jaune , Fuftoc & Clalrem- f Aux Antilles & à Ilfle de Tabago. f Jaune.couleur d'or, bourg ou Satiné jaune, Lapiré Mufcadier (Eil de Perdrix. Olivier Oranger Platane Puanc Rhode ou Afphalate.. . Rofe oii Bois marbré. Rouge ou de Sang. . . Santal citrin meriquL'. Indes Occidentales Indes Oriemalcs Indes Orientales Syrie & Midi de l'Eui-ops. . Chine , & Europe De l'Afie &: de l'Amérique.. ,\ & veiné o« ondé. jPIein. "I Plein., (Rouge & jon- quille.. . D'odeur fortç: De bonne odeur," De très- bonne Capde Bonne-Erpcrance, j^fri De la Jamaïque. Jlmc'rique Des Ifles Antilles. Amcrique Gris brun Jaune-brun , rayé. Jaune & blanc. . . Blanc Onde . /De L ode Moelleux. Très dur. Dur. Plein Plein. Plein , Blanc. , Pie Très-bonne odeur; De mauvaife odeur; {Jaune & rouge , J^ayé , . f D'une odeur S & très-pénéi bonne étrante. Plein.. Odeur de rofe. Près du Golfe de Nicaragua. Amer, j Rouge-foncé j Dur. A la Chine , auRoyaume de Siam aux Illcs de Solor & de Timor. > Jaune-clair (Dur...."....'.... fBonne odeur de Indes Orientales ") i Santal blanc. Satiné rouge- Violet Comme ci-dejjus. Sur la côte de C \ de TarafTarin, Ifles Antilles. Indes Occidenti ( Blanc roux. I Santal rouge ou Caliatour |'Surla côte de Coromandel , &: à Tifle /Rouge mêlé de jau-l p, J ■ I. Indes Orientales. . . \ ne & brun -j ^'^* }piein. I Plein j-Odeur, comme ci-dj \ & moins forte. Violet palilïandrej dit Ste, Lucie. aUs.,.A^°^S^ ■ L jaune. veiné de r J r-i • 1 fBanc-vmeux &\r)i - j Indes Orientales J . , , ï-Plem -î 1^ violet, raye. J |- Ifle de Ste. Lucie ou Aloufie. Indes Occidemalss I Gris-brun ? veiné. i Poreux, t Odeur de Violette très-douce. I Bonne odeur plus \ tortequelebois I violée. 770 ME N UISIER , ///. Pan. SeB. 111. Chap. X. N°. i,Aca/a:cet arbre croît à Ceylan , & porte un fruk affez femblable à des prunes ; fon bois a l'écorce rude & tendre comme le Sureau ; il eft rouge & léger comme du liège , & n'eft propre qu'à de petits ouvrages. 2. Acajou ou Acajous : cet arbre eft une efpece de Noyer qui croît dans le Malabar , & qui eft originaire des Ifles de l'Amérique & du Bréfîl : à Cayenne , à la Jamaïque , le bois d'Acajou proprement dit eft mou , d'une odeur un peu forte fans être abfolument mauvaife , de couleur roufsâtre, de fil Se quelquefois fi tortueux Se de rebours qu'on ne peut le travailler qu'avec des fers brettés. Cette efpece d'Acajou fe nomme Acajou-pomme ; il eft moins odorant que l'autre , feche plus yîte , & fe brunit plus promptement. L'Acajou de Cayenne vient haut & gros , & eft propre à faire des planclies ; fa couleur eft rougeâtre , quelquefois veiné ou marbré de jaune-& de blanc. Ce bois a une bonne odeur, fe polit bien, & on le nomme quelquefois Cèdre de Saint-Domingue. L Acajou de la Jamaïque eft d'une couleur brune un peu rougeâtre , rayé de brun foncé en fuivant les couches concentriques de l'arbre ; ce qui produit de très-beaux accidents aux environs des nœuds , dont alors les couches concen- triques fuivent les fmuofités. En général le grain de f Acajou eft fin , fes pores un peu ouverts, fijr-touc à bois debout, c'cfl-à -dire , à l'extrémité de fes fibres longitudinales , ce qui fait que ce bois n'eft pas bien folide & même un peu fujet à la pourriture par rapport à l'humidité qui s'introduit dans l'ouverture de fes pores. 3. Alois : ce bois eft très-rare & eftnommé par Diofcoride Agaloc/ium. Il y a trois efpeces d'Aloës , favoir , le Calombac qui croît à la Cochinchine , qui eft très-tendre & de plufieurs couleurs , d'une très-bonne odeur : ce bois eft extrêmement réCneux, ce qui fait qu'il fond plutôt qu'il ne brûle , & qu'on ne s'en fert que comme d'un parfum. La féconde elpece d'Aloës fe nomme Bois d'Aigle ou Agalochum fauvage ; c'eft un arbre qui croît à la Cochinchine , à Cambaye & à Sumatra ; fon bois eft compaft & pefant , percé de plufieurs cavités , eft de couleur roufle , & eft d'une très-bonne odeur. La troifieme & la plus commime efpece d'Aloës fe nomme Calambourc ou Calambour , & vient en greffes bûches des Mes de Solor Se de Timor ; c'eft un arbre qui reffemble affez à l'Olivier ; fon bois eft léger , poreux , & réfineux d'une couleur verdâtre , tirant fur le roux. 4. Amaranthe ,zppe[lé parles Anglois Ma/iageni ou Magohoni; efpece de bois violet que lesHoUandois nous vendent , Se qu'on nomme quelquefois Bois de la. Chine , quoique malrà-propos , puifque ce bois ne croît que dans le continent de la Guyane en Amérique. Cet arbre vient très-gros , & fon bois eft de fil & d'un grain fin & ferré ; fa couleur , avant d'être travaillé , eft d'un gris vineux & brillante comme fi elle étoit argentée ; lorfque ce bois eft poli , fa couleur change Des différents Bois propres à l'Ebénifterie. jjï change & devient d'un beau violet brun , qui , avec le temps , devient prefque noir. Ce changement eft caufé par levaporation d'une fubftance blanchâtre & rélineufe qui fe trouve renfermée dans fes fibres longitudinales , & qui paroît à bois de bout, comme une infinité de petits points blancs qui fuivent les couches concentriques de l'arbre. Le bois d'Amaranthe eft moyen- nement dur , fe travaille très-bien & eft fort d'uCige à préfent , où on l'emploie affez communément avec le Bois de rofe , fur lequel il tranche cependant un peu trop , comme je l'expliquerai en parlant de la manière de mélanger les bois. 5. Amourette eft un bois pefant dur & compad , de couleur jaunâtre, un peu rouffe, & veiné de brun rougeâtre : je foupçonne que ce pourroit être la même chofe que le Benoît fin , qui croît aux Antilles , & qui vient très-grand & très-gros. 6. Anis ou Anil à l'étoile , eft un arbre qui croît à la Chine , aux Indes Orientales , aux Ifles Philippines & en Sibérie , d'où on l'apporte en groff^es bûches : ce bois eft d'une couleur grisâtre & d'une odeur à-peu-près femblable àrAnis,& eftpeud'ufage en Ebénifterie, quoiqu'on fe ferve d'Erable teint en gris. 7. Afphalate, nommé par les Anciens Rhodium llgnum ou Bois de Rhode. On ne fait au jufte fi c'eft le bois connu fous le nom de Bois de Rhode ou de Rofe, ou bien fi c'étoit l'Aloës ou l'Agalochum. 8. Brcfil : ce bois vient originairement du Bréfil , province de l'Amérique Méridionale; il prend différents noms félon les autres lieux où il croît; celui qu'on nomme Bréfil de Fernatnbouc, eft le meilleur; il y a encore le bois de Bréfil proprement dit, celui de Lamon , de Sainte-Marthe , & le BréfiUet , qui croît aux Antilles & qui eft le moins eftimé de tous. L'arbre du Bréfil eft de deux efpe- ces ; favoir , le gros qu'on nomme ^apan , <Scle petit qu'on nomme Sapanhimas. Le bok de Brcfil na pas de moelle, eft fouvent tortueux, & vient fort gros; mais comme il a beaucoup d'aubier , il perd la moitié & même les deux tiers de fa groffeur. Pour que ce bois foit bon, il faut qu'il foit compad , dur & très- fec , que fa couleur fur le bois de fil , lorfqu'il eft éclatté, de grife qu'elle paroît, devienne d'un rouge tirant un peu fur le jaune, & qu'il foit d'un goût un. peu fucré. Il croît auffi de ce bois aux Indes Orientales , comme au Japon où il a de la moëlle ; au royaume de Siam , fur la côte de Malabar , & dans les deux prefqu'ifles du Gange ; ce bois ne pouvant croître ailleurs que dans la Zone Torride. Le Sapan des Indes dont il eft ici queftion eft d'un genre diiférenc de celui de l'Amérique ; mais il fert également à la Menuiferie & à la Teinture. 9. Catielle, qu'on nomme improprement Saffafras. C'eft un arbre qui ne croît qu a rifle de Ceylan , & qui ne vient qu'à quatre toifes de hauteur ; fon bois eft Menvisiek, 111. Pan. 111. Sea. Lj» t 772 MENUISIER, III. Pan. SeB. III. Chap. X. de fil dur, blanc & n'a point d'odeur ; il y a dans les vieux troncs de ces arbres des nœuds ou loupes propres à l'Ebéniftene. 11 croît dans la Floride en Amérique un alTez bel arbre qu'on nomme Pavane ou Bois de Candie, l caufe de fa bonne odeur; on prétend que c'eft la même chofe que le Saffafras. Il y a encore une efpece de bois jaunâtre tirant fur le brun , nommé Carabaccium, dont l'odeur fent le clou de gérofle , lequel pourroit bien être le même que le Pavane d'Amérique. 10. Cayenne. Il y a deux fortes de bois de Cayenne ; l'un , veiné de jaune & de rougeâtre , dont le grain eft fin & ferré ; l'autre , d'un brun rouge veiné & grisâtre fur les bords : l'une & l'autre de ces deux efpeces de bois eft femée de petites cavités remplies d'une efpece de gomme ou réfine qui s'évapore à l'air, laquelle gomme fuit les fibres longitudinales du bois , & paroît à bois de bout contenue dans une infinité de petits tuyaux femés irrégulièrement , ce qui n'empêche pas que ce bois ne fe polifTe très-bien. 1 1 . Ccdre : c'eft un des plus beaux & des plus grands arbres du monde : les plus grands croiftbient jadis fur le mont Liban , où il y eu avoit de 120 à 130 pieds de hauteur ; il n'en croît plus à préfent qu'aux environs de Biblos & de Tripoli de Syrie: il en croît aulT, beaucoup dans l'Amérique , dans les Ifles de Chypre & de Candie ; mais ils font moins beaux que ceux de l'Afie mineure. Il croît encore des Cèdres en Sibérie ; mais ce font les moins beaux de tous , & ils n'ont point d'odeur. Le bois de Cèdre eft de deux efpeces , favoir , le rouge & le blanc : la rouge , qui eft le plus beau , eft un bois plein , moyennement ferme , d'une couleur rougeâtre tirant fur le jaune , & dont les féparations des couches concentriques font d'un rouge brun tirant fur le violet ; de forte que ce bois refendu fuivant un de fes rayons paroit rayé à-peu-près comme le beau bois de Sapin , & eft d'une très-bonne odeur , à-peu-près femblablc à celle du mufc. ^ 12. Le Cèdre blanc n'eft point rayé comme le rouge , il eft dune couleur plutôt rouft"e que blanche , & eft plus mou & plus léger que le rouge , & a à-peu-près la même odeur. En général le Cèdre , quoique très-tendre , prend affèz bien le poli , & paffe pour être incorruptible , ce qui le faifoit fort eftimer des Romains qui en faifoient beaucoup d'ufage pour leurs meubles. Seneque , le Chantre de la pauvreté , avoit 500 tables de bois de Cèdre toutes pareilles portées fur des pieds d'yvoire. 13. Chine, ou Serpentin, ou Lignum Sinenfe', en Hollandois, Letterhout ou Bois de lettres , à caufe qu'on l'apporte marqué de lettres ou de marques que forment les taches dont il eft couvert. Ce- bois eft dur, lourd & extrêmement compaa, prenant bien le poli; d'une couleur rouge-brun , marqué de petites taches brunes ou plutôt noirâtres , qui partent du centre de l'arbre , fuivant la » Des différents Bois propres à l'Ebénifterie. jj-^ direâion des rayons. Ce bois eft réfineux & d'un grain très-fin ; & quoique très-dur, il fe fend aifément fur le bois de iîl, ce qui le rend affez difficile à tra- vailler ; de plus Ci couleur noircit en vicilliflànt. Quoique ce bois foit nommé en France B ois de la Chine , il eft fort douteux qu'il vienne de ce pays ; au contraire , on eft prefque sûr qu'il ne croît que dans le continent de la Guyane , dans l'Amérique méridionale. Ce qu'il y a de certain , c'eft qu'il croît à la Guyane une efp ece de Bois de lettre <^ui eft luifànt , dur &. de couleur rouge tacheté de noir. Quelquefois le fond de ce bois eft jaune ; mais dans l'un ou l'autre cas , il ne vient guère qu'à 4 pouces de diamètre. 14. Citron , arbre ainfi nommé à caufe de fon odeur & de fa couleur ; il croît dans les Mes de l'Amérique , & fur le bord de la mer. Les Américains lé nomment Bois de chandelle , parce qu'ils s'en fervent pour s'éclairer la nuit. Son bois réfineux eft lourd, compad, d'une odeur forte tirant fur celle de citron; fon grain eft ferré : il eft extrêmement de fil , & prend bien le poli. On l'apporte par tronc pefant environ 1000 livres ; c'eft à quoi on peut le diftinguer du Santal Citrin, auquel il relTemble , mais dont les bûches ne pefent que 100 livres; d'ailleurs le Citrin eft moins lourd que le bois de Citron, d'une odeur plus douce & plus agréable , & de meilleur goût que le dernier, qu'on nomme aulfi Bois de coco Se de ja/mln. On croit que c'eft le même que le bois de rofe de la Guyane. ' 15. Citronnier. Cet arbre eft peu gros ; fon bois eft blanc & fans odeur : il eft originaire d' Afie , d'où il fut apporté dans la Grèce , & de-là en Italie. Il croît maintenant en Efpagne , en Portugal , dans le Piémont & dans la Provence. Le bois de Citronnier étoit très-rare & très-eftimé à Rome fur la fin de la Répu- blique. Cicéron en avoir une table qui avoit coûté deux mille écus ; & Afinius PoUio , une de 30 mille livres : Pline dit qu'il falloir être un très-grand Seigneur pour faire ufage de ce bols , dont la beauté confiftoit dans la diverllté des ondes & des noeuds des racines. Ce bois n'eft plus d'ulàge à préfent. 1(5, Copdiba, arbre d'où découle le baume de Copahu. Son bois eft d'un rouge foncé , parfemé de taches rouge vif, d'une dureté à peu-près égale au Chêne, & fert à la teinture. On doute fi ce bois n'eft pas le même que le Fernambouc, dont il a l'odeur. Le Copaïba croît dans les forêts du Bréfil , dans l'Ifle de Maragnan & aux Antilles ( * ). 17. Corail. Cet arbre croît aux Mes du Vent, en Amérique. Son bois eft C* "jJ^aî VU au Cabinet d'Hifloire Naturelle du Jardin du Roi , du bois de Copaïba qui écoit d'une couleur jaunâtre, & d'un grain fin & ferré. 3e ne fai fi c'efl une nuance dans l'efpecc , ou bien s'il eft mal étiqueté ; car tous les Auteurs fe rapportent à la deîcription que je viens d'en faire , quoiqu'il y ait une grande différence pour la couleur ; ce qui prouve allez combien il feroit néceflaire que nous euflions une Hiftoirc des Bois étrangers bien détaillée , & faite d'après de bonnes obfervations fur les lieux & fur les diffé- rencs fujers; ce qui ne pourra jamais êcre, tant que les Ecrivains ne feront que fe copier le^ uns les autres, fans cricique, & fans examiner les chofes par eux-mcmes, ou du moins fans sVa être fait rendre compte par des gens comioifr feurs en cette partie. 774 MENUISIER, III. Pan. Secl. III Chap X. d'une couleur rouge pâle, rayé de veines d'un rouge de corail mêlé de brun fuivant les couches concentriques de l'arbre. Ce bois eft moyennement lourd, & fori; poreux ; il a les fibres très-ouvertes & remplies d'une cendre ou gomme qui eft plus ou moins foncée , félon les veines où elle fe trouve. Il a le défaut d'être très-difficile à travailler , parce que toutes ces couches concentriques ont une inclinaifon différente , ce qui produit des rebours qui font inévitables. On vend quelquefois ce bois pour du Santal rouge ; mais ce dernier eft bien plus com- padl que le bois de Corail , & eft d'un rouge beaucoup plus foncé. i8. Cyprès, arbre d'une moyenne groffeur. Il eft originaire des montagnes de Candie & des Ifles de l'Archipel. Son bois eft compaél , folide & de couleur jaunâtre ; lorfqu'il eft coupé à bois de bout , fes couches concentriques fe diftin- guent auffi aifément qu'au Sapin : il n'eft pas lourd , & n'eft pas fujet à fe pourrir ni à fe gercer ; les vers ne s'y mettent jamais ; il eft prefque d'une auflï bonne odeur que le bois de Cèdre , & prend très- bien le poli. Prefque tous les Auteurs anciens s'accordent à regarder ce bois comme incorruptible ; ce qu'il y a de certain , c'eft que les portes de l'ancienne Eglife de Saint Pierre de Rome , faites du temps de l'Empereur Conftantin , lefquelles étoient faites de ce bois , ont duré près de laoo ans. Il y a une autre efpece de Cyprès de l'Amérique, qu'on nomme Cèdre blanc , lequel n'eft pas connu en France. i<j. Lbene. L'arbre d'Ebene eft peu connu; fbn bois eft très-dur & pefànt,' cependant moins que le Bois de fer. Il y a quatre forces d'Ebenes ; fàvoir , la noire i la rouge , la verte & la blanche. L'Ebene noire , qui eft la plus commune , vient de Madagafcar , où les habitants la nomment Hafonmaimhi , c'eft-à-dire , bois noir. La plus belle Ebene noire vient de l'Ifle Maurice , dont elle a pris le nom. Pour que fEbene foie bonne , il faut qu'elle foit fans nœuds , d'un fil très-ferré , & d'une couleur luifante ; & qu'en la travaillant le copeau s'enlevc bien fans fe rompre, comme il arrive quelque- fois à une efpece d'Ebene qu'on diroit être du bois brûlé , & dont les copeaux font comme de la fciure. L'Ebene a le défaut d'être quelquefois tachée de veines roufsâtres , fur-tout celle qui vient de Flfle Maurice , ce qui en diminue la valeur , puifque la beauté de ce bois confifte dans fa couleur parfaitement noire & luifante. En général , l'Ebene eft un des plus beaux bois qu'on puifîè employer en Ebénifterie , tant par rapport à fà qualité pleine & compaéte , qui le rend facile à travailler , que par fa belle couleur noire , qui augmente encore avec le poli que ce bois prend parfaitement bien ; auflî étoit-ce prefque le feul qu'on employoit autrefois dans cette partie de la Menuiferie , à laquelle il a donné fon nom. Mais depuis que les autres bois de couleu r font devenus plus communs , on a fait moins d'ufage de l'Ebene , & on ne s'en fert prefque plus à préfent , ainfi que je l'ex- pliquerai ci-après. ao. Il y a de l'Ebene noire & blanche, qu'on nomme Ebcnt de Portugal, qui Des différents Bois pfopres à l'Ebénijlerïe. 77J E[ùi eft peu en ufage , & que je ne connois pas , ne l'ayant vue nulle part. 2 1 . UEhene rouge , autrement dite Grenadille, croît à Madagafcar ; elle eft un peu moins compaéte & moins lourde que la noire. Elle n'eft pas précifémenc d'une couleur rouge , mais au contraire d'un brun rayé de noir , en fuivaiit les couches concentriques , qui , à peu de cliofe près , font alternativement de ces deux couleurs. Ce bois eft entouré d'un aubier jaune , qui eft prefqu'auflî dur que le bon bois. 22. UEbene verte eft beaucoup moins dure que les deux premières elpeces : il en Croît à Madagafcar , à l'Ifle Saint-Maurice , à Tabago & aux Antilles : fa couleur eft d'un brun tirant fur l'olive , & toutes les fibres longitudinales de ce bois font remplies d'une cendre ou pouffiere verte & brillante , laquelle n'eft ( du moins à ce que je crois ) autre chofe que de la feve condenfée , laquelle paroît , à bois de bout , comme une infinité de petits points verds femés entre les couches concentriques, dont ils fuivent les contours. Cette cendre eft la partie de ce bois qui fert à la teinture , & qui , lorfqu'elle eft évaporée , fait perdre au bois £3 couleur verte, qui, alors, devient brune en vieillilîânt. Ce bois a le défaut d'avoir les fils entrelacés , ce qui y produit des rebours lorfqu'on le travaille fur la maille. Il y a une autre efpece d'Ebene nommée Cytife ou Ebé- nier des Alpes , dont le grain eft fin & ferré ; fa couleur eft un jaune pâle nuancé de verd; c eft un arbre de moyenne grofleur, 3z. c^ui doic plutôt être rangé dans laclaffc des bois de France, que dans ceux des Indes, auxquels il ne relfemble que médiocrement. 23. V Ebene blanche eft peu connue : le grand Pompée eft, dit-on , le premier qui en ait apporté à Rome dans fon triomphe fur Mithridate , Roi de Pont. M. de Bougainville , dans Ion Voyage autour du Monde en lyiSS , dit avoir vii à Boëro dans les Moluques, des Ebenes noires & blanches ; je ne fai s'il a voulu dire qu'il y avoit des Ebenes noires & des Ebenes blanches , ou bien fi ce n'étoid qu'une feule efpeco d'Ebene noire marquée ou veinée de blanc. 34. Epi de bled. Je n'ai pu fàvoir au jufte le vrai nom de ce bois ; je foupçonne cependant que ce pourroit être le bois de Rolè de la Chine, nommé 'fejlanty vu que les defcriptions qu'en font les différents Auteurs, convienent très-bien à l'Epi de bled , dont le bois moyennement dur , eft très-poreux. Le fond de ce bois ou , pour mieux dire , fes rayures prédominantes , font d'un noir rougeâtre , entremêlées d'autres raies couleur de chair ,' dans lefquelles il fe trouve de petites cavités remplies d'une pouffiere ou gomme de la même couleur , & quî paroilfent à bois de bout, ainfi que les fibres qui les renferment, comme des points ronds un peu allongés, difpofés fur un fond brun, de manière qu'on fent ( quoi- que affez difficilement) la forme des couches concentriques. Le bois de bout da l'Epi de bled , ne peut être mieux comparé qu'à du jonc; & il n'y a point, ou du moins peu , de différence à fes rayures confidérées verticalement , foit qu'il foit coupé fur la maille ou parallèlement aux couches concentriques ; en quoi Menuisier , ///. Fan. 111. Seçl. M 9 77<î MENUISIER, m. Pan. Secl. III. Chap. X. ce bois diflPere de tous les autres , qui , iorfqu'ils font rayés à bois de bout , le font fur le bois de fil refendu fur la maille (ceft-à-dire, fuivant les rayons de l'arbre), & veiné Iorfqu'ils font refendus parallèlement aux couches concentri- ques. Comme l'Epi de bled a les pores très-ouverts , & que fes rayures font d'une denfité inégale , il eft un peu difEcile à polir , & il faut avoir foin de remplir les ouvertures de fes pores avec un maftic préparé comme je f indiquerai en parlant du poli des bois : cette obfervation eft générale pour tous les bois dont les pores font ouverts comme à celui dont je parle. 25. FereoL Ce bois croît à Cayenne , & porte le nom de celui qui l'a décoU' vert ; il fe nomme auffi Bois marbré : le fond de ce bois eft blanc , & veiné ou tacheté de rouge. Il y a au Cabinet d'Hiftoire Naturelle du Jardin du Roi , du bois de Fereol dont le grain eft très-fin , Se dont le fond eft de couleur jaune foncé, avec des raies étroites "de couleur brune, tirant fur le violet ; c'eft peut- être une nuance dans l'efpece : au refte , ce bois eft beau , & fe travaille très- bien. 2.6, Ferc eft un arbre qui croît dans les Ifles de l'Amérique de la grofleur d'un homme par le tronc; fon bois eft extrêmement dur, d'une couleur fauve, brune tirant fur le noir , fur-tout au cœur du bois , qui eft extraordinairement dur ,& où cependant les couches concentriques fe diftinguent fort aifément, quoique fon grain foir, pour le moins , auffi farré <ju'à l'Ebene noire : la couleuc de ce bois eft généralement trifte , & on ne peut guère l'employer en Marque- terie que pour repréfenter des Terraflès , ou d'autres objets auxquels fa couleur foit convenable. 27. Fufec. C'eft un arbrifleau qui vient à la Jamaïque & au Midi de la France; fon bois eft d'un beau jaune veiné ; mais il eft peu folide. 28. Gayacon Bois-Saint, croît en Amérique, aux Ifles S. Domingue & du Port de la Paix ; fon bois eft folide , corapaâ & réfineux , d'une couleur verte , & rayé fuivant les couches concentriques, qui font alternativement vertes , pâles ou jaunes , & noires foncées de plus en plus , à mefure qu'elles approchent du centre : il ne peut le fendre que parallèlement aux couches concentriques , qui quelquefois fe féparent d'elles-mêmes ; & les fibres ligneufes de ces dernières, font tellement mêlées entr'elles, qu'on ne peut les féparer qu'avec la fcie. Lorfqu'on travaille ce bois, il rend une odeur forte, qui n'eft cependant pas défagréable. Les bûches de ce bois qu'on apporte en France, pefent jufqu'à joo livres, & leur coupe tranf/erfale n'eft point ronde comme à la plupart des autres arbres ; mais elle eft allongée en forme de poire. Il y a encore d'autres elpeces de Gayac , un peu différentes de celui-ci, entr'au- tres un qui eft auffi dur, mais dont la couleur eft jaune, à peu-près comme le Buis, & quelquefois veiné de verd ou de noir : cette dernière efpece de Gayac eft plus propre à l'Ebénifterie que la première , parce que fon bois , quoique très-dur , eft plus facile à travailler. Des différents Bois propres à VEbénifterie 777 ^9. Gommur blanc. Ce: arbre croît à la Guadaloupe ; fon bois eft blanc , veiné de gns. tirant quelquefois fur le noir. Ce bois eft quelquefois dur & difficile à travailler , & quelquefois tendre & poreux , quoique d'un grain fin & ferré ^ 30. Inde ou Laurier aromatique, appellé communément Bois de Campéche • c eft le cœur dun très-gros arbre qui croît en Amérique, dans la Baie de Cam- péche, douil tire fon nom; aux Mes de la Jamaïque , de Sainte-Croix , delà Martinique, & de la Grenade. Ce bois eft fi lourd , qu'il ne furnage pas fur l'eau- il eftcompaél & d'un grain affez fin; fes fils s'entremêlent les uns dans les autres, ce qui le rend un peu difficile à travailler, & qui n'empêche cependant pas qu II ne prenne très-bien le poli : la couleur de ce bois eft d'un rouge bril- lant, & même comme tranfparent , ou pour mieux dire, glacé d'un jaune foncé • cecte couleur change avec le temps, ou quand ce bois a été trop long-temps danl 1 eau ; alors il devient brun , & quelquefois d'un gris noirâtre , ce qui a trompé plufieurs de ceux qui en ont fait la defcription , les uns lui ayant donné une couleur rouge , & les autres une brune ou bien une violette. Ce bois a une odeur unpeu forte, fans cependant être défigréable , & il fert à la teinture en noir & en violet Le bois d'Inde ou de Campêche eft le même que le Laurier aroma- xque ou le Poivrier de la Jamaïque, ou arbre qui porte la graine des quatre epices Le véritable bois de Campêche fe connoîc par fa coupe, qui eft Lté à coups de hache par les Efpagnols qui en font un très-gros commirce : il y a du bois de Campêche qui eft d'un fond brun, tacheté de noir à diftance à peu-près égale ; mais il eft très-rare à préfent. 31. Jacaranda , gros arbre qui croît aux Indes Orientales ; il y en a de deux efpeces,! une blanche & l'autre noire,& toutes deux marbrées & fort dures- mais lin y a que le noir qui foit odorant. Il y a au Cabinet d'Hiftoire Naturelle du Jardm du Roi du bois de Jacaranda, dont le fond eft jaunâtre & rayé de brun violet , à peu-près comme l'Epi de bled , mais dont le grain eft beaucoup plus fin & plus ferré ; c eft peut-être une nuance dans l'efpece. ^ î;/"7-i^'"^" '1™ f ^"'^"'^ " '^^^'^"^ "--g-^ ; ii croît aux Antilles & a 1 Ifle de Tabago ; on le nomme auffi Fufloc Se Clairembourg ; il eft plein fans être abfolument dur ni pefant; il fe travaille & fe polit bien, quoiqu'il né laifle pas d être poreux; fa couleur eft d'un beau jaune foncé, qui approche de celle de 1 or; on appelle auffi ce bois Sadné jaune. Il croît dans l'Amérique Septentrionale, un gros & grand arbre qu'on nomme Arbre à Tulipe, qu'on croît être le même que le bois jaune. 33 Lapiré, grand arbre qui croît à Cayenne, dont le cœur eft mêlé de rouge & de jonquille, & qui eft de très-bonne odeur. S^. Mufcadier. Cet arbre qui porte le macis & la noix mufcade, croît aux Indes Orientales de la hauteur d'un Poirier; fon bois eft moëleux, & fon écorce cendrée : il n'eft pas d'un fort grand ufage , quoiqu'alTez bon à travailler. 35. Œd de Perdrix ou Bois de Perdrix. Je ne fai d'où vient ce bois; c'eft 778 ME NUIS 1ER, m. Part. SeB. lU. Chap. X. peut-êu-e une efpece de bois de Fert , qui croît à la Chine , & qui eft H dur, qu'on s'en fert pour faire des ancres de vailfeaux. Le bois de Perdrix eft très- dur & très-lourd; fa couleur eft plus obfcure que celle du bois de Fert; & quoique très-compaa , on apperçoit le long de fes fibres longitudinales , des pores très-fins remplis d'une cendre ou gomme blanchâtre, qui ne paroît a bois debout que comme de petits points blancs, prefqu'imperceptibles : fon ufage eft à peu-près le même que celui du bois de Fert. 06 Olivier. Cet arbre eft originaire de Syrie, & croît au midi de l'Europe ; il eft dur, ou pour mieux dire , ferme , réfineux & en général peu folide & tor- tueux; fa couleur eft jaunâtre, rayée de brun en fuivant les couches concentri- ques, ce qui fait qu'il eft ondé ou veiné fur fes faces verticales , félon qu il a ete débité fur les couches ou fur la maille. Quoi qu'il en foit, ce bois eft plus beau employé à bois de bout qu'autrement ; fes loupes ou excroilfances font auffi fort recherchées par la variété des figures qu'elles repréfcntent. Ce boisa le detaut de fe rouler , c'eft-à-dire , que les couches annulaires ou concentriques fe déta- chent les unes des autres, ce qui fait qu'on ne peut fouvent l'employer quen petites parties. j' ■> I 37. Oranger. Arbre de moyenne groifeur , originaire de la Chine, dou les Portugais l'apportèrent en graine : fon bois eft affez compaa, de couleur jaune. Se blanc vers le cœur. 38 Plane ou Plamne , arbre qui vient de l'Afie & de l'Amérique Septentrio- nale; fon bois eft blanc, affez compad , liant, d'un tiffu ferré; il reffemble affez'au bois de Hêtre; il tient le milieu entre ce dernier & l'Erable, dans l'efpece duquel il peut être compris : il peut s'employer en Ebénifterie dans fa couleur naturelle, mais encore teint en diverfes couleurs. (Voy. ci-après , Art. Erable ). 39. Puant. Arbre à peu-près de la grandeur du Chêne , qui croît au Cap de Bonne-Efpérance ; il eft d'un beau grain nuancé , & quoiqu'il fente fort mauvais, on en fait ufage , parce qu'il perd fa mauvaife odeur avec le temps : cebois eftpeiï d'ufage en France. . ^o.Rhode. Les Anciens ne font point d'accord fur la nature de ce bois, comme je l'ai dit en parlant de l'Afphalate ; ils ont aulfi nommé ce bois , Boii de Candie, apparemment parce qu'il croiffoit dans cette IftcOn connoît à préfent deux efpeces de bois de Rhodeou de Rofe; fune qui nous vient delà Jamaïque, & l'autre des Illes Antilles. ^ La première efpece vient de la groffeur de la cuiiTe d'un homme ; fon ecorce eft rude & brune , & garnie d'épines ; fon bois eft folide , blanc , a beaucoup de moële , & eft d'une odeur très-pénétrante. 41. La féconde efpece de bois de Rhode eft la plus commune , & celle qu on connoît fous le nom de bois de Rofe ou Bois marbré. Cet arbre vient haut & droit • fon bois eft ferme , fans être dur ; fa couleur eft celle de feuille morte , ou pour 'mieux dite , elle eft mêlée de jaune &de rouffeâtre, & d'un rouge violet *^ difpole SBcf. î. Defcriptioii des Bois des Indes , SCCi àiCpofé par tranches à peu-près égales , lerquelles filivent les couches concen- triques de l'arbre , de forte qu'en refendant ce bois fur différents fens , il eft rayé, veiné , ou même marbré pour peu qu'il fe trouve quelque finuofité dans fon fil, cequi lui a fait donner le nom de Boismurtré; aufîi eft-ce un des plus beaux bois qui nous viennent des Indes, & un de ceux dont on fait le plus d'ufage. Ce bois efl fujet à être carié dans le cœur , & perd avec le temps le vif de fa Couleur rouge qui devient pâle , & cela par févaporation de la fubftance réfineufe qui eft plus abondante dans les veines rouges que dans les jaunes, ce qui eft le contraire du bois violet , qui noircit à l'air j parce que la fubftance réOneufè eft plus abon- dante dans les couches claires que dans les brunes : cette obfervation eft préfque générale pour tous les bois réfineux , dont les couleurs font vives , & qui ont les pores ouverts. Le bois de Rofe lent , lorfqii'on le travaille , une petite odeur de rofe, & fes nœuds ne font point préjudiciables à la bonté de l'ouvrage; ail contraire, lorfqu'ils font employés avec goût , ils en augmentent la beauté, îl y a au Cabinet d'Hiftoire Naturelle du Jardin du Roi , du bois de Rofe dont la couleur eft grife , veiné de brun ; je ne fii fi c'eft le même que celui dont je viens de faire la defcription , duquel il ne diffère que par la couleur. 42. Rouage ou Bois de fi^ng. C'eft un arbre qui croît en Amérique, près du Golfe de Nicaragua; fon bois eft dur & d'un très-beau rouge, & fert en teinture. 43. Samal ou Sandal : il y a de trois efjîeces de Santal; favoir, le citrin, le blanc cS: le rouge. Le jaune ou citrin croît à la Chine, au royaume de Siam , & aux Ifles de Solor & de Timor , de la hauteur du Noyer ; fon bois eft moyen- nement dur & pefant; fes fibres font droites , d'une couleur rouffc pâle ou jaunâtre , tirant fur le citron; fon goût eft aromatique , un peu amer, qui remplie la bouche fans être défagréable ; il rend une odeur qui approche de celle du mule & de la rofe. 44. Le Sanial blanc croît dans les mêmes Pays , & eft en tout femblable ail Santal citrin, dont il ne difFere que par la couleur; on croit même que c'eft lé même arbre dont le cœur eft jaune, & les extrémités blanches; L'arbre de Santal eft auffi nommé Sarcanda. 4y. Le Santal roug! , auffi nommèF antagna^ croît dans l'ifle de Tanafferin j fur la côte de Coromandel ; fon bois eft compaél & lourd ; fes fils font tantôt droits, tantôt ondes. On apporte ce bois féparé de fon écorce & de fextrémité ligneufe (c'eft-à-direj de fa partie extérieure, ) & alors il eft à l'extérieur d'un rouge brun, prefque noir, & à l'intérieur d'un rouge foncé , mêlé d'un peu de jaune. Ce bois n'a pas d'odeur, & on dit que celui de Caliatour eft la même chofe que celui-ci. 46. Satiné. Cet arbre croît aux Ifles Antilles ; fon bois eft plein , dur , réfineux & très-poreux ; fes fibres ligneufes font remplies d'une cendre ou gomme brillante, qui paroît comme de petits points à bois de bout. Le bois Satiné eft plutôt nuancé ou ondé, que rayé; il y en a de plufieurs couleurs, ds Menuisier. 111. Pan. 111. Secl, N 9 ySo M ENVI S 1ER, m. Pan. SeB. III. Chap. X. fond rouge veiné de jaune , de rouge foncé, mêlé de gris olive ; & de quelque couleur que ce foit , ce bois a toujours l'air tranfparent, ce qui en fait la princi- pale beauté : comme ce bois n'eft pas régulièrement veiné à bois de bout , on peut le faire paroître rayé , en le refendant fur la maille , comme au contraire il paroît onde ou même flambé en le refendant fur les couches concentriques. Ce bois fe polit bien , & eft fort d'ufage à préfent. 47. Violée. Ce bois vient des Indes Orientales, d'où les HoUandois fappor- tent. Il eft prefque femblable au bois de Rofe, du moins pour la forme &la difpofition de fes couches concentriques : fa couleur dominante eft le brun violée prefque noir , rayé de blanc vineux , qui fe ternit avec le temps pour les raifons que j'ai dites en parlant du bois de Rofe , qui eft auffi plus compad que le violet : ce dernier a le défaut d'être fbuvent carié au coeur, d'avoir des nœuds vicieux, 8c d'être alTez difficile à travailler , parce que les fils de fes couches concentriques ont différentes direftions. Ce bois eft d'une bonne odeur de violette , ce qui , joint à fa couleur , lui a fait donner le nom de Violet : quoique je foupconne qu'on pourroit le mettre au nombre des Jacaranda , ce qui eft d'autant plus vrai- femblable, que le bois de Palixandre , elpece de bois violet, eft nommé dans différents Auteurs Jacaranda. 48. Il y a une autre efpece de Bols violet, nommé PaliJJlindre ou TaVixandre, lequel vient des Indes Occidentales en groflès bûches de 7 à 8 pieds de long , fur I a à r 5 pouces de diamètre. Ce bois eft moins beau que le violet , plus poreux , d'un grain prefqu'aufïï gros que le Chêne ordinaire ; là couleur eft d'un gris foncé , plutôt brun que violet, femé de quelques veines d'un blanc roux , tou- jours difpofées fuivant les couches concentriques; celui qui a davantage de ces veines eft le plus recherché ; mais en général , la couleur de ce bois eft trifte & délàgréable. Le bois de Paliflàndre rend une très-bonne odeur, plus forte qu'a celle du bois de Violette, & plus il eft échauffé, plus il fent bon , ce qui eft très-naturel , parce que ce bois étant très-réfineux ; la gomme odorante dont les pores {ont remplis , s'évapore d'autant plus aifément par l'aétion du frottement, que ces pores font plus ouverts , tant à bois de fil, qu'à bois de bout. Le bois de Palilfandre eft auffi nommé Bois de Sainte-Lucie ; je ne fai fi c'eft parce qu'il croît de ce bois à flfle de Sainte-Lucie ou Sainte- Alouzie , l'une des Ifles Antilles , ou bien fi c'eft parce que l'odeur du bois de Paliifandre eft à peu- près femblable à celle du bois de Sainte-Lucie , proprement dit , arbre qui croît en Lorraine, & qui eft du genre du Cerifier. Voilà, à peu de chofe près, le détail de tous les Bois des Indes, relativement à l'Ebénifterie ; & j'ai tâché de les décrire le mieux qu'il m'a été pofTible , afin qu'on puilîè , avec connoiftànce de caufe , faire choix des uns ou des autres , félon qu'on le jugera à propos : cependant il eft bon de faire attention que comme il ne m a pas été poffible de voir tous ces bois à divers degrés d'âge , ni même d'en voir de gros morceaux de plufieurs, il fe pourroit très-bien faire, que ma Sect. I. Defcription des Bois des Indes, ÔCc. 781 defcription ne fûc pas auffi exadte qu'on pourroic le défirer,& que je le lôuhaite- rois moi-même. Les mêmes fujêts différent quelquefois dans leurs différentes parties , ce qui a furement fait donner plufieurs noms à des bois qui peut-être viennent d'une même efpece d'arbre,comme je l'ai fait entrevoir plus haut. Il faut auffi faire attention que les bois changent de coi leur , non-feulement en vieil- liffint , mais encore en les travaillant , & que le poli les brunit beaucoup , du moins pour la plupart : c'eft pourquoi , avant de mettre en œuvre les bois dont on veut affortir la couleur, foit entr'eux, foit à une couleur donnée , il faut en travailler & brunir des échantillons , afin de ne point être trompé fur leurs véritables couleurs, du moins fur celle qui doit leur refter. 78^ MENUISlE R,I11. Pan. Secî. lÎL Chapi X. §. I. Defcripùon des Bois François , propres à ÏEbéniJlerie. Dans la defcriptiori que je vais feire des Bois de France , je ne traiterai que de ceux dont l'ufage eft propre à l'Ebénifterie , foi: de placage ou d'incruf- tation, afin de ne point répéter ce que j'ai dit au fujet des autres bois , au com- mencement de la première Partie de mon Ouvrage , page 22 & fuivantes. TABLE ALPHABÉT1Q_U E des Bois de France , difpofée comme celle des Bois des Indes. Noms des BoiSi 49. SO. î'- Si- SI- Alizier Azcroliei- Aulne . . i Buis < Cerificr Charme ■. . . Cormier Cytife au Ebénier des Alpe; Epine- Vinette Erable Couleur s. Blanc Rougcitre Jaune RouGâtre , veiné. Blanc Kougcâtre Verdâtf e Jaune Qualités. Dur Tendre. . . Très dur . . Plein Très - dur . Très - dur. Plein Plein Blanc roufsâtrejVei- 1 pigi^^ né Se ondé J „ . . rjaune & verdâtre,i n Faux-Acacia i i J^" !9- £0. 61. '62. ■63. C4. 6s. 66. 6-1. 68, 69. 70, 7i' Frêne ... . Fufain . . . Houx. . . . If. Merifier. . Mûrier . . Noyer . . , Poirier . . Pommier. . Dur. Dur. Dur. r I |Blanc _& jaune ,|pi,in, Jaune-p^ile . Blanc Rougeàtre 1 Rougeâtre , rayé. Blanc & jaune .. Noir veiné Rougeîure Blanc. ........ Ferme .... Tendre . . . Plein Très plein.. Plein. panier. fB'''™''^™-lPlein. Saiiïte-Lucic Sauvageon.. Sureau.. . . , Grîs rougeâti'e. . Blanchâtre Jaune Plein.. Dur. . Dur. Odeurs i-De très -bonne ■ \ oJcur. 45- Sect. I. §. I. Defcnpdon des Bois François, SCât 7§3' 49. Alisier. Cet arbre eft de moyenne grandeur : fon bois eft duf & plein ; fon grain fin & ferré. Sa couleur eft blanche , quelquefois rouffè , & prefque tou- jours noirâtre vers le cœur. Ce bois eft très-propre à prendre la teinture , & ne produit aucunes nuances , quoique les couches concentriques paroifTent à bois de bout. L'Azérolier eft femblable à l'Alizicr , & on peut s'en fervir également. jo. Aulne , arbre aquatique , très-grand : fon bois eft léger & un peu mou ; le grain an eft fin: il eft de couleur rouffe plutôt que rougeâtre : il prend bien la îeinture ; mais il ne fe polit pas bien , parce qu'il eft trop tendre. Jl. Buis, arbriiTeau de la moyenne grandeur. Il y a de deux fortes de Buis; favoir , celui de France & celui d'Efpagne. Le Buiî de France eft lourd, dur* compaéle , d'un grain fin & ferré, & de couleur jaune : il fe polit tfès-bren. Le Buis d'Efpagne eft à peu-près femblable à celui de France , excepté qu'il eft un peu moins dur, & fa couleur moins foncée; de plus, les couches concentri- ques du Buis d'Efpagne , font affez apparentes pour y former des rayures ou des ondes fur le bois de fil. Les nœuds ou loupes , & les racines du Buis de Provence , font très-recher- chées , & fe travaillent très-bien , parce qu'elles ne font pas fujettes à fe fendre. 52. Cenfier , arbre fruitier , originaire d'Afie , d'où il fut apporté en Europe par LucuUus, au retour de la guerre contre Mithridate. Le bois de Cerifier eft moyennement dur , a/fez plein , quoiqu'il ait le grain un peu gros , & que fes couches concentriques foient fort apparentes. Sa couleur eft le gris rougeâtre , plus foncé au cœur qu'aux extrémités. Ce bois fc travaille bien , & prend aifé- ment le poli. On femploie communément en Ebénifterie , pour faire de petits ouvrages de bois plein , Se quelquefois on ne fait que le plaquer comme les bois des Indes. 53. Charme, eft un arbre foreftier de la moyenné grandeur ; fon bois eft fort liant & difiîcile à travailler : il fe fend très -mal aifément , parce que fes fils font entrelacés les uns dans les autres. La couleur de ce bois eft blanche. On ne fait pas grand ufage de ce bois , parce qu'il eft fujet à pourriture , qu'il fe travaille difficilement , & qu'il eft fujet à fe tourmenter ; c'eft pourquoi on lui préfère le bois de Houx. Voje!^ Houx. J4. Cormier, arbre fruitier de moyenne grandeur. Son bois eft, après le Buis, le plus dur & le plus plein des Bois de France. Il y a de deux fortes de Cormiers pour la couleur ; l'un qui eft d'un blanc roux , & l'autre qui eft rou- geâtre , & qui eft le plus eftimé. En général , le bois de Cormier eft très-plein ; fes fils font fins , mais courts & peu liés les uns avec les autres , ce qui fait qu'il fe fend aifément , quoique d'ailleurs il fe travaille aflèz facilement , & qu'il prenne bien le poli. Quoique ce bois foit fort dur, fes couches concentriques fe diftinguent facilement à bois de bout , & même à bois de fil fur la maille. La bois de Cormier a le défaut de fe tourmenter , & il eft fujet à être piqué des vers Menuisier , III. Van. III. Sect O p 7h ME NUIS 1ER, m. Part. Sccl III. Chap. X. ^uand il devient vieux. La couleur du Cormier augmente en vieilliflànt , Sc il devient prefque brun lorfqu'il eft poli à l'huile. S S- Ç}''{fi °u Ebénier des Alpes, arbre de la moyenne grandeur. Le bois de cet arbre a beaucoup d'aubier, fous lequel fe trouve le bon bois, qui eft plein & très-liant. Voyez ce que j'en ai dit en parlant de l'Ebene verte , page jj^. ^6. Épine-vlnettc , arbrilTeau dont le bois eft plein , de couleur jaune , & qui fe travaille aifément. Son peu de groffeur fait qu'on ne peut l'employer qu'à de petits ouvrages & en placage , ou par incruftation : il fert auffi en teinture. 57. Erable , arbre de la moyenne grandeur. Son bois eft alTez plein , quoique léger, fonore & brillant , qui approche de la qualité du bois de Hêtre , & qui a le mérite de ne fe pas tourmenter. La couleur de l'Erable eft le blanc un peu roufsâtre. Ce bois eft quelquefois veiné & ondé , c'eft-à-dice , que fes fibres ligneufes, au lieu d'être droites, s'élèvent en ferpentant, ce qui produit des ondes d'une très-grande beauté, qui ne font apparentes que fur la maille, & <jui font plus ou moins grandes que les fibres ont de mouvement. Les loupes & les nœuds de ce bois font auffi très-recherchés , par rapport aux figures qu'ils repréfentent , & ils fe poliflent très-bien. Voyez ci-après , à l'Article de la différence des Bois par rapport à la forme de leurs différentes teintes, Pl. 277, Ftg. 15 (S- 16. Il y a beaucoup de différentes efpeces d'Erable, dont les prin- cipales font ï Erable plane ou le Plarane, qui vient d'Amérique, dont j'ai parlé plus haut , ÏErable proprement dit , & ÏErablc Sycomore , qui eft le moins eftimé de tous , parce qu'il eft moins plein , d'une couleur blanche , & rare- ment ondé , ce qui l'a fait mettre dans la claffe des Bois blancs. Il y a encore un grand nombre d'Erables qui ont très-peu de différence entre eux, mais dont la connoifl^ance eft peu néceffaire aux Menuifiers, vu que ces différences ne confiftent , pour la plupart , que dans leur grandeur , ou dans la figure de leurs fleurs ou de leurs feuilles , dont la defcription ne peut ni ne doit entrer dans cet Ouvrage , ainfi que je f ai dit au commencement de la defcrip- tion des Bois des Indes. Voye^^ la Note , page j6j. j8. Faux Acacia. Cet arbre , originaire d'Amérique, eft tortueux & épineux, fa couleur eft brillante, & rayée alternativement de jaune verdâtre & de brun^ tirant de même fur le verd , en fuivant la diredion des couches concentriques! Ce bois eft dur ; cependant il ne fe polit pas bien , parce que fes fibres font un peu entrelacées , de forte qu'il s'en trouve toujours à bois de rebours , ce qui produit une efpece de duvet ou de poil (ainfi que difentles Ouvriers) difficile à ôter parfaitement : il a auffi le défaut de fe pourrir à f humidité. Frêne, grand arbre dont le bois eft affez plein & liant; fa couleur eft blanche & rayée de jaune à la féparation des couches concentriques. Il eft fujec aux vers , & on en fait peu d'ufage en Ebénifterie ; cependant on pourroit, à caufe de fa couleur & de fes petites rayures, l'employer avec avantage dans les petites parties. Sect. I. §. I. Defcription du Bois François ,SCc. 7Sy 60. Fufain , arbrilTeau dont le bois eft dur & plein , de couleur jaune pâle. On peut l'employer en Ebénifterie , fur-touc quand il eft bien fec & de fil. 61. Houx, grand arbrilîèau. Son bois eft dur , liant & d'un grain fin & ferré j de couleur blanche , quelquefois brune vers le centre. Ce bois eft fort enufige en Ebénifterie , parce qu'il prend bien la teinture , & que comme il eft d'un grain fin & liant , on peut le découper en aufli petites parties qu'on le juge à propos : il fert aufli à faire des filets , comme je le dirai en fon lieu. 62. If. Cet arbre eft de moyenne grandeur, quoiqu'il s'en foit vu de 20 pieds de diamètre ; fon bois eft ordinairement tortueux , très-dur & liant , d'une belle couleur rouge mêlée de jaune & de brun. Quoique ce bois foit très-plein, fes couches concentriques fe diftinguent aifément , & font ordinairement marquées par un petit filet plus foncé que la couleur du bois , qui vient en fe fondant juf- qu'à la couche la plus prochaine , & cela du côté du centre de l'arbre , ce qui y produit de belles nuances à bois de fil. Le bois d'If eft, de tous les bois de France , celui qui , par fa couleur & fa dureté , approche le plus des Bois des Indes. On en fiit cependant peu d'ufage en Ebénifterie , je ne fai pour quelle raifon. Il y a de l'If qui eft tendre & extrêmement poreux ; mais il ne peut être d'aucun ufage pour la Menuifetie dont je traite. 6^. Mmfier , efpece de Cerifier fauvage , grand arbre fruitier, dont le bois eft ferme & plein, & d'un grain alTèz fin : couleur eft roufsârre , rayée de veines jaunes très-fines. Ce bois , lorfqu'il eft bon , fe polit bien , & on en fait le même ufàge que du Cerifier. Voyez Cerifier , page 7S3. (^4. Mûrier , arbre de deux efpeces , le noir & le blanc. Le bois du Mûrier noir d'Europe eft blanc fur les rives , & jaune dans le cœur , qui noircit en vieil- lifl"ant. Le bois du Mûrier noir d'Europe eft plus folide que celui du Mûrier blanc d'Afie : il eft d'une longue durée ; il réfifte à l'eau : de plus , il n'eft point fujet à la vermine , & on dit qu'il chaffe les punaifes ; fi cela eft vrai , on feroit très- bien de l'employer à faire des bois de lits. Ce bois eft peu d'ufage en Ebénifterie; cependant au défaut d'autre de fa couleur, on pourroit très-bien l'employer. 65. Noyer , arbre fruitier. J'ai fait la defcription de ce bois dans la première Partie de mon Ouvrage , page 26; c'eft pourquoi je ne m'étendrai pas beaucoup fur les qualités de ce bois , qui, quoique peu en ufage à préfent, eft cepen- dant un des plus beaux qu'on pui/Te employer en Ebénifterie, tant à bois de fil qu'en loupes , qu'on nomme communément loupes ou racines de Grenoble. Outre le Noyer de France , dont le plus beau vient du Dauphiné & de l'Auvergne , il y a encore le Noyer noir de Virginie , qu'on cultive maintenant en Bourgogne , qui eft noirâtre & veiné , mais qui a le défaut d'être poreux & caffant ; le Noyer blanc de Virginie , petit arbre dont le bois eft liant , compaéle , fort dur , & de couleur blanche ; & le Noyer de la Louifiane , appellé aufli Vacanier , qui eft femblable au Frêne , du moins en apparence. De tous ces différents Noyers, le noir eft celui qui eft le plus recherché en Ebéniflerie , à caufe de fes belles MENUISIER, m Pan. SeB. IIL Chapi X. nuances ; c'eft dommage que les Noyers foient fujets à la pourriture & aux vers. bis. Ofiei: C'eft un arbriiïèau aquatique , dont le bois eft très-menu , liant, tendre & blanc, & dont les fils font extrêmement fins. Ce bois fert aux Ebéniftes au défaut du Houx , pour faire des filets. 66. Poirier, arbre fruitier, dont le bois eft plein, compade & moyenne- ment lourd , d'un grain fin & ferré , & d'une couleur rougeâtre. Ce bois fe polit parfaitement bien, & prend bien la teinture en noir; de manière que les Ebé- niftes le fubftituent à l'Ebene. C'eft dommage que ce bois a le défaut de fe tour- menter; car c'eft un des plus beaux bois qu'on puifTe employer pour les petits ouvrages. Les Poiriers viennent quelquefois très-gros : on en a vu en Angleterre <3e 6 pieds de diamètre. 67. Pommier , arbre fruitier dont le bois eft moins dur que celui du Poirier , liane & fort doux: fa couleur eft blanchâtre. En général, ce bois approche beaucoup de celui de l'Alizier. Alizier. 68. Prunier , petit arbre fruitier, dont le bois , quoique plein , eft tendre & léger, (& quelquefois dur, félon les différents fujets) dont la couleur eft un gris ventrc-de-biche veiné de rouge , ce qui rend ce bois très-agréable à voir , tant fur les couches concentriques que fur la maille , qui eft petite & brillante. Ce bois a les fils un peu courts , ce qui n'empêche pas qu'il ne prenne bien le poli : c'eft dommage que fa couleur rouge paflè aifément ; à quoi cependant on peut remédier en le verniflànt. 69. Salme-Lucle ou Fadus , efpece de Cerifier fauvage, qui croît en Lor. raine & aux environs de Vérone , en Italie. Ce bois eft compade ; fa couleur eft d'un gris rougeâtre , agréable à la vue : il a une très-bonne odeur , qui augmente à mefure qu'il vieillit. Il faut le choifir fec , fans nœuds ni aubier. Le bois de Sainte-Lucie eft aufll nommé Mahuleb ,ct qui eft une erreur ; parce que le bois de l'arbre de Mahaleb, ou Cerifier des bois, quoique femblable au bois de Sainte- Lucie pour la couleur , eft beaucoup plus dur, & n'a point d'odeur. 70. Sauvageons. On nomme de ce nom des Poiriers & des Pommiers qui n'ont pas été greffés. Leur bois n'eft pas fi beau que ceux des Poiriers & des Pommiers proprement dits : il eft ordinairement plus dur & plus difEcile à travailler. Voy. ci-deftlis , Art. Voirler & Pommier. 71. Sureau, grand arbrifl'eau , dont le bois du tronc & des grolTes branches eft plein , dur & très -liant, de couleur jaune, femblable à celle du Buis. Ce bois fe corrompt difficilement , & eft très-propre à employer en Ebénifterie , à caufe de fa bonté & de fa belle couleur. D'après le détail que je viens ^de faire , tant des Bois des Indes que des Bois de France , on peut juger combien les premiers font préférables aux derniers , non feulement par rapport à leur nombre, mais encore pour leurs belles cou- leurs , la fineflè de leur grain, la bonne odeur que rendent la plupart , leurs qualités prefqu incorruptibles, ce qui ne fe rencontre que dans un très-petit . nombre Sect. 1. §. I. Defcrïption des Bols François , SCc. 7^7 «ombre de nos Bois de France , auxquels on donne de la couleur par le moyen des teintures , comme je le dirai en fon lieu , mais qui ne pourront jamais avoiC toutes les bonnes qualités des Bois des Indes ; de plus , la couleur des Bois teints fe paffe avec le temps ; ce qui ne pourra être autrement , tant qu'on n'aura paâ trouvé le moyen d'exténuer les fels des Bois , dont l'évaporation caufe celle de la teinture. C'eft dommage que dans les couleurs des Bois des Indes , il noua manque deux couleurs effentielles ; favoir , le bleu & le verd , lefqu elles font indifpenfables pour bien repréfenter des payfages , ou tous autres objets , dans la compcfition defquels ces deux couleurs font abfolument nécelTaires , & ou on ne peut fe les procurer que par le moyen do la teinture. A ces deux couleurs près , les Bois des Indes fournirent à peu-près toutes les autres aufli vives ou nuancées qu'on le peutdefirer. C'eft pourquoi dans le Paragraphe fuivant, avant de faire la defcription des différentes nuances des Bois, je vais donner une Table, dans laquelle j'ai mis en ordre & de fuite , tous les Bois , tant des Indes que do France , fuivant leurs différentes couleurs , & félon le rang que ces dernières tiennent entr'elles , afin que d'un feul coup d'œil on puilTe clioifir telle efpecc de Bois qu'on jugera à propos ; ce qui , par manière de dire , formera la pa- lette de l'Ebénifte ou Peintre en Bois ; & j'ai eu attention de marquer chaque efpecedeBois du numéro qu'elle porte à la Table alphabétique , &dans l'Article de leur defcription , à laquelle on pourra avoir recours , afin de ne point alliée enfemble les Bois durs & les Bois tendres , du moins autant qu'il fera pofllble. §. II. Des Couleurs en général ; & des Bois des Indes & de France , par rapport à leurs différentes couleurs & à leurs nuances. L'A R T de l'Ebénifterie eft auffi nommé Peinture en bais , comme je l'ai dit au commencement de cette Partie de mon Ouvrage , & cela à caufe des deffins que les Ebéniftes exécutent par le mélange des Bois , foit teints ou naturels , ce qui exige de ces Ouvriers beaucoup de connoiffiinces dans les deffins de tous les genres , mais encore une connoilfance par&ite des couleurs avec lefqucllcs ils peuvent les exécuter. Je ne parlerai pas ici des Couleurs par rapport à leurs propriétés Se leur rap- port , ni fjivant les définitions qu'en donnent les Phyficiens ; je me bornerai feulem.ent à en parler relativement à l'objet que je traite. Il y a cinq fortes de couleurs fimples ou primitives, lefquelles étant mélan- gées entr'elles , produifent toutes les autres. Les couleurs fimples font le bleu , Is jaune , le rouge , le fauve & le noir. Il fe trouve des Bois des quatre derniè- res couleurs plus ou moins foncées ; il n'y a que de la première , c'eft-à-dire du bleu , qui nous manque. Les couleurs compofées font le pourpre, U cramoifi, l'amardnthe &le vtolet, lefquelles proviennent du mélange du bleu & du rouge ; le verd, de toutes Menuisier. 111. Pan. IIL SeU. ? 9 788 ME N UISIER, III. Pan. Sed Uî. Chap. X. fortes, provient du mélange du bleu & du jaune ; le mélange du rouge Se du jaune , donne le jaune couleur d'or , la couleur de fouci , l'orangé , la grenade , &c. Le rouge mêlé avec le fauve, donne la couleur de canelle, de marron & de mufc; le jaune avec le fauve, donne toutes les couleurs de feuilles -mortes. De toutes ces couleurs compofées, il n'y a que le verd & l'orangé, & les ■couleurs qui en approchent , qu'on ne trouve pas dans les Bois , tant des Indes que de France, & pour lefquels il f.ut avoir recours à la teinture , ainfi que pour le gris , defquelles teintures je donnerai la compofition ci-après, & la manière d'en faire ufage. D'après ces connoi/Fances générales touchant les couleurs , les Ebénifies doi- vent s'appliquer à connoître parfaitement les Bois qui font de ces différentes couleurs, afin de ne pas être embarraffés pour repréfenter avec précilion toutes fortes de deffms, tant de fleurs que de payfages , &c. TABLE des Bols des Indes âC de France , fuivant leur couleur. Bleu. Il n'y a point de Bois de cette couleur, à moins qu'il ne foit teint. Bouge. Les Bois de cette couleur font: i'Acaja, n». i ; l'Amourette , n°. y • le Bréfil,n". 8; de la Chine, n". X3 , de Corail, X7; l'Ebene rouge , n»! ai ; le Bois dinde ou de Campcche, n". 30 ; le Rouge ou de Sang, n". 42 • le Santal rouge ou Caliatour, n". 4^. ' Les Bois de couleur rougeâtre ou nuancés font : l'Acajou , n^. 2 • l'Aloës ou Bois d'Aigle , n°. 3; le Bois de Cayenne, n". 10; de Cèdre, n^ n '• de Co- païba,n°. 16 ; l'Epi de Bled,n°. 24 ; le Lapire , n°. 33 ; le Rofe, n». 41 • k Sa tiné , n°. 46 ; l'Aulne, n». ;o ; le Cormier, n". 54 ; l'If, n». 6^ ; le Merifier 53 ; le Poirier , n». 66 ; le Prunier n». (58 ; & le Bois de Sainte-Lucie , n". Vo! Jaune. Les Bois de cotte couleur font: le Citron, n". 14; le Fufet n° a- • 'a Bois jaune, n°. 3 . ; le Pavane ou Bois de Canelle , n». <p ; SaLtal citrin, n» 43 ' îe Buis, no. J 1 ; l'Epine-vinette , n°. 56 ; le Fufain , n". 5o ; & le Sureau , n". 71 Les Bois de couleur jaunâtre ou nuancée font : le Cyprès, n». 18 ; l'Olivier n». 3d; l'Oranger, n». 37; le faux Acacia, n°. ;8; & le Mûrier, n«. 64. ' Fauve. Les Bois de cette couleur font: le Bois de Fert, n". ^6 ; & l'CEil de Perdrix, n°. 3^. A'«V. Il n'y a que l'Ebene proprement dite , nM 9 , qui foit de cette couleur yw/ec. Il n'y a que l'Amaranthe , n. 4, qui foit toute de cette couleur • les autre-s Bois violets font nuancés comme le Bois violet proprement dit, n" 47 & le Paliffandre , n". 48. ' • 47j Ferd. Il n'y a point de Bois de cette couleur , à moins qu'on ne le teigne • ceux qui en approchent le plus, font l'Aloés ou Calambour , n° 3 • l'EbenI verte , n°. 23 ; le Gayac , n°. 28 j & le Cytife , n". 55 Sect. I. §. ÎI. Des Couleurs en général, ôCc. 7§<) Blanc. Les Bois de cette couleur ( fi c'en eft une ) font : le Bois de Canelle, n°. 9 ; l'Ebene blanche , n. 23 ; le Platane , n°. 38 ; le Bois de Rhode , n°. 40 ; le Santal blanc , n". 44 , FAlizier , n". 49 ; le Charme , n°. 5 3 ; le Houx , 11°. 61 ; rOfier , n°. 6y bis ; le Pommier , n°. 67. Les Bois blancs veinés ou ondes font : l'Anis à l'Etoile , n". 6 ; le Cèdre blanc , n". 12; le Citronier , n". 15 ; l'Ebene de Portugal , n°. ; le Féreol, n°. aj' ; le Gommier, n°. 29 ; le Jacaranda, n°. 31 ; le Cerifier, n°. 52 ; l'Era- ble , n°. 5 7 ; le Frêne , n°. 59 ; le Noyer , n°. (5 J ; & le Sauvageon , n". 70. Tous les Bois nommés ci-delTus , ne font pas tous exaéleraent do couleur rouge , jaune, &c; mais comme ils font nuancés , & chacun d'eux plus ou moins foncé dans un endroit que dans l'autre , il eft fort aifé de s'afiortir de toutes les nuances de couleurs poflibles , qui, exception faite du bleu & du véritable Verd , fe trouvent dans toutes ces fortes de Bols , tant de France que des Indes ; mais plutôt dans ces derniers que dans les autres. Si la parfaite connoiflànce des différentes couleurs des Bois , eft eftentielle • • ^ à un Ebénifte , il faut encore qu'il fiche diftinguer ces mêmes Bois par rapport à Planché leurs nuances , ou, pour mieux dire , aux différentes figures que reprélénta la ^' conformation des teintes de leurs fibres, afin de ne pas les employer fans choix ni connoiflànce de caufe. Les Bois , par rapport à la conformation des teintes de leurs fibres , peuvent être confidérés comme faifant quatre efpeces diftinéles les unes des autres.; fàvoir , ceux dont les couches concentriques font alternativement teintes de diverfes couleurs , mais d'une manière large & irréguliere , comme on peut le voir aux Figures 1,2 & 3 , dont la première repréfente le bout d'un morceau de bois, dont les couches concentriques font teintes à diftances inégales, ce qui produit donc des rayures femblables fur le bois de fil , Flg, 2 , refendu félon la direélion des rayons de l'arbre ; fi , au contraire , on le refend parallèlement aux couches concentriques , comme la Figure 3 , ce bois n'eft que d'une feule cou- leur plus ou moins foncée , félon que la refente eft faite dans une veine plus ou moins claire , ce qui fait que ces fortes de bois ne s'emploient ordinairement que fur la maille , comme la Figure 2 , ou coupés diagonalement , comme fin- dique la ligne A B , même figure. La féconde efpece de Bois , par rapport à leurs formes , font ceux dont les couches concentriques, quoique diftinguées de couleurs à bois de bout, comme la Figure 4, ne produifent aucunes rayures à bois de fil , mais fimplement des veines flambées ou des taches , comme aux Figures ^ Sc6. Ces fortes de bois font fort agréables , lorfqu'ils font bien choifis & employés avec difcernement, en raifon de la grandeur de la place qu'ils doivent occuper , comparaifbn faite avec celle de leurs nuances ou de leurs taches, qui font toujours plus abondantes fur la maille que fur la couche concentrique. La troifieme efpece de Bois, font ceux dont le bout eft veiné irréguliéremerte ■79® MENUISIER, III. Part. Se&. IIÎ. Chap X. . de toutes les manières, comme la Figure 7. Ces efpeces de Bois font très-pro- Planche près à être employés à bois de bout ou diagonalement, comme je l'ai obfervéaux Fig. 8 (&<?. Quant au bois de fil, il ne fait guère d'effet que fur la maille , encore faut-il que les couleurs en foient vives , ce qui eft alTez rare à ces fortes de Bois. La quatrième efpece de Bois , eft celle dont les couches concentriques font régulières & alternativement teintes de diverfes couleurs , comme la Figure 10. Ces fortes de Bois font ceux qu'on peut employer avec le plus d'avantage , parce que non-feulement ils font beaux à bois de bout , mais encore à bois de fil , foit •qu'ils foient refendus parallèlement aux couches concentriques , comme la Fi- gure 1 1 , ou félon la direûion des rayons , comme la Figure 12 ; car dans le premier cas ils préfentent une furface ondée, dont les taches ou flammes font plus ou moins larges félon que la refente eft faite plus près de la circonférence de l'arbre ; dans le fécond cas , c'eft-à-dire , quand la refente eft faite fut la maille , comme la Figure la, le bois préfente des rayures prefque régulières , lefquelles font plus ou moins parfaites, félon que la refente eft diredlement faite en paffant par le centre de l'arbre. Ces quatre efpeces de différences, dans ce qui concerne les teintes des Bois , font celles qui font les plus frappantes : car il en eft une infinité d'autres qui ne font que des nuances entre chacune de ces dernières, auxquelles elles reffem- blent toujours par queiqu'endroit. Il eft encore quelques Bois dont la coupe tranfverfale , ou bois de bout , au lieu d'être rayée en fuivant les couches concentriques, repréfente une infinité de points de différentes couleurs , difpofés à peu-près comme au jonc , & toujours en fuivant les couches concentriques de l'arbre. Ces fortes de Bois font un affez bon effet à bois de bout , comme on peut le voir à la Figure 14. Quant à leur bois de fil , il eft toujours rayé , de quelque fens qu'on le re- fende; excepté que les rayes qui approchent le plus de la circonférence de l'arbre & qui lui font parallèles , font un peu plus larges que les autres. Foj. la Fig. 1 3 . Ce que je viens de dire touchant les différentes teintes des Bois , ne peut guère s'appliquer qu'aux Bois des Indes , n'y ayant qu'un très-petit nombre de Bois de France qui foient rayés ou veinés, ainfi qu'on l'a pu voir ci-deffus; cependant parmi ces derniers, l'Erable qui, quoique fans couleur, eft un des plus beaux Bois qu'on puiffe employer en Ebénifterie , fur-tout lorfqu'on le temt en gris ou de quelqu'autre couleur. Ce Bois diffère de tous les autres , tant des Indes que de France, par la conformation de fes fibres ligneufes , qui, au heu de nionter droites , vont en ferpentant à chaque couche concentrique , comme ,e i'ai expliqué plus haut , page ; & il a l'avantage de faire un très-bel effet •de quelque manière qu'il foit refendu; car s'il l'eft fur la maille, comme la Figure 15 , il repréfente une furface ondée , qui, à l'afpeél, fenible être en relief; fi , au contraire , on le refend parallèlement aux couches concentriques , fa furface devient moërée comme une étoffe. Fcjei la Figure 16. Les Sect. I. §. II. Des Couleurs en général, ÔCc. 791 Les Bois , tels que.je viens de les décrire, font , pour la plupart, refendus droits fur leur longueur ; cependant quand on veut en augmenter les nuances, ^ s^r -, & par conféquent la beauté, on les refend un peu en pente, ce qui , alors "^7 7- donne plus de mouvement aux formes de leurs nuances, & les rend propres à faire des rempliffiges de panneaux , foit en cœur , foit en rofaces, &c. comme je l'expliquerai en parlant de la manière de difpoferles Bois de placage. Les Bois s'emploient aufli à bois de bout; dans ce cas, il faut qu'ils foient d'un petit diamètre, afin que les figures qu'ils préfentent, foient plus agréables & pius aifées à raflbrtir. . Il eft bon d'obferver qu'en fiifant la defcription des couleurs & des nuances des Bois , tant des Indes que de France , je les ai décrits tels qu'ils font lorfqu'on les met en œuvre , & que la plupart de ces Bois changent de couleur en les tra- vaillant & fur-tout au poli, qui les brunit beaucoup , fans compter que ces mêmes bo.s changent en vieillilTant; c'eft pourquoi il eft nécefl-aire que les Ebé- n.ftes joignent à la théorie de la connoi/Fance des Bois, beaucoup d'expérience touchant les effets de ces mêmes Bois, afin de n'être pas furpris par les change- ments qui y arrivent néce/fairement. Au défaut de l'expérience, qu'on ne peut acquérir qu'avec beaucoup de temps, les jeunes Ebéniftes peuvent avoir des échantillons de tous les diffé- rents Bois , dont ils prendront au moins trois ou quatre de chaque efpecc afin d'en lailfer de bruts, d'autres corroyés, & les autres polis de différentes ma- nières ; par ce moyen on acquerra beaucoup de connoilfances en très -peu de temps : c'eft le moyen dont je me fuis fervi , & qui , joint aux autres connoif- fancos que j'avois à ce fujet , m'a été d'un très-grand fecours dans la partie donc je traite. En général, de quelqu'efpece que foient les Bois dont on fait ufage en Ebénifterie , il faut avoir foin de les choifir très-fecs . fans fentes ni nœuds , ( à l'exception des nœuds de certains Bois , qu'on emploie avec beaucoup d'a- vantage , comme je l'ai dit en fon lieu ; ) il faut cependant éviter que le Bois ne foit trop fec, parce qu'alors il tend à la vermoulure, fe travaille difiîcile- ment, & ne prend pas bien la colle ; de plus, quand le Bois eft trop fec, il perd une partie de fa force & de fa beauté. Quant au choix des Bois qu'il fluc mettre enfemble , j'en parlerai lorfqu'il s'agira de traiter de la manière de pla- quer les Bois. Tout ce que je puis dire préfentemenc , c'eft qu'il faut éviter d'allier enfemble des Bois dune trop inégale denfité , parce qu'il n'eft pas aifé de bien finir l'ouvrage où les Bois durs 8i tendres font employés les uns avec les autres , ce qui, je crois, eft très-aifé à concevoir. Menuisier, IU. Fan.lU.Sea. 9.9 MENUISIER, III. Pan. SeE. lll Chap. X. s §. III. Des différentes Compojîùons de Teintures propres à teindre les Bois, & la manière d'en faire ufage. L A. Teinture des Bois efl: d'une très-grande importance pour les Ebéniftes, puifque c'eft par fon fecours qu'ils parviennent à donner à leurs Bois les diflFé- rentes couleurs qui leur font néceflâires pour repréfenter toutes fortes d'objets, comme des fruits , des fleurs , des animaux , &c. Cependant les Ebéniftes ont toujours fait un très-grand fecret de la corapofition de leurs Teintures , afin de s'en conferver la jouifïîince exclufive , & de ne pas trop augmenter le nombre des Ouvriers : de-là vient que la plupart des compofitions dont les anciens Ebé- niftes fe fervoient , ou ne font pas venues jufqu'à nous , ou bien ont été mai imitées ; & que celles dont on fe fert à préfent , ou font défeélueufes , ou bien , £i elles font bonnes , ne peuvent fe perfeélionner, vu que ceux qui les pofTe- dent en cachent les procédés, non-feulement à leurs Confrères, mais même à ceux dont la théorie pourroit leur être utile pour perfe6lionner la compofition de leurs Teintures, ce qui leur feroit beaucoup plus avantageux que la jouiiTânce de leur prétendu fecret , qui , cependant , n'eft pas grande chofe , mais qui , quand même il nous feroit parfaitement connu , ne laifferoit pas toujours de nous faire regretter la perte de la méthode de Jean de Vcronne , qui teigaoit les Bois avec des teintures bouillantes & des huiles qui les pénétroient , ce qui feroit une chofe très-avantageufe à favoir , & dont la recherche ne feroit pas indigne d'occuper les foins de quelques Savants : car il efl fort à fouhaiter qu'on puiffe parvenir à trouver le moyen d'employer les drogues de bon teint dans la teinture des Bois, parce que leurs couleurs en feroient plus durables ; mais par malheur les parties colorantes de la plupart de ces drogues font trop épai/Tes pour péné- trer dans l'intérieur des Bois , ce qui eft cependant abfolument nécelfaire , afin qu'en travaillant les Bois teints , ils fe trouvent toujours de la même couleur , tant à l'intérieur qu'à la furface. C'eft pourquoi dans la defcription de la teinture des Bois , au défaut de ces moyens que je fouhaiterois connoître pour les teindre le plus parfaitement pofTi- ble, je ne ferai qu'expofer les procédés ordinaires aux Ebéniftes , auxquels je joindrai quelques expériences que j'ai faites par moi-même , lefquelles font encore bien loin d'atteindre à la perfeétion dont cette partie peut être fufcep- tible(*). (*) Avant que de traiter de la teinture des BoiSjfai confulté M. Macquer , pour tâcher, s'il étoit poflîble, d'en faire de plus folides & de plus belles que celles dont les Ebéniftes fe fer- vent ordinairement; il a bien voulu faire lui- même plufieurs expériences qui n'ont pas rempli mes vues , & qui toutes l'ont confirmé dans l'idée que s'il n'étoic pas impolTible de faire de meil- leures teintures , cela étoit du moins très-diffi- ciîe, 5: demandoit un temps confîdérablc pour parvenir à les faire , ainfi qu'on va le voir dans l'Exrrai: du Mémoire qu'il m'a communiqué.! -a Dès que j'ai eu examiné les morceaux de >j Bois teints en diverfes couleurs , que vous )3 m'aviez donnés pour modèles, & que j'ai eu 3) jetré les yeux fur les procédés des Teintures » que vous m'aviez laiffés , voyant que tous ces 33 échantillons étoient fore bien teints jufques Sect. l §. III. Des Teintures propres à teindre les Bois , SCc. 793 Les cinq couleurs primitives font , comme je l'ai dit plus haut, le bleu, le jaune , le rouge , le fauve & le noir 5 chacune de ces couleurs eft donnée par différentes drogues , lefquelles , mêlées enfemble , donnent les couleurs fécon- des ou compofées. Le Bleu propre à la teinture des Bois , fe fait avec de l'Indigo délayé dans de l'huile de vitriol , & mis enfuite dans une quantité fuffifmte d'eau. Le Jaune fe fait avec de l'Epine-vinette , de la terre à Jaune Se du Safran mêlés enfemble , ou bien firaplement de la Gaude. Le Rouge fe fait avec du débouilii de laine , ou bien de la décodion de Bois de Bréfil mêlée avec de l'Alun. Le Fauve fe fait avec du Brou de noix. Le Noir fe fait avec le Bois d'Inde , la Noix de galle & la Couperofe verte. Avant d'entrer dans le détail de la compofition des différentes Teintures , je vais donner une idée générale des drogues avec lefquelles elles font compofées , afin que les Menuifiers-Ebéniftes foient moins fujets à Être trompés lorfqu'ils les achètent. =j dans leur intérieur , j'ai jugé que toutes ces « couleurs éianc faites avec des drogues de faux teint , on ne pouvoit défirec autre chofc , jï finon de faire les mêmes couleurs audi bien =1 tranchées avec des inijrédieiiK colorants de =î bon teint. J'ai donc fait quelques tentatives en M eflayant d'aluner ces Bois comme les étoffes , s^ & de les teindre enfuite dans des bains de 5> Cochenille, de Gaude & de Carence; mais » ils n'ont pris que des couleurs aflez ternes , î» qui n'ctoient même appliquées qu'à la fur- 15 face de ces Bois, l'intérieur n'en étant aucu- => nement atteint, ce qui m'a fait renoncer bien vite à cette méthode. Je lui ai fait fucccder => celle qu'on emploie pour teindre en rouge de j> Carence très-beau & très-folide , les cotons & « fils; pour cela j'ai donné à plufieurs des mor- 2) ceaux de Bois les mêmes préparations qu'on s3 donne au cocon pour le teindre en rouge 31 d'AndrinopIe. Ces Bois ainfi préparés ont afl^z S) bien pris la teinture; mais la couleur n'étoit « toujours appliquée que fur la furface , & l'in- » téricur n'étoit nullement coloré. J'ai jugé, S) d'après ces épreuves , qu'apparemment les par- 3î ties colorantes des drogues de bon teint, » étoicnt trop grofles pour pénétrer jufques dans 3> rincérieur tin Bois , & qu'elles n'ctoient dépo- 3> fées à fa furface que comme fur celle d'un 33 filtre ; cela m'a fait défefpérer de trouver rien 5j de mieux que ce que l'on a jufqu'à.préfent. =j Néanmoins j'ai voulu faire encore quelques 3j effais pour voir fi ma conjecture avoir quel- » que fondement ; mais pour cela j'ai tenté des ij procédés abfolument différents de tous ceux B qu'on emploie dans aucune efpece de Tein- 5î ture. J'ai imiginé que l'Efprit-de-vin étant => une liqueur beaucoup plus pénétrante que » l'eau , & que les matières colorantes capables =■ de fe diffoudre dans ce menllrue , pouvant 3. être plus divifées & plus atténuées que celles » qui fe dlffolvent dans 1 eau, cela feroit capa- o ble de remplir mes vues ; mais la Teinture „ d'Orcanette , extraite par l'Efprit-de-vin , ne m'ayant pas mieux réuffi que mes tentatives => précédentes , j'ai encore abandonné cette mé- " tliode ; &. enlin pour detniere rellburce , j'ai » eu recours à quelques diffolutions métalliques, =. qui , par elles-mêmes & fans aucun ingiédient » colorant, ne laillent pas de taire quelques !■ couleurs très-folides fur les matières végétales. J'ai fait pour cela macérer mes Bois clans des !> diflolutions afToiblies d'or, d'argent & de mer. " cure; je les ai enfuite expofés à l'air, puis " trempés , celui qui étoit imprégné de diffblti- » tion d'or dans une dilTolution d'étain , & les deux auires dans une dillolution de foie da » foufre. J'ai eu un pourpre par le moyen de la => diffolution d'or, mais feulement à la' furface; » & différentes nuances d'aff.z beau grii, , par » celles d'argent & de mercure: quoique' l'in- » teneur de ces derniers Bois fut teint jufqu'à " un certain point, il étoit cependant beau- » c up plus clair que leur lurface; en un mot, =) cette dernière méthode, quoique très-recher- » chée , n'a pas eu un fuccès affez marqué pouc » me donner en^ie de la pouffer plus loin. « Voilà, Moufieur, tout ce que j ai pu faire; » vous voyez qu'il en réfulte qn'il fjur s'en tenir » à la méthoJe nfitée du faux teint. Je ne pré- » tends pas pour cela qu'il foit impollible d'ob- » tenir (iir ces Bois des couleurs aulii pénétran- » tes & plus vives que celles qu'on a faites juf- " qu^à préient ; mais les effais infruftueux que » j'ai faits , me donnent lieu de croire qu'on » ne aourroic y parvenir que par des recherches ■> qui , par leur longueur , leurs dcpenfes Se leurs " dilficulcés , n'auroient point de proportion " avec rimportance de l'objet, &c. « D'après l'expofé des expériences que M. MacJ quer a faites , ii y a tout à croire qu'il n'efl guère poflible de fe fervir des drogues du bon teint , à moins qu'on ne ttouve le i'ecret de les faire pénétrer dans le Bois, par le moyen de quelques préparations données aux Bois ou aux Teintures, ce qui fetoit égal ; ou bien en faifant toutes les Teintures ^ froid , en y laifi'ant féjourner Ifs Bois jufqu'à ce qu'ils en fùffent pénétrés, fuppoïe que cela foie pofûble. 7P4 MENUISIER, m. Pan. SeB. IIÎ. Chap. X. L'Indigo eft une efpece de cendre d'un bleu-foncé , provenant des feuilles d'une plante qui croît dans l'Amérique & dans l'Indoftan, & qu'on vend en petits morceaux. Pour qu'il foit bon, il faut qu'il foit moyennement dur , qu'il fur- ïiage fur l'eau , qu'il foit inflammable & de belle couleur bleue ou violet foncé , que fon intérieur foit parfemé de paillettes argentées , & qui paroiffent rougeâ- tres en le frottant fur l'ongle. L'Indigo eft préférable à toute autre drogue pour teindre les Bois , parce que c'eft une poudre dont les parties extrêmement fines & déliées , s'introduifent facilement dans les pores de ces derniers. L'huile de Vitriol eft le dernier efprit qu'on tire du Vitriol. Cette liqueur acide doit être très-concentrée, & être abfolument débarraflee de toutes parties aqueufes pour faire de belle couleur bleue , comme je le dirai en fon lieu. L'Epine-vinette eft un petit arbrilTeau dont les fruits , les écorces des racines •teignent en jaune. Celle de Candie a le bois très -jaune, & paffe pour la meilleure. La Gaude eft une plante afTez commune en France ; on la fait bouillir dans ae l'eau pour en extraire une liqueur jaune , qui, mêlée avec un peu d'Alun , -teint très-bien. Les Teinturiers préfèrent celle qui eft la plus menue & d'une couleur roufsâtre. On teint aufll en jaune avec le Bois jaune dont j'ai parlé ci-delTus , page 777. La Terre à jaune n'eft autre chofe que l'Ochre jaune dont fe fervent les Peintres. Le Safran eft une plante qui croît en France , fur-tout dans le Gâtinois : c'eft le piftil de la fleur de Safran qui donne ces petits filaments rougeâtres , ou , pour mieux dire , orangés , qu'on vend fous le nom de Safran , qui font une teinture d'un jaune doré. Pour que le Safran foit bon, il faut qu'il foit récent, d'une odeur pénétrante, d'une couleur luifante , & qu'au toucher il femble gras, & s'attache aux mains. L'Alun eft un fel foffile & minéral , qui fert beaucoup en teinture , foit pour difpofer les matières qui doivent être teintes , foit pour affermir les couleurs , dont il retient toutes les particules par fa qualité aftringente. Le meilleur eft celui de Rome , qui eft de couleur blanche , & tranfparent à peu-près comme du cryftal. La Laine à débouillir fe vend chez les Marchands de laine. En faifant bouillir cette laine on en tire une décodion couleur de rofe , qui eft plus ou moins foncée , félon qu'on a mis plus ou moins d'eau pour faire débouillir la laine, proportion gardée avec fa quantité. J'ai parlé plus haut du Bois de Btéù[,page 771 ; je me contenterai de dire kl que la décodion de ce Bois donne une couleur rouge clair , tirant fur l'oran- gé , & qu'on fonce & couleur en y mettant un peu d'alun. Le Bois de Bréfil de Fernambouc eft le meilleur , & on le bébite tout haché chez les Marchands Epiciers, qui le vendent à la livre. Le Sect. I. §. lit Des Teintures propres à teindre les Bois , ôCc. 79^ Le Brou de noix n'eft autre chofe que la première enveloppe des noix , qu'on été avant qu'elles foient parfaitement mûres , & qu'on fait bouillir dans de l'eau pour en extraire une teinture brunâtre ou fauve. Le Bois d'Inde dont j'ai parlé c\-Ae,Sv,s,page JJ'J , donne une décodlion d'un louge foncé , laquelle teint en noir; & lorfqu'on y mêle de l'alun , elle teint en violet. La Noix de galle eft une efpece d'excrefcence qui fe trouve fur les tendres rameaux d'une efpece de chêne nommé Rouvre. Les Noix de galle les plus eftimées viennent du Levant; les meilleures font celles qui font les plus pelantes , & dont la fur face eft épineufe. Il y en a de vertes & de noires : elles fervent également à teindre en noir. La Couperofe verte eft une eljjece de vitriol qui fe trouve dans les mines da cuivre ; c'eft le plus puillànt des acides : il corrode le fer & le cuivre ; il perce les parties à teindre d'une infinité de petits trous, dans lefquels la teinture s'introduit. La Couperofe fe nomme aufTi Vitriol Romain ou d'Angleterre , félon qu'il vient de l'une ou l'autre de ces Contrées. On en lait en France qui eft, dit-on , aulTi bon que ces derniers. La couleur de la Couperofe eft d'un verd clair ; il faut le choifir propre êc brillant. Le Verd -de -gris fort aufîi à la teinture des Bois; c'eft une rouille verte raclée des lames de cuivre. Pour qu'il foit bon , il faut qu'il foit fec , pur, d'un verd foncé & rempli de taches blanches. Voilà , à peu-près , la defcription des ingrédients dont on fe fort communé- ment pour la teinture des Bois; refte maintenant à donner la manière d'en faire ufage. Manière de teindre les Bois en Bleu. L A préparation du Bleu avec l'indigo & l'huile de vitriol , fe fait de deux manières ; favoir , à froid & à chaud ; mais le Bleu pour le bois fe prépare à froid de la manière fuivante. On prend quatre onces d'huile de vitriol de la meilleure qualité, c'eft-à-dire^ qui eft privée de toutes parties aqueufes, qu'on verfè , dans une bouteille de pinte , fur une once d'indigo réduit en poudre très-fine ; enfuite on remplie d'eau la bouteille , du moins à peu de chofe près , on la bouche très-exadtement , & on lute le bouchon avec de la cire ; après quoi on laifl"e le tout infufer pendant cinq à fix femaines , au bout defquelles on peut fe fervir de cette teinture qu'on fera plus ou moins forte , en y mettant autant d'eau qu'on jugera à propos , en obfervant toutefois d'y ajouter un peu d'huile de vitjriol , pour que la teinture ait plus de mordant. Quand la teinture eft au degré de force dont on a befoin , on la met dans un vafe de grès ou de terre vernilTée , & on y laiffe tremper les Bois jufqu à ce qu'ils en foient tout-à-fait pénétrés , ce qui demande quelquer: Menuisier ,111. Pan. III. SeS, R 9 MENUISIER, m. Pan. SeS. III Chap^ X. fois quinze jours & même un mois de temps , félon la dureté & l'épaiffeur de! Bois , qui , cependant , ne peuvent guère avoir plus d'une ligne. Les Ebéniftes fe fervent ordinairement d'un pot à beurre de grès pour mettre les Bois à la teinture , ce qui eft très-commode , parce que la forme de ce vafe leur permet de mettre des morceaux d'une alTez grande longueur, fans qu'ils foient obligés d'avoir une très-grande quantité de teinture. Il eft très-facile de connoître quand l'intérieur des Bois eft pénétré , vu qu'il n'y a qu'à couper un peu le morceau de Bois par le bout, à environ 2 ou 3 lignes de fon extrémité ; & quand les morceaux qu'on veut teindre, ne peu- vent pas être ainfi coupés , on met avec ces derniers un autre morceau de pareille qualité, fur lequel on fait des effais qui affurent du degré où fon: les autres morceaux. Manière de teindre en Jaune. Les Ebéniftes teignent en Jaune avec de l'épine-vinette, de la terre l jaune & du fafran, qu'ils font bouillir enfemble ; ce qui étant fait , ils font tremper les Bois jufqu'à ce qu'ils foient totalement teints. La proportion de ces drogues eft de deux litrons d'épine-vinette , fix fols de terre à jaune, & 4 fols de fafran. La décoaion de Gaude donne un très-beau Jaune , de bon teint, & on y fait tremper les Bois à l'ordinaire. Lorfqu'à cette décodion on joint un peu de verd- de-gris , on a un Jaune couleur de foufre. Le fafran infufé dans de l'eau-de-vie , donne un très-beau Jaune doré. Manière de teindre en Rouge; L E Rouge fe fait ordinairement avec du Bois de Bréfil , qu'on fait bouillir avec fix fols d'alun fur chaque livre de Bois. Ce Rouge eft un faux teint ; & comme il eft plutôt orangé que rouge, on peut lui fubftituer le débouilli de laine , qui donne un très-beau Rouge, tirant fur le rofe , qu'on rend plus foncé en faifmt pafferles morceaux qui ont été teints dans le débouilli, dans la teinture de Bois de Bréfil mêlée d'alun ; ce qui alors donne un très-beau Rouge, qui eft plus ou moins foncé, félon qu'on laiiTe les morceaux de Bois plus ou moins long-temps dans la teinture de Bois de Bréfil. La teinture de débouilli fe fait fort aifément : il ne s'agit que de faire bouillir de la laine teinte à cet effet, jufqu'à ce qu'elle tende une belle décoftion rouge , & d'éviter de la faire trop bouillir , parce qu'alors la laine reprendroit la couleur dont elle s'étoit déchargée d'abord. La proportion de la quantité de la laine à débouillir eft d'une livre pour qua- tre pintes d'eau , pour le premier débouilli , auquel on peut faire fuccéder un fécond , même un troifieme , jufqu'à ce que la laine ne rende plus de couleur. Sect. l §. m. Des Teintures propres à teindre les Bols, SCc. 797 La décoftion de Bois de Bréfil fans alun , donne un Rouge jaunâtre, qui eft quelquefois affez beau , & qu'on nomme Capucine. La décoélion du Bois d'Inde eft très-rouge ; mais elle fait une teinture noirâ- tre, qu'on rend d'un très-beau violet en y mêlant de l'alun de Rome, comme je le dirai ci-après. Manière de teindre en Fauve, en Noir & en Gris. L A teinture Fauve fe fait avec la décoâion de Brou de noix , laquelle peUï être plus ou moins forte, félon qu'on juge à propos , en y ajoutant toujours un peu d'alun. Le beau Noir fe fait en teignant d'abord les Bois dans une décoftion de Bois d'Inde ( ou de Campêche , ce qui eft la même chofe ) ; & quand cette première teinture eft feclie, on les fait tremper enfuite dans une décodion de noix da galle , dans laquelle on amis de la couperofe verte, ou vitriol de Rome ; quel- quefois on ne fait qu'une feule teinture de ces divers ingrédients , dont la pro- portion doit être d'une partie de noix de galle , une partie de vitriol , & fix parties de Bois d'Inde , le tout bouilli enfemble , dans laquelle on fait tremper le Bois jufqu'à ce qu'il foit pénétré. La teinture Grife fe fait avec une décoélion de noix de galle , dans laquelle on fait diffoudre du vitriol verd en moindre quantité que pour la teinture en Noir ; de forte que plus il y a de couperofe , plus le Gris eft foncé. La propor- tion ordinaire eft d'une partie de couperofe fur deux de noix de galle. Manière de teindre les Couleurs compofées. L A teinture Verte ordinaire des Ebéniftes , fe fait ordinairement avec les mêmes ingrédients que pour le Bleu , auxquels ils ajoutent de l'épine-vinette en plus ou moins grande quantité , félon qu'ils veulent que le Verd foit plus ou moins foncé. On fait un très-beau Verd-pomme en teignant d'abord les Bois dans le Bleu à l'ordinaire , & en les faifant tremper enfuite dans la décodlion de gaude , & cela plus ou moins de temps , félon qu'on veut avoir du Verd d'une teinte plus ou moins forte. Le Violet fe fait avec la décodlion de Bois d'Inde , à laquelle on a mêlé de l'alun de Rome ; & on peut avoir des Violets plus ou moins foncés , en teignanc d'abord les Bois en Rofe , & enfuite dans le Bleu , ce qui donneroit un Violet: clair. Si au contraire on vouloit avoir du Rouge brun tirant fur le Violet , on tein- droitles Bois d'abord dans la décodion de Bréfil, enfuite dans celle de Bois d'Inde. ypg MENUISIER, m. Part. Se^. Ilî. Chap. X. On peut obtenir des teintures compofées de toutes les nuances imaginables , en teignant le Bois dans une couleur primitive , puis dans une autre plus ou moins foncée , afin que la teinte qui réfulte de ces deux couleurs , tienne plus ou moins <3e chacune d'elles , ce qu'il eft très-poffible de faire , puifqu'on eft le maître de forcer ou d'afFoiblir les teintures primitives autant qu'on le juge à propos , foic en raifon de ce qu'exige la forme de l'objet qu'on veut repréfenter , ou bien en raifon de la différente qualité des Bois qui prennent plus ou moins bien la teintu- re , ou qui en augmentent ou affoiblident la couleur, ce qui eft fort à confidérer, & qui demande beaucoup d'attention & d'expérience de la part des Ebéniftes. En général , toutes les teintures dont je viens de parler s'appliquent à bams froids ; ce n'eft pas que plufieurs d'entr'elles ne puifTent être employées à chaud , mais c'eft que comme il faut un temps très - confidérable pour que les mêmes teintures pénètrent l'intérieur du bois , il n'eft pas poffible de les employer à chaud ; de plus , la teinture froide a , fur les Bois , beaucoup plus de brillant qu'étant employée à chaud. Voilà , à peu-près , le détail des Teintures en bois , du moins telles que la plupart des Ebéniftes les emploient, ou que je les ai moi-même employées dans les elTais que j'en ai faits , lefquels m'ont aflez bien réuifi , mais qui n'ont pas été fuivis un aflez long efpace de temps pour être bien sûr du fuccès de mes tenta- tives. Il feroit fort à fouhaiter que ceux qui font préfencement ufage de ces teintures, ou qui s'en ferviront dans la fuite , s'appliquafl"ent à les perfeétionner , ce qui , je crois , n'eft pas abfolument impoflîble ; & que l'ayant fait , ils fuffenr alTez bons Citoyens pour ne pas faire un myftere de leurs découvertes , qui ne pourront jamais que gagner à être rendues publiques. Les Ebéniftes teignent non-feulement leurs Bois pour les plaquer & les em- ployer à la place des Bois de couleur naturelle ; mais ils emploient ces mêmes teintures pour imprimer diverfes parties de leurs ouvrages lorfqu'elles font tra- vaillées ; alors ces teintures , comme le Rouge de Bréfil , le Violet de Bois d'Inde , le Noir , &c. s'emploient à chaud , ce qu'il eft très-aifé de faire , puif- qu'il fuffit que l'extérieur des Bois foit teint. Outre ces teintures , les Menuifiers en meubles emploient quelquefois une efpece de couleur jaune pour les Bois de lits , laquelle eft compofée d'ochre jaune & de vernis commun , ou de ce même ochre & de la colle d'Angleterre très-claire , quelquefois même ils n'y mettent que de l'eau , ce qui ne vaut rien. Avant que de terminer ce qui concerne la teinture des Bois , j'ai cru devoir donner une méthode peu coûteufe pour teindre les Bois blancs en rouge , ce qui fe fait de la manière fuivanre. On prend du crotin de cheval, qu'on met dans un baquet dont le fond eft percé 'de plufieurs trous , & qu'on place au-delfus d'un autre baquet, dans lequel tombe l'eau du crotin à mefure qu'il fe pourrit; & quand il ne fe pourrit pas alLz vite , on l'arrofe de temps en temps avec de l'uiine de cheval , ce qui l'aide beaucoup , & Sect. il De la refentê des Bois , êCc. 795» & donne en même temps une eau rouge qui , non-feulement teint la furfàce du bois, mais en pénètre l'intérieur à 3 ou 4 lignes de profondeur. En teignant les Bois avec cette teinture , il faut avoir foin qu'ils foient tous d'une même efpece, & à peu-près d'une égale denfité, fi l'on veut qu'ils foient d'une couleur prefqui égale par-tout. Cette obfervation eft générale pour toutes les teintures, lef- quelles ne font que des eaux, & n'ont point d'épaifi^eur palpable ni même iippa-^ rente , ce qui oblige les Ebéniftes à faire choix de Bois d'une couleur & d'une denfité très- égale, ainfî que je l'ai dit plus haut; ce qui demande beaucoup d'expérience & d'attention de la part des Ebéniftes , auxquels , exception faite des moyens de compofer & d'employer les teintures, il n'eft guère poffible de donner des règles de théorie fur cette partie , dont la réuffite n'eft fouvent dùe qu'à l'expérience , laquelle ne s'acquiert qu'avec beaucoup de temps , d'attention & de travail. Section Seconde. De la refente des Bois propres à l' Ebénijîerie, C o M M E les bois qu'on emploie en Ebénifterie , font pour la plupart fort chers , puifqu'ils coûtent tout bruts depuis 10 fols jufqu'à 30 fols , & quelque- fois même un écu la livre , félon les diiférentes efpeces de bois , on a grand intérêt de les ménager ; c'eft pourquoi au lieu de faire des Meubles ou autres ouvrages d'Ebénifterie en bois plein , on a imaginé de refendre le bois des Indes par lames ou feuilles très- minces , qu'on applique fur des bâtis faits avec du bois ordinaire. Ce ne font pas les Menuifiers-Ebéniftes qui refendent leurs bois , mais des Ouvriers qui ne font uniquement que cet ouvrage , & qui refendent non- feulement pour les Ebéniftes, mais encore pour les Luthiers, & généralement tous ceux qui emploient du bois mince. Ces Ouvriers ou Scieurs font payés à la livre , c'eft-à-dire , à raifon de la pefanteur de la pièce de bois qu'on leuu apporte , ce qui , joint au déchet du bois & la fciure , rend le bois près des deux tiers plus cher , ce qui fait un objet très-confidérable. Le bois de placage fe refend à environ une ligne d'épaiiTeur au plus ; quand on veut l'épargner on prend jufqu'à 10 à ir feuilles dans un pouce d'épailfeur, ce qui ne vaut rien ; parce qu'avant que le placage foit poli , il n'a pas une demi- ligne d'épaift"eur , qui fe trouve réduite prefqu'à rien lorfque l'ouvrage eft fini ; ce qu'il faut abfolument éviter , quoique cela foit fort d'ufage à préfent. Quand on veut débiter une pièce de bois pour faire du placage , on commence par choifir le côté le plus droit , & , s'il eft poffible , le plus étroit , pour y donner des coups de fcie & y faire les refentes , afin d'approcher davantage de la rive du bois, & d'avoir des feuilles d'une plus grande largeur; enfuite on met la pièce de bois dans la prelTe à fcier debout , & on la refend de l'épailTeur qu'on juge à Menuisier, III, Parc. III. Sec7, ■ S ^ Soo ME NU I s 1ER, m. Pan. S ecï III. C hap. X. ^ propos , ainfi que jo vais l'expliquer , après avoir fak la defcription de l'établi Planche au preffe à fcier debout , & de la fcie propre à cet ufage. ^78. La fcie propre à refendre le bois des Indes, qu'on nomme auffi Sae kprep,Jig. I 5 2 , efl à peu-près femblable à la fcie à refendre des Menuifiers en bâtiment; elle eft compofée dedeux montants & de deux traverfes ou fommiers dont les bouts faiUiflent & font arrondis , pour que ceux qui s'en fervent puilTent la tenir aifé- ment Le milieu de ces traverfes eft bombé en dehors , pour leur donner plus de force", & qu'elles ne ploient pas lorfqu'on fait bander la fcie. La largeur inté- ricure de la fcie à preffe, eft de 15 à i8 pouces , fur environ 3 pieds, pris du dedans de fes traverfes ou fommiers. La feuille de fcie a 4 pouces de laigeur au moins , & eft arrêtée dans des chapes de fer , dans lefquelles pafTent les traverfes de la fcie , ou , pour mieux dire , de fon chaflls. Ces chapes de fer , repréfentées fis A 5 8 6- 9 , fe font de fer plat & le plus large poffible , afin que la fce ne puiVe pas tourner aifément , & on réferve un écrou à celle du haut, pour y placer une vis . i , 4 ^ 5 • W-^c fert à bander la fcie ; on met en deJus du fommier une lame de fer attachée avec des vis, laquelle empêche que la preffion de la vis de la chape ne le gâte & n'y faffe des trous. Voy. la Ftg. 3 La lame de la fcie a , comme je l'ai déjà dit , 4 pouces de largeur au moins fur une petite ligne d'épailTeur au plus du côté de la denture , en diminuant infenfi- blement fur le derrière. On ne donne point de voie à ces fortes de fcies , afin de ménager le bois, & on a grand foin qu'elles foieat parfaitement droites fur le champ, & que leurs dents foient auifi parfaitement égales en hauteur, pour qu'elles pren- nent toutes également, & qu'elles ne cr^ufent pas dans l'épaiffeur du bois, ce qui. eft d'autant plus à craindre , que ce feroit autant de feuilles de perdues. Les dents de ces fcies doivent avoir 5 à 6 lignes d'ouverture de l'une à l'autre , & Être dif- pofées de manière que leur partie inférieure fe préfente prefque de niveau , parce qu'étant ainfi arrangées , elles font moins fujettes à s'émou£rer , ce qui arriveroïC infailliblement fi elles étoient faites à l'ordinaire, vu que prefque tous les bois des Indes font durs, & exigent par conféquent plus de réfiftance aux. dents de la fcie. Voyti les Fig. 6 <9 7 , qui repréfentent une partie de feuille de fcie vue de face & de côté à moitié de grandeur de l'exécution. La pr^iTe à fcier debout, repréfentée fig. 11 , eft une efpec. de petit établi d'environ 3 à 3 pieds & demi de longueur, fur a pieds de hauteur, dans le delTus duquel on afTemble une prefl-e . laquelle fert à retenir en place la pièce qu'on veut refendre. Pour que cette prelle foit folide , il eft bon que fa jumelle A fi^ix, ayc environ 6 pouces d'épaiflèur, ainfi que le deffus de 1 établi, dans lequel entrent les vis qui , pour être bonnes , doivent avoir au moms 2 pouces & demi ou 3 pouces de groffeur, & être affez longues pour que quand il y a du bois de 8 à 10 pouces d'épailT.ur dans la prefl-e , il refte au moins autant de longueur de la vis dans l'établi . ainfi que je l'ai obfervé à cette figure. Comme cet établi eft très- court , & qu'il eft fujet à s'ébranler par le mouvement de la Sect. II. De la refente des Êois , êCc. Sot Tcie , on le charge de pierres fiir le fond , pour le rendre plus folide ; mais je crois • ■ ■ ' ■ qu'il vaudroit mieux tenir les pieds de l'établi afTez longs pour pouvoir les fcelei* Planche dans le plancher de la boutique , qu'on creufe auffi au-davant de l'établi pou,- y faire entrer le bout des pièces à refendre , qu'il eft bon de ne pas faire furpader de plus de 3 pieds le deffus de la prelTe , tant pour ne pas fatiguer ceux qui tra- vaillent , que pour conferver la pièce qu'on refend , dans un état folide. Les preffes à fcier debout ne font pas toutes adhérentes à l'établi , comme celle qui eftrepréfentéeici,/V. 10 <S- ir;ce ne font que des prelTes ordinaires attachées fur un petit établi , ce qui eft moins folide que de les faire comme je le propofa ici. Quand on veut refendre à la prefTe , on commence par pkcer la pièce à refendre dans cette dernière , dont les vis fe ferrent avec un levier de fer qu'on ôte après s'en être feryi , afin qu'il ne nuife pas ; enfuite , avec une fcie ordinaire , on commence tous les traits à refendre à bois debout , jufqu'à 2 ou 3 lignes de profondeur , puis on fait ufage de k fcie à prelfe ,fig. i , laquelle fs mené hori- zontalement par deux hommes , en obfervant de l'incliner davantage du côté du croc, & de k relever en la retirant , afin de k foulager &. qu'elle ne tienne pas dans le bois , ou du moins que k fciure ne s'y engorge pas. Voyci la Fig. 10 , qui repréfente une prelfe à fcier debout vue en perfpeélivc , avec les Scieurs placés comme ils doivenc l'être. Quand on refend à k prelfe i on commence par la rive de la pièce , afin que les premières lames refendues ploient & facilitent le paiïïige de k fcie , ce qui ne pourroit être fi on la refendoit par le milieu , comme on le fait quand otî refend de groiTes pièces de bois à l'ufage de k Charpenterie, ou de k Menui- ferie ordinaire , vu que k fcie à prelfe eft très-mince , & qu'elle n'a point du tout de voie. Les Scieurs à la preffe ne tracent pas k pièce qu'ils veulent refen-. dre ; mais après avoir commencé le bout avec k fci« ordinaire , ils continuent le refte à k vue; ce qu'ils font très-adroitement, pour la plupart , lefquels font très-sûrs de refendre leurs lames non-feulement très-droites , mais encore par- faitement égales d'épaifleur entr'elles. Voy. la Fig. i r , qui repréfente k coupe de l'établi ou préfixe à fcier debout , & une pièce de bois débitée par lames jufr qu'à k moitié. Pour terminer ce qui regarde le débit du bois propre à l'Ebénifterie , j'ai repréfente , fig. 12 , une fcie qu'on nomme Scie à dépecer , laquelle fert à débiter non-feulement les bois durs , foit à bois de fil , foit à bois de travers , ou à bois de bout , mais encore l'écaillé , l'ivoire & k nacre de perle. La mon- ture de ces fortes de fcies eft toute de fer , dont k branche fupérieure eft évafée en dehors , afin qu'on puifle y adapter la lame & k tendre comme on le juge à propos , ce qui fe fait de k manière fuivante. Après avoir percé dans la lame de la fcie , un trou b , corrcfpondant avec celui de la branche inférieure de la njonture de k fcie , on met cette dernière & Soi MENUISIE R, m. Fan. SeR. ÎII. Chap. X. . celle qui lui eft oppofée , dans une preffe ou toute autre chofe capable de les Planche faire ployer , de manière qu elles tendent à fe rapprocher l'une contre l'autre , 278, Si on les ferre autant qu'on le juge à propos , pour donner à la foie toute la ten- fion nécelTaire ; puis la lame de la fcie étant arrêtée au point ^ , on la fait entrer dans la branche fupérieure de la monture , & on y trace la place du trou au point û , qu'on perce pour y placer une goupille ; ce qui étant fait , on fait encore ployer les branches de la monture , jufqu'à ce. qu'elles donnent la liberté de pafTer la goupille au-deffus d'une petite éminence formée par le bout de la bran- che, & qui fert à retenir la goupille en place, comme on peut le voir dans cette figure. Les lames de ces fortes de fcies font très-minces , & on ne leur donne point de voie , pour qu'elles perdent moins de matière , & qu'elles paiTent facilement ; on les amincit fur le derrière , qu'on fait avec une lime qu'on y palTe en longueur jufqu'à ce qu'on l'ait aminci autant qu'on le juge à propos ; enfuite on les frotte avec du grès , pour ôter les inégalités que la lime peut y avoir faites : cette opéra- tion s'appelle dcmaignr , en terme d'Ouvrier. Quand les fcies à dépecer fervent à fcier l'ivoire ou autres matières dures, U faut que leurs lames foient plus dures que pour les bois ordinaires ; alors on fe fert de fcies d'acier trempé , ou de refforts de pendules , lefquels font très- propres à cet ufage, & qu'on démaigri: fur la meule, leur dureté les rendant inacceffibles aux dents des limes. Les dents de ces fcies font inclinées à l'ordinaire ; & à celles deftinées à fcier l'ivoire , on les lime diagonalement des deux côtés , afin qu'elles préfentent une pointe aiguë qui divife la matière fans l'éclater. Les fcies à dépecer font de différentes grandeurs , félonies différents befoins. Celle qui eft repréfentée ici au quart de l'exécution , eft de la moyenne grandeur. Il y a encore d'autres fcies nommées Scies a l'Angloife , dont la tenfion fe fait par le moyen d'une vis. J'en ferai mention en traitant des Outils des Menui- fiers-Ebéniftes , dont la defcription va faire l'objet du Paragraphe fuivant. §. 1. Defcription des Outils des Ebénijles. L E s Outils des Menuifiers-Ebéniftes , font les mêmes que ceux des autres Menuifiers , quant à ce qui a rapport à la préparation de l'ouvrage, comme, par exemple , les établis, les outils d'affûtage ; mais ils en ont d'autres qui diffé- rent beaucoup de ceux des Menuifiers ordinaires , & qui ont par conféquent befoin d'un détail particulier , à la fuite duquel je donnerai une courte defcription duTour &des Outils qui y font néceffaires , le tout relativement à l'Ebénifterie, ainfi que des autres Outils & Inftruments dont l'ufage eft néceffaire dans cette partie de la Menuiferie. Comme Sect. II. §. I. Defcrlption des Outils des Ebénifles. 803 Comme les Ebéniftes fonc beaucoup de petits Ouvrages , ils ont plus de pré- » cautions à prendre eu les conftruifànc, que pour les autres efpeces deMenui- Planche feries ; c'eft pourquoi on a imaginé une forme d'établi d'un ufàge plus com- mode que ceux dont on fe fert ordinairement. Cet établi , repréfenté fig. i , fe nomme établi à V Allemande, (Toit qu'il ait été inventé en Allemagne , ou , ce qui eft plus vraifemblable , par des Ebéniftes Allemands , qui font en très-grand nombre à Paris); cet établi, dis-je, eft compofé , comme tous les autres , de quatre pieds , d'un fond & d'un deflus , à l'extrémité duquel eft placée une boîte à rappel , fervant à retenir le bois en place fur l'établi , de telle longueur que foient les pièces , & fans avoir befoin de valet ; ce qui fe fait par le moyen de deux crochets ou mentonets de fer a , b, fig. I , dont un eft placé dans la boîte , & l'autre dans l'établi , & qu'on change de place félon qu'on le juge à propos , comme je l'expliquerai ci-après. La boîte ou rappel , qui fait la partie la plus elfentielle de l'établi dont je parle , a 14 ou 13' pouces de longueur, fur 3 pouces & demi de largeur, ayant une épailTeur égale à celle de l'établi , qui eft ordinairement de 4 pouces. Cette boîte , repréfentée en grand )■ , (5 , 7 , 8 , i o 1 2 , eft yuide en dedans ' pour le paifage de la vis & de fon écrou , & eft compoféc de quatre pièces ou côtés A,B,C ,D ,fig.j , d'une tête E , fig. J , & d'une autre forte pièce ou tête F,fig.6 & ^ , au- travers de laquelle pafîe le crocliec de fer , comme on peut le voir à la fig. 6, qui repréfenté la boîte ouverte par devant , avec la place du crochet , indiquée par des lignes ponduées a , i , c , ; & à la figure S , qui repréfenté la coupe longitudinale de cette même boîte , & de la mortaife propre à placer le crochet; la pièce F, fe préfente à bois de hont, fig. 6 , & elle eft difpofée de manière qu'elle eft entaillée au nud du deffous de fétabli , où elle pafTe en forme de queue d'environ 8 à 10 pouces de loneueur , & eft retenue en place par une tringle G , fig. 6 & j , dans laquelle elle entre en entaille. Cette tringle G , fert à foutenir le deflbus de la boîte à l'endroit du crochet, & à fou- lager les languettes de la pièce de derrière , qui , fans la queue de la pièce F, fupporteroient feules tout le poids de la boîte. Les languettes de la pièce de derrière B,fig. 7, dont je viens de parler , doivent avoir peu de hauteur, pour ménager la force de la joue qui les re- tient , dont on augmente la folidité par des vis à tête fraifée , qu'on y place de diftance en diftance , comme on peut le voir dans cette figure , qui repré- fenté la coupe tranfverfale de la boîte , & d'une partie de l'établi : voyez pa- reillement la figure 10 , qui repréfenté le côté de l'établi prêt à recevoir la boîte , avec la barre G G , qui la foutient. La tête f de la boîte,/»-. ; , 6 (§■ 8, eft aflèmblée dans la pièce du deffiis & dans celle du delTous à rainure & languette , & y eft arrêtée avec des vis , ou du moins des chevilles à colle ; la pièce du deiTus A , pafTe en entaille par deffus la principale pièce F, fig. 8 , & y eft pareillement arrêtée , & celle de deflbus y Menuisier ,111. Pan. III. Seél. T ^ 8o4 ME NUI S 1ER, IIL Pan. Secl. III. Chap. X. === eft alTemblée à tenon & mortaife , comme on peut le voir dans cette figure. Planche La pièce B du derrière ,Jig. 7, eft attachée avec des vis fur la tête de la boîte & fur la principale pièce , comme on a pu le voir à la figure 12 , qui repréfence la boîte vue par derrière ; la pièce de devant, qui fert de porte , s'attache pareil^ lementavec des vis , qu'on n'arrête à demeure que lorfqu'on a placé l'écrou. La vis qui fert à faire mouvoir cette boîte , fe fait en fer , ainfi que fon écrou , ce qui eft le plus folide ; cependant lorfqu'on veut économifer , on fait la vis en bois , & l'écrou en fer , garni de plomb mêlé avec de l'antimoine , comme je l'expliquerai ci-après. Que la vis foit fùte en bois ou en fer, il eft nécefTaire qu'elle foit de toute la longueur de la boîte , afin qu'elle porte également du bout comme du collet , qui alors eft moins fatigué lorfqu'elle faitpreffion contre la boîte , & par confé- quent cette dernière contre l'établi. Voyei La fig. 8. Le collet de la vis doit être arrêté dans la tête de la boîte, afin de la rappeller , c'eft-à-dire , de l'ouvrir; ce qui fe fait en obfervant une rainure d'environ deux lignes de profondeur dans le collet , dans laquelle on fait entrer deux clavettes de fer ou de cuivre , ou même de bois très-dur , lefquelles arrêtent la vis & la boîte d'une manière fixe. Voyez Its figures 6&Î,, qui repréfentent la coupe de la vis & des clavettes qui l'arrê- tent à fon collet. Quand la vis eft de fer , on l'arrête de même , & 8 â 9 lignes de diamètre lui fuffîfent. Lorfqu'elle eft en bois , il faut , pour qu'elle foit folide , qu'elle en aie au moins quinze. Les écrous des vis en fer fe font à f ordinaire , & on y fait une queue longue d'environ 6 pouces , laquelle entre dans une mortaife pratiquée dans l'épaiflèuc de l'établi , avec lequel on l'arrête par le moyen de deux boulons à vis qu'on éloigne fun de l'autre le plus qu'il eft poffible , afin que l' écrou foit moins fujet à être ébranlé. Voyei la fig. 7 , où l'écrou eft repréfenté vu de côté avec ces deux boulons ; & la figure^ , qui repréfenté ce même écrou vu en defTus. En faifant ces fortes d'écrous , il eft bon d'y faire deux épaulements , l'un defTus & l'autre deftbus , lefquels fervent à retenir la boîte & à foulager les rai- nures de la pièce de derrière , comme je Fai obfervé_^o-. 7. Quand les vis font en bois , les écrous fe font de même que ceux ci-deffùs , du moins quant à l'extérieur, & on les fait aft'ez gros pour que le trou qu'on fait au milieu , foit d'environ 3 à 4 lignes plus large que la groffeur de la vis; on évafexe trou des deux côtés , & on perce des trous des quatre côtés de l'écrou i pour que la matière qu'on y coule pour former l'écrou de la vis , y tienne folide- ment. Quand l'écrou eft ainfi difpofé , on le place dans l'établi, & on l'arrête avec fes boulons , en obfervant que le trou de l'écrou fe trouve bien jufte vis- à-vis celui de la boîte ; enfuite on prend un bout de vis femblable à celle qui doit fervir , & on l'enduit à environ une demi-ligne d'épaifleur avec de la terre à four très-fine, broyée av&c de la colle , ce qui eft nécelTaire pour le jeu de la vis , Sc Sect. II. §. I. Defcrïption des Outils des Ebén'ifies^ Soj pour empêcher que la chaleur de la matière ne brûle lavis. Quand cet enduit eft fec , on place la faufle tis dans l'écrou , & on les enduit de terre au pour- Planche tour , pour empêcher que la matière ne fuie ; enfuite on coule la matière entré l'écrou & la fauiîè vis , qu'on retire lorfque la matière eft refroidie , & l'écroij fe trouve fait. V oye^ les fig. 6,j <5 8, où l'écrou eft repréfenté de face, de côt^ &en coupe ,& où l'on voit la manière dont il eft difpofé, ainfi que la matière qui forme l'écrou proprement dit , laquelle eft un compofé de plomb & d'an- timoine , dont la quantité en raifon du plomb eft comme un à deux. Les crochets ou mentonnets de fer qui fervent à l'établi dont je fais la defcrip-' tion, ont environ lo lignes quarrées de groffeur, & une longueur égale à l'é' paiflêur de l'établi, plus j» à lo lignes qu'il faut qu'ils le défaiBeurent , ce qui fait environ J pouces de longueur ; & on y adapte un ou deux reflbrts par les côtés , pour qu'ils tiennent en place à telle hauteur qu'on le juge à propos. Voye^ les fig. 2 éJ" 3. Le crochet quife pofe dans l'établi, fe change, comme on le juge à propos, dans des trous qui font percés de 4 pouces en 4 pouces de diftance les uns des autres , &; à 1 8 lignes du bord de l'établi , afin que le milieu de leur largeur fe rencontre jufte avec le point milieu de la vis. Voye^ la fig. Les trous où fe placent les crochets, fe percent en pente, à contre-fens de celui de la boîte de rappel , comme on peut le voir à la_^o'. 5, afin que quand on prelfe le bois entre les crochets , la force de la preffion ne les faffè pas fortir hors de leur place, & que la pièce ef,fig;. l, qui eft prife entre-deux, ne s'échappe pas. On met une prelfe de côté à ces fortes d'établis ; Se pour plus de commodité on y en met une féconde adaptée à un pied mouvant, qui entre en enfourche- ment dans la traverfe du bas de l'établi , & à rainure & languette dans le deffus: Cette féconde pre/Ie le change d'un côté de l'établi à l'autre , comme on le juge à propos , & fe dévêtit de fà place fort aifément , vu que la languette de la traverfe du bas eft fupprimée proche le pied de devant de l'établi. Ces prelfes s'écartent autant qu'on le juge à propos ; & pour les tenir égale- ment ouvertes du bas comme du haut , on aflemble dans le bas de leurs jumelles une tringle , 4 , qui paffe au travers des pieds , Se qui eft percée de pluficurs trous , dans lefquels on place une cheville de fer qui les arrête à la diftance con- venable. Malgré les prelfes dont je parle , on met dans l'épaiffeur du deflus de l'établi des petites prefles montées avec des vis de fer, dont les jumelles font d'une largeur égale à l'épailfeur de la table de fétabli. Voye^^ la fig. 11, où j'ai repré- fenté en coupe cette prelfe , avec fa vis & fon écrou , & où-j'ai indiqué , par des lignes ponéluées , la place des crochets , la rainure du faux pied , & les affem- blages des pieds , qui ne vont qu'aux trois quarts de l'épaiffeur de la table , ce qui eft plus propre, & vaut beaucoup mieux que de les faire paffer au travers, comme c'eft la couturpe. 2o6 MIE NUIS 1ER, III. Pan. SeB. 111 Chap. X. _ Au lieu de mettre des vis de fer aux preffes des côtés de l'établi , on peut en Flanche mettre de bois , taraudées dans l'épailTeur de l'établi , à l'extrémité defquelles on obferve une tête pour paffer une manivelle fervant à les faire mouvoir. Quelque- fois ces vis n'ont point de tête, & font taraudées dans toute leur longueur; de forte qu'un bout fe vilfe dans l'établi, & l'autre dans un offelet qui prefle contre la jumelle , ce qui revient à peu-près à la même chofe que quand elles ont des têtes ; à l'exception que quand il arrive que l'oflelet fe trouve difpofé perpendi- culairement , il furpaffe le deffus de la jumelle de la preffe, ce qui eft alFez incommode. On met auffi quelquefois des tiroirs au delTous de ces fortes d'établis , comme ceux//, 1, L, fig. I , œ qui eft très-commode pour ferrer une infinité de chofes ; de plus, ces tiroirs ainfi placés, nuifent moins que ceux qu'on pofc immédiatement au-delfous de l'établi , comme c'eft l'ufage. Après les établis , les prelfes font les plus gros outils des Ebéniftes : elles font Planche de deux fortes ; favoir , celles fig. l & 3 , dont le mouvement fe fait horifontale- ment , & dont les vis ont des têtes percées pour recevoir des boulons de fer fer. vant à les faire mouvoir. Ces preffes font compofées de deux jumelles A B 3c C D , lefquelles ont 5 à d pouces de largeur , fur 3^4 pouces d'épaiffeur , à raifon de leur longueur, qui varie depuis 2 jufqu'à 4 pieds, & dans l'une des deux , c'eft-à-dire , dans celle A B, les vis font taraudées , au lieu qu'elles en- trent tout en vie dans fautre. La longueur des vis de ces preffes doit être en- viron les deux tiers de la longueur de ces dernières , fur 2 à 3 pouces de dia- mètre ; & on doit avoir foin que leurs têtes foient frcttées d'un cercle de fer , pour empêcher qu'elles ne fe fendent lorfqu'on les force pour les faire mou- voir. Fojei les fig. I (5 3. On fait ufage de ces preffes fur l'établi, foit pour re- fendre debout, foit pour travailler fouvrage ou pour k coller. Dans l'un ou l'autre de ces différents cas , on arrête la preffe fur l'établi avec deux valets , afin qu'elle y foit arrêtée d'une manière fixe Se invariable. L'autre efpece de preffe, 2 & 4 , fert verticalement, & efl compofée,' comme la première , de deux jumelles & de deux vis , à l'exception que les vis font affemblées fortement S. chevillées dans la jumelle de deffous , laquelle e£i un peu plus large que fautre, afin de donner plus d'empattement à la preffe. La jumelle de deffus fe meut à volonté , & eft arrêtée par deux offelets abSccdi fig. 2 & 4, dans lefquels les vis font taraudées. Ces fortes de preffes font de différentes grandeurs , ainfi que les premières , & fervent pour les collages , tant en maffe que de placage. Après les preffes , le plus grand outil , & un des plus néceffaires, eft la meule; ou gagne-petit, laquelle fert à affûter les outils , & cela bien plus promptement qu'on ne feroit fur un grès , comme font tous les autres Menuifiers. Le gagne-petit ,fig. 5 , i& 7 , eft compofé d'un pied d'environ 16I1J pou-; ces de hauteur, fur 2 à 2 pieds ÔC demi de long , & 9 à 10 pouces de large. Sur ce pied eft pofée une auge de bois de chêne , d'une grandeur fufSfante pour contenir [ Sect. il §. I. Defcrlpt'wn des Outils des EbénïfieSi 807 contenir une meule d'environ a pieds de diamètre , & 2 à trois pouces d'épaif- feur. Cette auge doit être bien airemblée , & fon fond doit avoir environ a pouces d'épailîèur, afin d'être creufée en dellbus pour recevoir le pied fur lequel on l'arrête avec des vis : un des bouts de l'auge doit s'élever au-deffiis de la meule , & être percé d'un trou, dans lequel on fait entrer un morceau de bois ef,fict, 6^ qui fertà travailler la nacre de perle, comme je le dirai en fon lieu. A l'autre bout de la meule , eft une planche fervant à appuyer la main de celui qui affûte. Cette planche eft garnie de deux bandes de fer attachées aux deux côtés de l'auge avec deux vis g-, de manière qu'ils puiifent tourner librement ; l'autre bouc h , eft attaché avec deux autres bandes de fer plates, à l'extrémité inférieure deC. quelles on fait une efpece de rainure de J à (5 lignes de largeur , fur 3 à 4 pouces de longueur , qui fert à palTer une vis arrêtée dans le côté de l'auge, dont fécrou /, qui a une tête faiUante, étant ferré, retient en place la barre de fer , & par conféquenc la planche avec laquelle elle eft attachée, que l'on bailfe ou qu'on hauffe comme on le juge à propos , félon que la meule eft d'un plus ou moins grand diamètre. Le dedans de l'auge eft ordinairement garni de plomb très-nilnce , pour qu'elle contienne mieux feau , ce qui eft meilleur que de les lailler toutes nues ; quoique quand elles font bien aftemblées , & qu'elles ont fervi quelque temps , elles tiennent affcz bien feau , qui , en s'imbibant dans les pores du bois , y en- traîne le limon de la meule , qui y fait une efjDece de maftic. La meule eft un grès qui vient du Languedoc, d'Auvergne ou de Champa- gne ; mais celles qui viennent de Langres font les plus eftimées : leur couleur eft d'un gris blanchâtre. Pour qu'elles foient bonnes, il faut que leur grain foie fin , égal & ouvert , parce que quand il eft trop ferré , c'eft une marque que la meule eft dure. La meule eft montée fur un axe ou arbre de fer , auquel elle eft arrêtée avec des coins de bois de chêne ; cet axe pofe fur des collets de cuivre , dans lefquels font pratiquées des rainures où entrent des efpeces de languettes ou anneaux , faits aux deux côtés de l'arbre , ce qui fempêche de s'écarter d'aucun côté , & par conféquent retient toujours la meule au milieu de fauge. Les collets de cuivre font de deux pièces fur la hauteur , ils entrent à rai- nures & languettes dans les côtés de l'auge ; celui de deffus eft mobile , & redcfcend fur l'axe , oh il fait prefîîon par le moyen d'une vis qui eft taraudée dans une bride de fer attachée au-deflus du côté de l'auge. La meule fe tourne au pied ou à la main , félon qu'on le juge à propos ; dans l'un ou l'autre cas , la manivelle fert toujours , puifque quand on la tourne au pied , on y attache la corde de la marche , ou pédale / m. Voye[ lesfig. ^ , 6 & 7 , donc l'une repréfente le gagne-petit tout monté vu par le bout ; l'autre qui le repréfente vu de côté, & la dernière vu en coupe; ce qui eft fuffifant pour donner toute fintelligence néceffaire de cette forte d'outil , qui , quoique utile Menuisier , IIJ. Fan. III. Seci, V p Planche 280. SoS MENUISIER, III. Pan. SeB. lit Chap X. ; aux Menuifiers, eft le plus fouvenc fait par les Serruriers-machiniftes & autres ; Planche c'efl: pourquoi ceux qui voudront acquérir une parfaite connoidànce de toutes ■ ^^'^ les efjseces de meules ou gagne-petits , pourront avoir recours aux Arts du Coutelier 8c du Tourneur , où elles font amplement décrites. Quoique je dife que les Ebéniftes affûtent leurs outils fur la meule , ce n'eft pas qu'ils ne fe fervent auffi de grès comme les autres Menuifiers ; mais c'eft que la meule eft d'un meilleur ulàge , tant pour bien affûter que pour le faire avec plus de diligence. Quand les outils font affûtés , foit fur le grès , foit fur la meule , pour leur donner un taillant plus vif & plus fin , on les patfe fur la pierre à fbuile , ce qui les rend très-propres à couper le bois net , quelque tendre qu'il puiife être. Ces pierres viennent du Levant ; les meilleures font celles qui font de cou- leur blonde , d'un grain ferré, uni & très-égal : cette pierre a le défaut d'avoir de petites veines blanchâtres , foit en long , foit en travers , lefquelles font au- tant de durillons qui empêchent de bien affiler ; c'efl pourquoi il faut choifir celles qui feront les plus égales , ou , du moins, qui auront de plus petites veines, & en moins grande quantité. Comme ces pierres ne font pas d'un très-grand volume , & que d'ailleurs elles font fragiles , on les enchâlfe dans un morceau de bois , dans lequel on les fait entrer tout en vie, ôc le plus profondément qu'il eft pofîlble , & afin qu'elles y tiennent plus folideraent , on les fcelle avec du maftic. F" oje^ ksficr. 8 & On fe fert d'huile pour affiler les outils fur ces pierres , & il eft bon qu'elles en foient toujours imbibées , & qu'elles foient toujours très-propres, parce que la pouffiere qui s'y attache forme une grailfe qui les gâte , Se empêche les outils de prendre delfus. Les pierres à l'huile font chères ; celles qui font paffablement bonnes coûtent depuis quatre francs jufqu' à cent fols la livre ; mais auffi quand elles fe trouvent bonnes , c'eft un grand avantage qui diminue beaucoup de leur cherté. Les outils d'affûtage des Ebéniftes , comme fergents & valets , les varlopes , demi-varlopes , les feuillerets , les guillaumes, &c , font les mêmes que ceux des autres Menuifiers ; il n'y a que les rabots qui font un peu différents , quoiqu'ils faffènt auffi ufage des rabots ordinaires , pour la conftruélion de leurs bâtis & autres ouvrages de peu de conféquence. ■I Les rabots des Ebéniftes ,fig. I & 2. , différent des rabots ordinaires par fin- Planche clinaifon de la pente de leurs fers , & quelquefois par la forme de ces derniers,' qui, au lieu d'être unis fur la planche , font cannelés jufqu'à environ la moitié de leur longueur , comme je l'expliquerai ci-après. La pente des rabots des Ebéniftes , varie depuis celle des rabots ordinaires indiquée par la ligne al>, fig. i , jufqu'à celle b c, qui eft perpendiculaire avec le fût de l'outil ; cependant celle qui eft la plus ordinaire , eft celle b d , félon laquelle eftplacé le fer du rabot , cette pente eft d'environ 3 à 4 lignes , fur I Sect. il §. I. Defcnption des Outils des Ehénifîes. S09 la largeur de 3 pouces & demi à 3 ponces. Les rabots des Ebéniftes fontainlî de bout , afin qu'ils ne FalTent point d'éclats aux bois qu'on travaille , lefquels étant Planche quelquefois très-rudes , exigent que le fer foit plus ou moins de bout. Quoique ces rabots foient ainfi de bout , on ne s'en fert guère avec les fers ordinaires que pour le bois de bout ou de champ ; car quand il s'agit de raboter le bois de placage à plat , foit en feuille, foit collé , il ùut alors y mettre un fer à dents , lequel ne fauroit faire d'éclat, vu qu'il ne fait que rayer le bois , foit à bois de fil , foit à bois de travers. Les fers à dents ou bretés , ( ce qui eft la même chofe) repréfentés _/f<r. 3 , font de la même forme & grandeur que les fers ordinaires , à l'exception qu'ils font un peu plus épais. Les rayures ou cannelures des fers à dents, font creufées, du côté de l'acier, d'une forme triangulaire, & entre chacune d'elles il y a un petit filet plat , qui feul eft tranchant , vu que le fer étant affûté , chacun de ces filets forme une efpece de dent d'une forme quarrée , qui va en s'épaiflilTant fur le fond. Il y a des fers brettés dont la denture eft plus ou moins groffe , félon les diffé- rents befains. V oye^ la fig, 3 , où j'en ai repréfenté un de grandeur d'exécution , dont les dents font d'une moyenne grandeur, y en ayant de près de moitié plus petites, & du double plus groftes, dont on fait ufage félon les diverfes fortes d ouvrages , comme je le dirai en fbn lieu. Les fûts des rabots dont je parle , n'ont rien de différent de ceux des autres Menuifiers : il y en a de droits , comme les figures r & 2 , & de cintrés fur le plan , dans lefquels on met foit des fers unis , ou des fers à dents , félon que le cas l'exige. Les varlopes - onglets des Ebéniftes , font conftruites de la même manière que leurs rabots , dont elles ne différent que par leur longueur , qui varie depuis jo pouces jufqu'à 16. Il y a des varlopes-onglets à femelle de fer, /zo-. 4 , lefquelles font propres à travailler les bois très-durs & de rebours , les bois de bout & les métaux. Ces fortes de varlopes- onglets ne différent des autres que par la pente de leur lumière , qui eft extrêmement inclinée , & par la pofition de leur fer, qui eft retourné fens deffus deffous , comme on peut le voir dans cette figure , laquelle eft repréfentée en coupe , afin qu'on puiffe voir la pente de fa lumière , & la difpofition du fer , qui doit affleurer avec le deffous de la femelle de fer , contre laquelle il eft appuyé. La lumière de la varlope-onglet , telle qu'elle eft repréfentée ici , devient un peu longue , & diminue par conféquent de la force de l'outil ; c'eft pourquoi on en fait où il y a deux lumières, l'une qui fert à placer le fer & le coin , & i'autre indiquée par les lignes e ,f, g , A, par laquelle fortent les copeaux. Cette manière de difpofer les lumières , eft la moins ufitée , quoique cependant ce foiÉ la meilleure. ?io MEÎ^UIS lE R,ni. Part. Secl. 111. Ckap. X. i - La femelle de fer tient avec le fût de bois par le moyen de fix vis , lefquelles Planche padènt au travers de ce dernier, & font taraudées dans l'épailTeur de la femelle, ainfi qu'on peut le voir à la Jig. 5 , qui repréfente la coupe tranfverfale de la varlope-onglet, à l'endroit des deux vis. J^oye^ auffi la fig. 6 , qui repréfente cette même varlope vue en delTous , avec le bout des vis. Ce que je viens de dire par rapport aux yarlopes-onglet à femelle de fer , peut aufli s'appliquer aux rabots , qu'il feroit bon de conftruire de cette façon, fur-tout ceux qui fervent pour les bois de bout , ou ceux qui font extrêmemenc durs , dont le frottement gâte en peu de temps le deffous du rabot, qui alors ne peut plus aller comme il faut , à moins qu'on ne le redreffe. C'eft cette difficulté qui a fut imaginer les rabots de fer, tant pour les mé- taux que pour les bois durs. Ces outils , repréfentés Jig. 8 , 9 , 10 eîr 1 1 , font conftruits en forme do boîtes vuides par le delfus, dans lefquelles on ajude un coin de bois A , fig. 9 , lequel fert à retenir le derrière du fer , foit qu'on veuille que ce dernier foit pofé perpendiculairement , comme il eft aux fig. 8 & 9, ou qu'on le place incliné , comme findiquent les lignes pondluées B,C; dans ce dernier cas on abat le coin en pente , félon celle qu'on juge à propos de don- ner au fer de l'outil. Foye^ la fig. 7, qui repréfente ce coin vu en coupe & en delfus. Le fer de ces fortes de rabots eft arrêté en place par le moyen d un autre coin D , fig. 9 , lequel frotte contre un boulon de fer E , qui tient aux deux côtés ou joues du rabot. Quand le fer eft fort incliné , comme celui B C, le boulon E ne peut plus fervir , & on en met un autre F, lequel entre tout en vie d'un côté du rabot , & à quarré de fautre , afin qu'on puilfe fôter quand on le juge à propos , & qu'il ne tourne point étant en place. Le coin D , qui fert à retenir le fer , doit être plein fur toute fa largeur , pour qu'il foit plus folide , étant d'ailleurs fort inutile qu'il foit évuidé, vu qu'il n'y 3 rien en dedans du rabot qui puilfe arrêter le copeau. Quant à la conftruétion de ces fortes d'outils , je n'en ferai aucune mention ^ vu qu'elle eft du reffort des Taillandiers & autres Ouvriers en fer. Les Ebéniftes fe fervent de fcies à peu-près femblables à celles des Menui-' fiers en bâtiment ; c'eft pourquoi je n'en parlerai pas ici. Cependant il eft bon d'obferver qu'ils font plutôt ufage des fcies à tourner , que de toute autre , foit pour fcier fur la longueur ou fur la largeur ; c'eft pourquoi ils en ont de diffe-! rentes grandeurs , pour s'en fervir au befoin. Cette méthode eft très-bonne pour refendre le bois qui n'eft pas d'une forte épailfeur; mais je ne fai pourquoi ils fe fervenr de fcies à tourner pour fcier les bois de bout , les arrafements , &c. vu qu'une fcie ordinaire eft meilleure qu'une fcie à tourner , pour ce qui eft des bois de bout , fur - tout quand il faut que ces derniers foient coupés avec précifion. u Sec T. III. Des Bdi'is, ôCc. 8ir Je ne parlerai pas ici non plus de la fcie à découper , ou de marqueterie , parce qu'il fera beaucoup mieux de le faire lorfqu'il fera queftion de traiter de la manière d'en faire ufage. Il en fera de même de beaucoup d'autres outils , dont je ne ferai la defcription qu'à mefure que je décrirai les diiférents ouvrages d'Ebénifterie , ou , pour mieux dire , les diverfes opérations de l'Ebénifte , ce qui évitera toute efpece de répétition , & ce qui fera d'autant plus naturel, qu'en décrivant l'outil , je donnerai la manière d'en faire ufàge félon les différents cas ; c'eft pourquoi je remets cette defcription des autres outils aux Chapitres fuivants, ne me reliant , pour terminer celui-ci , qu'à parler de la conftrudtion des bâtis , ce qui fera l'objet de la Seâion fuivante. Section Troisième. Des Bâtis propres a recevoir les revitijjements d' Ebénijîerie ; de la manière de les difpofer Ù" de les conjlruux. La difpofition & la conftruflion des Bâtis propres à recevoir les revêtilTe- " ments d'Ebénifterie , quoique très - négligées de la plupart des Ouvriers ordi- naires , font cependant d'une très-grande conféquence , puilque c'eft du plus ou du moins de perfection avec laquelle les Bâtis font traités , que dépend toute la réuffite de l'ouvrage , qui , quelque bien qu'il foit fait , ne peut fubfifter long- temps , fi les Bâtis qui le portent ne font pas faits avec tout le foin nécelfaire. Trois chofes concourent à la perfeflion des Bâtis propres à recevoir le pla- cage ; favoir , 1° . le choix delà matière; 2°. la difpofition générale; 3°. la bonne conftrudlion. J'ai dit au commencement de cette Partie , /P(7^ir 766 , que les bois propres à la conftrudion des Bâtis, étoient le chêne tendre , le fapin , le tilleul, & tout autre bois tendre & fec , &c ; cependant il faut faire attention qu'il n'y a guère que le premier des trois , c'eft-à-dire, le chêne , qu'on puiffe employer pour les ouvrages de quelque conféquence ; les autres , quoique légers & peu fujets à fe tourmenter, n'étant pas afîèz folides ni afi^ez propres pour faire de bon ouvrage; c'eft pourquoi on ne doit jamais fe fervir d'autre bois que du chêne, lorfque les Bâtis feront fufceptibles d'alfemblages , comme les Bureaux , les Se- crétaires , &c. n'y ayant que les tablettes & autres ouvrages de cette nature , qu'on puilfe raifonnablement faire en bois blanc ; ce n'eft cependant pas ce que font les Menuifiers-Ebéniftes , qui , pour la plupart , ne font pas leurs Bâtis eux-mêmes , mais les font faire à vil prix par d'autres Menuifiers qui ne s'occu- pent qu'à cela, & qui emploient indiftindtement toutes fortes de bois, qu'ils trou> vent toujours bons , pourvu qu'ils foient peu chers ; de forte qu'ils font des Bâtis avec du bois de bateau , foit de chêne ou de fapin , des douves de tonneaux, du tilleul, du peuplier, du maronnier & autres mauvais bois. A la mauvaife qualité des bois , ils joignent une très-mauvaife façon, la plupart de leurs Bâtis étant faits Menuisier. III, Part. 111. Secl. X 5) Planche 2S1. 8 1 a MENUISIER, ni. Pan. S sel. III. Chap. X. fans prefqu'aucun alTcmblnge , fi ce n'eft quelques mauvaifes queues. Quand l'oU" Planche vrage eft cintré en plan, ils mettent les panneaux à plat-joint collés fur des taflëaux , tant à bois de bout qu'à bois de fil , ce qui fait de fort mauvais ouvrage , lequel fe détruit en très-peu de temps (*); c'eft pourquoi je ne faurois trop exhorter les Menuifiers-Ebéniftes à faire leurs bâtis de bon bois de chêne un peu tendre 8c très-fec , afin qu'ils prennent mieux la colle , & qu'ils falTent moins d'effet. Après le choix du bois propre à faire les Bâtis , les Menuifiers-Ebéniftes doivent avoir foin de leurs difpofitions générales , c'eft-à-dire , qu'ils n'en doivent déter- miner les formes qu'après avoir deffiné bien exadlement tous leurs ouvrages ^ tant en plan qu'en élévation , afin qu'il ne s'y trouve point de forme ni de com- partiment interrompus , comme il arrive prefque toujours , quand on attend que les Bâtis foient faits pour déterminer la forme & la grandeur des compartiments dont ils doivent être revêtus. En delTmant , foit le plan ou les élévations de l'ouvrage , & par conféquenC des Bâtis , il eft bon d'obferver toutes les épaifleurs des revêtifi^ements , du de- hors defquels on doit compter le nud de l'ouvrage , comme je l'ai obfervé aux Jîg. 1 , 2 eîr 3 , & fur-tout à la fg. 2 , où le nud du quart de cercle du pied cor- nier , indiqué par les lignes ponéluées a, b,c ,e& pris du dehors du revêtillèr ment. Il faut avoir le même foin pour tous les avants & arrieres-corps , & pour les feuillures , qu'il eft aulTi bon de revêtir , rien n'étant fi ridicule que de voir le bois des Bâtis apparent , lorfque les tiroirs ou les portes font ouvertes. Quand ces mêmes portes ou tiroirs ouvriront à recouvrement , c'eft-à-dire , qu'ils feront corps fur le nud de l'ouvrage, comme à la fig. 1 , & que ce corps ne fera pas d'une forte épailTeur , il eft nécelfaire d'y faire une double feuillure par derrière, qui porte le coup de l'ouverture , & par conféquent foulage le recouvrement du dehors. Quand les portes ou les tiroirs entreront tout en vie, comme à la^^. i , & 3 hfîg. ■) , il faudra toujours y faire des feuillures , afin que l'avant-corps du Bâtis, fig. r , foit toujours égal, ou que la par:ie ouvrante affleure toujours avec le nud du Bâtis , comme à la fig. 5 . Je ne fai pourquoi les Ebéniftes n'ont pas cette cou- tume , fe contentant , pour la plupart , de faire porter fur des talfeaux le fond C) Ce que l'avance ici n'eft que trop vérita- ble; cependant ce n'eft pas tout-à-fait la faute des Menuifiers-Ebéniftes, qui, la plupart, ne vendent l'ouvrage tout fini que ce qu il vaudroit de façon s'il étoit bon & bien fait, ce qu'ils ne peuvent faire autrement, vu qu'ils ne travaillent, en plus grande partie , que pour les Marchands, qui ne leur payent leurs ouvragres que ce qu'ils veulent. Le îuxe aifluel eft auiti une des caufes du peu de bonté des ouvrages d'iïbcniftcrie , tout îe monde voulant en avoir, quoique fans avoir le moyea de les payer ce qu'ils valeat j ce quia mis les Ouvriers dans le cas de faire de mauvais ouvrage , afin de contenter tout le monde , St. de pouvoir vivre en le faifant à bon marché , ce qui eft très-préjudiciable à cette partie de la Menui- ferie , laquelle ne peut fouffrir aucune efpece de médiocrité , & ne peut avoir de mérite qu'autant! qu'elle eft parfaitement bien faite; c'eft pour- quoi, je l'ai déjà dit, & je le répète encore, cette efpece de Menuiferie ne dcvroit être em- ployée que pour les grands Seigneurs , ou da moins puur des gens très-riches, qui aucoicnt Is moyen Je la bisn payer, s ÈCT. m Des Bdàs, SCc. 813 des tiroirs; de forte que pour peu que ces derniers fe dérangent, ou viennent * ' ' à fe travailler, ainfi que le derrière des tiroirs, le devant de l'ouvrage défaf- Planche fleure , ce qui fait un très-mauvais effet. Quant à la forme & à la confirudion des Bâtis , je n'en parlerai que très- fuccinâement , vu que j'ai traité cette partie fort au long , lorf:]ue j'ai fait la defcripdon de la Menuiferie en Meubles , à laquelle on pourra avoir recours ; tout ce que je puis recommander ici , c' eft qu'il faut conftruire ces Bâtis avec toute la précaution & la folidité pollibles , pour qu'ils ne faifent aucun effet lors qu'ils feront travaillés ; c'eft pourquoi il eft bon, après avoir corroyé les bois , & y avoir fait les affemblages , de les laiffer fécher dans un endroit où ils ne Ibient pas trop expofés à la chaleur ou à l'humidité. Il faut avoir la même atten- tion pour les panneaux , qu'il faut bien laiffer fécher avant & après les avoir ' collés ; après quoi on affemblera tout l'ouvrage , dont on collera les affemblages afin de n'y point mettre de chevilles , du moins aux endroits couverts de pla-i cage , parce que fi elles venoient à fortir de leur place , elles le feroient lever, ce qu'on pourroit cependant empêcher, en collant les chevilles. Comme les panneaux des Bâtis dont je parle , doivent être arrafés , il eft bon qu'ils foient d'une forte épaiffeur , c'eft-à-dire , qu'ils ayentt) lignes d'épailleut au moins, afin qu'ils ne ploient pas lorfqu'on travaille deffus. Toutes les portes , deffus de tables, & autres ouvrages de cette nature , doi- vent être emboîtés au pourtour, c'eft-à-dire, qu'ils foient compofés d'un panneau &d'un bâtis, aftèmblés à bois de fil; &mênie lorfque les tables & autres ouvrages feront d'une certaine grandeur , on fera très -bien d'y mettre , au lieu de panneau , un parquet d'affemblage fait en liaifon , afin qu'ils ne ploient en aucune façon. Il faut auffi éviter, lorfqu'on conftruit les Bâtis , qu'il ne paroiffe aucun bois de bout, parce que la colle ne prend pas fi bien fur ce fens du bois que fur le bois de fil ; & on aura foin , autant que faire fe pourra, qu'ils foient tout montés avant que d'être plaqués en dehors ; c'eft pourquoi quand il arrivera que le de- dans des Bâtis fera revêtu, on commencera par faire ce revêtiffement intérieur & le polir , puis on achèvera de monter le Bâtis à l'ordinaire. Quand les Bâtis font montés, il faut avoir grand foin, en les replaniffant, qu'ils foient bien dreffés fur tous les fens , & qu'il n'y refte aucune efpece d'iné- galité , parce que s'il en reftoit quelques-unes , on perceroit le placage lorfqu'on viendroit à le finir. Quand on replanit les Bâtis , il faut fe fervir de la varlope-onglet à dents , avec le plus gros fer bretté , qu'on paffe fur tous les fens , tant pour bien dreffer l'ouvrage , que pour le rayer de tous les fens , afin que la colle s'y attache mieux. Quand il y aura des corps fàillants à l'ouvrage , on finira les parties rentrantes les premières , du moins autant qu'il fera poffible , & on fera en forte qu'il s y trouve des joints , ce qui en rendra l'exécution plus facile , comme je l'ai obfervé suix7%, I (& a, Si cependant on ne pouyoit faire des joints à l'endroit du reffiut , 8ï4 MENUISIER, III. Fart. SeB. Ut Chap. X. I fans faire tore à l'ouvrage en afFoiblilTant la largeur des bois , il faut alors fair: Planche les joints plus loin que le relTaut, pour conferver la largeur & la force des bois, comme je l'ai obfervé à la Jig. 3 ; dans ce cas , comme le rabot ou la varlope à dents ne peut palTer au travers de la pièce, on met le panneau en place avant que de le coller dans les Bâtis avec lefquels on FafHeure pièce à pièce ; enfuite on dreffe le panneau à part avec la varlope à dents , & on le colle avec les Bâtis , fur la partie rentrante defquels on paffe une forte râpe à bois , afin de les rayer comme à peu-près feroit le rabot bretté. Quand les Bâtis font tout-à-fait finis , il eft bon de les lailTer fécher quelque temps, avant que de les revêtir de placage , parce que n'étant pas revêtus tout de fuite après être finis , on eft toujours à portée de les réparer , fuppofé qu'ils viennent à faire quelqu'elîct , malgré qu'on y ait pris toutes les précautions que j'ai recommandées ci-de{fus. Quand les Bâtis font prêts à revêtir, il faut faire choix des bois qu'on veut employer ; puis le deifein de l'ouvrage étant fait , comme , par exemple , celui qui eft repréfenté fig. 1 3 , on en trace toutes les formes principales fur la pièce à revêtir , fur laquelle on a foin de tracer les lignes perpendiculaires & horizon- tales abSccd,8cles deux diagonales ef&. gk, ce qui fe fait à toutes fortes d'ouvrages , afin de diriger les joints des plages ; enfuite on commence à plaque? les bois, comme je vais l'expliquer dans le Chapitre fuivant. CHAPITRE I De l'EbéniJieru Jîmple, êCc. 8ij CHAPITRE ONZIEME. De l'Ebénifterie Jîmple , ou du Placage à compartiments en général. L'É BÉNisTERlE doiit la dcfcription va faire l'objet de ce Chapitre , quoique la plus fimple des trois efpeces qui compofent cet Art , n'en demande pas pour cela moins d'attention ; de plus , les procédés qui fervent à cette première efpece d'Ebénifterie , font à peu-près les mêmes pour les deux autres efpeces ; c'eft pourquoi il eft très-effentiel d'en faire une exafte defcription , laquelle étant une fois bien faite , abrégera beaucoup celle des deux autres , & aidera à les bien faire connoître. Avant de commencer à plaquer , il faut d'abord que les bâtis foient entière- ment finis , & les delfeins faits, afin de tracer deffus les bâtis les principales malfes des compartiments qu'on y veut faire , ainfi que je fai dit plus haut ; refte enfuite à faire choix des bois qu'on doit employer. Deux raifons doivent déterminer dans le choix des bois de placage ; favoir , celle d'économie & celle de convenance. La première de ces deux raifons n'a ordinairement lieu que lorfqu'il s'agit d'un ouvrage de peu de conféquence , & qui n'eft payé qu'un prix modique , ce qui oblige alors à n'employer que des bois communs , qui , par conféquent , coûtent peu cher : car dans de beaux ou- vrages on ne doit pas épargner la dépenfe , pour avoir des bois d'une couleur ou d'une qualité requife. La féconde raifon , c'eft-à-dire , celle de convenance , eft la plus elTentielle , parce qu'il eft très-important de ne pas mettre enfemble des bois d'une couleur trop oppofée , ou d'une trop inégale dureté , & qui deman- dent diverfes efpeces de travail , foit pour les replanir , foit pour les polir. La trop grande difparité des couleurs , eft auiTi un très-grand défaut , parce qu'alors les différents compartiments tranchent trop les uns fur les autres. Je ne prétends cependant pas qu'il ne faille mettre enfemble que des bois d'une cou- leur à peu-près égale , ( ce qui produiroit un effet monotone prefqu'aulfi défa- gréable à voir , que la trop grande difparité de couleur , ) mais feulement de mettre enfemble des bois dont les couleurs , quoique différentes les unes des autres , n'ayent pas trop d'oppofition entr'elles , comme le blanc avec le noir, le rouge avec le jaune , &c. Ce n'eft pas qu'on ne puiffe employer des bois de couleurs ainfi oppofées , dans une même pièce de placage ; mais fi on le fait , on doit mettre entr'eux des bois de couleur moyenne , c'eft-à-dire , qui fafient nuance entre les couleurs oppofées , afin que le changement de fune à fautre ne foie pas fi fenfibleà l'œil, & ne le bleflè pas. Cette obfervation ne doit avoir lieu que pour les grandes parties de placage ; car pour les petites parties , comme les Menuisier , 111. Pan. III. Secl. Y p Planche I §1^ ME NUI s 1ER, m. Part. Scd. Ilî. Chap. XL =3 plates-bandes Se les filets , il eft bon qu'ils fe diftinguent par leur couleur oppo- '■^ fée à celle du fond de l'ouvrage , afin qu'ils foient plus apparents. Si la trop grande différence de couleur de bois fait un mauvais effet fur la face de l'ouvrage, elle n'en fait pas un moindre par le côté , lorfqu'd fe trouve des épaiifeurs de bois d'une couleur , & des revêtiffements d'épailfeur d'une autre , ainfi que ceux G I H, fig. ^, parce que la pièce revêtue paroît être de trois morceaux & de différentes couleurs. Les Ebéniftes ne font pas ordinairement grande attention à cet inconvénient , fe contentant feulement de mettre toutes les épaiffeurs apparentes fur le côté de fouvrage , ce qui laiife toujours fubfifter le défaut dont je parle , comme on peut le voir à la figure i , où, furies côtés A Se B, on voit l'épaiffeur du placage de face ; c'eft pourquoi je crois qu'il vaut mieux , lorfqu'on a des angles Caillants à revêtir avec des bois de différentes cou- leurs , de faire leurs joints en onglets , comme ceux E , F,fig. i , ce qui fait très-bien , & n'a d'autre difficulté que l'exécution , qui devient un peu plus com, pliquée qu'à l'ordinaire , fans cependant être impoffible, puifqu'il ne s'agit que de drelfer le joint de la pièce qui eft collée la première , avec un guiilaume dont le deffous , & par conféquent le fer , foit abattu en onglet. Un feul guiilaume difpofé de la forte , peut abfolument fuffire ; cependant il eft bon d'en avoir deux d'une pente oppofée, pour s'en fervir au befoin : il eft même bon d'en avoir de côtés , afin que dans le cas où les deux côtés feroient collés les premiers , comme ceux E , F,fig. I , on puiffe les recaler fans que l'un nuife à l'autre. Hors le cas où les bois des corps faillants font de différentes couleurs , il n'eft pas néceffairc d'y faire des joints d'onglets; il fuffit que l'épaiffeur du placage foit du côté le moins apparent de la pièce , comme je l'ai obfervé à toutes les figures de cette Planche. Le placage des angles rentrants fe colle le premier , & on colle enfuire celui des côtés qui failliflent; & lorfqu'il arrive qu'il y a des pans coupés , comme à la Ûg. I , il eft bon de faire des coupes comme à l'angle D, parce que quand on colle le morceau de côté fur celui du fond , comme à l'angle C, la pente qu'on eft obligé de donner au morceau de côté, forme une arête fujette à s'écorcher quand on vient à finir l'ouvrage ; il faut cependant obferver que quand on fait une coupe comme celle D , il faut mettre d'épaiffeur égale le premier morceau qu'on colle , & le finir à peu-près avant que de coller l'autre , afin qu'en finiffant l'ouvrage , l'angle D foit toujours au milieu du joint. Quand il arrive que les avants- corps ont peu de faillie , mais que cette faillie eft plus confidérable que l'épaiffeur du placage , il faut alors coller le placage de l'arriere-corps , & le finir fur le bord ; enfuite on plaque fur le côté du corps faillant , une petite tringle du même bois que celui qu'on doit plaquer fur l'avant- corps , laquelle étant bien jointe avec ce dernier , femble ne faire qu'une feule & même pièce. Il eft des occafions où le changement de couleur des placages eft avantageux^ De rEbéniJlerîe Jimple , ôCc. Êij comme , par exemple , dans le cas d'une tablette , comme celle repréfentée fig. • 7 , laquelle peut fe dirpofer de deux manières ; favoir , de coller le placage de Planche champ le dernier , de manière qu'il falle bordure au pourtour de la tablette , ainli que je l'ai obfervé dans cette figure , cote G & /. La féconde manière de difpo- fer le placage des tablettes dont je parle , coté H L , même fig. eft , au contraire de la première , c'eft-à-dire , qu'il faut coller le placage du plat le dernier , de manière qu'il fafTe cadre fur le champ de l'ouvrage. Dans l'un ou l'autre cas , il eft certain que la différence des couleurs du placage fait très-bien ; mais ce ne peut être, comme je viens de le dire, que dans le cas d'une tablette, ou tout autre petit ouvrage de cette efpece. Quand il fe trouve des ouvrages qui Ibnt revêtus des quatre faces , comme les fig. II & 12, &. que les revètiffements ibnt de différentes couleurs , il eft bon de faire les joints d'arête d'onglets , comme à la fig. i r , à moins toutefois qu'on ne voulût difpofer de travers les bois de côtés M , N , fig. 12 , & que l'épaif; feur de ceux de côtés leur fervît de bordure. Quand les angles arrondis feront plaqués , comme à cette figure , & à h fig; 6 , on mettra le placage plus épais qu'à l'ordinaire , à caufe de l'arrondiffemenc de l'angle, & on le collera le premier , lorfqu'il fera placé entre deux morceaux, comme à la_^o'. 12 , & le dernier quand il formera l'arête d'une pièce , comme li,fig. 6. Quoiqu'on ne plaque ordinairement que des parties plates , on peut cepen- dant très -bien faire des faillies de moulures en bois de différentes couleurs, ce qui feroit très-bien, & ne demanderoit qu'un peu de foin de la part de l'Ou- vrier ; c'eft pourquoi je crois qu'il feroit très-facile de le faire, & cela plus com- munément qu'on ne le fait. Foye^ lesfig.8 , ^ &10, où j'ai tracé diverfes fortes de moulures , dont les membres font de bois de rapport de différentes couleurs, & dont la conftruélion & la difpofition peuvent s'appliquer à toutes fortes d'ou- vrages, de quelque nature qu'ils puifïènt être. Section Première. Des diverfes fines de Companiments en général-, du détail & de la difpofition des bois de placage. L'e s P E c E d'Ebénifterie dont je traite , ou la Marqueterie proprement dite, confifte dans l'alfemblage des divers compartiments dont elle eft compofée. Ces compartiments font de deux efpeces ; favoir , les grands , & les petits. Les grands compartiments fe font ordinairement de grandes pièces de bois de placage , fcuvent d'une même efpece , dont les joints & la difpofition des fils oppofés les uns aux autres , forment différentes figures , foit dans la compofition totale de l'ouvrage , foit dans les diverfes parties qui le compofent. Les petits compartiments différent des premiers, non-fbulement par leus 8i8 ME N UISÎE R , ni Pan. SeB. lU. Chap. XL I : - grandeur , mais encore par la diiïerence des bois qu'on y emploie ; de plus les Planche petits compartiments font fouvent entourés de plates-bandes & de filets qui les féparent du refte de l'ouvrage , comme on le verra ci-après. En général, les compartiments , tant grands que petits , font formés par des lignes droites ou des lignes circulaires , ou enfin un compofé des unes ou des autres , ce qui rend l'ouvrage plus ou moins difficile à faire , quoiqu'on fe ferve à peu près des mêmes procédés pour l'exécution de ces différents compartiments 5 c'eft pourquoi je vais commencer par les premiers , c'eft-à-dire , par ceux qui font corapofés de lignes droites , comme étant les plus aifés , dont je me conten- terai de donner ( ainfi que des autres ) , quelques exemples généraux , applica- bles à la pratique , n'étant pas poffible d'épuifer , ni même de donner des pré- ceptes particuliers & détaillés fur cette matière , laquelle étant une affaire de goût , dépend abfoiument du goût & du génie de l'Artifte, qui compofe le deffein de fouvrage, de quelque nature qu'il puilfe être. Mais avant d'entrer dans le détail de ces différents compartiments, il eft bon de dire quelque chofe du débit & de la difpofition générale des bois de placage , parce que cette connoiffance cfl: abfoiument néceffaire pour pouvoir décider fur la forme & la grandeur des compartiments , fuivant l'efpece de bois qu'on veut employer. Après que les bois propres au placage ont été refendus de la manière que je FiANCHE " l'-^i dit ci-devant ,pdge Soi, on les replante au rabot à dents, tant pour les mettre d'une épaiffeur égale, que pour les rayer, afin qu'ils foient mieux en état de prendre la colle lorfqu'on les plaque ; & faifant cette opération , il faut avoir grand foin de remettre enfemble les feuilles qui fortent l'une delTus l'autre ^ parce que leurs veines & leurs nuances étant parfaitement égales , il eft bon , en les taillant fuivant la grandeur & la forme des différents compartiments , que les morceaux qui font femblables , foient placés à côté les uns des autres , ce qui fait un très-bel effet , d'autant plus que les veines , & généralement toutes les figures qui fe rencontrent dans un feuillet de placage , fe trouvent doublées , étant portées de chaque côté du joint , comme on peut le voir aux_^^. i , 2. & 6 de la Planche 284. De telle manière que les bois de placage foient refendus , cette obfervation eft générale ; parce que s'ils le font diagonalement ou en femelles , & qu'ils for- ment des rofaces, comme \afig. i,même PL il eft certain que les nuances de deux feuilles ainfi refendues , ne peuvent être parfaitement égales que lorfqu'elles fortent l'une de deflus l'autre, vu que les différentes couches concentriques de l'arbre étant d'un diam.etre inégal, elles offrent diverfes figures, félon qu'elles font coupées plus ou moins proche du centre ou de la circonférence de l'arbre. Si les bois font refendus parallèlement à leurs fils , c'eft encore la même chofe , non-feulement par rapport aux différents diamètres des couches concen- triques de la pièce de bois , mais encore par rapport aux différents accidents qui fe rencontrent dans l'intérieur de cette même pièce , comme le voifinage des nœuds Sect. ï. Des Compartiments m général, ÔC.C. 819 hœuds & autres accidents, lefquels donnent diverfes configurations aux fibres du bois , qui font très-apparentes à un endroit de la pièce , & ne fe retrouvent plus Pj-anche un demi-pouce plus loin. Cette obfervation eft très-effèntielle , fur-tout pour les compartiments où il eft nécelTaire que les mêmes nuances de bois fc répètent j comme les pointes de diamants, les étoiles, les rofices, &c. Je fai très - bien qu'il n'eft pas poflîble d'avoir , dans une même pièce, plus de deux feuillets qui foient parfaitement femblables ; mais comme ces feuil- lets font très-minces, la différence qu'il y a du premier (en commençant par le cœur du bois) au huitième ou au dixième, eft très-peuconfidérable, fur-tout quand la pièce de bois refendue eft d'un très-gros diamètre , & que les veines du bois formées par les couches concentriques , font très-proches les unes des autres. Si au contraire la pièce de bois refendue fe trouve avoir les veines très-larges , & être en même temps d'un petit diamètre , comme à la fig. i , on ne peut avoir guère que deux ou trois feuillets femblables de chaque côté , ce qui fait qu'on eft obligé de faire fervir les autres dans des parties qui demandent moins de régu- larité, Voyei -^"T^- 3 > 15 7 , qui repréfentent les élévations des feuillets a h, cdèf.tf, de la figure i , lefquelles font toutes différentes les unes des autres < Quand les bois font tels que je viens de le dire , & qu'il eft néceffiiire d'avoie un nombre de feuillets femblables , foit à la jig. 3 , ou \ celles (î ou 7, comme on n'en peut prendre que quatre ou fix pareils des deux côtés & fur fépaiffeur de farbre , on eft obligé de les prendre les uns au bout des autres , ce qui fouffra beaucoup de difficultés , vu qu'il eft très-rare de trouver une pièce de bois par- faitement de fil for une longueur confidérable , & fans qu'il s'y trouve quelques nœuds ou autres accidents qui faffent changer les veines du bois. Quand on refend le bois obliquement pour avoir des feuillets en femelles, comme la fig. 5 , la longueur de ces feuillets , lorfqu'on veut qu'ils foient d'une même forme , ne peut pas être prifè fur une ligne horifontale , comme celle gh, fig. 4. , parce que les nuances des feuillets inclinés , non-feulement ne feroient plus femblables , mais encore parce qu'elles ne ie trouveroient plus à égale hau- teur. C'eft pourquoi , lorfqu'on veut avoir plufieurs feuilles en femelles, comme , par exemple , celle repréfentée jig. 5 , laquelle eft prife fur la diagonale //, il faut , après avoir refendu la pièce en deux parties égales, comme le repréfente la ^g. I , faire une levée fur le derrière de la pièce , comme celle i m , prife de l'extrémité de la diagonale il , fig. ^; enfoite on refend la pièce en autant da C) Il n'efl pas exaftement vrai que les coii- 1 fible , & mieux faire connoître ks avantages oa elles concentriques d'un arbre quelconque , les inconvénients qui fe rencontrent dans le dé- foient aulTi régulières que je les ai repréfentces bit des bois de placage , qu'il ed elTentiél a un dans les figures de cette Planche , foit pour la Ebénifle de bien entendre, tant pour rendre fon différence de leurs couleurs , foit pour la régu- ouvrage plus parfait, que pour perdre le moins laritc de leurs formes, qui font extrêmement va- j de bois qu'il lui efl poffibie , ce qui ei'l fort à liées dans les bois , même les plus réguliers. Si , confidérer , vu la cherté du bois , & l'e décheo donc j'ai repréfente les bois de cette manière , ce du fciage , fans compter la perte des rognures de d'eft que pour rendre ma démonftration plus fen. I des fauïfes coupes, qui eft inévitaUe. Menuisier, 111, Pan. lll. Sgci. §20 MENUISIER, m. Pan. Secl. III. Chap. XI. «^Mui.'^— ; feuillets qu'on le juge à propos , toujours parallèlement à cette diagonale , Sd Planche Jgj points où chacun d'eux rencontre la ligne im , bornent leur longueur parle ^' haut , & on a les feuillets no , p q, r s , tu ,x y, :[ <&, & xy, égaux en longueur à celui z'/, & parfaitement femblables à celui fig. j , tant pour la nuance que pour la forme , excepté qu'ils font un peu plus longs que ce dernier, lequel n'efi vu que géométralement fur la ligne hl ,&u lieu d'être &r celle i Z ; ce qui , au refte , ne fait rien à la chofe. Cette manière d'avoir des feuillets en femelles parfaitement lèmblables entré eux , eft très-bonne , ne Ibuffre aucune difficulté dans l'exécution , & n'eft pas même fufceptible de changements ; parce que fi on vouloit pouffer les refentea au-delà du centre de la pièce, comme l'indiquent les lignes ponftuées , la forma du feuillet fig. y , feroit toujours la même , & fe redoubleroit en contre-bas de la ligne / 2 , ce qui eft tout naturel , vu que cette dernière paffe par le centre de l'arbre. Il y a des occafîons où cette dernière manière de refendre les feuillets efi très-bonne , parce qu'elle donne des figures d'ellipfe très-allongées , qui font un fort bon eiïet dans certains compartiments barlongs , où on peut les employer fort à propos. Les bois d'une qualité dure & d'un petit diamètre , s'emploient quelquefois à bois de bouc, non pas en les coupant tout-à-fait par tranches horifontales, mais en inclinant un peu leur coupe, comme , par exemple , la tranche AB ,fig. 3 ce qui leur donne plus de folidité , làns pour cela changer que très-peu de chofe à leur forme , qui , cependant , devient un peu plus allongée fur la longueur A B, que fur le diamètre ordinaire de la pièce ; mais, comme je viens de le dire , cette difiFérence eft de très-peu de chofe. Quand , au contraire , l'obliquité de cette tranche eft confidérable , comme celle C D , la figure change confidérablement , & de ronde qu'elle étoit , coupée horifontalement ou à peu-près , devient une ellipfe , comme je l'ai repréfentée dans la figure 2 , laquelle eft prife fur la diagonale CD, de la figure 3. Quand on fait des tranches ou lames à bois de bout ou horifontales , ce qui eft la même chofe , on doit avoir foin de les tenir plus épaiffes que les lames ordinaires , de la moitié de l'épaiffeur de ces dernières ; & d'un tiers feulemenc lorfque les branches feront prifes obliquement , ce qui eft très-naturel, le bois , quoique très-liant , étant toujours moins fort à bois de bout qu'à bois de fil. Le débit des bois de placage tel que je viens de le décrire , quoique très- fuccindlement , demande beaucoup d'attention & de pratique de la part de l'Ouvrier , foit pour le faire à propos , foit pour choifir des pièces d'une gran- deur & d'une qualité convenables , fuivant les différents befoins , ce qui demanda beaucoup d'expérience , & ne s'acquiert qu'avec le temps & la pratique. ^ ■ ' _; Quant à la difpofition des bois de placage , elle dépend plutôt du goût ou ds ^' 28™^ la volonté de ceux qui les emploient , que d'aucune règle certaine ; cependans on peut confidérer quatre différentes manières de dilpofei les bois de placage - Sj;ct. I. Des Compartiments en général, SCc. Ssr ravoir , la première & la plus fimple , qui eft de les mettre à bois de fil , foit horilbntalement ou perpendiculairement , comme issjîg. 3 d'' 4 , cote G H. La féconde , eft de mettre les fils des bois perpendiculairement &. liorifonta- lement , en y obfervant un joint fur la diagonale ab,fig.^ ,ct qu'on appelle des collages d'onglets , ou à pointes de diamants ; & on doit avoir foin, en collant les bois de cette manière, que leurs fils foient femblables autant qu'il eft poffible , & de mettre le clair ou le brun du bois enfemble , comme je l'ai fait à cette figure. On colle auflî les bois en forme de lolànge, comme \.z fig. 2, cote E F,cé qui revient à peu-près à la même chofe que les pointes de diamants , à l'excep- tion que le fil des pièces qui forment la lofange , ne font & même ne peuvent pas être parallèles avec les côtés de l'ouvrage , ce qui forme des vuides C D , qu'on remplit par d'autres placages , foit à bois de bout ou à bois de fil , ou même du même fens des lofanges , ce qui fe pratique quelquefois , fur-tout quand cette dernière eft féparée d'une plate-bande ou d'un filst , comme dans cette figure. La troifieme manière de difpofer les bois , eft de mettre leurs fils diagonale- ment, de manière que leurs joints perpendiculaires & horifontaux coupent leurs fils obliquement , comme à la Jlg. 6 , cote M Sa N. Quand les bois font: ainfi difpofés , on met le milieu du feuillet fur la diagonale b c , 8c on achevé ce qui refte pour remplir les angles avec des morceaux d'une nuance à peu-près femblable ; ou bien quand le milieu des feuillets n'eft pas exadlementau milieu de l'arbre , ( comme il arrive quand on a fait une levée , ) dans ce cas on fait le rempliflâge de deux pièces exaâemcnt femblables , en obfervant de bien mettre leurs joints fur la diagonale de fouvrage , foit que la pièce qu'on a à revêtir foie parfaitement quarrée , ou bien qu'elle foit de la forme d'un parallélogramme , ce qui eft une règle générale pour toutes fortes d'ouvrages. Voye:^ l'^-fiS' ^ ' 1^' eft difpofée de cette manière. La quatrième manière de difpofer les bois de placage , eft de les mettre en cœurs ou rofaces , comme la figure r ; dans ce cas on fait tendre le fil de chaque pièce de placage au centre de l'ouvrage; on taille les pièces parfaitement égales entr'elles, & on a grand foin qu'elles foient bien d'égale hauteur de nuance, afin qu'elles fe rencontrent enfemble autant qu'il eft poflible. Voyez ce que j'ai dit ci-deiTus à ce fujet , en parlant du débit des bois de placage. En général , de quelque manière que foient difpofés les bois de placage , on doit avoir grand foin qu'ils foient nuancés également de chaque côté oppofé , & que ces nuances fe rapportent autant qu'il eft polfible , ce qui augmentera beaucoup la perfeâion de fouvrage. On doit auifi avoir la même attention pour les frifes 00 ,PP,QQ,RR,fig. 3 , 4 , J (5 6 , foit qi/e ces dernières foienC placées à bois de fil , comme à la flg. 3 , ou à bois biais ou en onglet , comme aux fig. 4 J , ou enfin à bois de bout , comme à la Jîg. 6 , ce qui dépend dvj goût de 1 Ouvrier , ou , pour mieux dire , de la manière donc font placées les 822 ME NU ÎSIER, III. Pan. Sett IlL Chap. XL grandes feuilles de placage , au fil defquelles il eft bon que celui des frifes folc Planche oppofé. Les frifes font ordinairement féparées des panneaux par de fimples filets de hoiix ou d'ofier , (ou d'autre efpece de bois de couleur , ce qui cft égal , ) ou bien avec des plates-bandes S S ,ou feder- bandes , comn:ie difent les Ebéniftes , avec deux filets de chaque côté , comme je l'ai obferyé aux figures 2 > 3 > 4 j J & 6 de cette Planche. Les plates-bandes fe placent ordinairement à bois de fil, à moins qu elles ne foient d'une largeur confidérable , comme 4 à 6 lignes ; car alors on les met quelquefois à bois de bout, fur-tout quand elles font de bois nuancé , & qu'elles forment divers contours ; mais la manière la plus ordinaire eft de les faire de bois uni d'une feule couleur , & placées à bois de fil , comme je l'ai déjà dit. La difpofition des bois de bout eft à peu-près la même que celle du placage en cœur , Jîg. l ; parce que de quelque manière qu'on les arrange , ils ne peuvent former que des rofaces , ou , pour mieux dire , plufieurs cercles concen- triques les uns aux autres , ou toute autre figure circulaire , dont on fait tendre au centre les joints des pièces qui les compofent , en obfervant toujours d'op- pofer les figures , foit régulières , foit irrégulieres , les unes aux autres. Ce doit être la même chofe pour la difpofition des nœuds ou loupes , de quel- qu'efpece qu'ils foient , ii ce n'eft que les morceaux fbienc aflèz grands pour faire un panneau tout entier ; alors on n'y obferve pas de régularité , à moins qu'il ne fe trouve dans fouvrage deux panneaux pareils , qu'il eft néceflàire de remplir fynimétriquement , en oppofant les divers accidents de leurs placages les uns aux autres. Voilà , en général , tout ce qu'on peut dire touchant la difpofition des bois de placage ; le goût , fexpérience , & les diverfes occafions d'en faire ufàge , étant les plus sûres règles qu'on puifle confuker pour bien entendre cette partie de la Menuiferie , qui , comme je l'ai déjà dit , dépend beaucoup du goût de l'Ou^ vxier , de la mode &; des ufages reçus dans chaque fiecle. §. ï. Des diverfes Jones de Compartiments , tant droits que circulaires. , Les différents compartiments d'ulàge en Ebénifterie , font de deux efpeces^ Planche comme je l'ai dit plus haut ; favoir , les grands & les petits. Les uns & les autres ^' fe font ou par l'arrangement fymmétrique des joints & des fils des bois de pla- cage , ou par les diverfes figures que l'on donne aux frifes , aux cadres ou plates- bandes qu'on ajoute à ces derniers, c'eft-à-dire, aux compartiments, formés fimplement par les joints & les fils des bois, qui, dans les ouvrages firaples, font fouvent de la même elpece. La Figure l repréfente un compartiment d'une forme quarrée des plus fimples, entouré d'une frife unie & d'une plaie-bande qui fépare cette dernière d'avec le panneaa Sect. I. §. I. Des diverfes fortes de Compartiments. Sii panneau du milieu. Les bois de ce panneau font difpofés de deux manières diffé- rentes , à joints diagonaux & en oppofition avec le fens des fnfes , qui fe placent foit à bois de fil, foit à bois de bouc, ou enfin diagonalement, le tout félon la di/pofition intérieure du panneau. La Figure 2 repréfente un autre compartiment d une forme quarrée, entouré de fnfes à cadre, dont le remplilïïige eft fait diagonalement & en deux partie, fur la largeur. Les bois de l'intérieur de cette figure font, difpofés de deux manières ; favoir , diagonalement & à joints quarrés , comme ceux A Se B 8c a joints quarrés & diagonaux, comme ceux C, D , E, F, de manière que le' fil des bois fe trouve pofitivement au milieu de chaque pièce, ce qui fait affe^ bien Les plates-bandes qui entourent les frifes de cette figure , & qui les fépa. rent du panneau du milieu , font toutes accompagnées de filets que je nai p« marquer ici à caufe de la petiteife des figures , qu'il auroit fallu faire prefqu aulfi grandes que 1 exécution , pour que les filets eulfent été fenfisJes. La Figure 3 repréfente un compartiment quarré fans frifes, avec des oreilles quarrees aux quatre coins, ce qui produit douze angles, defquels partent autarft de joints qui vont tendre au centre de la pièce ,& félon lefquels on ajufte les bois de placage du fens qu'on le juge à propos , en obfervant néanmoins de le faire fymmetnquement , comme je l'ai fait dans cette figure , où les bois de placage lont places de trois manières différentes, afin qu'on puiffe choifir celle qu'on jugera à propos, La Figure 4 repréfente un compartiment oétogone ou à huit côtés , des angles defquels partent les joints qui féparent les bois de placage , ou félon lefquels leurs fils font difpofés , ainfi qu'on peut le voir dans cette figure , dont f infpediori feule doit fuffire pour faire connoître toutes les manières poffibles de difpofer les fils des bois dans une figure de cette efpece. La Figure y repréfente un compartiment circulaire en forme de roface l huit faces , entouré d'une plate-bande & de filets. Ce compartiment fait un très-bel effet , & demande beaucoup de foin pour être traité avec toute la perfedion donc il eft fufceptible, La Figure 6 enfin repréfente un autre compartiment partie droit Se partie circulaire, dont le milieu eft rempli par une étoile à huit pointes, & de bois d'une couleur différente du fond de l'ouvrage, afin de la faire mieux reffortir Les compartiments que je viens de repréfenter ici , quoiqu'en petit nombre fufiifent pour donner une idée générale de la manière de difpofer les joints & les fils des bois dans tous les cas poffibies . ce qui conftitue la première efpece de compartiment. Il faut cependant obferver que quand les ouvrages à revêtir feront d une forme barlongue , ( au lieu d'être quarrés , comme dans les figures de cette Planche , ) il faut toujours que les joints ou les fils des bois tendent aux angles de l ouvrage , fans s'embarraffer s'il eft quarré ou non (*). JZ'^Xn^ulriZ^^^^^^^ I = d'Ebénifîes <,„;, lorf.uiU f c , vu qu eue elt ne- font des ouvrages d'une forme barlongue dilbo Menuisier. III. Pan. 111. ScB. A 10 Planche 28î. Planche 824 MENUISIER, m. Pan. SeS. III Chap. XI. Il n'eti: guère pofilble de donner de préceptes touchant la féconde efpece de compartiments, c'eft-à-dire, ceux qui font formés par les différentes figures qu'on donne aux frifes 8c aux plates-bandes qui entourent les panneaux , vu qu'ils dépendent de la forme générale de l'ouvrage , du plus ou moins de richelTe qu'on veut lui donner , & encore plus que tout cela , du génie de l'Artifte. Je me contenterai donc de donner ici quelques exemples de compartiments , tant de l'intérieur des panneaux , que des frifes qui les entourent , & de ceux qui font les plus en ufage , d'après lefquels on pourra en inventer d'autres , ou fc fervir de ceux-ci , ainfi qu'on le jugera à propos, le choix de ces différents com- partiments étant purement une affaire de goût. En faifantla defcription des compartiments de la première efpece, je les ai fuppofés de bois unis , c'eft-à-dire, d'une même couleur & qualité ; au contraire ceux dont je vais parler préfentement , fe font non-feulement de bois d'une cou- leur & d'une qualité oppofées , mais encore dans lefquels on fait choix des nuances , pour donner aux différents compartiments une faillie du moins appa- rente. La Figure l repréfente l'efpece de compartiment le plus fimple de tous , & qu'on nomme en échiquier ; il eft compofé de plufieurs quarrés de bois de diffé- rentes couleurs , placés alternativement à côté les uns des autres , de forte qu un quatre blanc fe trouve entouré de quatre quarrés noirs , & un quarré noir en- touré de quatre quarrés blancs. Cette forte de compartiment , quoique très- fimple, demande beaucoup d'attention , pour que tous les joints de chaque pièce s'alignent & fe rencontrent parfaitement ; il faut aulTi obferver , quand on faic de ces fortes de compartiments , que le nombre des quarrés qui les compofent , foit non-pair , afin qu'il s'en trouve quatre de même couleur dans les angles , ce qui ne pourroit être fi le nombre des quarrés étoit pair , comme on peut le voir dans cette figure. S'il arrivoit que la pièce qu'on auroit à revêtir avec cette forte de compartiment , fût d'une forme barlongue peu différente d'un quarré , on diviferoit les deux côtés de la pièce en autant de parties l'une que l'autre , & toujours en nombre non-pair, afin d'avoir un même nombre de quarrés de cha- que côté ; & que ces mêmes quarrés de remplilfage foient d'une forme barlongue,- en rapport avec celle de la pièce à revêtir. Si , au contraire , la différence des côtés de la pièce à revêtir, étoit trop con- fidérable , on la rempliroit avec des quarrés à l'ordinaire , dont on augraenteroic ou rettancheroit le nombre autant qu'il feroit néceffaire , en obfervant toujours que ce nombre foit impair , tant fur le grand que fur le petit côté de la piecej Quant à la couleur des bois de l'efpece de compartiment dont je parle , il eU fent touiours les fils de leurs bois , ou les joints avec ceux de la pièce à revêtir , & s'en éloignend de ces derniers , à l'ordinaire , c'eft-à-dire , quar- plus ou moins, félon que le parallélogramme, rément , ou fuivant la diagonale d'un quarté , ce qu'elle repréfente , eft d'une forme plus ou moins qui fait un très-mauvais effet , parce que les angl es allongée, ries compartiments du plasage ne s'accordent plus Sect. I. §. I. Des diverfes fortes de Compartiments^ Sa/ a/Tez indifférent quelle ellefoit, pourvu que les quarrés de rerapliffagê foienc d'une couleur dillinae les uns des autres , & tous de celle des frifes & des Planche plates-bandes qui les entourent ; & s'il arrivoit que l'on fût obligé de faire les frifes ou les plates-bandes d'une même couleur que celle d'une des deux efpeces de carreaux , il faudroit les féparer d'avec ces derniers , en faifant régner un filée au pourtour de l'ouvrage , comme je l'ai obfervé aux différentes figures de cette Planche. La Figure 2 repréfente un autre compartiment compofé, comme le précédent, de quarrés de couleurs différentes , placés alternativement à côté les uns des autres. Ce fécond compartiment diffère du premier, en ce que les quarrés donc il eft compofé , font placés fur leur angle , ce qui lui a fait donner le nom de comparcimenc en lofange. Ce compartiment fait affez bien , & a cela de commode qu'on peut mettre les quarrés dont il eft compofé , en nombre pair ou impair , félon qu'on le juge à propos, en obfervant toutefois qu'il fe trouve un quart de quarrés dans l'angle , afin que tous les quarrés de la même elpece touchent de leurs pointes la plate-bande ou le filet du pourtour, & que les autres foienC tous coupés au milieu de leur largeur, comme je l'ai obfervé dans cette figure. Quand la place à revêtir fe trouvera être un peu plus longue d'un fcns que- de l'autre , on divifera toujours les carreaux de rempliffage sn nombre égal de chaque côté, ce qui alors changera leur forme, qui, de quarrée , deviendra lofange , foit fur la longueur , foit fur la largeur ; & on aura grand foin de tou- jours faire la divifion , foit des quarrés , foit des lofanges , en raifon de la gran- deur de la place à revêtir , afin qu'il ne s'en trouve aucun coupé irrégulièrement, ce qui eft un très-grand défaut , qu'il faut abfolument éviter à toutes fortes de compartiments , de quelqu'efpece qu'ils puiffent être, comme je l'ai obfervé aux différents compartiments repréfentés fur cette Planche. Les compartiments dont je viens de parler, s'emploient ordinairement dans des parties d'une moyenne grandeur ; mais quand les parties à revêtir deviennent trop grandes , on ne fait ufige de ces compartiments qu'en les entourant de plates-bandes & de filets , qui y font des efpeces de cadres , comme à lay?^. 3 , ce qui donne lieu de grandir les quarrés ou les lofanges autant qu'on le juge à propos. Quand on fait de ces fortes de compartiments , leur divifion fe fait de l'inté- rieur des plates-bandes qui leur fervent de cadres , fans avoir égard à la largeur du filet, afin que l'angle de ce dernier touche pofîtivement au nud de la plate- bande qui entoure l'ouvrage , ainfi que je l'ai obfervé dans cette figure. Comme ces compartiments font grands, il faut avoir foin qu'ils foient très-réguliers, foie qu'ils foient d'une forme parfaitement quarrée ou lofange, ce qui eft égal,- pourvu qu'il fe trouve aux quatre angles deux demi-quarrés , comme à cette figure , ou bien feulement un quart de quarré , fuppofé que le compartiment foie terminé par la ligne A B, même figure. L'intérieur des quarrés de ces 226 ME NU I S 1ER, m. Pan. Sec! 111 Chap. XL compartiments , fe remplit de différentes manières, comme je l'ai obfervéicî; Planche quelquefois on y incrufte des rofaces ou autres ornements , qui y font un très- bel effet. Comme je l'expliquerai dans la fuite. La Figure 4 repréfente un compartiment à dés ou cubes pofés fur un fond de couleur quelconque ; ces dés ou cubes font des hexagones placés à côté les uns des autres , de manière que leurs pointes fe touclient les unes aux autres , comme on peut le voir dans cette figure. Chacun de ces hexagones , ou figures à fix côtés , eft compofé de trois lofanges jointes enfemble , lefquelles font de différentes couleurs , pour faire paroître le relief des dés ou cubes ; de forte que la lofange C, qui eft du côté du jour , fe fait en bois de rofe ; celle D, qui efl le deffus du cube, en bois gris eu jaune ; & celle E , qui eft le côté de l'ombre, en bois violet ; & le fond en. tel autre bois qu'on le juge à propos, pourvu qu'il diffère de la couleur des bois qui forment les cubes , dont la couleur doit non-feulement différer de celle du fond, mais encore être plus foncée d'un côté que de l'autre à chaque lofange dont ils font compofés ; & on parvient à le faire en choififfant des mor- ceaux plus foncés en couleur d'un côté que de l'autre, ou bien en les paffant au làble chaud, comme je fenfeignerai en fon lieu. La Figure 5 repréfente un autre compartiment, qui ne diffère de celui dont je viens de parler , qu'en ce qu'il n'a point de fond comme ce dernier , mais qu'au contraire tous les dés ou cubes entrent les uns dans les autres fans lai/Ter d'efpace vuide, ce qui fait aftez bien ; cependant il eft bon d'obferver , en faifànc cette dernière efpece de compartiment , d'y faire un fond entre les cubes du haut & du bas, comme je l'ai obfervé dans cette figure, ce qui fait beaucoup mieux que de voir des bouts de cubes coupés comme on le fait ordinairement , & que je l'ai indiqué par la ligne F G. En général , que les compartiments dont je parle foient avec fond , comme la fier. 4 , ou fans fond , comme la^. J , il faut avoir grand foin , lorfqu'on en fait la divifion , qu'il fe trouve un nombre complet de cubes fur la largeur , & que fur la hauteur l'extrémité de ces mêmes cubes touche à la plate-bande ou au filet qui les entoure , comme je l'ai obfervé ici ; ce qu'il eft très-aifé de faire , puifqu'il n'y a qu'à hauffer ou baiffer la hauteur des cubes , félon qu'il en fera befoin , n'étant pas abfolument nécefTaire que l'hexagone du cube foit parfaitement régu- lier , quoique cependant lorfqu'il peut l'être , il n'en fait que mieux , & eft d'autant plus aifé à faire , que les trois lofanges qui compofent l'hexagone , font d'une forme femblable , ce qui n'arrive pas ordinairement quand l'hexagone eft d'une forme irréguliere. Si on ne vouloit pas faire des dés ou cubes faillants , comme à hfig. j , on pourroit fe fervir du compartiment de ces derniers pour faire un rempli/Tage de lofanges en bois unis , ce qui ne fait pas mal quand les joints en font bien faits, comme on peu: le voir dans cette figure. La Sect. I. §. I. Des dlverfes fortes de Compartîmencs. 827 La Figure 6 repréfence un compartiment à étoiles confures , qui eft d'une com- ■ pofition très-difficile en apparence; cependant ce ne font que des hexagones, Planche comme celui HyI,L, M, N, O , qui s'approchent & fe pénètrent les uns les autres , de forte que l'extrémité quelconque dans chaque étoile , devient le centre d'une autre. Il faut cependant obferver, en faifànt ces fortes de compar- timents , qu'il fe trouve , autant qu'il eft polTible , un nombre d'hextigones com- plet fur la hauteur , comme il fe trouve dans cette figure , afin que le fond ou le vuide que laifîènt les pointes des étoiles , foit femblable par le bas comme par le haut , ce qui ne pourroit pas être fi le compartiment étoit borné par la ligne P Q , dont la diftance jufqu'au filet fupérieur du compartiment , ne contient qu'un hexagone & demi de hauteur ; quant à la largeur de cette efpece de comparti- ment, pris dans le fens que le repréfente la figure 6 , il n'importe pas que le nombre des hexagones foit complet , il fuffit qu'il ne fe trouve point de pointes d'étoiles coupées fur une même ligne , pour que ce compartiment foit auffi pat; fait qu'il puilîè être. Ces fortes de compartiments peuvent être faits avec une {àillie apparente , ou bien être remplis de bois unis , ce qui eft égal pour la forme & la difpofition des joints , qui font toujours donnés par des lignes parallèles , horifontales & perpendiculaires , & par des triangles équilatéraux, dont les fommets font oppo- fés les uns aux autres , ainfi qu'on peut le voir dans cette figure , dont rinfpec-; tion feule vaut mieux que toute l'explication qu'on en pourroit faire. LaFigurey repréfente un autre compartiment compofé d'o6logones ou figures à huit côtés , difpofés en étoiles à huit pointes , lefquelles tendent, intérieure- ment , toutes à un même centre. Les étoiles qui compofent ce compartiment , fe touchent, fur leurs faces perpendiculaires & horifontales, par deux pointes, ce qui produit entr' elles un efpace quarré qu'on remplit foit en pointe de diamant, comme dans le haut de cette figure , ou bien en bois unis faifant fond , ce qui eft égal. Les autres vuides quarrés que produit la rentrée des pointes de ces mêmes étoiles , étant plus grands que ceux dont je viens de parler ci-deffiis , fef rempliflent par d'autres étoiles à quatre pointes , ou toute autre efpece de compar- timent, placées fur un fond qui les diftingue du refte de l'ouvrage , comme je l'ai obfervé dans la partie fupérieure de cette figure , dont les étoiles ainfi que les pointes de diamants , ont un relief apparent. Ces fortes de compartiments peuvent auffi fe faire totalement de bois unis , tant les étoiles que le fond , ou bien les étoiles d'une couleur plus ou moins foncée que le fond , ce qui eft égal. Il fe fait encore beaucoup d'autres compartiments propres au remplifiage des panneaux d'Ebénifterie , dans le détail defquels je n'entrerai pas ici , le petit nombre d'exemples que je viens de donner dans cette Planche , & l'explication que j'en ai faite , étant fuffifants pour aider à tracer régulièrement tel comparti- jnenc qu'on voudra faire , en obfervant toujours de faire les compartiments Menuisier , ///. Pan^ lll, SeB. B ro é 8^8 MENUISIER, III. Pan. Secl. 111. Chap. Xt. ~ 3 pour la place , & non pas la place pour les compartiments , comme il arrive très- ^i-'^^cm fouvent , & en évitant fur-rout de remplir des panneaux d'Ebénifterie avec des compartiments , lefquels étant ou trop grands ou trop petits , fe trouvent nécef- fairement mutilés par les cadres & les plates-bandes du pourtour du panneau , ce qui n'arrive que par la négligence des Ouvriers , qui, lorfqu'ils ont une fois fait le deflèin d'un compartiment , & les outils propres à en ajufter les différentes pièces , n'en veulent plus changer , foit par parefîè ou par incapacité , ou , ce qui eft plus jufte, par l'impoffibilité où les Marchands les mettent de le faire, en ne leur payant l'ouvrage que la moitié de ce qu'il vaudroit s'il étoit bien fait. — .i — — -, Les panneaux d'Ebénifterie font ordinairement entourés de frifes , foit de bois Planche unis collés de différents fens , ou bien en compartiments , ce qui eft égal ; dans l'un ou l'autre cas , on y met quelquefois des plates-bandes de différentes cou- leurs, entourées de filets, comme je l'ai déjà dit ; ces plates-bandes forment un fécond cadre autour du panneau, aux quatre angles duquel on leur fiit faira divers reffauts , comme le repréfentent les fig. l , 2 ê 3 , qui font difpofées de la même manière , quoique différentes , pour la forme , les unes des autres. Que les plates-bandes foient {impies , comme aux fig. 0. & j , ou qu'elles foicnC doubles , comme à la Jîg. i , il faut toujours qu'elles foient entourées de filets qui les féparent du refte de l'ouvrage , ce qui eft une règle générale dans tous les cas. Ces filets font ordinairement blancs ; cependant on peut en faire d'autres couleurs, ce qui eft indifférent , pourvu que leur couleur faffe oppofition avec les bois qu'ils féparent , & qu'ils foient d'un bois bien liant & de fil , afin de pouvoir les travailler facilement , comme je l'enfeignerai ci-après. Foye^ ^'^fig- 4 , qui repréfente une plate-bande avec fes deux filets qui y font collés , vue tant de face que de côté. Quand la couleur des frifes eft beaucoup différente de celle des panneaux , il arrive alors que le filet ne fe diftingue pas afîèz de l'une ou fautre couleur, ce qui oblige à mettre un filet double de deux couleurs différentes , lefquelles font oppofition avec le fond de f ouvrage , quoique de différentes couleurs. Fojei la figure J , qui repréfente des filets de cinq efpeces ; favoir , un file: double , coté A B ; m filet triple , dont le milieu eft noir , coté C; un autre filet triple dont le milieu eft blanc , coté D ; un filet triple dont le milieu eft mi- parti blanc & noir , coté E ; enfin une autre efpece de filet triple , dont les trois parties qui le compofent font toutes mi-parties , & en oppofition les unes avec les autres, coté F. Les frifes fe font quelquefois à compartiments , & de bois de différentes cou- leurs, lefquels forment Amplement des cadres, ou bien font remplies, dans toute leur largeur , par des compartiments quelconques. La première manière de faire les frifes , repréfentées ^g. 6 & 7 , eft la plus fimple , & ne demande d'autre foin que de tracer régulièrement les ronds ou les lofanges , foie que ces r.r r ^' ^' ^' dlverfès fortes de Companïmemà. 820 tares fo.enr ftns plates -bandes, comme l^fig. 6, ou avec des plates - bandes , comme h_fig. 7. ' ■ -La féconde manière de remplir I intérieur des frifes , eft beaucoup plus com^ ='°7. Pl>quée que la première , parce que l'efpace de ces dernières étant ordinaire- rnent peu confidérable , les parties qui compofent les compartiments dont ils lont remplis, ne peuvent être que très-petites , ce qui ea rend la parfaite exé- cution trcs-difficile , fur-tout depuis qu'on eft d ufage d'y mettre des grecques ou bâtons rompus , lefquels font compofés d une infinité de morceaux différents , comme on peut le voir dans les figures^, ^ , 10 , 11 <§■ 12. Les grecques ou bâtons rompus , repréfentés dans ces différentes figures , font plus ou moins compofés , en raifon de la largeur des frifes , & fe tracent tous Ce Ja même mamere , comme je vais l'expliquer. Quand on veut tracer de ces fortes d'ornements , il faut d'abord , après avoi^ trace le milieu de la frife, comme la ligne ab,fig. 8 , divifer la largeur de k fr.fe en autant de parties égales que l'exige le compartiment dont on a fait choix, lefquelles fe trouvent au nombre de fept dans cette figure ( les pleins devant ctre égaux aux vuides Ce qui étant fait , on trace autant de lignes parallèles quil y a de points de divifion de donnés ; enfuite on trace ces mêmes efnaces ou divifions perpendiculairement, en obfervant qu'il s'en trouve une au milieu de 1 ouvrage , comme dan. cette figure ; enfuite de quoi on détermine la forme des bâtons rompus , auxquels on fait faire autant de révolutions qu'il eft néceC faire pour remplir la longueur de la frife , en obfervant qu'il fe trouve au bout une révolution entière, ou du moins qui finiffe lieureufement, fans avoir l'aie, d'être coupée , ainfi qu e j'ai eu attention de le faire à la fig. 8 , cote G ■ à celle 9 , cote H ; à celle 10 , cote / ; & à celle i r , cote L. Il reTulte un inconvénient de cette obfervation , qui eft que fi la largeur de la trile eft bornée , fa longueur ne peut l'être qu'après avoir fait la divifion de cette même largeur en autant de parties qu'on le juge à propos, ainlî qu'on. a pu le voir c-defTus. Si , au contraire, c'eft la longueur de la frife qui eft donnée comme il arrive ordinairement, on ne peut en déterminer la largeur qu'après avoir fait choix du compartiment qu'on veut employer, & du nombre de révo- lutions que la moitié de la longueur de la frife pourra contenir, ce qui donnera imnombre de parties quelconques, fur lequel on divifera la moitié de la longueur de la trife , en obfervant toujours de mettre une de ces divifions au milieu de fa ongueur. La divifion de la longueur de la frife étant faite . on aura aifément fa largeur puifque c'eft la divifion déjà faite , répétée autant de fois qu'il eft nécef- laire , félon le compartiment adopté , qui la donne. Ce que je viens de dire touchant la divifion de la figure 8 , eft appliquable à toutes les autres , de telle efpece qu'elles puiffent être ; c'eft pourquoi je n'eiî paderai pas davantage , vu que l'infpeaion feule des figures peut , & même doit lufhre, pour peu qu'on veuille y faire attention. Sjo MENUISIER, m. Part. Se^. 111. Chap. XL _ \a Figure 12 reprékute une efpece de compartiment propre à remplir de* Planche cafés ou parties quarrées féparées les unes des autres , comme il s'en trouve queU quefois , fur-tout dans les angles des frifes , où ils peuvent tenir lieu de rofacel ou autres ornements. En général . toutes les parties qui oompofent les compartiments dont je parle , doivent être ajuftées d'onglets dans tous les angles ; & on doit avoir grand foin qu'elles s'alignent bien les unes avec les autres fur tous les fens , ce qui fait la principale beauté de ces fortes de compartiments , & de tous les autres en général. = Les frifes fe remplifTont aufll avec des compartiments circulaires , tels que les 1^^.^ Xlii^^J i. Planche entrelas ronds ou ovales , f.mples ou doubles , lefquels font toujours entourés de filets , & s'incruftent fur des fonds unis , foit de bois plein , foit de rapport. Foj, les fg. I & 2. _ Quelquefois au lieu d'enttelas ronds , on y met des poftes fimples & dune égale largeur dans tout leur contour, comme lesfig. 3 <& 4 (* )• Je ne m'étendrai pas fur ces fortes de compartiments, vu que , quoique diffé- rents , pour la forme , de ceux dont j'ai parlé ci-delTus , ils font fujcts aux mêmes foins pour les tracer , c'eft-à-dire, qu'il eft nécelTaire qu'ils foient d'une gran- deur relative à celle de la place qu'ils doivent occuper , afin qu'ils ne foient pas coupés par les cadres des frifes. ^ Il y a des occafions où on ne met point de frifes autour des panneaux d Ebe- nifterie , mais Amplement un champ liffe d'une forme contournée, lequel eft féparé du fond du panneau par un feul filet , comme le repréfente hfg. J ; quel- quefois ce champ liffe paffe droit comme à la^^. 6 , & le panneau eft entouré , ou , pour mieux dire, orné d'une plate-bande d'une forme contournée , ce qui fait'un affez bon eff'et , fur-tout quand les contours en font doux & gracieux. Quand les panneaux d'Ebénifterie deviennent très-grands , on y met quelque- fois dans le milieu une plate-bande contournée, ou bien on y met un petit pan- neau féparé du grand par un filet feulement , comme Auxfig. J <5 6 ; ou bien au lieu de plate-bande , on y met une efpece de ruban 7 , ce qui fait très-bien quand il eft placé & ombré à propos. En général , pour que les compartiments circulaires faffent bien , il faut que leurs contours foient doux , coulants , fans aucune efpece de jarets ; c'eft pour- quoi de telle efpece qu'ils foient , il eft bon , après les avoir tracés à la main le plus parfaitement poffible, de les chercher aux traits de compas, tant pour les rendre plus sûrs , que pour les faire plus fymmétriques , afin que le contour d un côté foit parfaitement femblable à celui qui lui eft oppofé. Quand on trace amfi les cintres au compas, il faut avoir grand foin que les centres des plus petites portions de cercles, foient placés fur les rayons des plus grands. Se que les II ell des occafions où les entrelas font tempUs de ro&ces, & les pofles fleuronuées , c'eft à-dire , ornées de feuilles d oruemcnts ; ma.s se n'en pas ici le lieu d'en parler, vu ^ue cette defcription dépend de la féconde efpece d'Ebe'- niflerie, à laquelle je ne pafferai qu'après avoir épuifé tout ce qu'il y a à dire fur celle-ci. centre* Sect. I. §. I. Des â'iverfcs fortes de Comparlunents, 831 centres oppofés faffènt une ligne droite avec leurs points de rencontre oii d 'at- — ~ toucliement ( ce qui eft la même chofè ) , ainfi que je l'ai obfervé aiix^ïV. 5 & (î , Planche fut lefquelles j'ai marqué les différents centres des courbes, ainfi que leurs rayons, que j'ai indiqués par des lignes ponéluées ; de forte que pour peu qu'on veuille faire attention aux diverfes opérations tracées fiir ces figures, on fera en écacde tracer au compas tous les cintres imaginables , fins avoir béfoin d'une explication plus étendue que celle-ci. Voilà, à peu-près , tout ce qu'il eft pofTiblc de dire touchant la théorie des compartiments, fur lefquels je ne m'étendrai pas davantae;c , vu que cette matière eft prefqu'inépuifable, & que le peu que j'en ai dit , quoiqu'on général i peut s'appliquer à tous les cas poffibles. Tout ce que je puis recommander aux Ouvriers , c'cft beaucoup d'exaiSlitude en traçant leurs compartiments , qu'ils tloivent toujours faire en raifon des places , comme je l'ai die plus haut , & que je ne faurois trop le recommander. Ils doivent aufll faire le deifein de leur ouvrage , & le tracer en grand , & même en colorer les maifes principales avant d'en faire les bâtis. Lorfque l'ouvrage doit être revêtu d'ornements de bronze , il faut les faire modeler fur le plan , lorfque c'eft une furface droite , ou bien faire des modèles en relief, pour modeler enfuite les ornements delTus , en fuivant les contours ou les reffiuts de l'ouvrage. Ces précautions font longues & coûteufes, à la vérité, mais aufll font-ce les feules qu'on puiffe prendre pour faire fouvrage dont il eft ici queftion avec toute la perfeilion pofllble : de plus , je l'ai déjà dit , & je le répète encore , cette efpece de Menuiferie n'eft pas faite pour tout le monde ; & je crois qu'en la faifent aufll bien qu'elle peut être , & la vendant ce qu'elle vaut lorfqu'elle eft bien faite , ce feroit un moyen sûr pour retrancher cette branche .du luxe aéluel , ce qui ne feroit aucun tort aux Ouvriers j puif- qu'en leur retranchant une partie de leurs ouvrages , on augmenteroit le prix de ceux qui leur refteroient à faire , ce qui deviendroit égal pour eux ; puifque l'Ouvrier une fois sûr d'être bien payé, s'appliqueroit davantage à fon ouvrage , & deviendroit en peu de temps plus intelligent & plus inventif : de forte que l'Art de l'Ebénifterie , qui femble maintenant réduit à une efpece de routine plus ou moins heureufe , renaîtroit , pour ainfi dire , de fes cendres , & on verroic paroître des ouvrages capables non-feulement d'égaler , mais même de furpaflèc ceux des flecles précédents. Menuisier , 111. Pan. 111. Seâ, G îq %i2 ME NUI S 1ER, m. Pan. SeS. lit Chap. XL §. IL De la manière de découper & d'ajujler les pièces droites f & des Outils qui y font propres. Après avoir traité fommairement des différents compartiments propres à l'Ebénifterie , ( lefquels font à cette efpece de Menuiferie , ce que font les pro- fils & les contours aux autres parties de cet Art déjà décrites) , il s'agit main- tenant de paffèr de la théorie à la pratique , en enfeignant la manière de procéder à l'exécution de ces mêmes compartiments , tant ceux qui font compofés de parties droites , que ceux qui font compofés de parties circulaires , ce qui entrai-" nera après foi le détail de plufieurs Outils nécelTaires à l'exécution de cette partie de l'Ebénifterie , comme je l'ai annoncé ci-devant , 8ii. Les compartiments d'Ebénifierie font , comme on a pu le voir ci-delTus , com- pofés d'une infinité de morceaux de bois de placage de différentes formes & grandeurs ( cependant femblables , comme difent les Ouvriers, chacun à leur chacun ) , c'eft-à-dire , que dans un compartiment compofé de cent morceaux différents, il y en a , par fuppofition, dix d'une forme , fix d'une autre , vingt d'une autre, &c, lefquels doivent être parfaitement égaux entr'eux , foit pour la grandeur , foit pour la direélion des fils , ou pour les nuances des couleurs ,• &c. Avant d'entrer dans ce détail , je vais donner la manière de préparer les filets & de les mettre d'épaiffeur , afin de ne me point répéter lorfque j'enfeignerai la manière de les employer. Les filets dont on fait maintenant ufage , font de deux efpeces ; favoir , ceux d'ofier , qui font les moins bons , & que les Vanniers vendent tout préparés ; & ceux de bois de houx , que les Ebéniftes préparent eux-mêmes , ce qui fe fait de la manière fuivante. On commence par choifir un feuillet de houx , refendu à l'ordinaire des bois de placage , dont le fil fe trouve le plus droit poffible , & qu'on dreffe fur la rive en liaivant toujours le fil du bois ; ce qui étant fait , on le refend au trufquin , par le moyen d'un outil ou entaille nommée bois à refendre. Cette entaille A B, repréfentéej^^. i , n' eft autre chofe qu'un bout de membrure d'environ 3 pouces d'épaiffeur , fur y à (5 pouces de largeur, fur lequel eft fait qn ravalement d'en- viron une ligne & demie d'épaiffeur , ce qui eft fuffifant pour contenir le feuillet qu'on veut refendre. Voje:^ ^"-fig- ^ > cote C. Ce ravalement ne fe fait pas dans toute la longueur de l'entaille; mais on y réferve un talon par le bout fupérieur coté A , contre lequel vient butter le bout du feuillet. La largeur du côté de l'entaille , contre lequel s'appuie le feuillet , eft arbitraire ; il fuffit qu'il foit bien dreffé & exadlemeut parallèle d'un bout à fautre ; parce que s'il arrivoit qu'il ne le fût pas , le filet fe trouveroic" refendu d'inégale largeur , ce qui eft tout naturel , puifque le trufquin D , dont I Sect. I, §. II. Découper êC ajufler les pièces droites , SCc. 833 fouverture eft fixe, ne peut faire que des traits parallèles, ce qui, je crois , — n'a pas befoin de démonflration. Planche Le trufquin dont on fe ferc pour refendre les feuillets , n'cft point difFérent pour la forme , des autres trufquins à longues pointes, fi ce n'eft que la pointe de celui-ci doit être de bon acier trempé , moyennement dur , & aminci (comme difent les Ouvriers ) en Langue de chat , afin qu'elle entre plus aifément dans l'épaiHeur du feuillet, qu'on refend cependant à deux fois; c'eft-à-dire , qu'après avoir donné un trait d'un côté , on le retourne pour en faire autant de l'autre. Quant à la manière de tenir le trufquin & le feuillet fur fentailie , voyez la figure r , dont l'infpecStion feule vaut mieux qu'une longue explication , qui , d'ailleurs , me paroît aflez inutile ici. Quand les filets font ainfi refendus , on les met égaux d'épailTeur avec un outil nommé Tire-filet. Cet outil , repréfenté flg. 3 , 4 5 , eft compofé d'une prin- cipale pièce ou fût EF , au milieu de l'épailfeur & de la longueur duquel eft placé un fer L , difpofé parallèlement à fes faces verticales ; au-deiTus du fût du tire-filet, eft placée une manivelle ou levier, laquelle fert à appuyer le filet contre le fer , comme je le dirai ci-après ; cette manivelle ou levier eft fixée pat un de fes bouts au point a , à une tige b c, fur laquelle elle fe meut à charnière ; & cette même tige b c , entre dans l'épaifleur du fût , dans laquelle elle eft ordi-; nairement attachée à demeure. A l'autre bout du levier , qui eft arrondi en forme de poignée , eft afferabla un petit tenon a , lequel entre d'environ 6 à 8 lignes dans fépaiflèur du defius du fût du tire-filet , afin que lorfqu'on en fait ufage , le levier refte en place. Le deffus du fût du tire- filet doit être ravalé de fépaiffeur des filets dans toute la largeur du fer , moins environ une ligne de chaque côté , qu'il eft nécef- faire qu'il foit enterré , pour qu'il ne fe faffe point d'engorgement. Ce ravalement doit préfenter une furface un peu arrondie fur la largeur de l'outil, & être garni de fer, afin que le frottement continuel des filets qu'on paife deflus n'y fafle pas d'inégalités, ce qu'il faut avoir grand foin d'éviter, parce que le fer de foutil prendroit plus de bois dans des endroits que dans d'autres , ce qui expoferoit les filets à fe couper. Il faut avoir la même attention pour le deffous du levier , qu'il eft auflî bon de garnir de fer , & non de cuivre , parce que celui-ci venant à s'échauffer , s'atta- cheroit au filet , & pourroit le noircir. Le tire-filet fe pofe quelquefois fur l'établi, où on l'arrête avec un ou deux valets ; mais pour Fordinaire on le met dans la prefle de côté , dans laquelle on l'arrête par le moyen de deux tiges /, M, lefquelles font aflèmblées & arrêtées à demeure en deffous du tire-filet. Ces tiges font non-feulement néceffaires pouc arrêter l'outil en place , mais encore pour procurer de la place à la faillie du fer, ainfi qu on peut le voir à la fig. 4 , qui repréfènte le tire-filet vu en coupe aveç jjne partie de l'établi & de la jumelle de la preflTe. I §34 ME NU I S I E R, m. Pan. SeB. lîl Chap, XI. ' Quand le tire-filet fe pofe fur l'établi , les tiges I , M , font fupprimées , Sc Planche on y met un fer qui ne déborde point l'épaiflèur de l'outil en deflbus , ce qui eft niTez incommode , fur-tout quand on veut y donner du fer ; c'eft pourquoi il faut le préférer avec des tiges, tel que je le repréfente ici. J'ai dit plus haut que la tige b c , fig. 3 , à laquelle eft attaché le levier G H , ctoit attachée à demeure dans le fût du tire-filet , parce que c'efl la manière la plus ordinaire de le faire ; cependant je crois qu'on feroit mieux de rendre cette tige mobile dans le, fût de l'outil, dans lequel on l'arrêteroit avec une vis de preffion , ou avec une clef, comme une tige de trufquin; ce qui donneroit le moyen de haufler ou de bailTer le levier félon l'épailfeur qu'on voudroit donner au fîlet , ou telle autre pièce qu'on jugeroit à propos de mettre d'épailTeur par le moyen de cet outil. En faifant la tige h c ainfi mobile , on feroit obligé d'allonger celle de l'autre bouc du levier de d en e, qu'on n'arrcteroit pas en place , vu qu'il eft nécefîàire qu'elle foit mobile à chaque inftant , mais dont on fixeroit la retombée par le moyen d'une vis ou d'une clef placée en deflbus ; & on auroit foin que cette tige d e , fût difpofée de manière qu'elle décrivît un axe pris du centre a du levier , afin de pouvoir hauffer ce dernier autant qu'il feroit nécefîàire. Quand on veut faire ufàge du tire-filet, on prend le manche ou poignée du levier de la main gauche ; puis de la main droite on prend un filet refendu qu'on fait palTer entre foutil & le levier en tirant le filet à foi,& on n'appuie fur le levier qu'autant qu'il, eft néceffaire pour que le fer de l'outil morde fiir le filet , qu'on retourne bout pour bout lorfque le premier bout a été mis d'épaif- feur, ce qu'il eft aifé de connoîcre quand le fer ne mord plus , & que le leviei porte fur le fût de l'outil. Voye^ la fig. y. En mettant les filets d'épailTeur , il faut avoir grand foin de choifir le fil du bois , afin que le fer n'y faffe pas d'éclats , ou du moins ne les écorche pas ; à quoi on remédie en partie , en mettant le fer debout ; ce qui ne difpenfe cepen- dant pas de choifir le fil du bois , puifque cela ne demande qu'un peu d'attention de la part de fOuvrier. Les plates-bandes de fil & autres parties étroites du placage , fe refendent au trufquin, comme les filets; & on fe fert , pour les mettre de largeur, d'une entaille ou bois à mettre de largeur , repréfentée fig. 2 , dans laquelle eft fait un ravalement dont la largeur eft égale à celle que doit avoir le morceau de feuil- let qu'on veut mettre de largeur ; ce qui fait qu'à chaque différente largeur , il faut rélargir ou rétrécir le ravalement de l'entaille , ou en avoir de toutes les largeurs dont on peut avoir befoin , ce qui devient un peu embarraflànt , fur- tout lorfqu'on a un grand nombre de pièces de différentes largeurs. On pourroit remédier à cet inconvénient , en ne faifant pas de ravalement à l'entaille fur la largeur , & en plaçant deifus une règle mobile à peu-près fem- \MÀQ à une parallèle de Graveur, laquelle, par conféquent, ne pourroit fe mouvoii; Sect. I. §. II. Découper ÔC ajujier les pièces droites , SCè. S35' 'mouvoir que parallèlement , & fèroit retenue en place par le moyen d'une vis ; de preflîon ; mais comme cet outil deviendroit un peu compliqué & coûteux, Planche les Ouvriers n'en feroient pas beaucoup d'ufàge , préférant toujours les outils lîmples & qui fe font à peu de frais. De telle manière qu'on falTe ces fortes d'entailles, il faut toujours qu'elles ïbient de bois dur & liant , dont le fil foit bien droit , & même un peu incliné ■du fens dont l'outil fe poufTc, afin d'être moins fujet à s'écorclier, lorfque quand les pièces font tout-à-fait de largeur , le fer du rabot ou de la varlope-onglet porte contre l'entaille , qu'il faut bien fe donner degarde de raboter, parce qu'on en diminueroit la largeur, foit en tout ou en partie, f^oy. Lijig. 1, qui repréfeji* te une entaille à mettre les pièces de largeur , avec la manière d'en faire ufiQ;e; la coupe de cette même entaille , & celle de la pièce NO, repréfentée cote P. S'il arrivoit qu'on eût des pièces longues à ajufter , dont la largeur eût befoin d'être inégale d'un bout à l'autre, on fe ferviroit toujours des mêmes outils, tant pour les refendre que pour les mettre de largeur, en obfervant de faire la joue de l'entaille à refendre , & le ravalement de celle à mettre de largeur, d'une largeur inégale d'un bout à l'autre , & cela en raifon de l'inégalité que les pièces doivent avoir. Quand 1 inégalité des pièces eft un peu confidérable , il faut avoir deux en- tailles à mettre les bois de largeur , dont la pente foit à contre-fens l'une de l'autre, afin de pouvoir recaler les pièces toujours en fuivant le fil du bois, afin qu'il ne s'y falfe point d'éclats , & que le joint foit toujours vif & fin. Quand les pièces font ainfi mifes de largeur, on les coupe à la longueur con- venable , foit quarrément , foit d'onglet, ou telle autre pente qu'il eft nécefiaire , ce qui fe fait avec une fcie à l'ordinaire , après les avoir tracés avec des calibres ou modèles propres à chacun d'eux; enfuite on les recale dans des entailles ou bois à ajufter , félon la pente qu'elles doivent avoir. Les entailles ou bois à ajufter , fig. 6 , j , 8 ê ^ , font des morceaux de bois d'environ 3 pouces d'épaifieur, dans le côté defquels eft pratiquée une rnortaifa où l'on fait entrer le bout du valet qui les tient arrêtés fur l'établi , comme le repréfente la figure 6. Le defllis de ces entailles ou bois à ajufter, eft ravalé d'environ 2 lignes de profondeur , (ce qui eft nécelîàire pour contenir les pièces qu'on veut ajufter ) & cela de diverfes manières , félon les différentes formes que les morceaux doi- vent avoir, foit que cette forme foit quarrée, ou fimplement à angle droit j- ou d'une pente quelconque. Quand les morceaux font d'une forme barlongue , après les avoir mis de largeur, comme je l'ai dit ci-deftùs, on les met dans l'en-, taille R , fig. 7, dont la largeur doit être égale à celle de la pièce dont on veut ajufter le bout , qu'on recale enfuite à bois de bout avec un rabot ou une varlope- onglet, dont le fer eft placé perpendiculairement, & en obfervant de bien appuyer la pièce contre le côté de l'entaille oppofé au rabot, & de ne guère Menuisier. III. Pan. III. Seci. D 10 ■53^ MENUISIER, lit Pan. Sea. lïî. Chap. XL r-^"— 1 prendre de bois à la fois , afin d'éviter les éclats, qui font fort aifés à faire à bois Planche de bout , quelque précaution que l'on prenne. Quand les pièces font d'une forme exaélement quarrée , on les tient un peu plus larges qu'il ne faut, en les mettant de largeur par bandes , ( ce qui eft plu- tôt fait que de le faire une à une ) ; & lorfqu'elles font coupées de longueur le plus jufte poffible , on les ajufte dans les entailles S o\xT , félon leur grandeur, lefquelles entailles font un peu barlongues pour pouvoir contenir la pièce avant qu'elle foit ajuftée. En recalant ces fortes de pièces , un de leurs côtés étant parfaitement dreffe , on commence par finir les deux bois de bout en pouffant fur le côté du bois de fil qui n'a pas été mis de largeur , & qu'on finit le dernier , pour regagner les éclats qui pourroient s'être faits en recalant les bois de bout. Quand les pièces font coupées d'onglet , ou de toute autre pente , on les recale =id'abord d'un bout dans une entaille U , fig. 7, dont la largeur eft toujours égale à celle de la pièce ; enfuite on les coupe de longueur & on les recale dans d'autres entailles X, dont la longueur & la forme font exaélement femblables à celles Je la pièce , foit qu'elle foit coupée parallèle dans fa pente , comme l'entaille X , ou quarrément d'un bout , comme de^^à g, ou en fens contraire , comme de g' à ^ , ce qui eft égal. Si le fîl de la pièce à recaler fe trouvoit en fèns contraire du bois de fil , comme ide L à l,fig. 8 , cote Y , il faudroit alors faire l'entaille à rebours , comme je l'ai obfervé ici , afin que le bois , dont le fens fe trouve alors de z en / , foit toujours coupé à bois de fil. Autant on a de pièces d'une même largeur , & d'une différente forme & lon- |;ueur , autant il faut faire d'entailles dans les bois à ajufter , comme je l'ai repré- fentéfig.^ ; & on ne doit point faire ufage de ces derniers, qu'après avoir efîàyé fes entailles les unes après les autres , & s'être alTuré que toutes les pièces qui ont ■été recalées dedans , fe trouvent avoir bien parfaitement la forme & la grandeur ïiécelTaires pour que le compartiment foit parfaitement bien fait. De quelque forme que foient les pièces à ajufter, on fe fert toujours de la même méthode , du moins pour les parties droites, foit que leurs faces foienc parallèles , comme celles qui compofent l'hexagone fg. 14 ^ ou qu'elles foienc d'une forme irréguliere , comme celles qui compofent la figure 17. Quand on aura des compartiments on les plates-bandes feront coupées par de petites longueurs , comme dans le cas des bâtons rompus ou autres , on collera les filets des deux côtés, comme à la Jig. 13 , après qiïoi on les coupera de longueur à l'ordinaire. Quant aux filets féparés & aux plates-bandes qui font très-étroites , «n ne les coupe pas à la fcie , & on ne les recale pas au rabot dans un bois à ajufter; mais on les coupe & ajufte au cifcau, ou bien au petit couteau de taille Eepréfenté fig, 16. Les grandes pièces de placage fe recalent à l'ordinaire au rabot 8i dans un Sect. I. §. II. Dêcoupêr SC ajufterles pièces droites, SCc. 837 bois à ajufter, repréfenté/"g. ro, 11 & 12, lequel n'eft autre chofc qu'un mor- ■ ceau de bois de IJ à 18 pouces de longueur , fur 2 à 3 pouces de largeur, Se Planche environ un pouce Se demi d epaiffeur. ^''i'' Ce morceau de bois eft ravalé des deux côtés de fon épaiflèur , d'enviror» 314 lignes , ce qui eft plus que nécefTaire pour appuyer contre le morceau de placage qu'on veut recaler , lequel on faic porter contre le talon du bois à ajufter donc les bouts font entaillés en forme de pieds-de-bichc, pour pouvoir tenir en place lorfqu'on en fait ufàge. Les talons des bois à ajufter, font coupés quarréraent d'un côté , & d'onglet ael' autre , comme ceux A , H , C , D ^ 3c on doit obferver que les entailles d'on- glet foient faites à contre-fens l'une de l'autre , pour fervir dans le cas où le fil du bois fe trouveroit difpofé de cette manière , ainfi que je l'ai démontré plus haut , en expliquant la figure 8 de cette Planche. Quand on veut faire ufige des bois à ajufter dont je viens de faire la defcrip- tion , on place dans un des trous de l'établi, une cheville , contre laquelle or» appuie un des bouts du bois à ajufter , qu'on retient en place , appuyant fautre bout contre fa poitrine ; puis on prend de la main gauche la pièce qu'on veut recaler , & on la place fur le bois à ajufter , où on la retient ferme en place contra le talon de ce dernier, puis on la recale avec le rabot qu'on tient de la main droite, jufqu'à ce qu'il porte fur le bois à ajufter, qu'on doit avoir grand foin de ne pas toucher avec le rabot ou la varlope-onglet. Voye:^ la fig. ly, laquelle repré- fente un Ebénifte laifant ufage du bois à ajufter , Se fur l'établi duquel eft placée une entaille ou bois à ajufter , de l'efpece de celle repréfcntée_/zo-. 7 , 8 eb" 9. Les grands bois à ajufter ne fervent que pour les grandes pièces de placage , dont on veut faire les joints , qu'on doit toujours avoir foin de tracer très-juftes fur leur place avant de les recaler dans les bois à ajufter, donc la trop petite largeur n'eft pas fufSfante pour bien diriger le joint d'une pièce d'une certaine grandeur , foit que ce dernier le retourne à angle droit , ou qu'il Ibit d'onglet , ce qui eft égal. J'ai dit plus haut , page 823 , en parlant de la difpoficion des bois de placage , que quand les places à revêtir fe trouvoient barlongues ou oblongues (ce qui eft égal ) , il falloit toujours que les joints diagonaux ou les fils des pièces de rcmpliUàge , tendilTent aux angles de la pièce à revêtir , ce qui donne différentes pentes aux coupes des pièces de rempliffage ; dans ce cas , il faut , lorfqu'on a un certain nombre de pièces d'une coupe femblable , faire des bois à ajufter dont la coupe des talons foie félon les différentes pentes des pièces à ajufter , afin qu'elles portent dans toute la largeur du talon lorfqu'on les recale. Il faut aulTi que la faillie du talon foie dégraiffée en deflbus , afin que la pièce demeure en place , & ne fe relevé pas en deflùs , ce qui arrive quelquefois , fur- tout lorfqu elle eft trop longue pour que l'étendue de la main puiffe la contenir en place. V oyei La fig. 11 , qui repréfente un bois à ajufler vu de côté , & Is \>o\xt de ce même bois coté E j même figure^ 83S 'ME N UJSIER, m. Pan. SeEl. ÎII. Chap. XI. — — D'après ce que je viens de dire touchant la manière de couper & d'ajufter les Planche pièces droites , il eft très-aifé de concevoir que cette partie de l'Ebénifterie , quoi- que la plus fimple en apparence , demande beaucoup de précifion & d'attention de la part de l'Ouvrier , fur-tout quand les compartiments feront compofés de beaucoup de petites parties , lefquelles doivent être toutes coupées & ajuftées avant de les coller, ce qui eft très-difficile à bien faire. Quant aux grandes parties de placage, elles demandent moins de fujétion , parce que non-feulement elles font en moindre nombre, mais encore parce qu'elles s'ajuftent les unes après les autres , & cela à mefure qu'on les colle , comme on le verra ci-après. La difficulté de l'ajuftement des dilïerentes pièces qui compofent les petits compartiments , a fait recourir à divers expédients , tant pour les rendre les plus parfaits pofllbles , que pour en accélérer l'exécution ; les uns ont coupé & ajufté toutes leurs pièces , & les ont collées les unes après les autres , foit que toutes ces mêmes pièces fuffent d'une forme femblable ou non , ce qui rend l'ouvrage aiïèz parfait , mais d'une très-longue & très-difficile exécution. D'autres , pour éviter ces difficultés , ont préféré , fur-tout lorfque les com- partiments offrent des figures régulières , comme des hexagones , des étoiles , de coller les pièces de chacune de ces figures d'abord par parties, puis toutes enfera- ble, de manière qu'elles falfent un tout qu'ils ajoutent enfuite, & qu'ils collent avec d'autres placages (ou qu'ils incruftent en plein bois, ce qui eft égal). Cette dernière manière d'exécuter les petits compartiments , eft la plus prompte & la jjIus commode ; c'eft pourquoi je vais m'en fervir en traitant de la manière d'ajufter les compartiments droits , tant petits que grands , ce que je ferai le plus fuccinélement poflible , me contentant de donner quelques exemples généraux , dont l'application puiffe fe faire à toutes fortes d'ouvrages, le nombre des exem- ples & leurs applications n'étant pas ce qui eft le plus elTentiel, mais bien plutôt la manière d'opérer, £ir-tout quand elle eft applicable à beaucoup de cas , com- me il arrive dans cette partie de la Menuiferie , où , abftraélion faite de la con- noiflànce des bois ou autres matières Se des différents compartiments , toute la théorie de cet Art ne confifte prefque qu'en diverfes manières d'opérer appli- • quées à différents ouvrages ( *). Planche Quand les compartiments font compofés de petites parties dont l'afTemblage forme des figures régulières , comme des hexagones , des étoiles , &c , on les colle les unes avec les autres avant de les plaquer ou de les incrufter , ce qui fe fait de la manière fuivante. {") Ce que j'avance ici femble être contradic- toire avec ce que j'ai dit au commencement de ïTion Onvrpoe, pagi; 705 , où j'ai fait l'énuniéra- tion des différentes connoiifances ncceifaires aux Ebénifles ; cependant pour peu qu'on veuille y faire accenlion, il eff fort aifé de voir que ces riêmes connoiiTances , quoique très-ncceflaires 6c même indifpenfables aux libcniflcs , ne font qu'acceffoiresàlcurs ouvrages,ou ne tiennent pas effentieilement à la pratique de ce qui conffituc ce qu'à proprement parler jOn appelle VArt it Vîùbé- On nijierie, lequel conufle plutôt dans diverfes ma-' nieres d'opérer , que dans des connoiiTances rela. tives foit à la forme , ioit à l'ufage des ouvrages fur lefquels on opère , étant très-indilFérent d'a- julter & d;' plaquer non-feulement des comparti- ments de difFcrentes efpeces, mais encore de Iç faire fur un côté de Bureau , fur la face d'une Commode on de tout autre ouvrage , puifqu'oa 1 fe fert toujours des mêmes moyens pour le faire» du moins à t^ès-peu de chofc près. Seût. I. §.ll. Découper se ajufier les pièces droites, SCc. 839 On commence d'abord par tailler & ajufter toutes ces pièces félon la orandeur Se la forme qui leur eft convenable ; enfuite fi c'efl , par exemple , un hexagone , comme la figure i , on colle enfemble les deux parties yi, ^ ffig- 2 , & on les laiJle fécher, après quoi on y ajufte la troifieme pièce C, qu'on colle enfuite , & qu'on laifTe pareillement fécher. Quand les trois pièces qui compofent l'hexagone , font ainfi collées, on recale ce dernier dans un bois à ajufter , afin de lui donner une forme la plus parfaite poflîble , fuppofé que les premiers morceaux qu'on a ajuftés, laiifent du bois de trop , ce qu'il faut éviter le plus qu'il fera poflîble. En recalant les hexagones, ou toute autre figure alTimblée , il faudra bien prendre garde aux pièces qui excédent plus les unes que les autres , pour y ôter autant de bois qu'il fera néceffaire , afin que les angles de la figure fe trouvent très-exadement à la rencontre des joints de chaque pièce , comme je l'ai obfervé aux fig. I & 2. Plus les figures font compliquées , & plus leur exécution devient difficile j- quoiqu'on fe ferve toujours des mêmes moyens pour les fiire ; les étoiles, par exemple, font de ce nombre, parce que non-feulement elles font corapofées de beaucoup de pièces , mais encore parce qu'il n'eft pas poflîble d'y retoucher lorfqu'elles font une fois collées toutes enfemble, ce qui demande beaucoup da précifion dans l'ajuftement de ces mêmes pièces. Les étoiles comme celle repréfentée dans la figure 3 , font celles dont la forme eft la plus fimple , puifque celle-ci n'a que quatre pointes D , E , F, G i lefquelles font compolées chacune de deux morceaux , & doivent être à égale diftance les unes des autres , de manière que la diftance D E, foit égale à celle E F , & celle F G égale à celle DG , &c , ce qui eft général pour toutes les étoiles d'une forme régulière. Quel que foit le nombre des pointes des étoiles , elles fe font toujours de la même manière , c'eft-à-dire , qu'après avoir préparé & ajufté les morceaux dons elles doivent être compofées , comme ceux H, I, L, M, fig. 4 , on les colle enfemble deux à deux , comme ceux A'', O , même figure ; puis quand la colle eft feche , on les recala & ajufte de nouveau , fuppofé que cela foit néceffaire ; enfuite on colle ces mêmes pointes deux à deux ( ou trois à trois , fi l'étoile eft compofée de fix pointes ) , comme celles P ,(?,/%. j , & on y retouche encore s'il eft néceffaire ; après quoi on achevé l'étoile en joignant les parties P, Ç> , enfemble. De quelque forme que foient les différents compartiments , on fe ferc toujours de la même méthode pour les exécuter , c'eft-à-dire, qu'on forme , autant qu'il eft poffible, des parties régulières compofées de plufieurs morceaux joints 8c collés enfemble , comme je viens de l'enfeigner ci-deffus ; ce qui étant fait, on les plaque à côté les unes des autres , comme à la fig. 6 , en obfervant qu'elles préfentent , par leurs affemblages , des lignes droites , foit horifontalemant , ou Menuisier, III. Part, III. Seci. E 10 S40 ME NUIS! E R, III. Pan. SeB. III. Chap. XL • i ^ perpendiculaires ou diagonales , ce qui eft égal , pourvu qu'elles exiflent , Sc Planche que par conféquent elles puilTent fervir à diriger le compartiment , lequel peuc alors fe difpofer par bandes droites fur l'un ou l'autre fens , comme on peu: le remarquer dans cette figure. Quand les compartiments feront comme la figure 7 , d'une nature à ne pou- voir donner aucune des lignes droites que je fouhaiterois du moins fans être interrompues , il faut , avant de placer les pièces de rempliflage , tracer fur les plates-bandes qui l'entourent , toutes les lignes que forment ces compartiments ; enfuite les pièces étant toutes ajuftées , on les mettra en place parties par parties & on placera une règle bien droite d'une ligne à l'autre, comme de Rà S, 6c de Rï T fOude Ra U, félon les différentes pièces , afin de fe rendre compte fi tous leurs joints s'alignent parfaitement ; enfuite de quoi on en colle une partie , qu'on lailfe fécher avant d'ajufter les autres. Quand les remplifîàges forment de grandes parties , com.me la Jig. 8 , on com- mence par ajufter la pièce A du milieu ,Jig. 9 , à laquelle on ajufte & on colle celles B ,C, dont onrecaleles extrémités a,l> , quand la colle eft feche ; enfuite on ajufte l'hexagone D ; & lorfqu'il eft collé , on y joint les deux autres pièces E , F: le refte à l'ordinaire. Le rempliffage des grands compartiments , comme ceux de l'intérieur des figures de la Planciie aSy , ne s'ajuftent pas d'avance comme ceux dont je viens de parler; au contraire on ne les coupe fur la place qu'après que les frifes qui les entourent font collées , & cela morceau à morceau, que l'on colle à raefure qu'ils font ajuftés , & de la manière qui convient à chaque efpece d'ouvrage , comme je l'expliquerai ci-après. Les pièces de remplifllige dont je viens de parler ci-de/Fus , non- feulement s'appliquent fur un fond de bois uni , mais encore s'incruftent dans de la Me- nuiferie apparente , avec laquelle elles affleurent , ce qui ne fait rien à la manière de les préparer, laquelle eft toujours la même. Quant à la manière de préparer les bâtis pour recevoir les incruftations, elle eft très-fimple , puifqu'il ne s'agit que de creufer dans ces mêmes bâtis la place néceffàire pour pouvoir contenir les pièces à incrufter, qui, lorfqu'elles font compofées de parties droites, comme dans les figures de cette Planche , font toujours très-faciles à faire , puif- qu'elles peuvent être creufées, ou du moins commencées avec un bouvet, 8c enfuite finies au cifeau & à la guimbarde , comme les places cotées G, G, G , jîg. 10, ce qui fait qu'elles font toujours parfaitement droites, d'une largeur & d'une profondeur égales par-tout : au défait du bouvet , on peut fe fervir d'un trufquin à fcie, lequel trace des traits de la profondeur dont on a befoin, & toujours parallèles entr'eux. Quand les places deftinées à recevoir des incruftations , quoique compofées de lignes droites , ne préfenteront pas de côtés parallèles entr'eux où on puiflà fe fervir de bouve: ou de trufquin à fcie , comme , par exemple , l'étoile / /, Sect. I. §. II. Découper 5C ajufier les pièces droites, SCc. 841 fig. 10, on les découpe & on les fouille au cifeau , puis on les finit à la guim- barde , ce qui eft la manière la plus ordinaire de faire ces fortes d'incruftations ; cependant quelque foin qu'on prenne en les découpant au cifeau , il efl: affez difficile de le faire fins aucun éclat, & bien droits fur toute la longueur. C'eft pourquoi je crois qu'il vaudroit mieux , fur-tout quand les parties à creufer font d'une certaine grandeur , & faites dans du bois difficile à travailler , il vaudroit mieux , dis-je , en découper les côtés avec une fcie à dégager, qu'on feroit pafTer contre une règle de fer , ou du moins de bois très-dur , appliquée fur l'ouvrage le long du trait de la partie à découper , ce qui eft très-facile à faire, & rendroit l'ouvrage beaucoup plus parfait, qu'en fuivant la manière ordinaire. Quand les côtés des parties propres à recevoir les incruftations , font ainfi découpées à la fcie, on acheva de les creufer au cifeau & à la guimbarde, comme le reprélènte la figure 12. La guimbarde, 77V. ir 13 , n'eft autre chofe qu'un morceau de bois , de 2 à 3 pouces de largeur , fur un pouce ou deux d'épailfeur, félon fa longueur (qui varie depuis un pied jufqu à un pied & demi , félon les différents befoins ) , au milieu duquel eft percé un trou un peu en pente , & d'une grandeur capable de contenir un fer a, jÇg-. 13 , de 3 à 4 lignes d'épaifi:'eur , & un coin i , pouc le retenir en place. Ce fer doit être bretté comme ceux des rabots , & excéder le deflxJUS de Ion fût de la profondeur du ravalement qu'on veut taire. Cet outil fe tient à deux mains , & on le fait aller en le poulTànt devant foi, comme de c ad, en obfervant , lorfqu'on commence à s'en fervir, de le fbulager un peu du derrière , afin que le fer ne prenne de bois qu'autant qu'on le juge à propos. Comme il y a de très-petites parties à fouiller , on peut fe paffer de guimbarde pour le faire ; ou fi on juge à propos de s'en fervir , on en fait de petites , lefquelles peuvent paffer par-tout , Se font d'un ufige plus facile que celle dont je viens de faire la defcription ; mais de quelque forme & grandeur qu'elles foient , il faut toujours que leur fer foit bretté , afin que le fond de l'ou- vrage fbit un peu rude , pour qu'il prenne mieux la colle. Après avoir donné la manière de découper Si. d'ajufter les pièces droites , ja vais maintenant traiter de celles qui font circulaires , ou du moins fufceptibles de contours , lefquelles alors ne peuvent pas être ajuftées au rabot comme les pre- mières, ce qui en rend la parfaite exécution un peu plus difficile, comme on va le voir ci-après. Planche 390, I S4î ME NVISÎEKjn. 'Pan. Sec! ÎII. Chap. XL §. III. Di la manière de découper les pièces cintrées , & des O utils qui y Jonc propres. m ■» Les pièces de placage contournées fe découpent à la fcie , 8c s'incruftetit Planche pour l'ordinaire avec le couteau de taille & autres outils , dont je donnerai la idefcription en parlant de l'incruftation de ces pièces. Deux fortes d'outils font néceflâires pour découper les pièces de placage ; ^voir , l'âne ou étau , & la fcie à découper, autrement dit la jcie de marqueterie. ïJine,fig. I, 2, 3 , 6 eir 51, eft une efpece de petit banc fupporté par trois pieds de IJ à 1(5 pouces de haut , lequel banc a environ a pieds & demi de lon- gueur, fur un pied de largeur , dans fa partie la plus large. Dans le deffus de ce banc , à environ 6 pouces du bout , efl: placé l'étau de bois B ,fig.i, lequel n'eft autre chofe qu'un morceau de bois de 3 à 4 pouces de largeur, fur 2 pouces d'épailTeur, & 12 à 15 pouces de hauteur, pris du deffiis du banc , fur lequel il eft alTemblé à tenon double , & y eft arrêté par le moyen d'un coin , comme les fig. 2 (5 3 , & les 7 (ir 8, qui le repréfentenc vu de face & de côté le double plus grand qu'aux élévations/^, i , 2 3. L'étau eft refendu fur fon épailTeur par une rainure d'environ 3^4 lignes de largeur au plus , & on a foin qu'elle foie un peu plus étroite du haut que du bas , afin qu'elle ferre mieux du bout. Cette rainure doit s'étendre jufqu'à 2 pouces de l'arrafement de l'étau ; & on doit obferver que la joue ou mord qui eft du côté de l'Ouvrier , foit plus mince que l'autre , afin qu'elle ploie plus facilement lorfqu'on veut en faire ufage ; l'autre joue de l'étau , c'eft-à-dire , la plus épaiffè , eft appuyée contre un arc-boutant C,fig. 2 , lequel y eft alTemblé à tenon & mortaife , ainfi que dans le deffus du banc ; quelquefois on ne fait pas de mor- taife dans la joue de l'étau , mais fimplement une entaille de 6 à 8 lignes de pro- fondeur , venant à rien du bas , dans laquelle l'arc-boutant entre tout en vie , comme je l'ai obfervé aux Jig. 7 (§ 8. Dans le milieu du delTus du banc, eft placé un petit montant A ,jig. 2 , à environ J pouces du devant de l'étau , au haut duquel eft affemblé à charnière , un levier D , dont l'autre extrémité vient butter contre le haut du mord du devant de fétau , pour le faire ployer , & par ce moyen retenir folidement les feuilles qu'on met dedans pour les décou- per. Le levier entre en enfourchement fur le mord de l'étau , afin qu'il ne s'écarte ni à droite ni à gauche , & il appuie deffus par le moyen d'une corde qui y eft attachée aux points a, a,fig.l & 2, laquelle , paffant au travers du banc , vient s'attacher à la marche F G , fur laquelle l'Ouvrier pofe le pied pour ferrer le mord de l'étau , comme je l'expliquerai en parlant de la manière de découper. Foyei la fig. l , qui repréfente l'âne vu du côté du levier, & les fig. 4 5 , qui repréfentent ce même levier vu de face & de côté. Le devant du banc , du côté de l'étau , doit avoir un rebord pour retenir les petites Planche 2p 1. Sect. I. §. III. Découper les pièces cintrées , âCc. 843 petites parties qu'on pofe delTus ; & le delfus de ce même banc doit Être chan- tourné en creux vers le milieu, afin que l'Ouvrier puiffe être affis commodé- ment deiïus. On fe fert encore d'une autre efpece d'âne ou étau, lequel diffère de celui dont'je viens de parler , en ce qu'il eft placé fur une table de id à 18 pouces de haut , dont le milieu eft évuidé pour £iire place à l'Ouvrier qui travaille affis fur un tabouret , & eft par conféquent entouré des trois côtés de la table fur laquelle il pofe fon ouvrage de droite & de gauche. Comme ces fortes d'ânes font peu en ufage à préfent (quoique très-commodes quand on a beaucoup de pièces à découper ) , je me fuis contenté d'en faire une courte defcription , fans en donner de figures , qui ne m'ont pas paru fort néceffaires, vu que la partie effentielle de cet âne , c'eft-â-dire , le mord , eft conftruit de la même manière que celui dont je viens de faire la defcripcion. Il y a d'autres petits étaux ou ânes qu'on arrête fur l'établi avec le valet , lef- quels ne différent de celui-ci , qu'en ce qu'ils font plus petits , qu'ils n'ont pas de pieds , & que la planche dans laquelle l'étau eft affemblé , eft coupée au nud du petit montant qui porte le levier; au refte on fait ufage de cet âne de la même manière que de celui à pieds , c'eft-à-dire, qu'on ferre toujours le mord de i'étau par le moyen de la corde a a , dans laquelle on paffe le pied , & on y fub- ftitue un petit patin à la place de la marche. Il eft encore une autre efpece d'étau ou âne de bois , /î»-. lo , ii 13 , dont les mords ou mâchoires ouvrent parallèlement par le moyen d'une vis de bois arrêtée par le collet dans une des mâchoires, de forte qu'elle tient avec cette dernière , foit qu'on ouvre ou qu'on ferme l'étau. Les deux mords ou mâchoires de cet étau font d'une forme égale à l'extérieur ; celui Hyfig.il, dans lequel la vis eft taraudée , eft affemblé à tenon & mor- taife dans le plateau L M , Se l'autre I, eft affemblé à queue dans la pièce à couUffe de ce même plateau, laquelle eft affcmblée à rainure & languette dans l'épaiffeur de ce dernier, & paffe en deffous du mord H. Voye^ la fig. 10 , nul r»préfente le bout de l'étau vu du côté du mord /; ôchfig.iz, qui repré- fente ce même mord avec la pièce à couliffe , avec laquelle il eft affemblé. Foy. les fier 1 3 <& 14 , qui repréfentent l'une l'étau tout affemblé & vu en deffus , & l'autre le plateau tout nud & prêt à recevoir les mords & la pièce à couliffe. Cet étau s'arrête fur l'établi par le moyen d'un valet , & eft très-commode non-feulement pour découper & limer les pièces, mais pour coller de petites parties qui ne pourroient pas réfifter à la fecouffe du valet. Quant à la manière dont la vis de cet étau eft retenue dans la mâchoire / , je n'en parlerai pas ic, parce que c'eft la même chofe qu'à celle de la boîte à rappel de l'établi à f Alle- mande, dont j'ai fait la defcription au commencement de cette 7mw , page. 803. ,. . La fcie de marqueterie eft un outil des plus néceffaires & des plus compli- p^^^^^^ Menuisier, III. Pan. 111. Secl. F 10 Planché S44 MENUISIER, III. Pan. S al. lîl. Chap. XL ■ qués dont fe fervent les Ebéniftes ; elle eft coir.pofée d'un chaffis de fer J B C D,fig. 4 , de deux mords , F , qui fervent à tenir la lame de la fcie , & d'un manche ou poignée G H , dont la partie H fe monte à vis pour bander la fcie autant qu'il eft néceflàire. Le chaffis d'une fcie à découper , efl fait de fer plat, pofé fur le champ , de <5 à 8 lignes de largeur, fur une ligne & demie d'épaiffeur au plus; la partie fupérieure de ce chaffis eftapplatie par le bout, & eft percée d'un trou quarré dans lequel paffe le bout du mord£', qui eft taraudé pour recevoir un écrou qui l'arrête à demeure fur le chaffis , dans lequel il ne peut pas tourner , puifque le trou du haut du chaffis eft quarré , & le bout du mord d'une même forme. Voye^ la Fig. I , qui repréfen^e le chaffis de la fcie vu en deffus avec fon écrou, fig- S- ^ Fig- 2 , qui repréfente cette même fcie coupée dans toute fa longueur ; & la Fig. 3 , qui la repréfente vue de face. La partie inférieure du chaffis, fig. 4 , eft terminée par une douille 7, qui eft percée d'un trou quarré en deffus, femblable à celui du haut , & dans laquelle douille la partie G dumanche, eftarrêtée à demture. Fojeiles figures 6 ô 'j , cpi repréfentent le bout de la branche du chaffis, & fa douille vue en coupe, 6c cette même douille vue en deffous. Les mords E, F , fig. 4., font tous deux compofés de deux parties chacun , lefquelles fe féparent à moitié de l'épaiffeur du mord, & font retenues enfemble par le moyen d'une vis , comme on peut le voir aux fig. 2,3 dr 4 ; de forte qu'en ferrant ces vis on arrête en place la lame de la fcie ai, fig. 3 ê 4 , laquelle, à caufe de fon peu de largeur, ne peut l'être autrement. Les deux mords font , comme je viens de le dire , femblables à l'extérieur , c'eft à dire, en dedans de la fcie ; mais ils différent en ce que celui du haut a une tige très-courte , au lieu que celui du bas en a une qui paffe au travers de la longueur du manche, avec la partie inférieure duquel il s'arrête par le moyen d'un écrou : à cette différence de longueur près , ils font parfaitement égaux , ayant tous deux une tige quarrée pour empêcher qu'ils ne tournent tant dans le manche que dans le haut du chaffis , laquelle tige eft taraudée également à tous les deux, comme on peut le voir à Lûg. 2 & à la^^, 13 , qui repréfentent le mord du bas dans toute fa longueur , avec la forme totale du manche , indiquée feulement par un trait. L'intérieur des mords doit être taillé comme une lime , pour pouvoir mieux retenir la feuille de la fcie ; & il eft bon que la partie mobile du mord entre en entaille dans le bas de l'autre , afin de n'être pas fujette à tourner lorfqu'on vient àferrerlavis.Fojvq les figures 8, (5 qui repréfentent un mord grand comme l'exécution , la partie mobile de ce mord vue en dedans , & la vis pro- pre a les ferrer tous deux. Le manche d'une fcie à découper eft , comme je l'ai die plus haut, compofé de deux parties ; l'une G ,fig. 2, qui eft fixe & adhérente au chaffis Sect. I. §. m. Découper les pièces cintrées , ÔCc. 84; de fer; & Fautre H 2, 4 ir, qui eftraobile, & entre dans la pre- miere , laquelle eft creufée en dedans pour recevoir la partie quarrée de la tige PtANCHE du mord , & la tige ou goujon de la partie mobile du manche. Cette dernière , cote II,fig. 2. & II, auffi percée dans toute fi longueur, pour laiffer pafTer la vis du mord, qui s'y arrête par le moyen d'un écrou c, fig. 11 p , de manière qu'en tournant la partie If, fig. a (g- n , on fait hau/fer ou bai/fer le mord inférieur de la fcie , qu'on tend ou détend par ce moyen , comme on le juge à propos. Les Menuifîers-Ebéniftes ont des fcies à découper de différentes grandeurs , ■félon les ouvrages qu'ils ont à faire ; celle qui eft repréfentée ici eft de la gran- deur la plus ordinaire ; mais qu'elles foient grandes ou petites, leurs formes & conftruaion font toujours les mêmes ; & il faut toujours que les branches hori- fontales de leurs chaffis ouvrent un peu du devant, afin que quand on tend la fcie , elles ne rentrent pas en dedans. La lame de la fcie à découper , telle qu'elle eft repréfentée ici , a les dents fur la même l.gne que le chaffis , comme aux fcies ordinaires ; cependant les Ebé- mftes la difpofent autrement , c'eft-à-dire , qu'au lieu de voir le côté de la lame comme dans la figure 4 , ce font les dents qui fe trouvent en face , de manière qu elle fcie horifontalement , & que le chaffis foit toujours perpendiculaire , du moins a peu de chofe près , afin de leur foulager la main , & que le trait qu'ils fcienc foit toujours parallèle avec le deffus du mord de l'étau (*). Les lames des fcies à découper, font faites avec des morceaux de relForts de montres refendus à diiférentes largeurs , depuis une demi-ligne , y compris la denture , jufqu'àune ligne & demie tout au plus, fur j à pouces de longueur , ce qui fiit que les plus grandes fcies à découper n'ont guère plus de 6 pouces de diftancs entre leurs branches, qu'on prolonge en longueur autant qu'on le juge à propos , c'eft-h-dire , autant qu'on peut le faire , en leur confervant la folidité convenable. La denture de ces fortes de fcies eft très-fine, prefque droite, comme celle des fcies à prefles , & cela pour qu'elle ne s'émoufte pas aifément. Quant à la manière de faire ufage de la fcie à découper & de l'âna , elle eft très-aifée, parce qu'après avoir tracé la forme des pièces, on s'affied à califourchon ' fur le banc de l'âne , puis on prend la pièce à découper de la main gauche , & on la met dans l'étau qu'on ferre , en appuyant le pied fur la marche du bas ; & on a foin que ce qui doit fervir , foit en contre-bas du trait , qu'on approche'le plus près qu'il eft poiTible du deffus des mâchoires de l'étau ; enfuite on prend la fcie à découper de la main droite, & on fcie la pièce, qu'on hauft-e ou bai/fe de k main gauche , félon que fexigent les différents contours ; il faut auffi, lorfqu'on fcie les pièces , hauffer ou baiifer la fcie félon qu'on eft en deffus ou en de/Tous foi/ufce dlTalic'^ ' ! Ebénirie,; ce qui me fait croira r.-- a ifLdlLS.-'r . '.'S '^='■7"" 'î™ derniers pourroient s'en fervir de lune & la lame d .porcc a 1 ordma.re , c'eft-à-d,re , l'autre manière , 3c cela en raifon des différent; comme elle eft reprcfentée fe 4 ce qui leur eft , ouvrages qu'ils ont à faire, oilcnt-ils , plus facile que 11 elle etoïc difgpfée à J ° ^ ( MENUISIER, III. Part. SeB. III Chap. XI. du trait , afin de refendre les pièces un peu hors d'équerre en deffous, fur-touC PWNCHE lorfqu'elles font fûtes pour Être incruftées , parce qu'elles ont plus d'entrée , & ^9^- qu'elles joignent mieux que fi elles étoient refendues d'équerre. Foyei la Fleure 14 , qui repréfente un Ouvrier occupé à découper une pièce , & placé fur l'âne félon la méthode ordinaire. Il y a des Menuifiers-Ebéniftes qui , pour avoir plutôt fait , ne fe mettent pas à califourchon fur l'âne , mais qui ne font que s'y alTeoir de côté , ce qui les oblige d'en placer l'étau obliquement , pour pouvoir travailler. Cette méthode eft pexi commode , vu qu'ils font toujours dans une fituation contrainte ; c' eft pourquoi on doit en faire peu d'ufage. Avant de découper les pièces contournées , il faut d'abord les tracer félon le deffin de l'ouvrage ; quelquefois on colle le deffin deffus , afin d'en mieux fuivre les contours, puis on les découpe comme je viens de le dire ci-deffus , en obfer- vant de fuivrê ces contours avec toute la précifion poffible , en commençant toujours de droite à gauche , & en faifant en forte de ne pas retirer la fcie que toute la pièce ne foit chantournée , du moins autant qu'il fera polTible. Quand une pièce eft évuidée dans le milieu , on y perce un trou pour paffer la fcie qu'on démonte de dans le mors , foit du haut_, foit du bas , & qu'on retend enfulte. Quand la diftance qui eft entre le dehors & le djd.ins d'une pièce , n eft pas confidérable , les Menuifiers-Ebéniftes ne fe donnent pas la peine de démonter kurs fcies; mais après en avoir fait le contour extérieur , ils paiï"ent au travers de îa partie' pleine en fuivant le fil du bois ; par ce moyen ils évuident le dedans fans quitter la fcie , ce qui n'eft fujet à d'autre inconvénient qu'à affoiblir un peu la pièce ; car le joint ne paroît pas lorfqu'elle eft collée. _ (-;g je ^iens de dire touchant la manière de découper les pièces cintrées , "pTTnche renferme à peu-près toute la théorie de cette partie de l'Ebénifterie ; cependant quand la forme des pièces eft régulière , comme des ronds parfaits , des arcs de cercles , &c, il me femble que la méthode de les découper à la fcie n'eft pas aiïbz parfaite, parce que quelquadrcitement qu'elles foient refendues, il n'eft guère poffible qu'il ne s'y rencontre quelques jarrets, lefqucls feroient moins • dans !<=■ cas de toutes pièces cintrées d'une forme circulaire , on feroit très-bien appare'nts dans des pièces d'une forme irréguliere ; c'eft pourquoi je crois que de ne pas fe fervir de fcie, mais au contraire d'un trufquin ou compas à verge , fig 1&2, dans la tête duquel on place une lame femblable à celle d'un couteau de taille, ou bien une petite fcie , avec quoi on découpe les pièces beaucoup plus régulièrement qu'avec un couteau de taille , vu que le compas à verge une fois ajufté, toutes les pièces découpées avec doivent être toutes parfaitement femblables Se fans aucuns jarrets. Les compas à verges peuvent être faits en bois, comme hs flg. I , i S 3 , ou bien en fer , comme les fig. 4 <& J , fur-tout quand ils font deftinés à découper de Sect. I. §. m. Découper les pièces cintrées , ôCc. §47 de petites parties ; dans l'un ou l'autre cas, ils font toujours compofés d'une tige ■■ ' AB,fig. I, au bout de laquelle eft pratiquée une lumière pour y placer un fer Planche quelconque , qu'on y arrête par le moyen d'un coin , comme dans cette figure , ''^ ou bien avec une vis de preffion , comme à la Jîg. J , ce qui vaut mieux qu'ua coin , à la vérité , mais aufll ce qui n'eft pratiquable que quand cet outil eft de fer ou de cuivre. La tige d'un compas à verge pafTe dans une tête ou boîte C, fig. i , armée d'une pointe en deflbus, & qu'on fixe fur la tige par le moyen d'une vis de preffion D , ce qui vaut mieux que d'y mettre une clef , comme font les Menui- lîers de bâtiment , parce que les coups qu'on eft obligé de frapper fur la clef pour la ferrer, dérangent toujours un peu la boîte de place , Ce qu'il faut évitera De plus , pour la rendre plus folide & éloigner toute efpece d'ébranlements , il eft bon de faire le trou ou mortaife de la boîte ,fig. 3 , & par conféquent la tige , plus étroite du bas que du haut , afin qu'étant prelTée par la vis , la tige joigne toujours parfaitement dedans , fur-tout par les côtés. Aux compas à verge de fer , la vis de la tête peut le placer fur l'angle , comme à la fig. 4 , ce qui eft plus folide que de la placer par-delTus ou par le côté, parce que la preffion de la vis fe fait des quatre côtés de la tige , par le moyen d'un couffinet placé dans l'intérieur de la boîte , fur lequel fe fait la preffion de la vis. Quant à la manière de faire ufàge des trulquins à verge , elle eft très-facile ; car il ne s'agit que de placer la pointe de la boîte au centre de la partie à décou- per , & d'éloigner la tête de la tige jufqu'au cintre donné , comme àe. E 3. F , Jig, 6 & 10 ; enfuite après avoir affiiré la boîte , on la prend de la main gauche qu'on appuie deffijs , pour qu'elle ne forte pas du point de centre , & de la main droite on fait mouvoir la tête du trufquin jufqu'à ce que la pièce foit découpée. Les trufquins à verge font non-feulement propres à découper les pièces de placage , mais encore à découper les parties de Menuiferie , foit pleines ou pla- quées , pour y faire des incruftations , qui ne fe découpent ordinairement qu'avec le couteau de taille ,fig. 11 (& 12 , ce qui eft fujet à beaucoup de difficultés,' parce qu'il n'eft guère poffible qu'avec ce couteau on lliive parfaitement un contour d'une certaine longueur fans y faire des jarrets , outre que l'inégalité des fils des bois entraîne prefque toujours le couteau , quelque foin qu'on puilîe prendre pour l'empêcher de tourner ; c'eft pourquoi il ne faut avoir aucun égard à l'ancienneté de l'ufage , & ne fe fervir du couteau de taille pour les incrufta- tions , qu'autant qu'on ne pourra pas fe fervir du compas à verge. S'il arrivoit qu'en fe fervant de ce compas , on craignît que la pointe de la boîte ne fît un trou à la place du centre , on pourroit coller fur l'ouvrage un petit morceau de bois mince , qui recevroit la pointe de cette boîte , ce qui levé-; roit toute efpece de difficultés , excepté celle du plus de temps ; car je ne fau- Menuisier , III. Parc. III. Se&. G 10 S48 MENUISIER, m. Pan. -Secl III. Chap. XI. ==» rois difconvenir que l'uiàge d'un compas à verge en emploie davantage que ne ANCHE fait le couteau de taille , fur-tout quand un cintre eft compofé de plufieurs arcs de cercles qui ont tous différents centres ; mais cet emploi de temps doit être compté pour très-peu de cliofe , fur-tout dans le cas de l'efpece de Menuiferie dont il s'agit maintenant, laquelle ne fauroit être faite avec trop de foin & d» précifion. On met dans le compas à verge non-feulement des efpeces de lames , comme ^^fg- 7 > encore des fcies, des limes , comme les fig.?^&(), afin d'agrandir au befoin une partie creufe qui fe trouveroit trop étroite , ce qu'on ne fauroit mieux faire que de cette manière , qui eft, je crois , la plus parfaite poffible, tant pour couper le bois franc & net, que pour rendre les parties cintrées exac- tement parallèles entr'elles. Le couteau de taille repréfenté fig.ii & xi, ne diffère du petit couteau de taille dont j'ai parlé page 385 , que par la longueur & la forme de fon manche , lequel a environ 18 pouces de long ; de manière que quand on en fait ufage , on le prend des deux mains , un peu au-deffus du fer , & on pofe le bout du man- che fur fon épaule pour fe donner un point d'appui , d'après lequel on dirige le manche du couteau qu'on enfonce dans le bois en le tenant un peu penché , & en le tirant à foi. Le fond des places propres à recevoir les pièces circulaires en incruftation s'évuide de la même manière que pour les pièces droites, c'eft-à-dire , qu'après les avoir découpées & fouillées au cifeau , on les finit à la guimbarde , du moins autant que cela peut fe faire ; enfuite on colle les pièces à incrufter , tant droites que cintrées, comme je fenfeignerai après avoir traité de k manière de plaquer, en commençant par les ouvrages les plus fimples , pour parvenir , par gradation , à ceux qui font les plus compliqués , comme je l'ai toujours obfervé dans le courant de cet Ouvrage. Section Seconde. De la manière de coller & plaquer la Marqueterie. - Quand les différentes pièces de placage font difpofées comme je l'ai enfeigné Planche ci-delTus, il s'agit de les coller à leur place, ce que les Ebéniftes appellent 354< plaquer , opération à laquelle ils apportent beaucoup de foin , parce que c'eft de fon plus ou moins de perfeftion que dépend toute la folidité de leurs ouvrages. Avant de donner la manière de plaquer, je vais faire le détail des outils pro- pres au placage , comme les marteaux à plaquer , le fer à chauffer , & les preffes amam,&c, afin que cette connoiffance une fois acquife, facilite l'intelligence de ce que j'aurai à dire en parlant des différents placages. Le marteau à plaquer des Ebéniftes , repréfenté jf^. 3 (S- 4 , ne diffère de celui des autres Menuifiers , que par la forme large & applatie de fa pane , laquelle eft Sect. il Manière de coller SC plaquer la Marqueterie. 849 réduite à une ligne & demie d'épaiffeur, fur a pouces & demi à 3 pouces de . largeur, laquelle largeur n exifte que fur environ un pouce depuis l'extrémité Planche de la pane , & vient à rien regagner le corps du marteau , comme on peut le voir à hfg. 4. Il y a deux fortes de marteaux à plaquer, l'un 4, qui a l'extrémité de la pane droite, & qui fert à plaquer l'ouvrage droit, c'eft-à-dire, dont la furfaca eft plane & unie ; l'autre ,fg. 5 , dont la pane eft cintrée , & qui fert à plaquer 1 ouvrage dont la furface eft creufe. Le fer à chauffer, repréfenté 8 (5p, eft un morceau de fer de 15 à 18 pouces de long, garni d'un manche à l'une de fes extrémités, & dont l'autre bout forme une malfe d'environ p lignes d'épaifl-eur, fur 2 pouces de largeur au plus , & environ 6 pouces de longueur , laquelle vient en fe rétréci/Tant par le bout , comme on peut le voir à hfig. 8. La maffe du fer & fa tige , ne forment pas une ligne droite en delTous ; mais cette dernière eft recourbée , afin qu'en pafïïant la maffe du fer fur l'ouvrage , on puiffe la tenir commodément, foit par le manche ou par le milieu de la tige , comme le font quelques Ebéniftes , en prenant la précaution de l'envelopper d'un linge ou avec une poignée de boîs nommée moufle, faite de deux pièces creufées dans le milieu , avec lefquelles on faiilt la tige pour ne fe pas brûler les mains. Il y a des fers à cLauffi-r donc le delTous eft bombé , pour fervir dans les ouvrages creux , ce que j'ai indiqué par la ligne a b c ,fig. 8. ^ Les preffes ou vis à main font de deux fortes ; les unes , qui ont depuis 6 pouces d'ouverture jufqu'à un pied , & même plus , & qui font conftruites en bois ; & les autres , qui font beaucoup plus petites , lefquelles font faites en fer ou' en cuivre. La première de ces deux efpeces de preffes , repréfentée^»-. r , eft compofée de trois pièces de bois ; favoir , une A B , dans laquelle les deux autres, qu'on nomme les branches de la prefe , font affemblées à tenon & mortaife , & à enfourcliement double, lefquelles paffent tout à travers de la principale'piece A B. Foyei la Fig. 7, qui repréfenté une des branches de la preffe vue de côté avec fes affemblages , à l'extréraicé de laquelle eft percé le trou de la vis qui y eft taraudé. L'autre branche de la preffe eft femblable à celle-ci, excepté qu'elle n'eft pas percée comme la première , & qu'elle eft un peu creufe en deffous , c'eft-à-dire , en dedans de la preffe , afin que quand on ferre la vis entre cette dernière & 1 ouvrage , elle pince toujours du bout , ce qui ne pourroit pas être fi elle n'étoic pas creufée en deffous , parce que quelque bien que foient affemblées les bran- ches , elles font toujours quelqu'effet. La vis de ces fortes de preffes , doit avoir environ^ à 8 lignes de diamètre , & eft terminée en deffous par une tête méplate qui fert à la tourner; cependant il vaudroit mieux , au lieu de cette tête , y laiffer un manche de 3 pouces de long ou environ , d'une forme un peu applatie, avec g MENUISIER, m. Part. SeB. IIL Chap. XL lequel on la tourneroit plus prompcement & plus commodément. Les petites prefles de fer , nommées aufli Happes, ne différent de celles dont je viens de parler , que par la grandeur & par la matière avec laquelle elles font faites ; car leurs formes & leurs ufages font abfolument les mêmes , puifqu'elles fervent l'une & l'autre à appuyer des parties de placage qui n'ont pas pris la eoUe lorfqu'elles ont été plaquées , comme l'indique la Jg. 2 , où j'ai repré- fcnté un morceau de placage pris dans la preiïe à main. Les autres outils propres au placage , font les pointes de Maréchaux , ou ; pour mieux dire , l'extrémité des clous plats dont fe fervent les Maréchaux , des fers à mouler , dont je parlerai ci-après , une éponge ,fig.6, pour mouiller le placage avant & après être collé, & un pot à la colle , de cuivre, qui doit être à double fond , c'eft-à-dire , que ce doit être deux pots ou vafes qui entrent l'un xîans l'autre, dans l'un defquels on met de l'eau , dont la chaleur entretient celle de la colle , qui eft placée dans le plus petit, ce qui s'appelle/zz/-£ ckaiifer la ■colle au bain-marie , ce qui eft très-commode , parce que non-feulement la colle fe maintient dans un degré de chaleur à peu-près toujours égal, mais encore parce qu'elle ne s'attache pas au pot & ne s'y brûle pas , comme cela arrive aux pots à colle ordinaires. Il y a des Ebéniftes qui ont de petits fourneaux d'environ a pieds de hauteur, fur lefquels ils font chauffer leur colle , ce qui ofi très-commode , parce qu'ils n'ont pas la peine de fe baiffer fi fouvent que quand la colle eft devant le feu , oh d'ailleurs elle chauffe moins également que fur un fourneau , fur lequel on peut lailTer le premier pot, dans lequel eft l'eau , à demeure, & retirer celui •dans lequel eft la colle, quand on le juge à propos. On ne fe fert , pour plaquer , que de la colle d'Angleterre , du moins quand on veut faire de bon ouvrage ; & on doit avoir foin qu'elle foit toujours bien chaude & un peu confiftante, fans cependant être trop épailTe, parce qu'alors elle feroit corps fous le placage, & ne pourroit plus fortir lorfqu'on appuieroit le marteau deffus. Si la colle trop épaiffe n' eft pas bonne pour faire de bon placage , celle qui eft trop claire l'eft encore moins, parce qu'elle ne colle point du tout, & que le placage ne peut pas prendre, quelque foin qu'on puiffe prendre, & quelque diligence dont on puiffe ufer. Quand on veut plaquer, on commence premièrement parles parties extérieures de l'ouvrage , qu'on ajufte d'abord tant de longueur que de largeur ; enfuite on pofe plufieurs pointes le long du trait contre lequel la pièce à coller doit venic joindre, tant fur la longueur que par les bouts , afin qu'elle ne puiffe pas fe déranger lorfqu'on la plaque , ainfi qu'on peut le voir à la fig. lo; enfuite on moule la pièce, c'eft-à-dire, qu'on la bat avec la tête du marteau du côre' qu'elle doit être collée , afin de la faire creufer , & que par conféquent elle porte mieux fur les bouts. Ce qui étant fait, on mouille la pièce avec l'éponge à l'eau Sect. il Manière de coller ÔC plaquer la Marqueterie. 5y f à l'eau tiède du côté du parement , ou bien avec de la colle très-claire , ce qui vaut d'autant mieux , que cette colle , quoique peu conflftante , remplit mieux les pores du bois que ne peut faire de l'eau , ce qui eft fore à confidérer d'au- tant qu'on ne mouille ainfi les pièces de placage du côté du parement, que pour empêcher qu'elles ne fe creufent de ce côté , lorfqu'on étend de la colle du côté du placage, ce qui ne manqueroit pas d'arriver fi on ne prenoit cette précaution , parce que les feuilles de placage étant très-minces , la colle qu'on y met toute chaude , en s'introduifant dans les pores du bois , les dilate & fait creufer la pièce , ce qu'on ne peut empêcher qu'en la mouillant de l'autre côté, ainfi que je viens de le dire , & qu'on doit toujours avoir foin de faire avant de mettre la colle , afin que l'eau qu'on met fur le côté du parement, en s'introduifant la premierl tlans les pores du bois , contrebalance l'effet de la colle qu'on met de l'autre côté , laquelle en fait d'autant moins , qu'elle trouve plus de réfiftance , ce qui doit faire préférer de la colle claire à de l'eau , pour mouiller le parement du placage. Quand la pièce eft ainfi mouillée , on la chauffe du côté du joint , & on la mouille encore s'il eft nécefi-aire; enfuite on l'enduit de colle , ainfi que le bâtis fur lequel on veut la plaquer, & on la pofe à fa place le plus promptemenc qu'il eft poflible; puis on prend le marteau à plaquer, dont on appuie forte- ment la pane fur la pièce en le poufilint devant foi, & en l'agitant de droite à gauche , fans ceffer d'appuyer le plu. a^'il eft p^ffibfc , afin quc In colle s'intro- duife dans Us porcs du batis & du placage autant qu'il eft néceffaire pour qu'ils s'attachent l'un à fautre fans qu'il refte de colle entre-deux , parce que s'il y en reftoit , elle feroit un corps étranger qui fe détruiroit à la fuite, foie par la trop grande chaleur ou par l'humidité ; c'eft pourquoi on commence toujours à pla- quer une pièce par un bout, & on avance à mefure en pouffant toujours la colle devant foi , laquelle n'étant pas retenue , fort par les deux côtés de la pièce , s'ils font ifolés , comme à laj%. lo ; fi un des côtés de la pièce qu'on plaque, touche à une autre, on commence par plaquer le côté du joint toujours en com' mençant par le bout de la pièce, & en pouffant la colle devant foi du côté de la pièce qui eft libre. Quand il arrive que les deux côtés de la pièce font engagés , on la plaque toujours à fordinaire , en obfervant de mettre une cale par le bout , entre la pièce à plaquer & le bâtis , afin de laiffer un paffige à la colle ; & on n'Ôte cette cale que précifément à l'inftant qu'il eft néceffaire de plaquer le bout de la pièce. Quand on a plaqué une pièce , on la fonde , c'eft-h-dire , qu'on frappe delfus à petits coups , avec la tête du marteau, pour favoir, par le fon qu'elle rend, fi elle porte bien par-tout , ce qui eft fort aifé à connoître ; parce que quand elle porte bien, elle rend un fon plein & fonore ; au lieu que quand il y a du vuide, elle rend un fon fourd qui annonce l'endroit qui ne porte pas, & fur lequei il faut faire palfer le marteau à plaquer, toujours en l'agitant de divers fens. Quand on a plaqué une pièce extérieure, telle que celle CD,fig. lo,, oij Menuisier^ m. Pan. m, Sca^ Hiq 8p M E NUI SI E R , m. Pan. SeS. IH. Chap. XL - plaque celle qui lui eft oppofée, comme celle EF, même figure; ce qui étanc Flanche fait, on plaque les deux autres, qu'on n'ajuftc ordinairement qu'après que les deux premières ont été plaquées ; parce que quelques foins que l'on prenne, il arrive prefque toujours quelque dérangement , auquel on ne peut plus remédier quand une fois la colle eft prife. A mefure qu'on plaque les pièces , on prend un cifeau ou même une petite ipatule de bois , avec laquelle on enlevé la colle qui fort de deiïbus , tant pour ne la point perdre , que pour qu'elle ne nuife pas à plaquer le refte de f ouvrage. Quand les pièces du pourtour d'un ouvrage quelconque font ainfi plaquées, il eft bon de les lailTer féclier une journée au moins ; après quoi on ajufte celles •du milieu , qu'on plaque toujours de la même manière que ci-deflûs , à l'excep- tion que quand elles font très-grandes, on les plaque par parties , comme de 6 pouces en 6 pouces, ainu que l'indiquent les lignes d, e,f,fig. ir, ce qui oblige de fe fervir du fer à chauffer , afin de rendre à la colle le degré de chaleur convenable. Le fer à chauffer fe tient de la main gauche , & on le fait pafler fur l'ouvrage en appuyant deffus , de la droite , avec le manche ou la tête du marteau à pla- quer autant qu'on le juge à propos, pour chauffer la colle, fans cependant brûler la pièce qu'on plaque. Au lieu dp fc lèrvir du marteau à plaquer, o„ farrvit beaucoup mieux de pren- dre un fimple morceau de bois , ou le manche de quelqu'autre outil pour appuyer fur le fer à chauffer , parce que la chaleur de ce dernier fe communiquant au marteau, met celui qui vient à s'en fervir en danger de fe brûler les mains, ce qui , à mon avis , n'efl: pas fort néceffaire. V oje::^ la Figure il, qui repréfente un Ouvrier occupé à chauffer une grande pièce de placage entourée de frifes à bois de fil , ce qui eft fefpece de placage le plus fimple. , Quand l'Ebénifterie eft plus compofée , comme , par exemple , laj^g. i , Se PiANCHE qu'il y ^ plates-bandes au pourtour des frifes , on commence par plaquer ^i'î- celles du dedans de l'ouvrage , ainfi que celle A B, ce qui fe fait à l'ordinaire , c'eft-à-dire , qu'on f appuie contre des pointes ; cependant quand ces plates- bandes font étroites, comme celle-ci, elles font fujettes à ployer fur la longueur lorfqu'on les plaque , ce que les pointes ne peuvent guère empêcher ; c' eft pour-; quoi je crois qu'à la place de ces dernières , on feroit très-bien de mettre une règle , ainfi que celle CD, contre laquelle on puifle appuyer la plate - bande dans toute fa longueur : cette règle s'attache fiir le bâtis avec des efpeces de clous repréfentés_y7g. 4 <& J , dont je parlerai ci-après , & doit être abattue en chanfrein fur le devant , afin qu'elle ne nuilè pas au paffage du marteau à pla- quer. Voyei^ la Figure 3 , qui repréfente la coupe de cette règle avec le trou propre à paffer le clou par lequel on l'arrête. Le rempliflàge des frifes fe plaque après que toutes les plates-bandes fcnt feches ; ce n'eft pas qu'on ne pû: les plaquer immédiatement après avoir Sect. II. Manière de coller SC plaquer la Marqueterie, Syj plaqué les plates-bandes intérieures , comme la frife cote E , ce qui donneroit — =^ beaucoup d'aifance pour drefler leurs joints extérieurs ; mais il en réfulteroit une Planche difSculté pour plaquer la plate-bande extérieure, qu'on a peine à bien faire joindre contre le remplifTage F ; c'eft pourquoi il vaut mieux ne remplir les frifes que quand toutes les plates-bandes , tant intérieures qu'extérieures , font collées & feches. Quand les frifes font remplies à compartiments, comme la partie G , fig. r , on plaque les pièces de ces compartiments les unes après les autres, & toujours après que les plates-bandes font pofées , ce qui demande beaucoup de foin ; d'autant que chacune des pièces de ces compartiments eft préparée d'avance, comme je l'ai enfeigné en parlant de la manière d'ajufter les pièces droites, page 835' (S" fiùv. Le placage des pièces du milieu de cette figure, fe fait toujours à l'ordinaire; & quand il eft difpofé diagonalement , comme de H en /, on commence pat ajufter une pièce comme celle Hl, qu'on plaque & qu'on arrête, fi on le juge à propos, par des clous à patte , ^g-. 4 (gj. Cette première pièce ainfî collée , on en ajufte une féconde à côté , qu'on plaque & arrête de la même manière que la première , puis une troifieme , & enfin une quatrième , ce qui fait le rempli/Tage du panneau , du moins par les angles , parce qu'il arrive rarement que chaque pie<î= i^^ii. d'une largeur luthlànre pour le remplir en entier; de forte qu'il rcfte toujours des vuides comme ceux L , M , qu'on rem- plit par d'autres pièces dont les veines & la couleur fe rapportent avec celles des angles le plus parfaitement poffible ; de manière que quand l'ouvrage eft fini , il femble n'être que d'un feul morceau. Plus les pièces de remplillige d'un panneau ont l'angle ou , comme difent les Ebéniftes , la pointe aiguë , & plus on doit avoir foin que ces pointes foient bien plaquées , parce que pour peu que l'air s'introduife de/Tous , elles lèvent tout de fuite ; à quoi on remédie en les arrêtant avec une pointe qu'on recourbe defllis , ce qui , à mon avis , n'eft pas trop bon , parce que cette pointe ainfi recourbée ne porte qu'en un endroit , & qu'elle eft fujette à gâter le joint , & même à écrafer la pointe de la pièce ; c'eft pourquoi je crois qu'il vaudroit mieux fe fervir de clous à patte, 4 <§• J , lefquels ne différent des clous ordinaires que par une petite tête ou patte faillante , laquelle peut prendre fur le placage fans y rien gâter , ni par deffus ni par le côté. Voye^ les Fig. 4 ; , qui repré- fentent cette efpece de clou dans fa grandeur naturelle , vu de face , en defliis & de côté. Le placage des pièces contournées fe fait de la même maniera que celui des pièces droites , c'eft-à-dire , qu'après avoir collé les plates-bandes , tant droites que cintrées , comme à la f.g. 2 , on ajufte les pièces de rempliffage , & on les plaque enfuite à l'ordinaire. Comme les pièces de rempliffîige ne peuvent pas toutes fc tracer au compas^- Planche S 54 ME NUISIE R,in. Pan. SeB. 111. Châp. XL ! on eR obligé de prendre leurs cintres fur celui des plates-bandes déjà pofées , ce qui fe fait de deux manieras différentes , qui , toutes deux , reviennent à peu- près au même , comme je vais l'expliquer. On prend une ou plufieurs feuilles de papier, qu'on applique fur les plates- bandes qui font pofées , fur lefquclles on a foin de les tenir bien étendues ; cnfuite avec le manche d'un outil quelconque (pourvu qu'il foit arrondi & uni) , •on frotte fur le papier en appuyant un peu en dedans de la partie à plaquer. Se en fuivant bien exaétement tous les contours des plates-bandes, dont l'arête s'imprime dans le papier & y fait un pli, ou , pour mieux dire, un trait qui «donne exaâement le contour de la place vuide, & fur lequel trait on paife de la raine de plomb ou de la fanguine , de crainte qu'il ne s'efface en redreffanc le papier. Voje^ la Fig. ç. Après avoir ainfl pris le calque de la pièce , on l'étend & le colle fur un feuillet de placage ; & quand il eft fec , on découpe ce feuillet avec la foie de marqueterie à fordinaire. Il faut obferver , en collant le calque fur le feuillet, de ne mouiller le premier qu'à fendroit du trait , afin qu'il refte dans fa grandeur, «& qu'il ne foit pas dans le cas de fe retirer en féchant. Quand il y a plufieurs pièces d'une forme ferablable à ajufter, pour uferda plus de diligence , on ne fait qu'un calque , qu'on pique avec une épingle dans tous fes contours ; puis après lavou r.,, ip feuillet , on le frotte avec un petit fachet rempli de mine de plomb ou de fanguine pulvérifée, iaquclle paflânt au travers des trous du calque , laiffe fur le feuillet un petit trait pondue , qu'on leprend enfuite avec le crayon. Cette manière de prendre le contour des pièces cintrées , eft alTez défeC- Tueufe , parce qu'il n'efi: guère poffible de faire tous les contours des plates- bandes parfaitement femblables , & que quand ils le feroient , il n'eft pas plus poffible de les coller fans les faire un peu ployer ou rentrer, foit en dedans ou en dehors ; c'eft pourquoi je crois qu'il vaut mieux prendre un calque pour chaque pièce , ou bien fe fervir de la féconde manière de prendre le contour des pièces cintrées , laquelle eft plus fimple & plus facile que la première , ce qui fe fait de la manière fuivante. Après que les plates-bandes font parfaitement feches, on les frotte fur l'arête avec de la craie ; puis on prend un feuillet, que l'on coupe & ajufte d'un bout félon la direâion qui lui eft propre ; ce qui étant fait , on le met à fa place du bout qui eft ajufté : on le fait paffer par-deffus les plates-bandes cintrées , &, avec le marteau on frappe légèrement fur le feuillet , en fiiivant , autant qu'il eft poffible, f arête intérieure & le contour des plates - bandes , lefquelles étant frottées de craie , comme je viens de le dire , marquent fut le feuillet un petit trait blanc qui donne le contour exaél de la pièce , qu'on découpe enfuite à l'or- dinaire avec la fcie de marqueterie. Voy.les Fig. 6 & lo, qui font ainfi découpées. Je viens de dire qu'on ajuftoit les pièces d'abord par un bout , & c'eft la bonne manière ; Sect. II. Manière de coller SC plaquer la Marqueterie- taaniere ; parce que s'il y a quelque chofe à y retoucher , on eft le maître de le ^ faire. Cependant il y a des Ebéniftes qui prennent le contour des deux bouts Pi'Af'tHE (que je fuppofe tous deux cintrés ) tout à la fois , & qui , par la grande habi- tude qu'ils ont, font prefque sûrs de n'en jamais manquer aucun. Comme la Figure 2 eft très-petite , je n'ai pu y repréfenter des filets autour 'des plates-bandes , tant droites que cintrées , quoiqu'il foit toujours bien d'en mettre. Ces filets fe collent aux pièces droites avant d'ajufter ces dernières , fur-tout quand elles font étroites , comme les frifes de bâtons rompus & autres. Quant à celles qui font cintrées , on n'y colle les filets qu'après qu'elles font plaquées ; & on leur fait fuivre le contour de ces mêmes plates-bandes , en y mettant des pointes , fig. 8 , de diftance en diftance , fur- tout dans les parties creufes , comme je l'ai obfervé à la_^^. 7. En général , lorfqu'on plaque l'Ebénifterie , il faut éviter de le faire dans des lieux trop humides , ou expofés à beaucoup de hâle , parce que l'un fait fécher îa colle trop vite, & que l'autre l'empêche de prendre; ce qui, de façon ou d'autre , donne pafiàge à l'air , qui fait lever le placage. Il fiut auffi avoir foin de couvrir les parties plaquées avec un linge un peu humide , pour empêcher qu'elles ne fechent trop promptement à l'extérieur , & qu'elles ne lèvent à fen- droit des joints , qu'on doit avoir gi-anJ /iin couvrir de toile , après même les avoir plaqués. Quelque foin qu'on prenne , il arrive cependant que le placage levé quelque- fois ; alors on lui fait reprendre colle en le chauŒmt avec le fer ; & s'il eft trop roulé pour prendre avec le marteau à plaquer , on le contraint avec des clous à tête, quand il eft polTible d'en mettre, ou avec des preffes à main, ou enfin avec des goberges , c'eft-à-dire , des tringles , dont un bout porte contre le plancher de la boutique , & fautre Contre une cale placée fur f ouvrage , de manière que la goberge roidic entre cette dernière & le plancher , ou , pour mieux dire , le plafond de la boutique. Quand l'ouvrage eft cintré fur le plan , on le plaque de la même manière que quand il eft droit, en obfervant , lorfqu'on prend la longueur ou le contour des pièces , de les faire ployer félon le plan de l'ouvrage ; & quand ce plan eft confidérablement cintré en S , comme , par exemple , la fig. i , il eft bon d'arrêter le bord du placage avec une vis à main du côté du bouge, & de retenii la partie creufe par le moyen d'une goberge A'^, d'une cale O , & d'un couffin P , placé entre cette dernière & l'ouvrage , pour mieux en prendre les finuofités. Voye:^ la fig, 1 5' , qui repréfente , en coupe , une partie de placage ainfi difpofée ; & la^g. 17 , qui repréfente ce même placage développé fur une ligne droite. Ce que je viens de dire touchant le placage cintré , n'eft bon qu'autant que le cintre n'eft pas trop confidérable posr que les pièces puiffent aifément ployer ou même que , fi elles le font , on ne puifîe pas craindre qu'elles ne fe redrelTent j Menuisier. IIL Part. III. Secl. 1 10 ME NU I S 1ER-, m. Pan. Se^. UI. Ciiap. XI .. t'cli pourquoi dans le cas d'une partie très-cintrée & de peu d'étendue, il LvX •cintrer les pièces avant de les coller , ce qui fe fait de la manière fuivaiite. La partie à plaquer étant prête , ainfi que celle repréfentée Jïg. 1 1 , ( abflrac- tion faite des deux placages Q R S Se T U X, ) on commence par ajufter toutes Ces pièces à la longueur convenable , comme celle Jzg. 14 , pour le placare ^RS , ou celle/o-. 16, pour celui TU X; enfuite on les moule fur unfer cliaud , en prenant la précaution de les mouiller pour qu'elles ploient plus aifé- iBcnt. Les Ebéniftes fe fervent , pour cette opération , du premier morceau de ftr qu'ils ont fous leurs mains , ce qui les met fouvent dans le cas non-feulement de fe brûler , mais encore de mal cintrer leurs pièces , foit en les chauffant plus à un endroit qu'à l'autre, foit en les faifant ployer inégalement ; ceft pourquoi le crois qu'il vaudroit mieux qu'ils fîfîènt ufàge d'un outil fait exprès pour cet ouvrage ; cet outil eft repréfentéj^jO-, 13 , & je le nommerai fir à mouler. Cet outil eft une efpece de cylindre de à 18 pouces de longjufqu'au manclie , fur environ un pouce Se demi de diamètre , fur la furface duquel , Se ' dans la plus grande partie de fà longueur , eft pratiquée une efpece de coulilTa ou rainure faillante , dans laquelle on fait entrer l'extrémité de la pièce qu'on veut cintrer , de manière qu'elle s'y trouve prife de toute fa largeur , & qu'on ^eut la faire ployer comme on le juge à propos , fans craindre qu'elle ne fè caflè à bois de travci», commo 11 arAvo qnplquefois quand on ne fe fèrt que de ïcs doigts pour faire ployer les pièces qu'on veut mouler, f^bjc^ Ja Fiv. 12., (qui repréfente la coupe de cet outil deffiné grand comme l'exécution. Quoique j'aye mis un manche au fer à mouler pour pouvoir le tenir plus com- modément , il feroit cependant mieux de le difpofèr de manière , quoiqu'avec TDn manche , qu'il pût le placer fur l'établi dans une elpece de fourchette 3 •deux branches qui le làififfent par les deux bouts, afin que l'Ouvrier quien fait ufage , puilTe être libre de fes deux mains , tant pour faire ployer la pièce , que pour la mouiller par derrière autant qu'il eft néceflàire ; cela feroit d'autant plus commode, que le fer une fois chaud, on pourroit l'entretenir à un degré de chaleur égale par le moyen d'un fourneau placé au-delîôus. Quand l'ouvrage eft cintré en bouge , comme du côté QRS , fig. 1 1 , il faut îivoir foin que les pièces de placage foient un peu plus cintrées que la place , afin qu'elles portent bien des bouts , ce qui eft elTentiel à toutes fortes de pla- cages , & fur-tout dans le cas dont il eft ici queftion ; par la même raifbn , quand l'ouvrage eft cintré en creux , comme du côté TU X, mime figure , il faut que le placage foit moins cintré que fa place , ce qui ne fouffre aucune difficulté. Quand les places font abfolument trop cintrées pour y mettre du placage ployé , du moins avec folidité , on y met alors du bois d'une épailTeur conve- nable , qu'on creufe ou arrondit après qu'il eft plaqué , comme on le juge à propos. Ce que je viens de dire touchant la manière de plaquer rEbéniflerie ordinaire. Sect. m. Manière définir l'Ebénîfierle it placage , ÔCc 8^7 renferme a peu-pres tout ce que la théoHe peut enfeigner à ce fujet, & Il appLcable aux autres efpeces d'Ebdnifterie dont je vais parler ci-après , du moins a quelques différences près , que j'aurai foin d'indiquer lorfqu'il fera nc^elTaire Une me refteplus,pourterminerce Chapitre, &cequiconcernelapremierI e.pece d Eben,fterie , qu'à enfeigner la manière de la finir après l'avoir plaquée & les différentes manières de polir toutes fortes d'ouvrages , de telle nature' qu ils puiffent être, afin d'épuifer tout de fuite ce qui concerne le poli , qui eft a peu-pres le même à tous les ouvrages de rapport , ce qui fera le fujet de h ^ section luivante. ' Section Troisième. De la manière définir Œbéniflerie de placage , & des différents efpeces dépolis: Q.AK. Ieplacageeflfufiifammentfec,ils'agitdelefinir,c'eft-à-dire,d'en d-aprÏ. ''''' °" ' ~ l'-plierai d -(Jr"& a7''"f ' '^"—-P- la colle qui eft relié. ci^/Tus , & qu on enlevé avec un cifeau ou tout autre outil ; enfuite on le replanic au rabot a dents , auquel on Jonne que crès-peu de fer , pour ^vite/l , & on doit avoir foin de pouffer le rabot diagonalement aux fils du bds" Zr toutalarencontredesjoints,commedea.U,&cà/; r c j ' 1 I Cl j L • I ' ^'^^*>A^- i> afin de ne point ecorcher le fil des bois en le renverfant en dehors du joint. Quand le bois de bout d'une pièce eft perpendiculaire'à une autre il f,,,, avoir la même attention, & pouffer le rabot du bois de bout au bois dl fil & toujours diagonalement comme ^ à . , ;f^. x , ou de . à/, ce qui eft „'o„ feulement la même chofe . mais encore ce qu'on doit néceff^irement faire afin de ne point creufer le placage plus fur un fens que fur l'autre & qu'il f ' feitement droit fl,r tous les fens. Il faut aufîl faire attention , Lfql lesTls'dT, pièces font a angle droit , & que par conféquent leurs joints font d'onolets de prendre ces mêmes joints du plus petit côté des pièces , & de pouffer le rabo't de " ^ a A, afin de renverfer les fils des bois fur eux-mêmes , & qu'ils fervent de point d appui les uns aux autres ; ce qui ne pourroit être fi on pouffoit le rabot de . parce que les fils des bois étant pris fur leur plus grande longueur, ne trouvé' roient plus de foutien , s'éraiUeroient à l'endroit du joint, fur-tout quand le bois des pièces eft tendre & poreux , comme il arrive quelquefois Quand le placage eft compofé d'un grand nombre de pièces, il n'eft guère poflible de fuivre exadement la méthode que je donne ici; cependant on ne doit s en écarter que le moins qu'on pourra ; & quand les pièces feront abfolumenc trop petites pour le faire , ou que le placage fera contourné , comme à la fi.. . , en pouffera le rabot en tournant de droite à gauche , & en évitant de prendre 858 MENUISIER, ni. Pan. SeB. IlL Chap^ XI. ' ' aucune pièce à bois de travers , du moins autant qu'A fera poffible de le faire. En Planche g^;,^i-al ^ il faut avoir grand foin de ne jamais pouffer le rabot à bois de travers contre du bois difpofé diagonalement ou perpendiculairement , comme de £ à / , fier. 2 , parce qu'il eft ptefqu'impoffible de le faire fans éclatter les pièces à l'eni droit des joints , ou du moins fans agrandir ces derniers. A mefure que le placage fe nétoie , on doit retirer le fer du rabot jufqu a qu'il ne morde prefque plus du tout , & on doit même changer de plufieurs rabots , dont les fers foient cannelés plus fins , & placés plus debout les uns que les autres , afin que les derniers dont on fait ufage , ne foient , à proprement parler, que des efpeces de racloirs. Lorfqu'on commence à replanir le placage , on doit avoir grand foin de frotter avec de la graille le dcffous du rabot , afin que la colle qui eft reftée deffus le placage étant échauffée par le frottement du rabot, ne s'y attache que le moins qu'il eft poffible ; & il faut replanir le placage jufqu'à ce qu'il n'y refte aucune efpece d'inégalité dans toute fa furface, tant par la faute des pièces qui font quelquefois d'une inégale épaiffeur , que par les ondes que le premier rabot peuc y avoir faites. Le placage étant ainfi replani , on le racle & le polit comme je vais l'enfei- gner après avoir fait In defcription des outils & des ingrédients dont on fe ferc pour le yKjli de l'Ebénifterie. Les outils propres à finir & polir fEbénifterie en général, font les racloirs de toutes les efpeces, les limes douces d'Angleterre, la pierre de ponce , la peau de chien de mer , la prêle , les poliffoirs , les bois à polir fimples & garnis , & les frottoirs. Les autres ingrédients font la cire , la laque , la colophane , le tri- poli , le charbon , l'huile d'olive & le blanc d'Efpagne. Les racloirs ,Jig. 3 , 4 <& y > fcnt compolës d'un fût de bois de 3 pouces de longueur , fur environ 2 pouces de largeur , & J à 5 lignes d'épaiffeur , dans le milieu de laquelle eft affemblée , ou, pour mieux dire, incruftée une lame d'acier qu'on choifit le plus fin & le meilleur qu'il eft poffible, pour qu'il coupe plus fin. Les racloirs des Ebéniftes différent de ceux des autres MenuiCers de bâti- ment , en ce qu'ils n'ont pas de bifeau comme ceux de ces derniers , & qu'on les aiKite quarrément fur la pierre à l'huile , de manière qu'ils ne mordent que dé leur arête , laquelle étant moins aiguë que s'ils avoient un bifeau, eft moins fujette à s'égrener. Quand le racloir eft affûté fur le champ , on le frotte fur là plat des deux côtés avec un morceau d'acier trempé , qu'on appuie fortement deffus pour en rabattre le fil ; ce qui étant fait , on paffe ce même morceau d'acier fur le champ , en faifant en forte de le tenir le plus droit poffible , ce qui lui •donne un fil fin des deux côtés , lequel enlevé un petit copeau fin & uni , quî achevé d'enlever toutes les petites inégalités que le dernier rabot à dents peut avoir laiffées. Les racloirs font droits Comme la fig. 3 , ou cintrés comme hfg. y , ce qut es Sect. 111. Manière de fuir l'Ebéniflerie de placage , SCc. §^9 ne fait rien à la manière de les affûter, qui cft toujours la même, ainfi que la manière d'en faire ufage , comme on le verra ci-après. Il eft encore une autre elpece de racloir, qui ne diffère de ceux dont je viens de parler , qu'en ce qu'il ne coupe pas, mais qu'au contraire les arêtes font un peu arrondies. Ce racloir fe nomme Racloir à la cire , parce qu'il fert à ôter le fuperflu de la cire après qu'elle a été étendue avec le poliffoir. Après les racloirs , les Ebéniftes fe fervent quelquefois de limes douces d'An- gleterre , dont la taille iîne & douce eft très-propre à unir le bois & le préparer à recevoir le poli. Pour fe fervir commodément de ces limes , il efl bon que leur foie foit recourbée , afin que leur manche foit un peu élevé au - defTus de l'ouvrage. La pierre de ponce eft une efpece de pierre d'une fubftance légère & poreufe, peu compacte , & remplie d'une infinité de cavités plus ou moins confidérables. Cette pierre eft rude au toucher; & pour en faire ufage il faut funir d'un côté fur le grès , enfuite fur un morceau de bois uni , avant de s'en fervir fur l'ou- vrage. Il faut choifir la pierre de ponce qui a le grain le plus égal, & dans laquelle il ne fe rencontre pas de veines dures , lefquelles réfiftent plus au frotte- ment que le refte de la pierre , & rayent l'ouvrage , ce qu'il faut éviter. La peau de chien de mer fert , en général , à tous les Menuifiers ; mais les Ebéniftes ne fe lèrvenr qnp 'i^^ puiuc;. les plus flnes, comme l^s nageoires/ qu'ils appellent oreilles de peau de chien , lefquelles ont le grain le plus fia de toute la peau , & qui , par conféquent , rayent moins l'ouvrage. Voy. la Fig. 6. La prêle ou aprêle , fig. J , auffi appellée queue de cheval, & en latin cquije- mm , eft une efpece de jonc très-dur , dont la furface eft rude & comme cannelée dans toute fa longueur, qui eft de 15 à 20 pouces de haut, & qui eft divifée par jets ou nœuds de 2 à 3 pouces de diftance les uns des autres. On doit ôtet les nœuds de la prêle lorfqu'on en fait ufage , parce qu'ils font plus durs que le refte de cette dernière , & que de plus leur faillie rayeroit le bois. La cire dont les Ebéniftes fe fervent pour polir, eft ordinairement de la cire jaune; pour le poli des ouvrages communs, comme les Armoires, les Com- modes de bois de hêtre &. de noyer , &c. on met un tiers de fuif avec de la cire ; & dans les beaux ouvrages on doit fe fervir de belle cire blanche , quoique ce ne foit point la coutume. La laque eft une efpece de gomme ou cire de couleur rouge , qui vient des Indes orientales , &; qui fert au poli des bois de couleur. La colophane eft une efpece de gomme ou réfine de couleur brune ou noi- râtre, qui eft faite avec de la térébenthine fine, cuite dans de l'eau jufqu'à ce qu'elle devienne folide. Cette gomme fondue avec du noir de fumée , fert pouï le poli des bois noirs , & à remplir la capacité des gravures. Lepoli(roir,j?o-.8(§'<j,eftunfaifc;audejonc ordinaire,d'environ4pouces delon-i gueur , fur environ 3 pouces de diamètre. Ce faifceau eft fortement lié dans touts Menuisier , ///, Part. III, Secl, K, S^o MENUISIER, m. Part. .Secl. III. Chap. XL fa longueur ; & avant d'en faire ufage on l'imbibe de cire fondue , qu'on lailTe refroidir; enfùite de quoi on frotte le polifToir fur un morceau de bois corroyé, pour l'unir & le rendre propre à polir l'ouvrage. Il y a des poliffoirs de diverfes formes <Sc grandeurs , pour pouvoir entrer dans les parties creufes ou étroites. Les bois à polir, Jîg. lo, ii & 12 , font de petits morceaux de noyer, ou tout autre bois d'un grain fin & ferré , fans être trop dur , d'environ 6 pouces de longueur au moins , lefquels font de diverfes formes & grandeurs , & amincis en bifeau par le bout. Ces bois fervent à polir l'ouvrage , ou, pour mieux dire, à étendre la cire dans les parties creufes & étroites dans lefquelles les poliflôirs ne peuvent pas entrer , comme les filets 8c autres petites parties dont il eft nécelTaire de conferver les arêtes vives. Quelquefois les bois à polir fcnt garnis de cliapeau ou de peau de buffle , pour fervir à différents polis , comme je le dirai ci-après. Le tripoli eft une efpeœ de craie ou de pierre tendre , d'un blanc rougeâtre, rude au toucher , quoiqu'il foit fort uni. On s'en fert pour polir , réduit en poudre très-fine paiTée au tamis , & mêlée foit avec de l'eau , de l'huile , du fuif ou du vinaigre , fuivant les différentes matières qu'on polit. Le bon tripoli vient de Bretagne. Le charbon qui fert à polir , eft celui de hêtre, de fufain , qu'on doit choifir bien égal, Scfans fente ni nœuds. Un polic uumu^ &les racines avec de l'indigo & du vinaigre , ce qui y fait de belles nuances & des figures. On fe fert d'iiuile d'olive pour les polis , foit au tripoli ou au charbon ; cepen- dant pour le poli à l'huile, qui eft, à proprement parler , plutôt une teinture qu'un poli , on fe fert d'huile de lin , dans laquelle on fait infufer de l'orcanette , efpece de racine d'un rouge foncé en delTus , laquelle teint d'une belle couleur vermeille. Je ne parlerai pas ici du blanc d'Efpagne , parce qu'il eft non-feulement très- connu, mais encore parce qu'il ne fert qu'à finir dans certaines occafions, pour ôter les taches que les doigts pourroient avoir fait à l'ouvrage. Quand le placage eft replani , comme je l'ai expliqué ci-deflus, on le pafTe au racloir , lequel fe tient à deux mains , en appuyant de la paume de la main droite lorfqu'on le poulTe devant foi , ou du bout des doigts , le plus près de la lame qu'il eft poflîble, lorfqu'au contraire on le tire à foi ; car on en fait ufàge des deux: manières. De l'une ou l'autre façon , il faut qu'il foit incliné du côté oîi on le fait avancer, à peu-près félon la direélion d'un angle de degrés. De quelque manière que foient difpofées les pièces d'un placage, il faut toujours les racler à bois de fil , en obfervant toutefois que la lame du racloir foit difpofée oblique- ment avec le fil du bois, comme l'indiquent les lignes ab, cd &.ej',fig. 14, afin de mieux couper les fils du bois , lefquels étant pris ainfi , fe détachent plus aifément , vu qu'ils ne font pas pris tous enfemble ; de forte que le fil qui eft fous le tranchant du racloir trouvant de la réfiftance , & étant appuyé par celui Sect. III. Manière de finir rEbéniflerie de placage, ôCc. ^6t qui eft à côté, s'enlève fans fe ployer, ce qui arriverait néceiîàirement fi on — menoic le racloir perpendiculairement au fil du bois , fur-tout dans les bois Planche tendres. Quand la pièce eft ainfi raclée d'un fens , on la racle de l'autre , en polànt la lame du racloir félon la diredion des lignes gc ,b e Se dh; après quoi on donne le dernier coup de racloir félon la direâion des fils du bois , pour achever d'en- lever les fils qui pourroient être reployés de côté ou d'autre. Il ne faut pas beau- coup appuyer en donnant ce dernier coup de racloir , afin de ne point onduler le bois , ce qui ne manqueroit pas d'arriver C on appuyoit beaucoup , parce que les bois étant pour la plupart d'une inégale denfité fur la longueur, le racloir mordroit plus dans les endroits tendres que fur les durs , & y formeroit des ondes , ce qu'il faut avoir grand foin d'éviter. C'eft en partie cette raifon encore , même plus que la difficulté de couper les fils des bois , qui oblige de placer la lame du racloir obliquement à ces mêmes fils , pour qu'il porte en même temps fur les parties dures & fur les parties ten- dres du bois , afin qu'étant foutenu par les premières , il n'entre pas plus qu'il na faut dans les dernières. Cette obfervation eft très-effentielle , & on ne fauroit trop y faire attention , fur-tout quand les pièces de placage font coupées en femelles , & qu'elles pré- fentent alternativement despa--^-^ Jun^^ des cendres , cane Tur la longueur que fur la largeur , ce qui les rend très-difEciles à racler & à rendre leur fuperficie aulTi plane qu'une glace , comme l'ouvrage bien poli doit être. Toutes les pièces d'un placage fe raclent ainfi féparément; & lorfqu'elles fonc difpofées comme la fig. ij , ou de toute autre manière quelconque, il faut avoir grand foin que le racloir ne vienne pas heurter contre leurs joints, mais au contraire qu'il prenne ces derniers obliquement ou perpendicul-'irement à eux-mêmes, félon que le cas l'exigera. C'eft fur-tout à la rencontre de plufieurs joints, comme au point i , r;, qu'il faut prendre de grandes précautions , afin de ne point écorcher les joints ni les fils du bois ; dans ce cas , on doit faire tourner un peu le racloir , pour éviter de heurter les uns ou les autres : c'eft ce que la pratique enfeigne encore mieux que la théorie la plus parfaite. Quand le placage eft raclé , on y paiïè la peau de chien fine , pour ôter le refte des fils que le racloir n'a pu enlever ; & il faut avoir grand foin que cette peau de chien foit très-douce & bien égale , fans quoi elle rayeroit f ouvrage. Il fauC auffi avoir attention de palTer la peau de chien du même fens que le racloir. Se éviter d'appuyer autant fur les endroits tendres que fur les durs , afin de ne point faire d'ondes à l'ouvrage. On pafTe la peau de chien jufqu'â ce qu'en regardant l'ouvrage prefqu'horifon- talt-ment & de divers fens , on n'y appcrçoive plus aucun fil qui s'élève au-delTus de fa furface , & que les parties tendres de cette même furface femblent ne plus ME NUIS 1ER, Fil. Pan. SeB. III. Chap. XI _ V faire de cavités; alors on paffe la prêle pour effacer les petites raies que la peau Planche de chien a faites, en obfervant les mêmes précautions qu'à cette dernière, en commençant par appuyer, & enfoulageantla main peu à peu, afin qu'en finilTanc, la prêle ne fafle prefque qu'effleurer la fuperficie du bois. La prêle fe tient avec les doigts pour polir l'ouvrage plan ; & pour les filets , il eft bon de paCTer dedans de petits bouts de fil de laiton ou autre , lefquels la maintiennent droite , afin de ne point gâter les arêtes de l'ouvrage ( *). Dans les parties creufes , comme les gorges & autres moulures, où les doigts ne pourroient pas entrer pour appuyer fur la prêle , on prend un bois à polir d'une forme & d'une grandeur néceifaires pour pouvoir la contenir. Quand l'ouvrage eft prêlé , & par conféquent parfaitement uni , il préfente une furface très-plane, mais d'une couleur terne qui change abfolument celle du bois , laquelle revient &. même augmente par le moyen du poli qui fe fait de différentes manières , comme je le dirai ci-après. Le poli le plus ordinaire eft celui qui fe fait avec la cire, & par lequel je vais commencer , comme étant celui qui eft le plus en ufage pour l'Ebénifterie de placage dont il eft ici queftion. Pour faire de beau poli , on doit prendre de la cire de la meilleure qualité polTible , & on en frotte toute la furface de l'ouvrage jufqu'à ce qu'il y en aie fuffîfamraent par-tou.. ; curuin; ^i. r<£t^..j o,-^ If. poliiFoir , lequel , par fon frot- tement , l'échauffé, ainfi que le bois dans les pores duquel elle s'introduit. Voy. la Fi". 13 , qui repréfente un Ouvrier occupé à polir une pièce de placage. Il y a des Ebéniftes qui , au lieu de polilfoir de jonc , fe fervent de liège, ce qui n'eft pas bon ; parce que le liège s'échauffe trop au frottement , ce qui met la cire prefqu' en fufion , & expofe le placage à fe décoller. Quand la cire eft bien étendue avec le polilfoir, tant fur les parties planes que 'dans les cavités , ( ce qui fe fait avec les bois à polir , ) on la retire avec le lacloir à cire qu'on paffe fur l'ouvrage pour ôter le plus gros de la cire , qu'on achevé enfuite d'étendre & d'enlever avec un frottoir, qui n'eft ordinairement qu'un morceau de drap , ou , ce qui vaut mieux , de ferge , laquelle , fans être trop rude , a plus de mordant que le drap. Cette opération eft la dernière du poli ordinaire , après laquelle , lorf- qu'elle eft bien faite ainfi que les autres , l'ouvrage doit être auffi uni & aufïï iuifant qu'une glace. Quand on polit des bois poreux ou de couleur rougeâtre , comme le Palilfan- dre , FAmaranthe & autres, lorfqu'on a étendu la cire fur ces mêmes bois , on y (') Il y a des Ebéniftes qui, à la place de la peau de chien , paflent fur leurs ouvrages une Jime fine & douce , laquelle le drefle parfaite- ment ; mais cette méthode n'eft guère fulvie , àcaufede la difficulté d'avoir des limes courbes, foit par leur foie ou dans leur longueur; c ell: pourquoi on ne s'en fert guère que pour les filew Si, autres moulûtes , ou pour des parties faillantes , ou enfin pour des ouvrages d'Ebénif- tetle d'alTemblage , quoiqu'il fetoii: fort à défirei; qu'on pût l'employer à toutes fortes d'ouvrages-, lefquels en feroient aifurémcnt plus paifaitemeni: liifes & mieux drelî'cs qu'avec la peau de chien, qui, quelque précaution qu'on prenne, fait tou- jours quelques cavités à l'ouvrage. feme '^ECT. m. Manière de finir L'Ebénifterie de placage, ^c. 8(^3 feme de la gomme-laque en poudre, laquelle étant étendue avec le polilToir , ' - - remplit les cavicés du boisTans y faire de taches, en même temps qu'elle en Planche augmente la couleur. ^$6. On peut auffi fe fervir de colophane en poudre pour les bois noirs, ou bien mêler avec la cire des couleurs en poudre femblables à la couleur du bois , pour empêcher la cire d'y faire une teinte , qui , cependant , lorfqu'elle eft bien éten- due , ne peut pas être fenfible ; de plus , fi ofi craint cet inconvénient avec de la cire jaune , il faut en prendre de la blanche , laquelle ne tache point le bois. ' Quant à ce qui eft de la méthode de mêler de la gomme-laque , de la colophane ou autre ingrédient avec la cire pour polir le placage , elle eft certainement bonne à bien des égards; mais auffi fert-elle fouvent à mafquer les défauts de l'ouvrage, fur-tout aux yeux de ceux qui n'en ont pas une parfaite connoifl-ance. Le poli dont je viens de parler, eft celui dont on fait le plus d'ufage pour l'Ebénifterie de placage , parce qu'il fe fait tout à fec , ce qui eft néceEire pour ne point décoller les pièces. Il y a encore d'autres efpeces de polis , qui font le poli commun , le poli à feau & le poli à l'huile, foit au tripoli ou au charbon. Le poli commun n'eftpas, à proprement parler , du relforcdesEbéniftes, puif- qu'il ne fert ordinairement que pour les gros meubles , comme les Armoires , les Commodes , &c; cependant comme les Ebéniftes en font ufage quelquefois pour leurs ouvrages les plus communs , j'ai cru Jcvoir en parler ici plutôt que dans la partie du meuble , afin de ralFembler dans un feul article tout ce qui concerne les différents polis. Le poli commun fe fait fans aucun apprêt ; lorfque l'ouvrage eft fini & raclé le plus proprement poffible, fans cependant prendre toutes les précautions dont j'ai parlé plus haut, on le frotte de cire , laquelle eft ordinairement alliée d'un tiers de fuif , & on étend cette cire avec une broITe un peu rude , puis on efiliie l'ouvrage avec un frottoir de ferge. Pour étendre plus promptement la cire & la faire mieux entrer dans les pores du bois , on fe fert quelquefois d'une efpece de pocle de tôle , dans laquelle on met des charbons ardents , & qu'on paffè au- ' defllis de l'ouvrage le plus près poffible , afin de chauffer mieux la cire, Au lieu de cette poêle , on peut fe fervir d'un morceau de fer très-chaud & même pref- que rouge, lequel vaut d'autant mieux, qu'il fait bouillonner la cire & l'obligs de s'introduire dans les pores du bois , qu'on polit enfuite avec la brolTe. Si au lieu de fe fervir de cire mêlée , on fe fervoit de bonne cire, & même de cire blanche , on pourroit, en fuivant cette méthode, faire nn poliadmi. rable , tant pour la durée que pour la beauté, bien entendu toutefois qu'on n'en feroit ufage qa'à de l'ouvrage plein & afl'ez folide pour que l'adion du fer rougd qu'on paflê deffiis n'y puifle faire aucun mal. J'ai poli des ouvrages de bois de noyer de cette manière, qui font devenus auffi beaux & auffi luifants que les elaces. Le poli à l'eau fe fait de la manière fuivante : Après que l'ouvrage a été racléj Menuisier , III. Pan. III. Scc% L iq §64 ME NUISIE R, m. Pan. Secl. III. Chap. XI. ■•— ""~ on prend un morceau de pierre de ponce bien uni , que l'on trempe légèrement Planche dans i'eau , & avec lequel on frotte l'ouvrage de tous les fens poffibles , en obfer- vant de toujours finir à bois de fil ; & on continue l'opération jufqu'à ce que J'ouvrage foit parfaitement liflè , ce qui ne peut être qu'en réitérant l'opération .à diiférentes fois , & après avoir laifTé fécher l'ouvrage à chaque reprife. Quand l'ouvrage eft poli à la ponce , on le prêle enfuite , & on le polit à la cire à l'ordinaire , ou bien on le met en huile avec un linge ou une éponge , ce qui eft plutôt une couleur qu'un poli. Cette teinture , qui eft compofée d'huile de lin & d'orcanette , donne au bois une couleur brune , qui devient luifante -avec le temps. En générai , le poli à l'eau & à la ponce n eft guère propre qu'aux ouvrages de peu de conféquence , & qui font faits de bois rebours & tortueux , tel que le Noyer ruftique , l'Acajou tortillard , & autres femblables ; de plus , il laifTe tou- jours une efpece de limon qui entre dans les pores du bois , & qui a bien de la peine a s'en aller , ce qui fait un mauvais effet ; on ne peut faire ufage de ce poli qu'aux ouvrages fiùts en plein bois , l'humidité étant contraire aux ouvrages de placage. On fe fert aufll de la pierre de ponce à fec pour polir les bois blancs , comme le Sapin , le Peuplier & le Tilleul , ce qui les rend très-liffes & doux au toucher. Lorlqu on ne polie pas l'Ebcniftcrit; uveo la cire à l'ordinaire , & que l'ou- vrage eft aflez de conféquence pour y faire la dépenfe d'un plus beau poli , après l'avoir prêlé , on le polit avec du tripoli réduit en poudre paffee au tamis de Ibie , broyée avec un peu d'huile d'olive de la meilleure qualité , qu'on étend fur l'ouvrage avec un poliffbir à l'ordinaire , & qu'on elTuie enfuite avec le frottoir ; puis on prend un autre polilToir ( garni de peau de bufBe ou de chapeau ) avec lequel on recommence à polir l'ouvrage en y femant un peu de blanc d'Elpagne , pour enlever les taches , ôc on l'eflîiie enfuite avec un linge fin & propre. Le tripoli s'emploie différemment , félon les différentes efpeces de bois ; on le broie avec f huile d'olive pour l'Ebene , le Bois violet & la loupe de Buis ; avec- du ftiif pour le Bois rofe , & de f eau pour le bois de la Chine. L'Ebene fe polit auflî au charbon à fhuile, foit en poudre , foit avec un chat- bon entier , dont on aftûte bien le bout , c'eft-à-dire , dont le bout eft Uni & drelTé. Ces différentes efpeces de polis fe terminent toujours par le polilToir de buffle & un peu de blanc d'Efpagnc. Comme la plupart des couleurs des bois , foit des Indes , foit de France, ou des bois teints , perdent leur éclat avec le temps , Se qu'il eft très -important dé conferver ces couleurs, on ne pourroit mieux faire , après les avoir finis à la prêle & au tripoli , ou au blanc d'Efpagne , que de les vernir avec du vernis blanc , appellé communément vernis de Venifè. Quoique le vernis dont je parle foit un peu différent de ce dernier , le vernis, propre à mettre fur les ouvrages d'Ebé- nifterie , eft blanc , ou , pour mieux dire , fans aucune couleur : il eft compofé 'Sect. m. Maniéré de finir l'Ebéniflerié de placage, ôCc. 85; d'une pinte ou deux livres d'efprit-de-vin , de cinq onces de fandaraque la plus : blanche pofllble, de deux onces de maftic en larmes, d'une once de gomme élémy, & d'une once d'huile d'afpic , le tout fondu au bain-maric fans que l'cfprit- de-vin bouille ; & quand ce vernis eft refroidi , on le filtrfe au travers du coton , pour qu'il n'y refte aucune efpece d'ordure. Dn peut mettre plufieurs couches de ce vernis fur les ouvrages d'Ebénifterie » Jàns craindre qu'il en obfcurci/Te les couleurs , en faifant attention de ne pas mettre la féconde que la première ne foit parfaitement bien feche. Quand on a ainfi rais deux, quatre ou fix couches de vernis , & que la dernière eft parfaite- ment feche , on polit le tout avec un tampon fait de lifieres de drap roulées , ou avec du buiBe , fur lequel on met un peu de tripoli détrempé dans de l'eau ; enfuite on lave le tout avec de l'eau claire 5 & on l'effuie avec des linges blancs & fins. Cette méthode dé finir l'Ebénifterie j eft un peu plus coûteufè & plus fujette que les autres; mais auffi a-t-elle l'avantage d'être la plus parfaite , parce que le vernis , en bouchant tous les porcs des bois , faifit leur couleur , qui , ne pou- vant plus s'évaporer , refte toujours dans le même état , ce qui eft d'un très-grand avantage , vu que c'eft en partie dans la vivacité de ces mêmes couleurs , que confifte la beauté des ouvrages d'Ebénifterie , de quelqu'elpece qu'ils puiffenc être : & c'eft le feul moyen que je connoilîe pour donner du brillant h la cou- leur des bois teints. Les différents polis font applicables non-feulement à l'efpece d'Ebénifterie dont je viens de parler , mais même à toutes les autres efpeces dont je vais traiter ci-après , excepté cependant l'Ebénifterie oih on emploie l'écaillé , la nacre , Se les métaux , dont le poli fe fait d'une manière différente , comme je le dirai ert ion lieui Planche U6 MENUÎSÎE R, m. Part. SeB. 111. Chap. XIL CHAPITRE DOUZIEME. De rEbénifterie ornée , appellée Mofaïque ou Peinture en Bois , en général. L'e s r e c e d'Ebénifterie dont je vais traiter ici , eft la plus précieufè de toutes , Tant pour la délicateflè du travail , que pour les connoiflances qu'elle exige de la part de l'Ouvrier, qui , comme je l'ai dit au commencement de cette Partie , doit bien entendre le defi'ein de tous les genres, & connokre le ton & la nuance des couleurs , pour repréfenter , le plus parfaitement poiïible , toutes fortes de fujets , comme des bâtiments en perfpeilive , des ornements , des fleurs , des payfages, des figures, &c , le tout fait en bois de rapport de couleur naturelle ou teints, incruftés fur un fond d'Ebénifterie , foit de bois de placage ou en plein bois , ce qui eft égal quant à la manière d'opérer, du moins à très-; peu de chofe près , comme on le verra dans la fuite. La grande difficulté de cette efpece d'Ebénifterie, confifte non - feulement dans l'art de découper & d'incrufter les bois pour repréfenter , le mieux poflîble j différents fujets , mais encore dans l'art de donner à chaque pièce l'ombre qui lui eft néceflàire , ce qui fe fait par le moyen du feu ou des acides , & qui demande beaucoup d'attention & d'expérience pour le bien faire. Pour donner à la defcription de cette partie de l'Ebénifterie toute l'étendue convenable, & en même temps éviter les répétitions, je me contenterai de donner quelques exemples des différentes manières d'opérer , les plus générales & les plus néceflaires , lefquelles pourront s'appliquer à tous les cas , afin d'abréger , autant qu'il fera poffible , la fin de cette Partie de mon Ouvrage; étant d'ailleurs très-indiiïerent, dans la defcription dont il eft ici queftion , que l'on fâche à quelle elpece de meuble ou autre efpece de Menuiferie ces exemples feront applicables , puilqu'on peut les employer indifféremment à toutes , félon le goût de l'Artifte , ou , pour mieux dire , le defTein général de la pièce à revêtir , 8c la dépenfe qu'on veut y faire , laquelle doit toujours être très-confidérable , proportion gardée avec la première efpece d'Ebénifterie , celle dont il eft ici queftion , ne pouvant fouffrir aucune efpece de médiocrité dans l'exécution , ce qui la rend très-coûteufe lorfqu'elle efl bien faite ( * ). (") Rien de fi commun que de voir des meu- bles revécus d'Ebciufîerie de toutes les efpeces, & rien de plus rare que d'en trouver de parfaite- ment bien faits ; & cela moins par la faute des Ouvriers que par celle des Acquéreurs, qui , la plupart, fans goût & fins connoiflance , & ce *iui eft encore pis , fans avoir les facultés de payer de bons ouvrages, prennent indidinfle- ment celui qu'on leur préfente, pourvu qu'il leur coûte peu cher : de-Ià viennent le grand nombre & la mauvaili^ qualité desouvrages d'Ebénifterie a où, fans parler de l'épargne de la matière, la façon eil abfolument mauvaife , quant à la partie de la Uiéorle & de la pratique , & cette première Lorfque Sect. I. Principes élémentaires de Perfpeciive, ^é-f Lorfque j'ai traité fommairement des différentes elpeces d'Ebénifterie î page , j'ai mis celle dont il eft ici qiieftion dans une clafTe particulière , comme étant abfolument différente des deux autres efpeces, & cela pour donner plus d'ordre & de clarté à mon Ouvrage ; cependant il efl rare à préfent que la Mofàïque s'emploie toute feule , c'ef"t-à-dire , fur des fonds de bois unis ; au contraire on l'emploie prefque toujours avec l'Ebénifterie de la première efpeCc ^ c'eft-à-dire , la Marqueterie de placage , ftir laquelle on fincrufte, ce qui fen\- ble réunir les deux premières efpeces d'Ebénifterie , Se n'en faire qu'une feule» quoiqu'elles foient différentes l'une de l'autre, tant pour la théorie que pour la pratique. SectionPremiere,- k i Principes élémentaires des règles de Perfpeciive , dont la connoijfance ejl abfolument néccfaire aux Ebénifes. D E toutes les connoifFances néceffaires aux Ebéniftes , celle des règles de la ïerfjjeélive eft une des plus effentielles , & cependant celle qui eft le plus fou- vent négligée , rien n'étant plus commun que de voir des ouvrages qui fouvenC ne manquent pas de mérite , où les règles de Pei fpeâive font abfolument vio- lées, foit dans les deflîns que les Ebéniftus c^mvoC^nt eux-mêmes, ou dans ceux qu'ils copient, que fouvent ils rendent mal, ( fuppofé qu'ils foient bien faits), & cela faute de connoilTance des principes qui ont fervi à mettre ces deffins en perfpeétive. Pour obvier à ces difficultés, & pour faciliter les Ebéniftes pour lefquels cet Ouvrage eft particulièrement fait , j'ai cru ne pas pouvoir me difpenfer de donner ici quelques notions de cette fcience , le tout démontré méchaniquement , fans entrer dans aucun détail des rapports qu'elle a avec les règles d'Optique , & des autres parties des Mathématiques , dont la connoiflânce eft néceffaire à la parfaite théorie de la perfpedlive , mais dont , à la rigueur, les Ebéniftes peuvent fe paffer. La Perfpeâive eft une fcience par le moyen de laquelle on parvient à repré- fenter fur une furface plane , les différents objets qui frappent notre vue , comme les bâtiments , les payfages , & même les hommes & les animaux, non pas comme chacun de ces différents objets font exaélement , ( ce qui eft l'objet des delîins géométraux) mais comme ils paroiflènt à notre vue, & cela en raifon de la diftance qu'il y a de nous à eux , & de la façon dont ils nous font préfentés ; de forte totalement négligée , tant pour les comparti- ments de la Marqueterie , que pour les ornements de la Mofaïqae , lefquels font la plupart mai deffincs & fans goût, & le plus Couvent peu faits pour 'a place qu'ils occupent. Je ne prétends cependant pas dire ici qu'il ne fe trouve pas des ouvrages d Ebénillerie très-bien faits ; je fuis Menuisier , III. Pan. Ul. Sed, même très- éloigné de le penfér; au contraire j je fai qu'il y a d'excellents Artiltes dans cette partie , auxquels je rends toute la jultice polTible; niais par malheur le nombre n'en ell pas biea grand , & ne peut même pas l'être , pour les rai- fons que j'ai donrlées ci-dclfus , à la note de la page M lo Planche 257. SdS MENU ISIER, 111. Pan. SeS. 111. Ckap. Xll qu'ils diminuent de capacité en raifon du plus ou moins d'éloignement , & fera- blent en même temps changer de forme , quoiqu'en eflfet ils foient toujours les mêmes ; cette différence étant un effet d'Optique , dont la connoiffance de la caufe n'eft point néceffaire ici. On diftingue trois fortes de Perfpedlives , celle des lignes, celle des plans Sc celle des corps , qui , toutes trois , s'exécutent de la même manière , ce qui eft tout naturel , puifqu'elles dépendent toutes des mêmes principes , comme je vais le démontrer ci-après. ' Lorfque nous regardons un objet quelconque , l'efpace que notre vue em- braffe forme un cercle dont notre œil eft le centre , de forte que nous ne pou- vons appercevoir que les objets renfermés dedans. Ce cercle coté a a,fig. i ér 2» fe nomme cercle vijuel, & fon centre li , point de vue, auquel point tous les objets doivent tendre lorfqu'ils fe préfentent perpendiculairement à nous, c'eft- à-dire , à la bafe fur laquelle nous fommes pofés. Le point b fe nomme encore point horifontal , parce que la ligne c à, qui paffe par ce point , eft toujours de niveau , foit que l'objet fur lequel elle eft tracée , ou , pour mieux dire , qu'elle coupe , fe préfente parallèlement à la bafe ef, fur laquelle nous fommes placés , ou qu'il foit perpendiculaire à cette même bafe ef, qu'on nomme ordinaire- ment ligne de terre , parce qu'elle doit toujours être parallèle à la ligne horifon- tale c d,&. que fa diftance à cette dernière eft égale à la hauteur humaine , qui eft de 5 à (5 pieds , du moins pour l'ordinaire ; car il y a Jos cas où on hauffe ou' baifle plus ou moins le point de vue , ce qui n'empêche pas que la ligne de terre ne foit toujours parallèle à la ligne horifontale c d, dont les extrémités qui touchent le cercle vifuel, fe nomment points de diflances , auxquels points rendent toutes les lignes inclinées de 45 degrés à la ligne de terre. Le point g , fe nomme point de dijîance tranfpofé; 3c c'eft par le moyen de ce point que l'oa borne la longueur de toutes les lignes des plans , foit qu'elles foient parallèles à la ligne de terre , ou perpendiculaires à cette dernière. La ligne g 6,fe nomme originale , & elle doit toujours paffer par le point de vue l> , & par conféquenC couper en deux parties égales la ligne horifontale c d , à. laquelle elle eft per- pendiculaire. Quand on veut mettre un objet en perfpe£live, on commence par en tracer le plan géométral en deffous de la ligne de terre , comme , par exemple , la ligne h i,fig. Jj qu'on prolonge jufqu'à la ligne de terre qu'elle rencontre au point n ; puis de ce point on mené une ligne au point de vue b , ce qui donne d'abord rinclinalfon apparente de la ligne qu'on veut mettre en perfpedlive ; enfuite des points h, i, qui font les extrémités de la ligne géométrale, on mené deux lignes au point de diftance tranfpofé , lefquelles venant à couper la ligne n b, fig. r , aux points 0 , p , donnent la longueur de la ligne mlfe en perfpeéllve. Si on vouloit mettre en perlpeâive la ligne l m , parallèle à celle hi , fia. ^ , on opérerolt comme pour cette dernière , & on auroit la ligne ^ r en perlpec» Sect. Ï. Principes élémentaifes de Perfpeclivè. Sd^ tlve ,fig. I. Si au lieu des lignes perpendiculaires A i & Im de la figure 5 , on vouloit mettre en perfpeûive les lignes horifontales de la même figure, on fe Planchs Xerviroit toujours de la même méthode que pour les lignes perpendiculaires , c eft-à-dire , qu'après avoir élevé fur les extrémités de la ligne horifontale les perpendiculaires des points n 8c s , on mené deux lignes au point de vue 6 ; puis des points i & /, on en mené deux autres au point de dif- tance tranfpofé, leCpelles coupent les lignes menées au point de vue i^, & donnent les points o, r, par lefquels on fait paîTer une ligne qui eft parallèle à la ligne de ferre , qui eft celle il,fig.S, vue en perfpedive , dont elle ne diiïere que par la longueur. La ligne h m , fe met de même en perfpeaive, en menant de fes extrémite's h m , deux lignes au point de diftance tranfpofé , ce qui donne ,fig. i , h ligne horifontale p q , laquelle eft plus courte que celle 0 r , en raifon°de ce que la ligne h m ,fig. eft plus éloignée de la ligne de terre que celle i l. S'il arrivoit que les lignes il 8c km, quoique toujours parallèles cntr'elles,- fuirent d'inégale longueur , ou, quoique d'égale longueur, elles ne fulTent pas placées perpendiculairement au-defTus l'une de l'autre, comme, par exemple, de u à t, on fe ferviroit toujours de la même méthode pour les mettre en per- fpeaive , en obfervant de mener autant de lignes perpendiculaires à la ligne de terre , & de-là au point de vue, qu'il y auroic de bouts de lignes , ce qui eft fort aifé à concevoir. Lorfqu'on fait une fois mettre des lignes perpendiculaires & des lignes hori- fontales en perfpeélive , il eft bien aifé d'y mettre des quarrés , puifqu'ils ne font formés que par la combinaifon de ces deux efpeces de lignes , & qu'en démon- trant la manière de les mettre en perfpeclivè , j'ai tout de fuite conftruit un quarré , comme on peut le voir dans la figure i ; c'eft pourquoi je n'en, parlerai pas' davantage , vu que ce ne feroit qu'une répétition de ce que j'ai déjà dit. Si on vouloit mettre en perfpeélive les diagonales im & h l, du quarré jig. y & cela fans avoir égard au quarré mis en perfpeélive, /a-, i , on prolong^eroiC chacune de ces diagonales jufqu'à ce qu'elles rcncontralTent la ligne de terre aux points X 3cy; puis du point de diftance tranfpofé^, on tire deux lignes parai- leles aux deux diagonales qu'on veut mettre en perfpedive , & on les prolonge jufqu'à ce qu'elles rencontrent la ligne horifontale, ce qui, dans le cas dont il eft ici queftion, fe fait aux deux extrémités de cette ligne, où font les points de di- ftance c d, parce que les angles que forment les lignes dont je parle , avec la li- gne perpendiculaire du milieuou ligne originale , doivent être égaux avec ceux que forment les lignes qu'on veut mettre enperfpe^ive, & une ligne perpendi- culaire élevée au milieu de ces mêmes lignes ; & que ces angles étant chacun de 4^ degrés, il eft nécelTaire que les lignes gc&.gd, rencontrent la ligne horifontale à fes extrémités , de manière que c'eft toujours aux points de diftance que doivent tendre les lignes d'onglets ou de 4; degrés, mifes en peripeétive , ainfi qu'on Syo MENUISIER, III. Part. SeH. III Chap. XII. peut le voir dans cette figure , où la diagonale m i , prolongée jufqu'en x , eft -renvoyée au point d; & celle h l, prolongée jufqu'en , eft renvoyée au point c. L'opération que je viens de faire , ne fert qu'à donner l'inclinaifon des diago- Tiales ou lignes d'onglet , mifes en pcrfpedlive. Quant à leur longueur , on la borne de la rhême manière que celle des lignes horifontales , c'eft-à-dire , que de chaque extrémité des diagonales du plan , /%. J , on mené des lignes au point de diftance tranfpofé ; & le point où elles touchent les diagonales mifes en per- fpedlive , en borne la longueur , comme on peut le voir dans hifig. r. Les quarrés pofés fur l'angle , c'eft-à-dire , dont la diagonale eft perpendicu- laire à la ligne de terre, comme celui fig.6, fe mettent en perfpe6live par le moyen des lignes de leurs côtés , prolongées jufqu'à la rencontre de la ligne de terre, aux points i, 2, 3 Se f. Se de-là reportées aux points de diftance qui leur font oppofés, c'eft-à-dire , ceux i & 2 , au point d. Se ceux 3 & y, au point c, ce qui donne, Jîg. 1 , le quarré fur l'angle 4, ^, (5 & 7, vu en per- fpeélive , dont la diagonale 7 , J , tend au point de vue , ce qui doit être , puif- que cette même diagonale eft perpendiculaire à la ligne de terre dans la figure 6. Les quarrés fur l'angle peuvent auffi fe mettre en perfpedlive par le moyen des lignes perpendiculaires élevées de leurs angles à la ligne de terre, menées enfuite au point de vue , & coupées , par des lignes menées de ces mêmes angles , au point de diftance tranfpofé , ainfi que je l'ai fait pour le quarré/g-. ^ & x \ mais cette dernière méthode eft plus compliquée que k première qu'on lui préfère dans le cas dont je parle ; cependant cette méthode a le défauc d'être plus jufte que l'autre, parce que les lignes dont on fe fert s'approchent moins , & par conféquent donnent des points de fedion plfis juftes que ceux qui font donnés par la rencontre des lignes tendantes aux points de diftance , lefquelles font toujours très-inclinées à l'horifon , & par conféquent tendent beaucoup au parallélifme , ce qui en rend le point de rencontre moins certain , pour peu qu'on n'opère pas bien jufte, ce qui , quelquefois , donne des erreurs confidérables , fur-tout dans de petits objets ; c'eft pourquoi il eft bon de s'affu- rer de la juftefle de l'opération par la méthode du quarré , comme je l'ai obfervé dans la figure 1. Quand les plans font difpofés de manière que ni leurs côtés ni leurs diago- nales ne font pas perpendiculaires à la ligne de terre , comme à l'ifig. 7, on fe fèrt toujours des mêmes méthodes que ci-devant \ à l'exception que fi on veut employer la méthode du quarré fur l'angle , les points de diftance changent en raifon de l'inclinaifon des côtés du quatre , lefquels étant plus ou moins inclinés à l'horifon , donnent des points de diftance inégaux, comme ceux a, b,fig. 2 é'* 4 , qui alors fe nomment points de dijlance accidentels ; ces points font toujours donnés par des lignes partantes du point de diftance tranfpofé , & menées parallèlement aux côtés oppofés de la figure du plan , de forte que l'angle cd, 7%. 3 , eft égal à l'angle gh^fig.jiôi l'angle de,ç?i égal à celui/^ , même fig. Les Sect. I. Principes élémentalrès de Perfpective. 871 tes diagonales de ce quarré tendent auflî à d'autres points de vue accidentels; celle 0 n, qui partage la figure en deux , & par conféquent l'arc de cercle fm cr» Planche k , aufll en deux parties égales , eft donnée en perfpedive par une ligne partante du point de diftance tranfpofé, Si. qui partage en. deux parties égales l'arc de cercle cûfe au point i, duquel point étant prolongée jufqu'à la ligne d'horifon, elle donne le point / pour point de diftance accidentel , duquel , au point m , on fait paiîèr la diagonale demandée. Le point de diftance de l'autre diagonale fe trouve par la même méthode ; (î je ne l'ai point marqué ici, e'eft que non-feulement il eft très-loin au dehors de la Planche, mais encore parce que j'ai cru que ce que je viens de dire étoit fufE- ' faut , fans embarraSèr davantage cette figure , qui l'eft déjà beaucoup , vu fon peu de grandeur. Les figures circulaires fe mettent en perfpedive de la même manière que les quarrés; on divife leur furface par un nombre de perpendiculaires quelcon- que, qu'on prolonge jufqu'à la ligne de terre , & qu'on mené enfuite au point de vue pris par des lignes provenantes du point de diftance tranfpofé , & menées! aux points de divifion de laj%. 8 : on a , fur la figure 4, des points de fedtion qui donnent la figure du cercle vu en perfpedlive. Ce que je viens de dire , renferme à peu-près tout ce qu'on peut dire touchant la perfjSeâive des plans , du moins pour ine confoi-mcr au peu d'étendue que je me fuis propofé de donner à cette matière : refte préfentement à dire quelque chofe de la perfpeélive des corps , laquelle eft très-aifée , celle des plans étanc une fois bien entendue. J'ai dit ailleurs , en parlant des corps folides , qu'on pouvoit les confidérec comme une infinité de plans très-minces , placés au-deffus les uns des autres ; en fuivant le même raifonnement , par rapport à la perfpeâive , il fera fort aifé de concevoir que des corps réguliers mis en perfpeélive , ne font autre chofe que plufieurs plans élevés au-delEis les uns des autres , & qu'on doit s'imaginer voir au travers des corps , comme s'ils étoient tranfparents. Soit les quatre quarrés a , 1^ , c , d , fig. 14, le plan de quatre prifmes qu'on veut mettre en perfjîedive ; on commence d'abord par tracer leurs plans perfpec- tifs fuivant la méthode que j'ai donnée ci- deffus, ainfi que ceux e,f, g,h,figi. 51 ; puis à chaque angle de ces plans perfpeâifs, on élevé autant de perpendi- culaires qu'on prolonge indéfiniment ; ce qui étant fait, d'un des angles du plan géométral , on élevé une ligne perpendiculaire comme celle L l, laquelle coupe la ligne de terre au point m , & fur laquelle on marque la hauteur des prifmes en partant de la ligne de terre ; enfuite la hauteur étant bornée comme , fuppofé , au point / , on mené de ce point une ligne tendante au point de vue p , laquelle donne la hauteur perfpedive de toutes les lignes perpendiculaires élevées des angles des plans perfpeétifs, en obfervant toutefois que cette hauteur n'eft exac- tement vraie que pour les lignes élevées fur le côté du plan perfpeélif , corrsf- MmUISIER , ///. Van. 111. Seîi^ N 10 ME NUISIE R, 111 Part. SeB. lll.Chap. XIL pondant à celui du plan géomécral , fur lequel la ligne im l a. été élevée. La hauteur des lignes perpendiculaires élevées fiir les autres côtés du plan perfpec- tif, eft bernée par des lignes horifontales , tracées des points où la ligne If rencontre les autres perpendiculaires , comme on peut le voir dans cette figure, ■où les quatre prifmes font terminés par cette méthode , & dont les quatre plans fupérieurs q , r, s , t, font exactement perpendiculaires & femblables aux plans inférieurs e ,f , g , h. Quand je dis que les plans fupérieurs font égaux aux plans inférieurs, ce n'eft que fiir leurs faces verticales ; car pour leur épailfeur, elle efl plus ou moins conCdérable , félon qu'ils font plus ou moins éloignés de la ligne horifontale , où cette épailfeur eft réduite à une feule ligne , c'eft-à-dire , à rien. Voye^ ^'^fiS' 9 > ^'^^ plans donnés par les lignes np 8c o p , font iné- gaux fur leur épaifleur , non-feuleraent entr'eux , mais encore avec ceux des bouts inférieurs & fupérieurs des prifmes. Que la hauteur des prifmes dont je parle , (ou de tel autre corps régulier quelconque ) foit donnée par une ligne élevée du côté intérieur ou extérieur du plan géométral , cela eft indifférent , comme on peut le voir dans cette figure , où la ligne x u , qui eft égale de hauteur à celle / 1 , étant menée au point de vue j> , donne pareillement la hauteur des prifmes , en obfervant toujours de prendre des points de hauteur fur les perpendiculaires élevées fur les côtés du plan per- fpeélif , qui corre/pondent à ceux du plan géométral fur lequel la ligne des véri* tables hauteurs a été élevée , ainfl que je l'ai recommandé ci-defTus. Tous les corps réguliers fe mettent en perlpeélive par la même méthode , & on peut même l'appliquer aux corps irréguliers , en les réduifant à des formes régulières , comme des cubes , des prifmes , &c. afin d'avoir des points d'après lefquels on puilfe partir pour les mettre en perfpeiSlive , comme on le verra ci- après. La figure lo repréfente une pyramide en perfpeéllve, dont la hauteur eft donnée par une ligne provenante du centre de fon plan ,fia. i J , ce qui eft tout naturel, vu qu'il n'y a qu'à ce point qu'exifte la véritable hauteur de la pyramide. S'il arrivoit que la pyramide , au lieu d'être droite comme celle repréfentée dans cette figure , fût inclinée , & que fon fommet , au lieu d'être à fon centre j , fût au point :^ ,fig. i J , on auroit toujours fa hauteur perfpeélive , en élevant de ce point une perpendiculaire , fur laquelle feroit tracée la véritable hauteur , que l'on feroit tendre au point de vue , pour avoir la hauteur perfpedtive de l'axe incliné, comme on peut le voir dans hjicr. ro. Les corps cylindriques fe mettent en perfpeélive par la même méthode que les corps quarrés; ceux qui fe préfentent de face, comme la^^. i6 , font les plus faciles , il ne s'agit que de mettre leur axe & leur diamètre perpendiculaires en perfpedive , tendants au point de vue ; puis à la rencontre des lignes ten- dantes au point de diftance tranfpofé , avec la ligne de diamètre inférieur , on élevé les perpendiculaires ab ôicd, dont la longueur donne le diamètre des Sect.Î. Principes élémentaires de Perfpecllvê. 873 ^ellx bouts du cylindre vu en perfpedive. Cette opération étant faite, du milieu de chacune de ces perpendiculaires, comme centre , on décrit deux cercles , PtANCHs auxquels on mené deux tangentes , l'une en deflus , & l'autre en deffous lef- ^^7' quelles donnent un diamètre apparent du cylindre vu en perfpedive , qui augmente d'autant plus , que le cylindre eft plus écarté de la ligne originale ; car quand il eft très-proche de cette dernière , le diamètre n'augmente pas; & même lorfque cette dernière lui fert d'axe , il diminue en apparence, & cela en raifon du plus ou moins d'éloignement qu'il y a de l'œil à l'objet, comme on peut le voir dans la figure 12 , où les lignes i & /, provenantes du point h, font tangentes avec le cercle beaucoup plus loin de fon diamètre que les lignes J,g, provenan- tes du point e , qui eft le plus éloigné du cercle ; de forte que dans le premier cas ce dernierne femble avoir de diamètre que la corde m „, donnée par le point de contaa des deux tangentes ; au contraire , quand l'axe du cylindre eft éloigné de la ligne originale , foit à droite ou à gauche, fon diamètre augmente en appa- rence, parce que la ligne ep , qui eft fuppofée partir du point de vue, entre dans le diamètre du cylindre pour atteindre le point q , ce qui donne un petit fegment^ n o , dont l'ordonnée , ou , pour mieux dire , la largeur doit être aug- mentée au diamètre du cylindre , comme on a pu le voir dans lesj^g. 4 (& 8 , fur lefquelles je n'ai pu faire de démonftration , à caufe de la petiteffe de la figure , quoique ce fût la véricabie pJace de le faire ; ce qui , au reftc , ne faic rien à la chofe , puifque cette démonftration eft applicable non-feulement aux plans circulaires, mais même aux corps cylindriques & fphériques , comme on peut le voir dans la figure i r. Les cylindres vus de côté , comme celui 7%. 17 , fe mettent en perfpeclive comme les corps quarrés, ainfi que la _fig. ly, enfuite fur une des lignes qui ont fervi à donner la hauteur du prifme dans lequel le cylindre doit être infcrit on décrit le demi-cercle ^ ri , qu'on divife en quatre parties égales, qu'on fait tendre au point de centre f , &; on mené ces divifions au point de vue à l'ordi- naire ; puis aux points où elles rencontrent les diagonales des bouts du prifine on fait paffer des courbes qui décrivent les deux bouts du cylindre vu en per- Jpeélive. Ce cylindre, ainfi que celui ir, augmente de diamètre en raifon de ce qu'il eft plus ou moins éloigné de la ligne horifontale , ce que je n'ai pas pu trop faire fentir , à caufe de la petiteffe de la figure , ce qui, au refte , n'eft pas fort néceffaire, après ce que j'ai dit en expliquant la figure 12. La Figure 20 repréfente la perfpedive d'une partie d'Architeâure , avec un avant-corps au milieu, laquelle eft repréfentée en plan dans la figure 24 , & au pourtour duquel règne une marche , afin que la per/pecSlive foit un peu plus compliquée , & qu'on y reconnoiffe les différentes opérations que j'ai démon- trées ci-deffus. La Figure 2^ repréfente ce même corps avec la faillie de la corniche qui k Syit MENUISIER, m. Part. SeB. III. Chdp. Xll couronne, lefquels font repréfentés en plan perfpe6lif dans la fig. 2.I ; au» deffiis ,Ji'g. 18 , eft l'élévation de ce même corps avec fa corniche , laquelle fe met en perfpedive de la manière fuivante. Sur la ligne perpendiculaire provenante d'un des angles du plan géométral, «n trace le profil de la corniche de la forme & à la hauteur qu'elle doit être , & en trace tous les membres fur cette ligne aux points a,b,c,d, defquels pomts en mené autant de lignes au point de vue, jufqu à ce qu'elles rencontrent l'angle de la partie mife en perfpec^live , au pourtour de laquelle on les fait tourner en fuivant les différentes formes du plan ; puis h chaque angle du plan, & à la ren- contre de ces lignes, on en fait palfer d'autres tendantes aux deux points de diftance , félon la direftion des angles de la corniche , comme il eft indiqué fur le plan , fig. ïï. Ce qui étant fait, à l'un des angles faillants ou rentrants, ( ce qui eft égal) on trace la forme du profil, auquel on donne une faillie égale à celle qui eft marquée fur le plan à cet endroit; & par chaque angle que forme ce profil , on fait paifer des lignes tendantes au point de vue , lefquelles venant à rencontrer les diagonales des angles qui leur font correfpondantes, donnent la perfpedive de la corniche , ainfi qu'on peut le voir dans h fig. 18, & dans celle cote A,où cette opération eftfaiteplus en grand, pour qu'elle foit plus fenfible. On pourroit fe difpenfer de tracer ce double profil , en retournant celui de lalio-ne des hauteurs en dedans, & un opér^mt fur le premier angle faillanC comme s'il étoit rentrant , ce qui abrégeroit beaucoup fouvrage , qui en feroic en quelque façon plus jufte , ce que je n'ai pas fait ici , parce que la figure eft très-petite , & que la double opération qu'il autoit fallu faire au premier angle faillant, l'auroic trop embrouillée. La Figure 22 repréfente une bafe en perfpeaive , dont le plan géométral eft en-bas , /g-. 25. Quand on veut mettre une bafe en perfpeûive , on trace le plan perfpeaif avec toutes les faillies des moulures, à la rencontre defquelles, avec les lignes perpendiculaires & diagonales du plan , on élevé autant de per- pendiculaires , ainfi qu'au point de centre ou axe de la colonne ; ce qui étanc fait , on porte fur cette perpendiculaire , élevée au centre du plan perfpeûif , la hauteur de tous les membres de moulures de la bafe, afin d'avoir autant de points , par lefquels on tiré des lignes tendantes aux points de diftance & au point de vue , afin qu'à leur rencontre avec les perpendiculaires du plan qui leur font correfpondantes , on trace les profils a,b,c,d, par lefquels on fait palier les lignes des contours de la bafe. Les chapiteaux , /?^. 19 , 23 (& 27, fe mettent en perfpeftive de la même manière que les bafes, & fouvent même un profil fuffit , ainfi qu'à ces dernières , pour les mettre en perfpefli ve , du moins pour la partie quarrée ; car pour la partie ronde il faut nécefi"airement faire un plan perfpeûif , afin d'avoir des points fur les iignes diagonales de ces derniers , pour former des profils par lefquels paffenc les contours des njoulures , comme je fai obfervé aux/^. 22 , 19 (& 33. Le§ Sect. I. Principes élémentaires de Perfpeclivè. 87^ Les règles de Perfpeaive que je viens de donner, n'ont pour objet que ce — - qui regarde la forme des plans ou des corps. Il y a encore une autre efpece de Plancf Perfpedive, qu'on nomme Perfpc3ive aérienne, laquelle a pour objet la couleur des corps, c'eft-à-dire , les différentes nuances qu'ils prennent par la lumière qui les éclaire, &les ombres qui les obfcurciffent ou qui les couvrent, & cela en raifon du plus ou moins de diftance qu'il y a de nous à l'objet. L'air qui nous environne , ainfi que les objets que nous appercevons , quoi- qu'un fluide très-tranfparent, ne laiffe pas que de diminuer la lumière que les corps reçoivent, & qu'ils nous réfléchilFent ; plus il y a de diftance de nous à l'objet éclairé , & plus le volume d'air qu'il y a entre nous eft épais : de forte que non-feulement la lumière qui frappe fur ces corps devient moins vive, mais encore leurs couleurs , ce qui eft tout naturel , puifque les couleurs n'exiftent qu'où il y a de la lumière , & que l'afFolbliffement de cette dernière entraîne néceffaire^ ment celle des couleurs; c'eft pourquoi dans une Perfpeûive qui repréfente un objet avec plufieurs avants & arrierés-corps , comme la fig. 4 , le premier corps L , doit être plus éclairé que le fécond M , celui-ci plus que celui N, & ce der- nier enfin plus que celui O. Il en eft de même des 3 deflus des marches F, Q, R. Les ombres doivent être auffi en raifon de la lumière , c'eft-à-dire , que plus cette dernière eft vive , plus les ombres doivent être marquées; c'eft pourquoi celles X, Y, font les plus fortes de toute cocte figure, étant les plus proches de l'œil. Les reflets , comme ceux S,T,U, doivent auffi être plus fenfibles où la lumière eft la plus vive , & s'éteindre à mefure qu'elle s'afFoiblit , & que les ombres deviennent plus pâles. Cette diflïrence de lumière & d'ombre doit être non-feulement en raifon da l'éloignement des corps , mais encore de leur pofition continue ou éloignée les uns des autres , parce que la lumière fe réfléchit plus ou moins, félon ces diffé- rentes pofitions ; les ombres s'affljibliflent lorfque les corps font près les uns des autres , parce que la lumière qui réfléchit d'un corps fur un autre , diminue la force des ombres qui portent fur ce dernier, fur-tout quand les corps font éclairés par la lumière du foleil , laquelle produit beaucoup de reflet , & donne des ombres vives & tranchantes comme celles de cette figure. Je ne m'étendrai pas davantage fur cette partie de la Perlpeâive, dont la' . connoiflànce eft cependant très-néceiTaire aux Peintres en bois , qui ne doivent rien négliger de ce qui peut concourir à la perfeâion de leur Art , qui n'a de vrai mérite qu'autant que les objets qu'il repréfente , approchent de la vérité la ' plus près poffible ; c'eft pourquoi à la fcience de la Perfpeètive , tant linéaire qu'aérienne, ils doivent joindre celle du mélange & des nuances des couleurs des bois dont ils font ufage , ce qui demande de leur part beaucoup d'étude & d'ex- périence , afin qu'en faifant choix des bois & en les ombrant, ils ne foient pas trompés fur l'effet qu'ils feront lorfqu'ils feront employés & finis ( * ). (*)Les notions de Perfpeaive que je viens | fujets repréfcntant des ouvrages d'Architeflure de donner , fout applicables non-feulement aux | mais encore à des fujets de payfages , de figure» Menuisier , ///, Pan. III. Scéi. 0 10 ° tj6 MENUISIER, ÎIl. Pan. Se3. III. Ckap. XîL ' ^ Ce que je viens de dire toucKanc les règles de la Perfpedive , quoique très- PiANCHE fuccindl , renferme à peu-près toute la théorie-pratique de cette fcience démon- trée méchaniquement ; & comme mon deflèin n'a pas été de donner un Traité complet de Perfpeélive , mais feulement des notions élémentaires, par le fecours defquelles on pût mettre méchaniquement diverfes fortes d'objets en perfpec- tive , je crois m'être affez étendu pour pouvoir donner aux Ebéniftes le moyen d'éviter de faire des fautes grolfieres en Perfpeélive , & d'entendre paffabïement les diverfes opérations de cette fcience , dans laquelle ils peuvent d'ailleurs fe perfeaionner par l'étude des divers Ouvrages qui ont été faits fur cette matière , mon deflein n'étant pas de les éloigner de l'étude des fcierices néce/Taires à leur état , mais plutôt de les difpofer &. de les encourager à le faire' pat les notions abrégées que j'en donne , & que je ne pourrois pas même rendre plus étendues, vu les bornes que je me fuis prefcrites. Avant d'exécuter la Perfpedlive fur l'ouvrage, il faut d'abord en faire le tleffin félon les règles que j'ai données ci-delTus, foit que ce defTm repréfente des compartiments en plan , comme les Jig. 2 <& 3 , ou des corps en élévation , comme la_;%. 4. Le deffin étant fait , non-feulement au trait , mais ombré , & même colorié , on en trace toutes les parties fur l'ouvrage , non pas en le décal- quant comme les deffins d'ornements & de figures dont je parlerai ci-après , mais en le traçant à nud avec la pointe , aCn que toutes les parties foient à leur place. Se qu'elles tendent bien aux différents points. Soit , par exemple , les figures 26-3, repréfentées en petit fig. i , qu'on veut tracer fur l'ouvrage, on commence par marquer fur cette dernière les deux points de diftance , C, & le point de vue B, auxquels points on pofe une pointe très-fine pour faire un point d'appui à la règle, de laquelle on fe fert pour tracer les compartiments dont les diftances font données par le deffin qu'on a fait. Les règles dont on fe fert pour tracer la PerfpetSive , n'ont ordinairement rien de particulier ; cependant il feroit bon qu'elles fuflent faites comme celle repréfentée/^. 5 , dont l'extrémité D, eft garnie des deux côtés d'une platine de fer ou de cuivre , dans laquelle eft percé un trou rond , dont le centre c répond parfaitement avec le devant de la règle a ^ ; de manière qu'en faifant entrer dans ce trou les pointes placées aux points A,B, C,fig. i , on feroit sûr do ne point varier en aucune manière , & que toutes les lignes tendroient à leurs points. Si cette règle étoit toute de fer ou de cuivre , elle n'en feroit que meilleure , parce que non-feulement on s'en ferviroit pour tracer la Perfpedive fur le bois, mais encore pour l'incrufter, vu que cette règle étant fixée d'un bout au point de vue ou de diftance , & de l'autre fur la pièce , par le moyen d'un valet ou d'une preffe à main , elle pourroit feryir de conduite pour appuyer les couteaux de & de fleurs , dont la condruaion va faîre le fu- 1 nerai la méthode d'ombrer les bois foit pal ;ct de la Seftion fuivaace , dans laquelle je don- I le moyen du feu ou des acides, (Sec. ' 877 Sect . 1. Principes élémentaires de Perfpeciive. îaîlle , les fcies à découper & autres outils dont on fe fcrt pour incrufter. - Quand la Perfpec^ive eft tracée fur l'ouvrage , on en prépare toutes les nièces, P'-'^nche ce qui demande beaucoup d'attention de la part de l'Ouvrier , parce que toutes ces pièces font d'une forme irréguliere & d'inégale grandeur entr'elles , foit que leur direction foit au point de vue ou aux points de diftance ; cependant quand les figures font des quarrés perfpeélifs , comme dans la fig. a , elles font un peu moins fujettes , parce qu'on peut préparer des bandes de carreaux parallèles & d'inégale largeur entr'elles , qu'on coupe enfuite fuivant l'inclinaifon qu'elles doivent avoir peur tendre au point de vue , ce qui fe fait en mettant la pièce au-deiTus de la place qu'elle doit occuper, & en faifant palTer la règle par-delTus, de manière qu'on la découpe jufte avec le couteau de taille ; après quoi on peut la recaler , s'il eft nécelEire, dans un bois à recaler mobile , puis on les met en place à l'ordinaire. Les bois à ajufter mobiles , y%. 7 8 , font compofés de deux pièces de bois chacun, dont une , qui eft celle qui porte l'ouvrage , & contre laquelle frotte le rabot, eft fixe fur l'établi ; l'autre, au contraire, eft mobile fur la première afin de pouvoir prendre l'inclinaifon qu'on juge à propos de lui donner. La pièce de defTous du bois à ajufter , 7 , eft ravalée de l'épaifll;ur de la règle ou joue mobile EF, afin d'avoir un talon G, contre lequel on pui/Te appuyer la pièce qu'on ajufte. La rc-gle E F , arrêtée par le moyoa de deux vis , & elle eft percée de deux mortaifes d'une largeur égale à la groifeur du collet de ces dernières, afin qu'on puiffe la mettre à telle diftance du bout de la pièce de deflbus , & félon la pente qu'il eft nécelTaire de donner à la pièce à recaler. La règle de l'autre bois à recaler ,fig.2, eft fixe au point U, de manière qu'elle ne fe meut que du bout l, où on la fixe par le moyen d'une vis placée comme celle de la figure 7. Je n'entrerai point ici dans le détail de la forme & de la conftrudion des diffé- rents objets qu'on peut mettre en perfpedive ; il n'importe quels ils foipnt , pour- vu qu'on les affujettifle aux règles que j'ai données ci-defllis , tant pour la forme générale & particulière de^hacun d'eux, que pour la manière de les exécuter, qui eft à peu-près toujours la même que pour l'Ebénifterie de placage , vu que la Perfpedive peut également fe placer fur des fonds de bois pleins ou de bois de rapport , ainfi que cette dernière ; c'eft pourquoi je me fuis contenté de don- ner ici, dans les jÇ^. 2 6- 3 , des exemples de compartiments mis en perfpeéliva félon les règles que j'ai données ci-deffus. J'ai pareillement donné, dans les/^-. ^& 6, des exemples de corps en perfpeélive félon ces mêmes règles , où j'ai eu attention de laiffer une partie des lignes de conftruâion , afin qu'on recon- noilTe plus aifément la marche des opérations qui ont fervi à les conftruire. §78 MENUISIER, m. Part. SeS. 111. Chap. XlL Section Seconde. la manière de découper , d'ombrer , d'incrufier les Ornements de bois de rapport. D E teU» nature que foient les Ornements de Mofaïque , il faut , avant toute chofe , les deffiner à part fut le papier le mieux poffible , comme la fig. i , en v obfervant toutes les ombres nécelTalres , félon que ces mêmes Ornements doi- vent être placés , foit à droite , foit à gauche de l'ouvrage , ou bien félon que ce dernier eft éclairé, fuppofé qu'il foit d'une nature à -ft- - f « ' ^^^^ ' par exemple , les revêtiffements d'Appartement , ou même des Meubles qu: font faits expris pour occuper une place dont ils ne doivent pas fortir ce ou. eft très- e-rentieî à obferver , n'y ayant rien de fi ridicule à voir que des Ornements qur étant faits pour paroître faiUants , font ombrés du côté par lequel ds font éclaires , ce qui arrive fouvent lorfqu'on ne prend pas la précaution que je recommande "ouand les Ornements font ainfi deffinés fur lepapier , on en prend le calque pour les tracer fur le bois , ce qui fe fait de plufieurs manières. La plus ufitee , & celle aon. fe fervent les Ebéniftes , eft d'appliquer fur le deffin un autre papier blanc , puis d'oppofer les deux enfemble à la lumière , ce qui fe fait en Lpofantfur un verre placé verticalement au grand jour ou même fur un carreau de la croifée , ce qui eft égal , pourvu que les traits du deifm puiffent s apperce- voir au travers du papier appliqué fur le deffin ; enfuite on prend un crayon , & on trace fur le papier blanc tous les traits du deffm , qui fe trouve exademenc calqué de cette manière , qui n'a d'autre défaut que d'être peu commode , vu ■ qu'il faut deffiner ce calque verticalement , & même , s i eft poffible , un peu h,cliné du haut en devant, afin que le jour frappe mieux deffus , ce qui rend la pofition de celui qui eft obligé de deffmer ainfi , trcs-fatlguaate ; c eft pourquoi fe crois qu'il vaudroit mieux prendre les calques à la manière des Graveurs , foit en appliquant fur le deffin un papier huilé ou verni, ou même un papier fer- pente très-fin, au travers duquel on puiffe lire tous les traits du deflin, qu on calque enfuite à la plume avec de l'encre de la Chine un peu forte pour le papier huilé ; avec une pointe fine , un peu arrondie par le bout, pour le papier verni ; & avec de l'encre de la Chine ou du crayon, pour le papier blanc. On peut encore prendre le calque d'un deffm, en frottant le derrière du deffm avec de la mine de plomb, ou de la fanguine tendre pulvérifee, & en l'appliquant légèrement fur un papier blanc ; enfuite on prend une pointe fane , av»c laquelle on paffe fur tous les traits du deflm , qui , par ce moyen , fc trou- vent tracés fur le papier blanc qui eft fous le deffin , & qu'on repaffe enfuite foit à l'encre ou au crayon , pour affurer les traits qu'on y a faits. Cette dermere elpece Sect. il Découper, ombrer, inerafterles Ornements, ôCc. ?>79 efpece de calque s'applique & fe colle fur le bois qu'on veut découper , ce qui fe fait à la manière ordinaire , comms je le dirai ci-après. Planche Quand on a beaucoup de parties d'Ornements d'une forme femblable, comme, par exemple , la rofàce repréfentéc fig. l & fuiv. on eft alors obligé de prendre plufieurs calques pour les coller fur le bois ; ou bien quand la chofe n'eft pas d'une très-grande conféquence , on fait un calque de papier un peu fort , qu'on frotte de fanguine par derrière, & qu'on fait décalquer fur le bois avec une pointe à fordinaire , ou bien on pique ce même calque avec une épingle , en fuivant tous les contours le plus jufte poflible ; puis avec un petit làchet de toile fine , rempli de mine de plomb fine ou de fanguine pulvérifée , on frotte fur le calque , lequel étant placé fur le bois , y laiffe une traînée de points qui indi- que le contour de la pièce à découper. Cette dernière méthode n'eft bonne que pour les grandes parties ; car pour les petites , il vaut mieux faire autant de calques qu'on a de pièces femblables a faire, ce qui en rend l'exécution beaucoup plus parfaite. Dans le cas dont il eft ici queftion, on peut encore fe fervir d'un modèle de fer-blanc ou de cuivre très-mince , contourné de la même manière que les piecés qu'on veut découper , ce qui eft beaucoup plus jufte que des calques de papier, qu'il eft très-difficile de delfmer parfaitement femblables , fur-toUt quand on en fait un grand nombre d'une forme pareille, ce qui doit faire préférer la méthode que je donne ici , qui n'eft pas plus coûteufe que celle dont on fe fert ordinaire- ment , parce que fi on perd du côté du prix de la matière , on gagne d'un autre côté par le temps qu'on épargne , & , ce qui eft fort à confidérer , par la plus grande perfeélion qu'on donne à l'ouvrage. De plus , les calibres ou patrons ainfî faits en fer-blanc ou en cuivre très-mince , peuvent fervir très-long-temps fans fouffrir d'altération fenfible dans leurs formes , ce qui eft un double avan- tage qui doit les faire préférer aux calques de papier , du moins dans le cas où on a un grand nombre de pièces femblables à découper , comme les rofaccs repré- fentées fig. l , ou toute autre de cette efpece. On doit cependant obferver que ces modèles, foit en fer-blanc ou en cuivre, ne peuvent fervir que pour les contours extérieurs des pièces , & que les con- tours intérieurs fe tracent à l'ordinaire , à moins qu on ne voulût faire autant de modèles que chaque pièce feroit compofée de parties différentes , ce qui ne pourroit être que dans des pièces d'une certaine grandeur. Les Ornements en général, font réguliers comme ceux de cette Planche , ou irréguliers. Dans le premier cas, il faut avoir grand foin que toutes les parties qui les compofent foient parfaitement femblables & égales entr'elles , du moins cha- cune avec là femblable, ce à quoi on parvient aifément, en prenant fur le deffin les extrémités & les diftances de chaque partie , & en les indiquant foit par des lignes droites &horifontales, ou enfin par des cercles concentriques furie calque ou fur la pièce à découper, fuppofé qu'on n'y colle point de calque , comme )Q Menuisier , IIL Paru III. Stil. P lo S8o ME NU ISIER, m. Pan. Sec! IlL Chap. XII. l'ai obfervé à la figure a , afin que ces lignes ainfî tracées , fervent à corriger les inégalités qui pourroient s'être glilTées , foit en faifant le calque , foit en le décal- quant. Les Ornements de Mofaïque étant ainfi calqués & reportés fur la pièce de placage deftinée à cet ufage , il faut les découper , ce qui fe fait avec la fcie de marqueterie dont j'ai donné la defcription ci-delTus , ainfî que la manière d'en faire ufage ,fage §43 ô fuiv. Lorfqu'on découpe les Ornements , il faut avoir grand foin d'en fuivre les contours le plus parfaitement poflîble , tant à l'intérieur qu'à l'extérieur , & on doit aulTi obferver d'en découper toutes les parties faillantes , & de les détacher les unes des autres , afin de pouvoir les ombrer comme on le juge à propos; Kojf j la fig. 3 , qui repréfente la roface deffinée fig. i , toute découpée , & les morceaux féparés les uns des autres pour les préparer au feu & y donner les ombres , comme il eft indiqué dans le deffin fig. i. Quand les parties font trop petites pour être féparées, comme les côtes des quatre feuilles A, B,C, D, fig. 3 , on ne les refend pas à la fcie , & on fe contente de les indiquer au burin, comme je l'enfeignerai ci-après ; cependant il eft beaucoup mieux de les refendre , à moins qu'elles ne foient abfoluraent trop petites pour pouvoir le faire , parce qu'il eft toujours plus facile de les ombrer que quand elles ne le font pas ; & que les ombres faites , foit au feu ou par le moyen des acides , font beaucoup plus douces & plus naturelles que celles qu'on fait au burin. Quant à la manière de découper les Ornements , c'eft la même chofe que pour les pièces circulaires dont j'ai parlé , p. 842 & fiuiv. & on doit avoir grand foin de découper tous les contours extérieurs un peu en pente , afin qu'ils forcent un peu lorfqu'on les met en place , & que par conféquent ils joignent mieux ; de plus , cette pente en augmentant la furface extérieure des Ornements , en refferre tous les joints lorfqu'on vient à les mettre en place , de forte qu'ils ne paroiffent plus que par la différence des couleurs ou des ombres des pièces qui les compofent , ce qui eft nécelTaire pour donner à l'ouvrage toute la perfedlion dont il peut être fufceptibk. Lorfqu'on découpe les Ornements ou autres pièces de Mofaïque , il faut avoir grand foin de conduire la fcie de manière qu'elle puiffe découper le plus grand nombre de parties polfible , làns être obligé de la retirer de la pièce qu'on découpe , ce qu'il eft toujours facile de faire , pour peu qu'on veuille y faire attention ; & on doit obferver de mettre à part , proche de foi & dans un en- droit propre , cliaque morceau découpé , toujours félon la place qu'ils doivent occuper , comme on peut le yokfig. 3 ; ce qui étant fait, on les raflemble les uns auprès des autres. Se on les place fur un papier enduit d'un peu de colle claire , pour les retenir enfemble & en conferver toutes les parties , qui écanli fouvent très-petites , font fort fujettes à s'égarer. I Sect. II. Découper , ombrer , incrufler les Ornements , SCc. 88r Cette obfervation eft très-eflèmielle , fur-tout dans le cas des Ornements ■ ' ' réguliers , tels que ceux qui fcnt repréfentés dans cette Planche , lefquels ont Pi-anche beaucoup de parties femblables , qu'il eft très-important de ne pas changer de place , vu que quelque précaution qu'on prenne en les découpant , il n'eft guerô poffible de les faire parfaitement femblables entr'elles , & qu'il faut par confé~ quent bien prendre garde de les changer de place. De plus , ces fortes d'Ornements réguliers ne fe découpent guère pour utl feul , étant de l'avantage de l'Ouvrier d'en découper tout de fuite le nombre dont il a befoin ; il eft donc nécelTaire de prendre des précautions pour que ces Ornements ne foient pas expofés à fe perdre ni à fc confondre les uns avec les autres. Il y a des Ouvriers qui , au lieu de coller les morceaux découpés à plat fur dii papier , fe contentent de les coller fur le champ avec de la colle claire , placés de diftance en diftance , afin que les morceaux tiennent tous les uns avec les autres , ce qui eft moins bon que la première méthode que je viens d'expliquer ; parce que pour coller ainfi les pièces d'Ornements fur le champ , la colle , quoi- que claire , doit cependant être confiftante , ce qui ne lai/Fe pas de faire une épaifl"eur qui groflît le joint , & qu'il fiut ôtsr avant d'incrufter les Orne- ments , ce qui eft fujet à y faire des éclats lorfqu'on veut les décoller pour les ■ ombrer enfuite , ainfi que je vais l'explicjiier. Les Ornements Se autres parties de Mofaique , s'ombrent de deux manières ; Civoir , avec le feu , ou , pour mieux dire , le Cible chaud , ou avec des liqueurs acides. La première manière eft la plus ufitée , & celle par laquelle je vais com- mencer , & qui , quoique très-fimple , demande beaucoup d'attention & d'expé- rience de la part de l'Artifte , ce qu'il ne peut acquérir que par une longue pra- tique , vu les différences qui fe rencontrent , tant dans les couleurs que dans la plus ou moins grande dureté des bois qu'il emploie ; ce qui fait que je ne don- nerai ici que des règles générales touchant la manière d'ombrer les bois , ce qui eft peut-être plus aifé à bien faire qu'à décrire , vu que c'eft une affaire pure- ment d'expérience & de pratique. Pour ombrer au feu , on prend du fablon ou du fable de rivière très-fin , qu'ort met dans une poêle de fer , & qu'on fait chauffer fur un fourneau , jufqu'à ce que la chaleur du fable foit capable de brunir le bois , fans cependant le brûler ce qu'on connoît en y plongeant un morceau de bois de la même épaiiTeur & de la même qualité que ceux qu'on veut ombrer. Fojei la fig. 7. Enfuite on prend les pièces d'Ornem.ents , lefquelles doivent être décollées & raifemblées toutes à leur place , & on les ombre les unes après les autres félon le ton du deflîn , qu'il eft bon d'avoir toujours devant foi , pour donner à chaque pièce la teintd qui lui eft néceiTaire. Comme les pièces à ombrer font fouvent trop petites pour qu'on puilTe les tenir avec les doigts fans fe brûler, on les prend avec une pointe,/^. 51, qu'ort SSa MENUISIER, III. Part. Secl. III Ckap. XIÎ. - pique dedans, ce qui eft peu commode,parcequeles pièces peuvent tourner & mê' me tomber dans le fable, ce quiles expofe à fe brûler, ou du moins à être ombrées plus qu'ilne faut, ou à fens contraire ; c'eft pourquoi je crois qu'au lieu de la pointe, 9> feroit mieux de fe feryir d'une pince ou tenette de fer repréfentée Jig. S, avec laquelle on pourroit tenir les pièces à ombrer, quelque petites qu'elles puiflent être, fans crainte qu'elles tournalTent ni qu'elles tombafTent ; ce qui ne peut pas arriver, quand même on ouvriroitla main avec laquelle on tient la pince, les branches de cette dernière ne pouvant fe mouvoir d'elles-mêmes , puifque elles font retenues par un reffort EF , qu'il faut comprimer pour les faire ouvrir. Quoique l'ufage de ces fortes de pinces foit très-commode , les Menuifiers- Ebéniftes ne s'en fervent pas, aimant mieux s'expofer au danger de brûler leurs bois ou leurs doigts , que d'abandonner leurs anciennes coutumes , bonnes ou mauvaifes. Les bois ne s'ombrent pas du premier coup , mais en les plongeant à diverfes reprifes dans le fable, en obfervant de les y enfoncer plus ou moins , félon qu'on veut en forcer l'ombre plus près du bord de la pièce , qui , d'ailleurs , s'ombre naturellement en adouci/Tant. A mefure qu'on a ombré une pièce , il faut la remettre à fa place , tant pour qu'elle ne s'égare pas , que pour examiner fi elle eft ombrée au degré qui lui convient , comparaifon faite avec le defflii de l'ouvrage & les autres pièces déjà ombrées , afin qu'elles foient parfaitement d'accord entr'elles & le dcflîn, dont il faut qu'elles imitent f effet, du moins autant qu'il eftpoiîïble, ce qui n'eft pas bien facile à faire fans beaucoup de patience & de précaution , & par-deffus tout cela , fans le fecours d'une pratique confommée , &. une très-grande connoiffance dans la partie du deflln. On ie fert auffi des acides pour ombrer les bois , comme je l'ai dit plus haut. Ces acides font feau de chaux , dans laquelle on met du fublimé corrofif , pour en augmenter la force. On fe fert aufli d'efprit de nitre & d'huile de foufre. De ces trois ingrédients , fefprit de nitre efl celui qui fait le plus d'effet fur le bois , qu'il faut avoir foin de brunir avant de le teindre , parce que fefprit de nitre détruit totalement les couleurs. Cet acide donne aux bois blancs une cou- leur roufsâtre, & les pénètre dans l'inftant. L'aélion de fhuile de foufre eft moins violente: elle donne aux bois blancs une teinte d'un brun vineux, & augmente certaines couleurs, au lieu de les détruire; c'eft pourquoi on peut l'employer après avoir teint les bois , du moins dans beaucoup de cas. Il faut avoir grand foin , en employant l'un ou l'autre de ces deux acides , de n'en mettre qu'une très-petite' quantité , parce qu'ils s'étendent beaucoup , fur- tout l'efprit de nitre , dont 3 lignes de diamètre s'étendent au moins à (5, ce qui fait près de trois fois la chofe. , L'eau de chaux , quoique moins violente que les deux drogues dont j'ai parlé ci-delfus , ne laiffe pas que de brunir les bois , foit blancs ou colorés , & je la préférerois à ces dernières , fur-tout pour de grandes parties, Ea Sect. îI. Décmpêr y ombrer ^ incrufter les Ornements ^ dC,c. 8S3 En général , la méthode de brunir les bois par le moyen des acides , n'eft plus ■■ — ■en ufaec à préfent , du moins chez le plus grand nombre des Ebéniftes , &, je ne Planche fai pas trop pourquoi , vu que leur ufage eft très-commode , fur-tout dans des parties toutes entourées de lumières , & qui ne peuvent par conféquent pas être ombrées au feu , à moins que de les découper à l'endroit de l'ombre , ce qui n'eft pas toujours polîible. Quant à la manière de faire ufàge des acides , elle eft très-fimple ; il ne s'agit que d'en mettre , avec un pinceau ou le bout d'une plume , la quantité fufSlànte fur le bois qu'on veut brunir , & de recommencer l'opération autant qu'on le jugera à propos , en augmentant ou diminuant la quantité & l'étendue de la liqueur , félon que le cas l'exigera , ce qui eft une affaire purement d'expérience j 8c fur laquelle on ne peut guère donner de règles certaines ; c'eft pourquoi je me contente d'indiquer ici le nom. & l'ulàge des drogues propres à brunit les bois laiflànt aux Arciftes le loin d'en diriger f emploi à raifon des différentes occa- fons de le faire , Icfquelles font fi variées , qu'on ne peut entrer dans aucun détail circonftancié , qui , de plus , deviendroit très-confidérable , fans être abfolument utile. Quant aux drogues fervant à brunir les bois, on les vend toutes prêtes chez les Epiciers-Droguiftes , fous le nom que je les ai indiquées ; il n'y a que l'eau de chaux qu'il faut faire loi-même , ce qui eft très-facile , puifqu'il ne s'agit que d'éteindre de la chaux vive dans de f eau ordinaire , & de prendre la liqueur qui furnage quand la chaux s'éteint. Quand toutes les pièces font ainfi ombrées , on les met à leur place , puis on les colle toutes enfemble du côté du parement (c'eft-à-dire , du côté qu'elles ont été tracées & découpées) fur un morceau de papier, & on les laiffe fécher cnfuite pour pouvoir les incrufter à la place qui leur eft deftinée , ce qui fe fait de la manière fuivante. Quand le papier fur lequel les pièces font collées eft parfaitement fec , ofj en déchire toutes les extrémités pour découvrir le pourtour de la pièce à incruf ter , comme le reprélènte ^^fig. 4 ; enfuite de quoi on pofe cette pièce à la place qu'elle doit occuper , & on y trace uri trait avec une pointe très-fine , en obfervant de bien lùivre les contours de la pièce à incrufter ; puis on fait l'incruf ration avec le couteau de taille & les autres outils propres à cet ouvrage , ainlî que je l'ai enfeigné page 832 ij' fuiv. en parlant de l'incruftation des pièces de marqueterie , tant droites que circulaires. Quand la place que doivent occuper les Ornements , eft tout-à-fait évuidée , comme le repréfente la fig. ^ , on y préfente la pièce à incrufter ,fig. 4, pour voir fi elle entrera aifément , & on achevé de l'ajufter , fuppofé qu'il refte quel- que cholè à y faire ; ce qui étant fait , on l'enduit de colle en deflbus , ainfi que. la pièce qui doit la recevoir, & on la met en place, en obfervant de n'y pas mettre trop de colle , & de la placer de manière qu'il refte un peu de jour poui; Menuisier , III. Pan. III. Sea. Q 10 Sg4 MENUISIE R,IIÏ. Part. SeB. III. Chap. XII. que le fuperflu de cette dernière puiffè s'évacuer aifément ; après quoi on achevé de l'enfoncer en frappant tout doucement deflus avec la tête du marteau à pla- quer. Quand la pièce qu'on colle eft d'une certaine grandeur, & compofée de plufieurs morceaux , il faut avoir foin de prendre un morceau de bois uni qui la couvre toute en entier, fur lequel on frappe avec le marteau, afin qu'elle ne foit pas expofée à fe rompre, mais qu'au contraire elle entre tout d'une pièce, &. que tous fes joints fe reflèrrent en même temps, ce qui arrive néceflairement pour peu qu'elle foit bien ajuftée , & que fes contours fcieui; découpés en pente, comme je l'ai recommandé plus haut , page 880. Quand la pièce eft collée , on la fende avec le marteau , pour voirfi elle porte bien par-tout , & on l'enduit d'un peu de colle claire par-deffiis , afin que l'humi- dité de deffous ne la fafle point relever ; enfuite de quoi on couvre l'ouvrage avec un linge un peu humide , & on le laiffe fécher dans un lieu exempt de trop de hâle ou d'humidité ; après quoi on enlevé la colle , & on replanit tout l'ou- vrage , comme je l'ai enfeigné ci-devant , page 8^7 , en obfervant cependant de ne pas le polir qu'on n'ait gravé les parties qui doivent l'être , ce qui fe fait de différentes manières , comme je vais i'enfeigner dans le Paragraphe fuivant. §. I. De la manière de graver & de finir les Ornements de bois de rapport, La gravure de l'Ebénifterie dont il eft ici queftion , e(t une parde très-eflên- tielle à bien faire , & par conféquent à connoître , parce que c'eft par fon fecours qu'on parvient à donner aux différents objets qu'on repréfente , tout l'effet poffible , ce qui ne peut être avec les feuls traits de la foie à découper , laquelle ne donne que des maffes d'une moyenne grandeur , & que les ombres qu'on donne aux pièces découpées , ne peuvent pas toujours fufEre ; c'eft pour- quoi on a recours à la gravure , laquelle donne à l'ouvrage toutes les fineffes de perfeélion qu'on peut fouhaiter, La gravure d'Ebénifterie fe fait avec un burin repréfenté fig. 10 , 11 12 , lequel eft un morceau d'acier d'environ 334 pouces de longueur , fur a lignes de largeur au plus , & un peu plus d'une ligne d'épailTeur du côté du dos, c'eft- à-dire , en deffus , en venant à rien par-defTous ; de forte que fa coupe forme un triangle très-alongé, comme le repréfente la fig. 13. Le milieu de l'épailTeur de ce burin eft évuidé dans prefque toute fa largeur l parallèlement à fes côtés ; & fon extrémité fupérieure a ,fig. 10, eft coupée en chanfrein de à ^ , de manière que le taillant de l'outil qui eft du côté b c, quoi- que très-aigu , coupe le bois très-finement & fans y faire aucun éclat , vu que par la difpofition du chanfrein a b y'A coupe autant des côtés que de la pointe, & que pour peu que cette dernière entre dans le bois , ce font les deux côtés de l'outil qui coupent les premiers; de fcrte que le copeau pafTe entre deux, & devient plus ou moins épais , félon qu'on enfonce plus ou moins l'outil. Sect. il §• /. Manière de graver les Ornements , SCc. SSy Ce burin eft monté dans un petit manche de bois , Jïg. lo, dont le delTous eft applati , afin qu'on puifle mener le burin le plus proche de l'ouvrage qu'il efl: poffible , & en faciliter le partage fur le bois , dans lequel il ne faut pas qu'il entre bien avant, & toujours également ; c'eft pourquoi le deifous du burin ^c, qu'on appelle ordinairement le ventre , eft un peu bombé fur fi longueur, ce qui , joint au peu d'épaiifeur du manche de ce côté, donne à l'Ouvrier la facilité de le faire entrer dans le bois auflî peu & tant qu'il le juge à propos. Ce burin fe tient de la main droite , laquelle doit être pofée fur l'ouvrage : dans toute la longueur de l'avant-bras , le manche appuyé dans le creux de la main , & retenu par le pouce & le doigt majeur ; le doigt index doit être tendu deflus pour le conduire &. le faire prendre dans le bois, comme je l'ai repréfenté fg. I (5 3 , cote A. Le burin fe tient ainfl quand on veut faire des traits droits , foit perpendicu- laires ou horifontaux , ce qui eft égal ; mais lorfqu'on veut faire des contours d'un très-petit cintre , on fait gliffer l'index de deflus le dos du burin , qui alors n'eft retenu que par le pouce dans le creux de la main , pour avoir la liberté de tour- ner le burin comme on le juge à propos : dans ce cas le bras de l'Ouvrier ne pofe pas fur l'ouvrage ; mais on le levé un peu à l'endroit du coude , comme on peut le voir à hfig. rj , qui repréfenté un Ouvrier occupé à graver des fleurs dans un panneau d'Ebénifterie. De quelque manière qu'on fè ferve du burin, il faut être affis devant fon ouvrage ( du moins pour l'ordinaire , ) & avoir la main gauche & fbn avant- bras appuyés fur l'ouvrage parallèlement au devant de ce dernier , à peu-près dans la pofture d'une perfonne qui écrit , comme on peut le \onfig. 3 , cote B. On fe fert du burin pour indiquer les petits détails qu'on n'a pas pu faire à la fcieà découper , & pour former des ombres par le moyen des tailles ou hachures ( ce qui eft la même chofe ) ; dans ce dernier cas les tailles fe difpofent de deux manières différentes; favoir, à une feule taille, comme la fg. 13 , ou bien à deux tailles , comme la /g. 14. La gravure à une feule taille eft la plus belle , & fe fait par des traits de burin parallèles entr'eux j qu'on fait plus ou moins forts, & qu'on ferre ou qu'on éloigne les uns des autres, félon qu'on veut que l'ombre foit plus ou moins forte fur la largeur ou fur la longueur , ainfi qu'on peut le voir àla/^. 13. _ La gravure à deux tailles fe fait de la même manière que la précédente , a l'exception qu'on difpofe les traits de burin en forme de lofanges , ce qui ne fiic pas un fort bel effet dans l'efpece de gravure dont il s'agit ici , où il eft bon que toutes les tailles fuivent le fens des parties que l'on grave ; c'eft pourquoi on fera très-bien de graver tous les ouvrages quelconques à une feule taille , ainfi que je l'ai obfervé aux différents exemples que j'ai donnés dans les Planches 3519 , 300 , 301 , &c ; ce qui eft d'autant plus naturel , que la gravure en Ebé> Bifterie ne fert pas pofitivement à former les ombres , mais feulement à les Planche 300, 2S6 MENUISIER, III. Pàn. Sed. III. Chàp XII. ' • augmenter , ce qui demande moins de noir , & peut , par conféquent , difpenfei Planche de mettre des fécondes. Il efl des occafions où , au lieu de burin , on peut fe fervir d'une pointe à peu- près fembiable à celle dont fe fervent les Graveurs en bois. Cet outil, repré- leai&fg. j , 6 (§■ 8 , eft compofé d'un manche de 4 à y pouces de long , fendu en deux fur fon épaiifeur à environ 2 pouces de longueur , comme de E à F, fia. 6, pour placer la lame G H entre deux, & pouvoir l'avancer & la reculer comme on le juge à propos. La lame H n'eft autre chofe qu'un morceau d'acier très-mince , qu'on aiguife par le bouc, & qu'on arrête dans le manche, en ferrant ce dernier avec une iicelle dont on l'entoure, comme on peut le voir à la jî^. j ; & pour que cette lame ne mouve pas dans le manche, on fait dans les deux côtés de ce dernier, fig. 7 , un petit ravalement contre lequel s'appuie le dos de la lame ^fig. 8, qui , comme je viens de le dire , eft très-mince , étant fouvent faite avec des refforts de montres ou de petites pendules. Au lieu de relTorts, il y a des Ebéniftes qui fe fervent de vieilles lancettes qu'ils emmanchent dans un morceau de bois , foie pour leur fervir l faire des incruftacions extrêmement délicates , ou pour la gra- vure de leurs ouvrages. Quand on grave à la pointe , on rient cette dernière de la main droite , à peu- près de la même manière dont on tient la plume, & on fait couper la pointe en la tirant à foi , comme on peut le voir à la/^. 2 & à la fig. 4, cote C. Cette gravure ne fait qu'un fimple trait dans le bois , qu'on élargit enfuite en repaifinc la pointe dans le même trait plufieurs fois, & en l'inclinant à droite & à gauche pour couper du bois fur le côté de la taille , qu'on élargit par ce moyen. En gravant à la pointe, on fe place devant fouvrage de la même manière que pour graver au burin , à f exception que la main gauche eft plus étendue fur fou- vrage , comme on peut le voir à la fig. 4 , cote D. La gravure à la pointe eft très-utile pour les parties très-délicates où l'on craint que le burin ne faife des éclats , ou qu'il n'échappe ; au refte cela dépend beau- coup du goût & de fhabitude de fOuvrier, qui fe fert de l'un ou de l'autre d» ces outils félon qu'il le juge à propos. Je ne m'étendrai pas davantage fur ce qui concerne la gravure de l'Ebénifte- rie de bois de rapport, vu que la théorie de cette partie de l'Ebénifierie tient beaucoup à la pratique , laquelle varie félon les différentes occafions ; & que chaque Artifte adopte fouvent une manière de faire qui lui eft particulière , ce qui , au fond , eft fort indifférent , pourvu que l'ouvrage foit bien fait ; c'eft ce qui fait que je n'ai donné que des règles générales touchant la gravure , lefquelles feront , je crois, fuffifantes pour donner une idée jufte & précife de cette partie de l'Ebénifterie , dans laquelle il n'eft pas poffible d'exceller fans avoir une grande pratique du deffin des différents genres , laquelle fervira mieux à conduire & à déterminer la quantité ÔQ la forme des tailles de la gravure , que tout ce que je pourrois Sect. il §. /. Manière de graver ks Ornements^ §§7 pourrais dire à ce fujet , fui: lequel on ne peut guère donner que des règles générales, ainfi que je l'ai fait. Quand on a fini la gravure d'une pièce quelconque , on en ébarbe les tailles , c eft-à-dire , qu'on ôte toutes les bavures produites par le burin fur les bords de ces dernières , ce qui fe fait avec le racloir ou avec le taillant d'un cifcau , ce qui eft égal; enfuite on remplit les tailles avec dû mafdc, foit noir, brun, ou de toute autre couleur , qu'on tient chaud dans un vafe comme celui I ,Jig- 15 , Se qu'on applique , ou, pour mieux dire, qu'on introduit dans les tailles avec une fpatule de bois ; on le laifTe féclier & on le racle enfuite ; après quoi on faic une recherche à l'ouvrage , pour voir s'il n'y manque rien , & fi la gravure fait l'effet demandé; s'il arrive qu'il y manque quelques tailles , on les fait 6c on les maftique à fordinaire ; ce qui étant fait , on achevé de polir l'ouvrage , ce qu'on doit faire avec beaucoup de foins & de précautions , vu la différence des fils des bois , & la multitude des parties dont il eft compofé, Cette obfervation eft très-' effentielle , non-feulement pour le poli de ces fortes d'ouvrages , mais encore lorfqu'on commence à les replanir après qu'ils ont été incruftés. Les Ornements , les fleurs, &c. s'incruftent non-feulement fur des bois de placage , mais encore en plein bois , ce qui ne change rien à la manière d'opérer en général ; cependant lorfqu'on fait des incruftations dans de l'ouvrage en plein bois , le fond de ces incruftations eft un peu plus difficile à évuider que quand c'eft fur dos bois de placage ; c'eft pourquoi aux outils propres à faire des incruC tarions dont j'ai fait ci-devant la defcription page 840 , on doit joindre les cifeaux coudés ,_fig. 9 ê" 10 , les cifeaux en carrelets ou burins ,fig. 11 , & les gouges arrondies fur le taillant, tant droites que coudées, fig. 12, lefquels outils font de différentes grandeurs , depuis J à ô lignes de largeur , en diminuant juf- qu'à une ligne , afin de pouvoir s'en fervir dans les plus petits endroits , de ne rien écorcher au bois qu'on entaille , & le faire le plus proprement pofllble , afin que quand l'ouvrage eft fini , il ne paroiffe aucun joint , ou du moins que ces derniers ne foient fenfibles que parla différence des fils ou de la couleur des bois , ce qui demande beaucoup de précifîon, tant en creufant les places deftinées à recevoir les Ornements , qu'en découpant ces mêmes Ornements , dont les coa-' tours faits à la fcie de marqueterie , doivent être encore réparés avec de petits couteaux de taille , afin de leur donner toute la perfetSlion pofi^ible , fuppo* fé cependant que la fcie y ait fait quelques jarrets ; car il y a des Ebéniftes qui font très-sùrs de n'en faire aucun , & de contourner les Ornements à la fcie fans qu'il y ait rien à y faire. Voilà , à peu-près , tout ce qu'on peut dire touchant la théorie de l'Ebénif- terie de la féconde efpece, c'eft- à-dire, de la Mofaïque ou Peinture en bois; refle maintenant à faire l'application de ces règles générales à différents fujets , pour épuifer cette partie de l'Ebénifterie , laquelle eft , comme on l'a pu voir Menuisier , IIL Van. 111. SeB. R 10 Planche S88 MENUISIER, m. Pan. SeB. III. Chap. XIL la plus compliquée de toutes , tant pour les connoilTances qu'elle exige , que pour la dilEculté de {on exécution. Section Troisième. De la manière de repréfenter les Fleurs , les Fruits , les Payjages & les Figures en bois de rapport, • " % L'o B J E T de la Mofaïque étant d'imiter la peinture , ou , pour mieux dire , la Planche nature des différents fujets dont cette dernière n'efi: que la copie , il faut , autant qu'il eft poffible, que les ouvrages de Mofaïque relTemblent aux fujets qu'on veut repréfenter , comme les Fleurs , les Fruits , &c. Pour parvenir à donner aux ouvrages de Mofaïque , ce caraélere de vérité qui en fait tout le mérite , il faut joindre aux connoilTances théorie-pratiques de l'exécution dont j'ai parlé ci-deffus , celle de la théorie fpéculative , qui a pour objet l'ordre & la convenance qui doivent régner dans fenfemble d'un ouvrage ,' afin que toutes les parties qui le compofent foient parfaitement à leur place , & d'accord les unes avec les autres. Cette féconde efpece de théorie , qui n'eft autre chofe que ce qu'on appelle le goût, ne peut pas s'enfeigner dans un Livre ; ce ne peut être que le réfultat des réflexions que peut nous faire naîrre une grande habitude dans le deffin , & un examen fuivi & réfléchi des chofes qu'on repréfente par le moyen de ce der- nier ; c'eft pourquoi, fuppofant cette théorie toute acquife dans la plupart de ceux qui fe vouent à cette efpece d'Ebénifterie , ( ce qui , au fond , doit être vrai) je me contenterai de donner ici quelques exemples de defllns propres à être exécutés en bois de rapport , Se la route qui me paroît la meilleure à fuivre pour parvenir à les bien exécuter. La principale figure de cette Planche , repréfente le deflln d'un Bouquet compofé de plufieurs fleurs , dont les principales font , un Œillet de 1; grofle efpece A , avec des boutons & des feuilles B , une branche de Jon- quille C , une Tulipe D, une branche de Hyacinthe E , un Pavot F , des Rofes G 8c H, avec leurs feuilles / & un bouton L , & enfin quelques autres petites feuilles & fleurs qui fe réunifl'ent avec les tiges des autres fleurs , & font toutes liées enfemble par un ruban noué en rofe , ce qui termine le bas du Bouquet, dont le deflln doit non-feulement être terminé & ombré avant que de procéder à fon exécution en bois, ainfi qu'on le voie dans cette Planche, mais encore être colorié au naturel, afin qu'on puilfe faire choix des bois (foit temts ou naturels ) dont la couleur puifle imiter celle de la fleur qu'on veut repréfenter. En général, il faut faire attention que toutes les feuilles ou pétales qui com- pofent une fleur , ne font pas de la même nuance de couleur, & qu'il en eft, comme , par exemple , la Rofe , où cette nuance eft très-fenfible , comme aufli 301, Sect. m. Manière de repréf enter les Fleurs , les Fruits , ôCc. 885) Il en eft d'autres qui font toutes d'une couleur , comme la Grenade, le Barbeau , &c. ce qui doit faire préférer de prendre des bois coloriés pour faire des fleurs Planche donc les pétales font toutes d'une même couleur , & des bois blancs pour celles dont la couleur des pétales eft nuancée , afin de pouvoir les teindre après les avoir découpés, ce qui donne alors la facilité d'en foncer plus ou moins la couleur, à moins qu'on ne voulût faire les fleurs nuancées de plufieurs morceaux de bois de différentes couleurs , foit teints ou naturels, ce qui pourroitêtrë, &feroit de l'ou- vrage très-précieux, fur-tout s'il étoic fait avec des bois de couleur naturelle (*) ; mais cette manière de faire les fleurs augmenteroit de beaucoup le prix de l'ouvrage ; c'eft pourquoi on préfère de prendre les fleurs quelconques dans un feul morceau de bois , qu'on teint enfuite après l'avoir découpé à l'ordinaire y c'eft-à-dire , avec la fcie de marqueterie. La teinture des fleurs ou de toute autre pièce de Mofaïque, fe fait avec les mêmes ingrédients & de la même manière que pour les bois de l'Ebénifterie fimple dont j'ai parlé c\-<\<iw&ni, page 792 &fiiv. cependant comme il eft quel- quefois nécelîaire que quelques-unes de ces pièces ( comme , par exemple , les pétales des fleurs , les parties de ciel , &c. ) foient nuancées fur leur furface , & même changent quelquefois de couleur , il faut prendre garde, en les teignant , qu'elles ne prennent pas trop de couleur , ou qu'elles n'en prennent pas^'égale-^, ment par-tout , ce qui fç fait de la manière /uîv-ancc. On commence par donner aux bois un bain de teinture de la couleur & de la force que doivent porter les parties les plus claires de la pièce ; enfuite de quoi, lorfqu'elle eft parfaitement feche , on defline defTus le contour que doit faire la nuance la plus foncée ; ce qui étant fait , on couvre de cire ce qui doit refter clair, c'eft-à-dire , de la couleur du premier bain de teinture , puis on remet la pièce dans cette dernière pour fe foncer en couleur , jufqu'à ce qu'elle foit ve- nue au point où elle doit être ; & s'il arrivoit qu'une pièce eût befoin de trois ou quatre nuances , on recommenceroit trois ou quatre fois la même opération. Il faut obferver , en couvrant les pièces avec de la cire , d'en mettre un peu plus avant que l'endroit où les couleurs doivent différencier , parce que lorfqu'on remet les bois dans la teinture , elle s'introduit un peu au pourtour de la cire & cela plus ou moins , félon la qualité de la teinture , & la plus ou moins grande denfité du bois dont on fait ufage, ce qui fait que je ne faurois donner ici de règles certaines du plus ou moins d'étendue qu'il faut donner à l'enduit de cire , vu que cela varie beaucoup , & qu'il n'y a qu'une longue expérience qui puifTe fervir à diriger cette opération. Au moyen de fexpédient que je propofe ici, on peut non-feulement aug- (") C'eflainn qu'on fait les Mofaïques de Flo- lence & de Rome, l'une avec des verres ou émaux teints de diverfes couleurs, & les autres avec des cailloux refendus par fciil'Ies, toutes les deux fcellées fur.un fondde manic,ainïïquelo font ces magnifiques tables qu'onvoit encore dans les iWaifons Royales , dont elles font un des plus beaux ornements. Quel dommage qu'un fi bel Arr foit prefqu'entiérement Dcgfigé en France j tandis qu'il fait tant d'honneur aux Italiens ! Planche 301. Planche 502. tpô MENUISIER, m. Pan. SeEl. III. Chap-. Xll ■ menter le ton de la couleur d'une pièce , mais encore en changer comme on le jage à propos , c'eft-à-dire , qu'on peut teindre une pièce de deux ou trois cou- leurs différentes , en obfervant toutefois d'enduire de cire le deffous & le delTus des endroits qui ne doivent pas £tre teints , & cela à chaque changement de teinture. Lorfqu'on change la nuance d'une pièce teinte , ou qu'on la teint de diverfes couleurs , l'endroit de la fëparation ne paroît pas fort fenfible , & ne paffe pas; tout de fuite du rouge pâle au rouge foncé , ou du verd au jaune , &c ; mais les différentes teintes ou couleurs s'adoucifTent à leur rencontre en fe mêlant, ce qui fait très-bien pour les couleurs qu'on ne fait que foncer ; mais pour celles Qui font différentes , il arrive quelquefois que leur rencontre donne une nuance compofée des deux premières , ce qui exige beaucoup d'attention & de foin pour empêcher cette troifierae nuance , foit en mettant une couleur la première préférablement à une autre , foit en augmentant ou en diminuant l'étendue de la cire , ce qui eft une affaire purement d'expérience. Toutes les fleurs qui compofent un Bouquet tel que celui-ci ou tout autre , fe découpent à part , & s'ombrent chacune félon la place qu'elles doivent occu- per ce qui ne demande qu'un peu de foin de la part de l'Artifte. On doit avoir la même attention pour toutes les autres parties du Bouquet, comme les feuilles , les tiges , & le ruban qui les noue , ce qui eft général non- feulement pour les fleurs , mais encore pour toutes autres fortes d'ouvrages , comme , par exemple , la frife d'ornement courant , repréfentée dans la figure 3 de cette Planche. La manière de découper , d'ombrer & d'affembler les diverfes parties qui com- pofent les fleurs , eft la même que pour les ornements dont j'ai parlé ci-deffus , page 878 &/.; cependant pour faciliter l'intelligence de ce que je viens de dire chant la difpofition des fleurs du Bouquet de la Planche 301 , j'ai donné dans la Planche fuivante , le détail d'une partie de ces fleurs ; favoir , la Tulipe D, Pl. 301, toute découpée; fig. i, la même fleur raffemblée & couverte de fon papier ,fig. 1 , & toute raffemblée fans papier , pour qu'on en puiffe voir tous les joints , qui font faits félon les contours que forment les dehors & les revers des pétales de cette fleur. Les Figures 4 & 5 , repréfentent les deux Rofes G Se H toutes raffemblées ; la figure 6 , la Rofe de haie M; la figure 7 repréfente la tige de la Hyacinthe E ; la figure 8 , les deux feuilles de Rofe / ; les figures 9 & 10 , le Pavot F, divifé & raffemblé ; la figure 1 1 repréfente l'mikt A ; la figure 12 , une grande (•) Ce n'crt cependant pas la méthode du commun des Ebéniftes , qui achètent des fleurs toutes faites à quelques-uns de leurs Confrères qui ne s'occupent qu'à ce genre d'ouvrage, fans •i'embarraffer fi elles iront bien les unes avec les autres , & û elles ftpc ombrées pour la place qu'elles doivent occuper ; ce qui fait que^ dans la plupart des ouvrages communs, on voit des fleurs qui fcmblent y être placées comme au hafard , & ombrées les unes d'un fens , & les autres d'un autre, ce qui fait un très -mauvais effet, feuille Sect. m. Manière de repréfenter les Fleurs , les Fruits , SCc. Spf feuille cotée N. Les figures 13 , 14 & 15 , repréfentent le nœud de ruban tou: détaillé ; & les figures i(î , 17 & rS , une partie des ornements de la frife cou- PI'A'^che rante ,fig. 1 , PL 301 , chantournée par mafles. Les tiges des fleurs, généralement parlant , ne font jamais droites ; cependant il y a des Ebéniftes qui les préparent comme celle A B , fig. 18 , en obfervanc feulement de les tenir plus étroites d'un bout que de l'autre, ce qui peut quel- quefois pafler pour des tiges de peu de longueur, ou qui font prefque droites &fans reffauts, comme, par exemple, celles des Tulipes, des Jonquilles ^ &c ; mais pour celles qui font fufceptibles de contours & de reffauts , il faut abfolument les contourner, comme l'indique le delTm de l'ouvrage, quoique cela tienne beaucoup de temps à faire. Quand toutes les parties qui doivent compofer une pièce de Mofaïque .comme === le Bouquet repréfenté, PL ^01, fig. l, font toutes préparées, comme je l'ai enfei- Pi-anchë gné ci-delFus, on procède à leur incruftation, ce qui fe fait delà manière fuivante. On commence d'abord par tracer fur l'ouvrage , au crayon feulement, tout f enfemble du delfm , ou du moins les contours extérieurs de toutes les parties qui compofent le Bouquet , ainfi que je l'ai obfervé fur cette Planche , Jig. i ; enfuite Ton commence à incrufter les fleurs , dont on trace le contour exté- rieur fur fouvrage avec une pointe très-fine , à la place que chacune d'elles doit occuper. Lorfqu'on incrufte les fleurs , il faut obferver de commencer par celles qui trouvent en delTôus , c'eft-à-dire , dont la forme extérieure n'eft pas entièrement apparente , comme celles M, H , fig. r , parce que lorfqu'on vient à incrufter les fleurs qui font toutes entières comme celle G , on en trace le contour tano fur le fond de l'ouvrage , que fur les fleurs déjà incruftées , comme je l'ai obfervé dans cette Planche , où la place de la Rofe G, n'eft qu'éyuidée ^ au lieu que les fleurs qui favoifinent font toutes incruftées. Cette obfervation eft très-elTentielle , parce que fi on commençoit par incruf ter les fleurs qui font toutes apparentes , & que le contour de ces fleurs fût très- détaillé , comme celui de f Œillet A, il feroit très-difficile de bien ajufter les autres feuilles ou fleurs qui favoifinent , & de les faire joindre parfaitement dans ' tous les angles & contours que produit fextrémité de cette fleur , que je n'ai repréfentée ici toute incruftée, que pour mieux faire fentirles raifonspour leP quelles on ne doit incrufter ces fleurs que les dernières. C'eft pourquoi (règle générale) on doit toujours commencer par incrufter les parties qui paroiffent les plus engagées dans le pourtour de leurs contours, puis incrufter enfuite celles qui ne le feront que dans une partie , & finir par celles dont le contour fera totalement apparent, comme ceUes A Se G , Se en général toutes celles qui font dans le même cas. Quant aux fleurs qui font ifolées, comme celles C ,D, il eft indiiféîeftîj Menuisier , III. Pan. III. Se&, S 10 Spa MENUISIER, m. Pan. SeB. IIL Cliap. XÎI. ■ ■ Je les incrufter les premières ou les dernières; cependant il faut faire attention Planche ^ ^.'eft l'extrémité de leur tige qui forme un contour , comme à la figure F , ou fi c eft le bas de la fleur , comme à la figure D , parce que dans le premier cas il faut incrufter la fleur la première , & la tige enfuite; & qu'au contraire dans le fécond il faut incrufter la fleur la dernière , pour les raifons que je viens de détailler ci-defTus. Ce que je viens de dire pour l'incruftation des fleurs , doit s'appliquer aux ornements comme la figure a , afin que les contours des parties qui pofent fur les autres , fe defllnent mieux , & que leurs joints en foient plus parfaits. Ces ornements, tels qu'ils font repréfentés dans la figure 2, cote O , fe nom- ment Morefques, & fe font ordinairement avec du bois d'une feule couleur, appliqué fur un fond différent. Quelquefois ces ornements font de deux cou- leurs , fur-tout lorfqu'ils font compofés de manière qu'ils femblent s'enlaffer les uns dans les autres ; dans l'un ou l'autre cas , il eft très-rare qu'on les ombre : on fe contente de les bien contourner extérieurement , Se d'en indiquer les contours intérieurs par des traits de fcie à découper, ou bien par des tailles faites au burin ou à la pointe à graver. Voyei lafig. 1 , cote O, où une partie de la frife d'ornements courants eft difpofée de cette manière , & dont le côté oppofé P, eft tout difpofé pour recevoir le refte de l'incruftation , ainfi qu'une partie des m'alfes du bouquet de la figure i , ce que j'ai fait afin de faire mieux connoîtte la marche de l'exécution de ces fortes d'ouvrages , qui , tomme on peut le voir , ne fauroient être traités avec trop de précifion & de foins , ce qui demande beau- coup d'expérience dans la pratique , qui eft pour le moins auffi néceflaire dans cette partie de FEbénifterie , que la théorie la plus parfaite. ■ La Figure i de cette Planche , repréfente le deflln d'un panneau d'Ebénif- piIi!J^E~ terie, dont le milieu eft orné d'un médaillon foutenu par des branches de Rofe & de Laurier , & couronné de guirlandes de fleurs , lefquelles fe conftruifenc de la manière que j'ai décrite ci-delTus. Le médaillon peut fe remplir de différentes manières , foit par un fujet comme celui de la figure première , ou feulement par un chiffre ; dans l'un ou l'autre cas , lorfque , comme dans les figures l , 2 & 3 , le fond du médaillon eft diffé- rent du fond de l'ouvrage ( comme cela doit toujours être ) , il eft bon que le daillon foit tout rempli de fon fujet avant que de l'incrufter fur le fond du meo panneau. Quand on fait un médaillon ou tout autre ouvrage de cette efpece , on com- mence par découper toutes les pièces qui doivent y être incruftées , afin de les tracer chacune à leur place ; enfuite de quoi on évuide le dedans de l'ovale avec la fcie à découper , qu'on y introduit par un trou percé dans un des endroits qui doivent être évuidés, ou bien qu'on fait entrer par l'endroit où le chiffre appro- che le plus près du bout de l'ovale, comme aux points A ou B , fig. 2. , ce qui foufFre aucune difficulté , parce que le trait de fcie eft fi mince , que lorfque ne Sect. III. Manière de repréfenter les Fleurs , les Fruits , SCc. 8^3 ies deux parties font rapprochées , le joint n'eft plus apparent. Quand le dedans ■ de 1 ovale eft évuidé, on y colle les parties de remplilfage ; & quand on a fait entrer la fae par les côtés de l'ovale , comme à la^^. 3 , on doit , avant de placer les parties de remplilTage, y coller le filet du pourtour, comme à la 3 , & même le cadre entier ,7?o-. 4 , afin de faire approcher les joints , & que les mor ceaux de remplilTage foient bien ferrés à leur place , comme on peut le voir à la 3 , qui repréfente le médaillon a , tout rempli & vu en delTous , c'eft- a-dire , du côté qui s'applique fur le panneau. _ Quand le médaillon eft fec, on le colle en place fur le fond comme de l'Ebé- nifterie ordinaire , & on le finit enfuite. Je ne parlerai pas des fleurs ni des autres parties de détail de cette Planche vu que ce que j'ai dit ci-de/Tus, en expliquant la Planche 301, doit fufEre - cependant comme il y a beaucoup de petites parties dans les fleurs de la figuré I , qui ne peuvent s'incrufter, comme les épines , l'extrémité des petites tiges, &c, on fe contente de les graver fur le fond de l'ouvrage, d'où elles fe déta- chent foit en noir ou en brun, félon la couleur du maftic dont les tailles font remplies. La Figure i de cette Planche, repréfente un Trophée de guerre, compofé de diff-erentes armes & inftruments tant anciens que modernes, lefquels font places fur un amortiffement qui leur fort de fupport. Ce morceau , quoique très-compliqué , peut cependant être exécuté en Ebé nifterie. Il y a dans le Cabinet du Roi , à Choify , une Table fur laquelle il y a un trophée du même genre que celui-ci , & qui eft exécuté avec toute la pré- cifîon & la délicateffe pofllbles, ce qui fait beaucoup d'honneur à fon Auteur que je nommerois ici avec plaifir fi je le connoiffois, vu que ces exemples fonî très-rares , & qu'on ne fauroit trop louer ceux qui font capables de faire de fl belles chofes. Le Trophée que j'ai repréfenté ,fi^. r, s'exécute de la même manière que les autres morceaux de Mofaique dont j'ai fait la defcription ci-deffus, c'eft-à-dire qu'il faut toujours coller les grandes maifes enfemble avant de les incrufter fur le fond de l'ouvrage, comme je l'ai repréfenté,/^. 2 ,& toujours commencer par les pièces qui font les plus engagées , & finir par celles qui font totalement ou du moins en partie, ifolées. Il faut auffi avoir attention de mettre le fil dû bois du fens où il fe trouve le moins tranché lorfquon le découpe, & de la plus grande longueur des pièces, comme je l'ai obfervé aux développements des principales pièces de ce Trophée, repréfentées/^. 2, & cotées iJ.C D F n,I,R. ,^,i^,r. Quand les pièces doivent être arrondies comme celles A,M,E,N, O, G, P, il faut, autant qu'il eft poflible, mettre le fil des piece's parallèle! ment a leur arrondifl-ement , parce qu'en les brunifllant, l'adion, foit du feu ou des acides, fe fait mieux de ce fens que de l'autre ,& s'adoucit plus naturel- Planche 304' Planche 30î< MENU IS 1ER, III. Pan. Secî. lîl. Chap. Xll = lement à bois de fil qu'à bois de bout : car l'inégale denfité d'une pièce dé tLANCHE bj-unig ^ [jy;^ j^^^^j. ^ j^^^^^^ ^j^^ ^^^j^^ ^^.^^ ^ l'aaion du feu ou des acides, ce qui fait que le bois bruni de cette façon eft ondé à l'extré- mité de l'endroit ombré, ce qui n'arrive pas quand on difpofe le fil du bois du même fèns que 1 ombre , comme je le recommande ici, .. I-a Figure i de cette Planche , repréfente un panneau fur lequel j'ai raffemblé Planche des Fruits de diiférentes efpeces , des Oifeaux & autres Animaux. Je n'entrerai ^° • pas ici dans le détail de la conftruélion de cette pièce de Mofaïque , vu que ce ne feroit qu'une répétition inutile de ce que j'ai dit jufqu'à préfent. Je n'ai donc fait le deffin de cette Planche , ainfi que ceux des Planches 304 , 305' 8c 307, que pour donner un exemple de chaque efpece de Mofaïque , en obfer- vant de donner à chacune d'elles le détail des parties principales , & les diffé- rences qui peuvent fe trouver dans la manière de les exécuter. Dans la Figure 2 de cette Planche , j'ai repréfente le détail des principales pièces de la figure i , lefquelles font cotées C,D,E, F, G,I,L, M, N, & fe conftruifent à l'ordinaire ; il n'y a que le poil des Animaux , & les plumes des Oifeaux qui fouffrent un peu de différence , parce qu'elles fe font prefquû -routes au burin, pour mieux exprimer les poils & les filets des plumes ; c'çft pourquoi j'ai repréfenté,y?g-. 2 , cotes A Se B , une aîle d'Oifeau toute détaillée & en malTe , afin qu'on en juge mieux que dans les autres parties de cette Planche , qui deviennent un peu petites. • — ' La Figure i repréfente un payfage, avec un Berger placé fur le devant. Planche p^^^^ 1^ fl^^j^g ^ mouton près de lui qui femble être attentif au fon de l'inftrument, comme cela lui eft, dit- on , naturel. Dans le bas de la Planche, j'ai repréfenté, fig. 2,3,4, principales parties de rapport qui compofent cette pièce de Mofaïque, dont le fond doit faire partie , c'eft-à-dire, qu'il ne doit point y avoir de fond d'ouvrage apparent, comme aux autres Planches repréfentées ci-devant , mais que les intervalles que laiifent les arbres ôc les terrafies, doivent être remplies par un ciel, qui fe fait ordinairement en bois d'érable, dont les nuances fe prêtent volontiers à l'effet des nuages , & donc les parties les plus 'ouvragées fe reportent à part, comme le repréfente la figure 3. Voilà , à peu-près , tout ce que je puis dire touchant la théorie & la pratique de l'Ebéniflerie de la féconde efpece, c'eft-à-dire , de laMofiïque; trop heu- reux fi les foibles effais que je préfente ici , peuvent être utiles au Public , & fur- tout aux Ebéniftes qui s'attachent à cette partie de ce bel Art , qui n'eft pas affez connu , & malheureufement trop négligé ; & qui , pour être bien décrit , auroit eu befbin d'un auteur plus expérimenté , n'étant pas affez verfé dans la pratique de cet Art , qui demanderoit, pour être bien connu , un long ulàge & une quantité de connoiffances que je puis bien indiquer ici , mais que je ne poflède Sect, III. Manière de repréfenter lés Fléiirs , les Fruits , ôC,c. S^y poffède pas affez parfairement pour les bien enfeigner ( *). Dans la defcription de la Mofaïque , je n'ai donné aucun exemple de pei'- fpeâive , ce que je n'ai pas cru néceflàire , vu que ce n'eft que la première efpece d'Ebénifterie dont les pièces font coupées relativement à la place qu'elles doivent occuper, pour repréfenter un objet quelconque, félon les règles que j'en ai données page 86S Se fuiv. ce qui ne change rien à la manière d'opérer j qui eft la même que pour l'Ebénifterie de placage. Cependant il feroit à fouhaiter , lorfqu'on repréfente des parties d'Archiùec- ture en perfpetSive ou même en géomérral, qu'on imitât, dans le mélange des bois , la manière de difpofer les marbres ; c'eft-à-dire , qu'on pourroit , par exemple , dans le cas d'un Frontifpice orné d'ordres d'Architedure , faire le fût des colonnes d'une forte de bois, les bafes & les chapiteaux d'une autre, l'archi- trave & la corniche d'une autre, & enfin la frife & les autres parties adjacentes d'une autre efpece , ce qui, certainement, feroit très-bien, files différentes efpe- ces de bois étoient bien mélangées & en oppofitionles unes avec les autres, fans cependant qu'elles tranchalfent trop foit entre elles ou fur le fond de l'ouvrage; Ce que je dis ici relativement à un Portique décoré d'ordres d'Architeélure ^ peut également s'appliquer à tout autre objet , fans pour cela qu'il fût repréfenté en perfpeclive , ce qui feroit une efpece d'Ebénifterie très-agréable à la vue , & qui feroit nuance entre la première & la féconde efpece d'Ebénifterie dont je viens de faire la defcription , & à laquelle je vais faire fuivre celle de l'Ebénif- terie pleine <5c de l'Ebénifterie ornée , laquelle terminera cette Partie de mon Ouvrage. C) Dans la defcription des deux premières efpeces d'Ebénifterie , j'ai été aide des confcils de M. Cliavigncau , Compagnon Mcnuifier- Ebéaille, lecjyel poflede très -bien cette partie. & dont les talents mériteroiant d'être plus connus , pour lui procurer les moyens de Jes, mettre en ufagei» MENUISim , ni. Part. III. Scci, ( •Spfi MENUISIER, m. Pan. SeB. III. Chap. Xlll. CHAPITRE TREIZIEME. De l'Ébénifterie pleine ou d'ajfemblage en général. A. V A N T de traiter de la trolfieme efpece d'Ebénifterie , c'eft-à-dire , ceLle dans la conftruftion de laquelle on fait entrer les métaux & différentes autres matiè- res , je vais faire la defcription de l'Ebénifterie pleine , laquelle fert fouvent de fond à la première , & dont par conféquent la connoiffance eft abfolument néceflàire. Sous le nom SEhiniflene pleine, on comprend tous les ouvrages faits en plein bois , dont la conftrudion eft particulièrement du reiïbrt des Menuifiers- Ebéniftes , comme beaucoup de Meubles dont j'ai déjà fait la defcription dans la féconde Seâion de cette troifieme Partie de mon Ouvrage , & une infinité d'au- tres ouvrages dont je parlerai ci-après , & qui font abfolument du reflbrt des Ebéniftes , à caufe de leur petitefle , & encore plus de la propreté & de la grande précifion avec lefquelles il faut qu'ils foient faits , tels que les Métiers à broder de toutes formes & grandeurs, les Tables de différentes efpeces, les Guéridons , les Pupitres de toutes façons, les Boîtes de toutes fortes , &. généralement tous les Modèles & les Inftruments fervant aux différents Arts, comme la PliyCque , la Méchanique , &c. lefquels demandent à être traités avec une propreté & une exaditude dont il n'y a guère que les Menuifiers-Ebéniftes , & encore ceux qui s'adonnent particulièrement à cette partie de leur Art , qui en foient capables ; de forte que ce genre de travail demande une étude toute particulière par rap- port à la grande précifion & aux foins qu'il exige , quoiqu'en général on fe ferye toujours des mêmes principes pour la conftruélion de ces fortes d'ouvrages , que pour celle des autres elpeces de Menuiferies , comme je l'expliquerai dans la fuite. Les ouvrages d'Ebénifterie dont il eft ici queftion , fe font toujours en bois des Indes , ou du moins avec des bois de France les plus propres , comme le Poirier , le Noyer & autres de cette efpece , lefquels prennent bien le poli , & dont le grain fin & ferré les rend plus faciles à travailler & à prendre toutes les formes qu'on juge à propos de leur donner, quelque petites que foient les pièces , ce qu'on ne peut pas faire avec les bois à gros grain', comme le Chêne , l'Orme , &c. Les outils dont on fe fert pour faire cette efpece d'Ebénifterie , font les mêmes que ceux des Menuifiers d'affemblage , des Menuifiers en Meubles , & des Menuifiers-Ebéniftes , dont j'ai fait la defcription au commencement de cette Partie de mon Ouvrage , du moins quant à ce qui regarde la conftruélion , qui ï)e l'Ebénifierie pleine en générah Sy/ efi- toujours la même ; cependant comme cette efpece d'Ebénifterle doit être faité avec beaucoup de foins & de précifion , il eft bon que plufieurs des outils qui fervent à fa conftruflion, comme lesEquerres de toutes fortes, & même lesTruf- quins à vis, foient conftruits enfer ou en cuivre, au lieu d'être tout de bois, parcs que les opérations faites avec ces derniers, ne peuventpas être faites fi juftes qu'a- vec les autres , vu que le bois de leurs lames s'ufe aifément par le long ufage ; les fcies doivent aulTi être d'une meilleure conftruilion, tant pour la forme & la qua- lité de leur monture , que pour celle de leur lame , qui doit être trempée , afin de mieux réfifter à la dureté des bois , qu'il faut toujours couper jufte & le plus proprement poffible, ce qu'on ne peut pas âiféraent faire avec les fcies ordinaires* Comme cette efpece de Menuiferie eft quelquefois ornée de moulures , les outils qui fervent à les former font les mêmes , & fe font de la même manière que pour la Menuiferie d'affemblage ; cependant comme on emploie quelquefois des bois très-durs & difficiles à travailler, on fait la pente de ces outils plus droite qu'à l'ordinaire ; quelquefois même on y met des femelles de cuivre oU de fer , ( ce qui vaut beaucoup mieux ) afin qu'elles réfiftent plus long-temps au frottement fins perdre de leur forme , ce qui eft très-utile , parce que la forma du fût d'un outil de moulure refiant toujours la même , il eft plus aifé de confer- ver celle du fer, qui ne fauroit alors s'altérer en l'affûtant fans qu'on ne s'en apperçoive en le mettant dans fon fût ; tout finconvénient qu'il peut y avoir aux outils de moulures ainfi conftruits , c'eft que non-feulement ils font beau- coup plus coîiteux que les autres , mais encore ils ont le défaut de tenir fur le bois en frottant delfus , ce qui les rend plus rudes à conduire ; les femelles de . cuivre fur-tout, ont cet inconvénient , parce que ce métal étant plus poreux que le fer , s'échauffe plus aifément par l'adion du frottement , ce qui l'attache en quelque forte avec le bois fur lequel il coule. Les Menuifiers-Ebéniftes fe fervent, pour la conftrudion des ouvrages donc il eft ici queftion , non-feulement des outils communs aux autres Menuifiers,' ainfi que je viens de le dire , mais encore de diverfes fortes d'outils appartenants à d'autres Arts , comme ceux du Tourneur , pour ce qui a rapport au Tour à pointe ordinaire , & aux Filières en bois ; de ceux du Serrurier , comme les Etaux , les Limes 8c autres outils de cet Art , qui leur font néceffàires , non- feulemeut pour ferrer & ajufter les parties de ferrurerie qui s'adaptent à leurs ouvrages, mais encore pour travailler les bois durs, dont les bois de boutfe reca- lent & s'équarrilfent à la lime beaucoup plus aifément qu'on ne pourroit le faire au cifeau ou avec tout autre outil; c'eft pourquoi, après avoir fait la defcription de quelques outils propres à la conftruélion de l'Ebénifterie dont je parle , je donnerai une notion, Amplement élémentaire, de la partie de l'Art du Tour- neur & du Serrurier , dont la connoifiànce eft abfolument néceflàire , & même indifpenfable , aux Ebéniftes , pour faire les parties de leurs ouvrages qui appar- tiennent à ces différents Arts , & auxquels ils font liés de manière que les ^ Sp8 MENUISIER, IIL Pan. SeB. III Chap. XlIL Ouvriers de ces mêmes Arts ont été obligés de ieur lailTer faire des chofes qu ils ne pouvoient pas faire eux-mêmes , du moins fans beaucoup de peine & de perte de temps ( * )• Planche ^o8. Section Premiers^ Defcriptlon de quelques Outils propres a la conflruBlon de VlEhèniJlerie d' ajjemhlage y & la manière de s en fervlr* . C o M M E la 'plupart des bois des Indes font très-chers , pour la plus grande partie difficiles à travailler , on les débite à la fcie , tant fur l'épaiiTeur que fur la largeur, afin d'épargner la matière en y faifant le moins de perte polTible , & en même temps pour les corroyer plus facilement j vu que beau- coup ne peuvent l'être qu'avec la varlope-onglct à dents , du moins pour les mettre tout-à-fait à la groffeur convenable , ce qu'on ne peut pas faire avec la varlope ordinaire, vu que ces bois étant fouvent très-durs ou, ce qui pis eft, de rebours , les fers pleins des varlopes mordroient peu deffus , ou y feroient des C^) Cette liaifon des ArtS , iSc le rapport que flufieurs ont les uns avec les ancres , eft la Inëilleurc preuve qu'on puiffe donner de l'im- poflibiiitc où font les Ouvriers de s'afl^jétir â des Règlements qui donnent à tel Art la jouif- fance cxcluiîve de certains outils, & qui, par conféquent, en privent les autres Arts auxquels ces outils feroient très-nécelîaires , puïfque ceux mêmes qui jouifTent de ces droits, fe trouvent tous les jours, dans la néceflité de les aban- donner, parce qu'ils leur deviennent onéreux; Ou bien pour jouir eux-mêmes des outils d'un autre Art, auquel, par repréfailles , ils accor- dent, du moins tacitement, la communication des leurs , ne voulant pas choquer ouvertement ces Feulements faits pour allurer leurs droits, quoiqu'ils ne faOent au contraire que les gêner eux Si. les autl-es Ouvriers , fans leur faire au- cune efpece de bien. En effet , ne feroic-il pas beaucoup plus utile pour le progrès & la per- fei5tion des Arts, ôc pour le bien de Thumanitt^ même , qu'il fût libre à chacun des Ouvriers ou des Arciftes , de fe fcrvir des outils qui leur feroient les plus utiles pour accélérer leur tra- vail , & le rendre plus parfait? A quoi fcrt de gêner les hommes jufques dans la manière de travailler? ne le font-ils pas déjà affez par la néceflltc phyfique qui les oblige de le faire pour conferver leur exiftence, S: par Tinconvênient des Maîtrifes , qui , quoiqu'inrtituces pour fcr- vir au maintien &; à la perfedion des diffé- rents Arts , ne fervent fouvent, au contraire, qu'à leur deilruftion ? Et fuppofé même que les Maitrifes tendïlTent au but qu'on s'étoit pro- pofé en les établiifant , la communicatoin des outils que je fouhaiterois , ne pourroic leur faire aucun tort , & leur feroit, même , beau- coup de bien. Qu'imporccroit-il à un Ouvrier, ou, pour mieux dire , à un Maître d'un cer- tain Ait, qu'un auue fc feivîc de quelques qu^ tils dont l'ufage lui appartient , pourvu qu'il ns fît que des ouvrages de fon Art ? il ne per- droit pas pour cela le droit , ( peut-être jufle , ) de \c iaidt sSi le tronuoir en contravention J Qu on adie dans les Laboratoires de Ja plupart des Seigneurs ôc des Savants qui s'exercent aux: Arts méchaniques , on y trouvera enfemble les outils du Mcnuifier avec ceux du Tourneur ceux du Serrurier , de l'Horloger, & généra- lement tous les outils qu'ils croient leur être nc- cellaires , & dont ils le fervent indiftinftemenc félon qu'ils le jugent convenable. Si de*; crens qui ne travaillent que pour leur amufement & fouvent pour l'inflruaion du Public, ont reconnu la nécelTité de fe fervir indifférem'inent de toutes forces d'outils , à plus force raifoa des Ouvriers qui travaillent pour gagner leur vie , devroient-ils avoir plus de commodité Se la liberté de fe fervir de tous les oucils qui peuvent leur être utiles. On ne peut guère, comme je J'ai démontré dans le cours de cen Ouvrage, faire les ouvrages d'un Art fans le fecour'; de beaucoup d'autres ArLS ; & il eft très-difficile de bien connoîtrc les jufles bor- nes qu'on peut lui donner: celui dont je traite fur tout, eft dans ce cas plus que tout autre- car dans fon origine il tient à l'Art du Char- pentier, avec lequel il ne faifoit anciennemeuc qu'un; d'un autre côté il tient au Serruiier au Tourneur, au Sculpteur, au Layetier , au Boillelier, au Tabletier, à rEventaiîlifte', à rOrfévre & même au Bijoutier, des outils def- quels les Menuifiers ont fouvent befoin , & dune la privation leur fait beaucoup de tore ; ou It ils s'en fervent, ils font expofcs à être faifis ; d'où il s'enfuit des querelles , des procès , t'anî-^ mofité & l'efpritde parti , qui en font le- fuites , ce qui ell plus malheureux encore, Timper- feaion qui fe rencontre dans prelqus tous Jet ouvrages des dillctems Arts, éclats ^ Sêct. t. Des Outils propres à l'Ehènifl&rie d'a(}\mblags , êCc. 895» éclats qu'on ne pourroit pas atteindre fans faire tort aux différentes pièces qui =■ alors fe trouveroient trop minces ou trop étroites ; de plus cette efpece de Me- Planche nuiferie étant faite pour être polie, il faut qu'il ne s'y trouve aucune cavité dans toute là furface , tant fur la longueur que fur la largeur , ce qui , par con- féquent, oblige à fe fervir des outils à fers brettés , du moins pour le bois d'une qualité extrêmement dure , ou d'un fil trop mêlé de rebours , ainfi que je viens de le dire ci-delTus ; pour les bois qui feront moins durs & plus de fil que ceux dont je viens de parler , on les corroyé avec les varlopes & de la manière ordi- naire. Cependant on fera très-bien de les terminer avec les outils brettés , afin d'éviter toute efpece d'éclats à leur furface. Quand les pièces font trop petites , ou d'un bois trop dur pour être corroyées à l'ordinaire , c' eft-à-dire , avec des varlopes & des rabots , après les avoir fciées , on les équarrit avec les râpes & les limes de différentes efpeces , comme je fex- pliquerai ci-après ; mais de quelque manière que les bois foient corroyés , -les Ebénifles fe fervent, pour les équarrir , d'équerres de bois ordinaires ; cependant il feroit bon qu'ils en euflent de fer ou de cuivre nommées éqiierres à chaperons dont une des branches fût tournée furie plat , & l'autre furie champ , comme cd[<ifig. 1, dont on auroitfuppriraé la partie abcd, alin qu'en inclinant l'équer- le de quelque manière que ce foit , fa branche fupérieure fût toujours perpen- diculaire à la pièce qu'on travailleroit , comme on peut le voir à la fig. 4 , où la branche fupérieure de lëquerre , fuppofée de e en f, efl: perpendiculaire à l'autro branche 0^ A, vue par le bout dans cette figure. Ces mêmes équerres peuvent auffi fervir pour retourner fens dellùs deffous , c'eft-à-dire , la branche fupérieure en delfus au point i , Se l'autre g h , pofée à plat fur l'ouvrage. P^oyei la fig. 4. Cette équerre peut auffi fervir de triangle pour tracer l'ouvrage , foit qu'elle foit conftruite comme je l'ai fuppofée , ou qu'elle eft repréfentée^o-. a. La Figure i repréfente une autre efpece d'équerre ou de triangle propre à tracer des angles droits à différentes parties où les équerres ou triangles ordi- naires ne feroient pas d'un ufage commode. Les équerres dont je viens de parler, ne peuvent fervir que pour des angles faillants & des furfaces planes ; & comme il arrive quelquefois qu'on a des cavités à angle droit à creufer dans le bois , comme des mortaifes ou autres ouvrages de cette efpece , on fe fert pour les équarrir (ou du moins pour vérifier fi elles font percées bien quarrément) , d'une équerre nommée équerre à croix, laquelle eft compofée de deux tringles de fer A B Se CD, dont la dernière fe meut perpendiculairement à la première , avec laquelle elle eft arrêtée par le moyen d'une vis E , de manière que cette équerre fert en même temps à vérifier fi les côtés de la partie creufe font perpendiculaires à la furface de l'ouvrage, & à affurer de l'égalité de la profondeur , puifqu'on fait defcendre la branche C D de l'équerre, depuis F jufqu'à D , d'une longueur égale à la profondeur: de la partie qu'on veut creufer , comme on peut le yoir dans cette figure j Menuisier , 111, Parti 111. Secî, Y lo, 500 ME NUIS lE R, m. Part. SeB. Ilï. Chap. XIIl -"' ^ dans laquelle j'ai repréfenté , par des lignes pondluées , la même équerre reportée Planche .de l'autre côté de la mortaife. •5°*' Quoique je n'aye repréfenté ici que des équerres & des triangles à angles droits , il eft cependant bon d'avoir des triangles-onglets , & de faufles équerres aufli de fer, pour les raifons que j'ai dites ci-deffus ; fi donc je ne les ai pas delTmés ici, ce n'eft que dans la vue d'éviter les répétitions , & pour ne point multiplier inutilement les figures , & par conféquent les Planches. La Figure j' repréfenté une efpece d'équerre, ou , pour mieux dire , de com- pas propre à vérifier en même temps fi une pièce eft parfaitement d'équerre & d'une égale épaiffeur dans toutes fes parties , ce qui eft nécelTaire , fur -tout pour les pièces qu'on équarrit à la lime. Les frufquins en fer font d'une forme à peu-près fèmblable à la figure y, excepté qu'au lieu de la branche en retour d'équerre G , leur tige eft terminée par une pointe prife à même la tige , ou rapportée à vis dans cette dernière , ce qui eft égal , pourvu que cette pointe foit d'acier bien dur & même trempé ; fur-tout quand on s'en fert pour les métaux. J'ai dit plus haut , pn^e 8io , que les Ebéniftes fe fervoient des mêmes fcies que les autres Menuifiers ; cependant pour les ouvrages dont il eft ici queftion, il eft bon que ces fcies , fi elles font les mêmes , foient faites avec un peu plus de foin , & que leurs lames foient trempées , afin qu'elles réfiftent mieux en travaillant les bois durs; or, comme les fcies trempées demandent à être extrê- mement tendues, on fera très-bien, au lieu de corde , d'y mettre une tringle de fer taraudée d'un bout , afin de recevoir un écrou par le moyen duquel on puiffè bander la fcie au degré qu'on le juge à propos. Voye^ les fig. 7, ii , 13 ^ & 14' Il faut avoir foin que le bas de cette tringle (foit de fer ou de cuivre ) foit d'une forme quarrée , ainfi que la partie du haut prife immédiatement après le taraudage , afin qu'elle ne tourne pas lorfqu'on ferre l'écrou ; & il eft même bon de garnir l'extrémité du bras de la fcie, fig. ir, d'une platine de fer en dedans , laquelle eft percée d'un trou quarré par oîi pafle la tringle, comme on peut le voir dans cette figure. La Figure 6 repréfenté une fcie nommée Scie à V Angloïfe , dont l'arçon ou monture eft tout de fer ; cette fcie fe bande par le moyen du manche , leque! reçoit le bout du mord H , qui y eft arrêté pat le moyen d'un écrou /, à peu- près de la même manière qu'à la fcie de marqueterie dont j'ai fait la defcription page 843. Ces fortes de fcies fervent non-feulement pour tous les petits ouvra- ges , mais encore pour couper les métaux tendres , comme le cuivre , l'étain ^ &c. ainfi que pour les autres matières qu'on emploie en Ebénifterie ; c'eft pour- quoi il eft toujours néceflaire que leurs lames foient trempées. La Figure 8 repréfenté un outil nommé Couteau a fcie ou Scie en couteau ^ lequel ne diffère de la fcie à main ( dont j'ai parié dans la première Partie ds Sect. 1. Des Outils propres à ménifiened'aJfemMage,8Cc. pof ïnon Ouvrage, page 190,) que par la grandeur de la lame & la forme du manche. Cette fcie eft très-commode pour de petites parties on on ne peut Pianche pas fe fervir de fcles ordinaires, & il eft bon de les conftruire comme celle ^"^^ repréfentée fig. S , afin de pouvoir changer leurs lames quand on le juge à propos. Les Figures 9 & i J rcpréfentent une autre efpece de fcie à manche & à con- duite , laquelle ne defcend qu'à la profondeur qu'on juge à propos de lui don- ner, & forme par conféquent , dans plufieurs pièces, des traits d'une profondeur égale. Cette fcie eft compofée d'une lame à l'ordinaire , & d'un chaffis ou mon- ture de fer divifé en deux fur l'épaiffeur, & dont une des parties entre en en- taille des deux bouts dans celle qui eft dormante , & qui , par conféquent , entre dans le manche , de manière qu'elles ne femblent faire qu'une ; ces deux parties font arrêtées enfembie par le moyen de trois vis taraudées dans la partie dormante de la monture, au milieu de laquelle la fcie eft placée , étant percée elle-même par trois mortaifes correfpondantes & d'une largeur égale au diamètre des vis , de manière qu'on peut faire avancer ou reculer la lame autant que peut le per- mettre la longueur des mortaifes; enfuite de quoi on ferre les vis pour tenir la fcie en place. F jyq la fig. ç) , où j'ai caiTé le milieu d'une partie de la monture , afin qu'on pui/Te voir la mortaife de la lame , & par conféquent la refuite qu'elle peut avoir. La Figure 10 repréfente une autre fcie à conduite , dont la monture eft au milieu , de manière qu'on peut y adapter une ou deux lames de fcie , c'eft-à-dire une de chaque côté. La monture de cette fcie entre dans un premier coup de fcie donné auparavant dans la pièce , & elle peut, ainfi que la précédente , fervir non-feulement à couper les différentes parties de fouvrage , mais encore à y faire des ravalements de différentes profondeurs & plus ou moins larges , félon que les fcies font plus ou moins épai/Tes , à la place defquelles on peut même mettre des écouenes fi on le juge à propos , fur-tout pour travailler les bois durs , l'ivoire , fécaille ou d'autres matières dans lefquelles on veut faire des incruftations , en raifon defquelles on conftruira les outils dont on aura befoin • me contentant des deux exemples que je viens de donner , Icfquels font , ce me femble , fufEfants pour aider à en compofer d'autres , foit d'une forme à peu-près femblable , ou difpofés comme des outils à fût. La Figure 12 repréfente un outil nommé FerçoLr ; ce n'eft autre chofe qu'une pointe d'une forme applatie , dont les arêtes extérieures font vives & coupantes. Cette pointe fert à percer de petits trous dans des parties de bois minces , en obfervant de difpofer la partie la plus large du perçoir en travers des iîls du bois , afin que ces derniers étant coupés , n'oppofent point de réfiftance à la pointa qu'on enfonce dans le bois , qui alors n'eft pas expofé à fe fendre. Les autres petits trous fe percent à la mèche , à l'ordinaire ; & quand on craint que les pièces ne foient trop foibles pour réfîfter à l'effort de cette dernière, on les perce MENVISIE R, m. Paru SeE. III. Chap. llïl. ■ au foret , comme je l'expliquerai ci-après en parlant des outils propres à percef Planche Jes métauîf. ^ Les outils dont je viens de faire la defcription ( abftradlion faite de ceux du Tour & de Serrurerie dont je vais parler ci-après , & en général de tous les outils de Menuifiers dont j'ai parlé dans le cours de cet Ouvrage , qui peuvent fervir également à la conftru(Sl:ion de l'Ebénifterie dont il eft ici queftion) , font , à peu de chofe près , tous ceux qui font les plus utiles. Il en eft encore beaucoup d'autres que chaque Ouvrier fait pour fon ulàge , félon fon génie & les diffé- rentes occalions qu'il a de les employer avec plus ou moins de fuccès ; mais comme la plupart de ces outils font peu différents de ceux dont j'ai parlé dans la defcription des différentes elpeces de Menuiferie , j'ai cru pouvoir me di{^ penfer d'entrer dans aucun détail à ce fujet , cette matière étant d'ailleurs iné- puifàble. Quant à la conftruélion de l'Ebénifterie pleine , c'efl toujours la même chofè que pour les autres efpeces de Menuiferie; les différentes parties qui la compofent font toujours liées les unes avec les autres par le moyen des rainures , des lan- guettes , des tenons , des mortaifes & autres afîêmblages ; toute la différence qu'il y a , c'eft qu'il faut que tous ces différents affemblages, ainfi que tout le refle de la conftruélion de cette Menuiferie, foient faits avec toute la perfeélion poffible, que le corroyage des bois, les joints & les afîêmblages fur-tout, foient faits avec la dernière des précifions , làns être dégraiifés en aucune manière ; de forte qu'en travaillant fur les joints ils ne fe découvrent pas. Je ne parlerai pas ici de la qualité des bois , lefquels doivent être parfaits & auffi fecs qu'il convient ; fans quoi , quelque foin qu'on prenne , on ne peut pas faire de bon ouvrage. , SectionSeconde. Notions clémentaues de la partie de l'An du Tour nécejfaire aux Ebénifles, ' " L'Art du Tour eft , de tous les Arts relatifs ou accefîbires à fArt du Menui- Planchb fier , celui qui femble appartenir de plus près à ce dernier , dont il faifoit affûré- ^ ment partie avant qu'il fût devenu affez confidérable pour être divifé en plufieurs branches , qui, par la fuite des temps , font devenues des Arts différents , dont la jouiffance eft exclufive par le moyen des Maîtrifes ; en effet, tous les anciens ouvrages de Menuiferie font ornés de parties faites au Tour , qui sûrement ■ l'étoient par les Menuifiers , ou du moins leur grande adhérence avec la Menui- ferie , donne lieu de le croire ainfi , ou bien que les Tourneurs étoient eux- mêmes Menuifiers , ce qui eft la même chofe. Maintenant les Menuifiers ordinaires ne font plus d'ouvrages de Tour , quoi- qu'ils foient en droit d'en faire , du moins les Maîtres Se leurs fils fous eux , ou un de leurs Apprentifs ; il n'y a que quelques Menuifîers-Ebéniftes qui fe fervent de f Sèct. II. Notions élémentaires de l'An du Tour, SCc. 903 cle ce droit pour tourner eux-mêmes les parties de leurs ouvrages qui ont befoin de l'être , ce qui eft beaucoup mieux que de les faire faire par un Tourneur ordi- Planche naire , qui, queiqu'habile qu'il foit , ( s'il n'eft que Tourneur proprement dit ) n'eft guère en état de traiter auffi bien les parties de Menuiferie qui ont befoin d'être tournées , que le feroit un Menuifier qui fauroit tourner ; de plus , il n'y a que dans les Villes comme Paris , & quelques-unes de nos Provinces , on il y a des Maîtrifes exclufives où les Menuifiers ne font pas Tourneurs ; & comme cet Ouvrage eft pour tous les Pays indifféremment , ce feroit le rendre incom- plet , fi je ne donnois au moins des notions élémentaires du Tour à pointe , donc à la rigueur , les Menuifiers peuvent fe pafTer , du moins pour les ouvrages ordi^ naires. La Figure l repréfente un Tour à pointe, lequel eft compofé d'un banc oii établi , de deux poupées avec leurs pointes , de deux ou trois fupports avec leurs barres , d'une perche , d'une marche ou pédale, & d'une corde par le moyen de laquelle on fait tourner l'ouvrage , pris entre les deux pointes des poupées. L'établi ou banc du Tour a de hauteur 3 pieds à 3 pieds un quart , fur y à (î pieds de longueur ; il eft compofé de deux jumelles A B , C D , de j^. pouces quarrés , diftantes l'une de l'autre d'environ 2 pouces , & aflembiées à leurs extrémités par des entre-toifes qui y entrent à tenons doubles fur leur épaiffeur , & qu'on cheville fortement. Quelquefois au lieu de mettre ces traverfes ou entre-toifes à bois de bout comme dans la figure r , on y met des morceaux à bois de fil afiemblés à clef avec les jumelles , au travers defquelles , & au milieu de leur épaifleur, on fait pafier un boulon de fer à vis , lequel retient très-biea l'écart des jumelles , & en même temps donne la facilité de les démonter , foi: pour les redrefiir, ou pour quelqu'autre chofe qu'on voudroit y faire. Les jumelles font portées par quatre pieds d'une grolTeur à peu-près égale à celle de ces dernières , dans le deffous defquelles on les affemble à tenons & mortaifes doubles fur l'épaiffeur. Quand on veut que ces alTemblages foient très- folides , on y met des vis , dont la tête ronde & plate s'incrufte dans le defius des jumelles avec lequel elles affleurent ; l'écrou de ces vis fe place dans l'intérieur du pied, à 3 ou 4 pouces de leur arrafement ; & on doit avoir grand foin qu'il foit bien ajufté , pour qu'il ne puiffe faire aucun mouvement. Quand on met des vis aux alTemblages des pieds de l'établi du Tour , on ne doit donner à ces derniers qu'un pouce de longueur au plus, ce qui eft nécelTaire' pour les retenir en place où ils n'ont pas befoin d'être chevillés. L'extrémité inférieure des pieds de l'établi ou banc du Tour , eft affemblé dans des patins E, F, fig. 2 , avec lefquels ils affleurent , & dont la longueur eft d'environ 3 pieds , afin de donner plus d'empattement au banc , & pour recevoir des arcs-boutants C , H, qui viennent s'y aiïembler , ainfi que dans les pieds , à tenon , à mortaife & en embreuvement , afin d'oppofer plus de réfif- tance , & d'empêcher que le pied de l'établi ne falTe aucun mouvement, r oye^ MENi/lSIER , m. Pan. III. Sec% X 10 504 MENUISIER, m. Pan. Sect ni. Chap. XlII. ^'^fig- 7 > qui repréfente un arc-boutant tout défaffemblé , avec fes tenons & les deux barbes a, ^, dont la faillie eft indiquée par des lignes ponduées ; &la jig.^, qui repréfente le patin vu en delTus avec les aflemblages tant des arcs- boutants que des pieds , qu'on clieville avec les patins, du moins pour l'ordi- naire; car il vaudroit beaucoup mieux y mettre des vis en de/Fous , lefquelles arrêteroient les pieds beaucoup plus folidement qu'on ne pourroit le faire avec des chevilles. L'établi ou banc du Tour, tel qu'il eft repréfenté dans la figure de cette Planche , eft de la moyenne grolFeur , & on peut tourner deffus tous les plus gros ouvrages de Menuiferie , en obfervant de l'arrêrer fortement contre la niuraiUe, & même contre le plancher, ou, pour mieux dire, le plafond de l'Attelier , par le moyen d'un ou plufieurs étréfillons ou goberges placés de divers fens , pour éviter que fétabli ne tremble lorfqu'on y tourne de gros ouvrages , à l'effort defquels le poids de l'établi n'apporte pas affez de réfiftance ; ce qui, cependant, eft affez rare pour les ouvrages de Menuiferie ordinaires, qui ont, pour la plupart , befoin de moins de réfiftance que n'en oppofe le poids de rétabli tel que je l'ai repréfenté ici; c'eft pourquoi, dans le cas de petits ouvrages , on fait ufage d'établis moins lourds que celui-ci , & dont le defllis eft plus large fur le derrière, afin de pouvoir y placer fouvrage ou les outils. Ces fortes d'établis peuvent être placés contre le mur ou vis-à-vis d'une croifée ou bien être ifolés dans le milieu de fArtelier; dans ce dernier cas, il faut qu'ils foient fermés au pourtour, du moins de trois côtés, celui de la jumelle la plus étroite devant être toujours vuide & fms traverfe par le bas , pour donner la liberté de faire mouvoir la marche. Le deffus de ces fortes d'établis doit toujours être très-épais, pour qu'ils ne tremblent pas lorfqu'on travaille delfus , & leurs jumelles de devant avoir tou- jours 4 pouces de largeur. En général , le deffus des établis de Tour doit être très-droit & bien dégauchi , afin que les poupées portent également par-tout, & foient toujours bien perpen- diculaires ; il faut auffi avoir grand foin que la diftance ou rainure qui eft entre les deux jumelles, foit bien égale de largeur dans toute la longueur de l'établi pour que les queues ou tenons des poupées n'ayent pas plus de jeu dans un endroit qu'à l'autre. Les faces intérieures des jumelles qui forment cette rainure , doivent être parfaitement d'équerre , & par conféquent perpendiculaires au delfus de la table , pour ne nuire en aucune manière au paffage des queues des poupées, qui doivent entrer très-jufte dans la rainure, fans cependant frotter beaucoup , afin de pouvoir les faire aller & venir comme on le juge à propos. Les poupées l d^L,fig. i , font des pièces de bois de 12 à 14 pouces de liauteur, prifes du deffus de l'établi , fur j à 5 pouces d'épaiiTeur, & 7 à 8 d ; largeur, à fextrémité inférieure defquelles eft réfervé un tenon ou queue oui faife entre les deux jumelles , & les défaffleure en deffous d'environ 6 pouces Sect. h. Notions élémentaires de l'An du Tour, SCc. <jo; pour pouvoir y faire une mortaife dans laquelle on fait entrer un coin c d, fig. — -. a , qui arrête la poupée fur les jumelles à telle place qu'on le juge à propos. Flanche P^oyei les fig. 3 0' 4 , qui repréfentent les deux poupées I , L , fig. i , vues de face, c'eft-à-dire, fur leur épailleur, avecies mortaifes propres à placer les coins , lefquelles mortaifes remontent en contre-haut du deffous des jumelles , indiquées par des lignes ponâuées, d'environ un demi-pouce , ce qui efl nécef- faire pour faciliter la prefîîon du coin. Au haut des poupées ,fig.i,^ <& 4 , & le plus près poffible de leur extré- mité , font placées deux pointes d'acier , terminées toutes deux en forme de cône un peu bombé fur fes faces ; une de ces pointes qui eft placée à gauche , fig. 3 , eft taraudée dans toute fa longueur, & eft terminée en dehors par une manivelle e fi, au moyen de laquelle on la fait mouvoir pour l'avancer ou la reculer félon qu'il eft befoin. L'autre pointe , fig. 4 , eft arrêtée à demeure dans la poupée ; & pour confer- ver à cette dernière toute fa folidité , on reploie la pointe en équerre de g er» h, & de h en L , où elle traverfe la poupée avec laquelle on l'arrête avec un écrou , le bout L de la pointe étant taraudé à cet effet. Voyei la fig. y , qui repréfente cette pointe vue de face , & cotée des mêmes lettres que la fig. 4. Les pointes ne doivent pas être placées direélement au milieu de la largeut des poupées , mais au contraire le plus près du devant qu'il eft pollible , afin que dans le cas d'un ouvrage d'un petit diamètre , la barre qui fupporte l'outil appro- che contre l'ouvrage. Les fupports ordinaires font compofés d'une tige MN, fig. 1, de apouces d'é- paifl"eur, fur environ 3 de largeur, à l'extrémité de laquelle eft alTemblé, en retour d'équerre , un montant ou mantonnet O , dont la hauteur doit être de j à (î pouces. A environ un pouce & demi de diftance du mantonnet O , eft pareille- ment afl'emblée une cheville P , d'un bon pouce de diamètre , laquelle fert à retenir en place la barre de fupport QR,fig. 6, laquelle doit être prife très- jufte entre la cheville & le montant, afin qu'elle ne faffe aucun mouvement lorfqu'on travaille & qu'on appuie l'outil deflus. Ces fupports entrent tout en vie dans les poupées , à environ 3 pouces au- deftus de l'arrafement de ces dernières ; & on pratique au-defllis des mortaifes,' dans lefquelles entrent les flipports des entailles oià fe placent les chevilles qui retiennent la barre de fupport , de manière que cette dernière peut approcher jufqu'au devant des poupées , ce qui eft quelquefois néceflaire. La barre de fupport Q R , fig. 6 , eft une pièce de bois de chêne , ou de tout autre bois ferme & de fil , dont la longueur doit être égale à celle du banc , ou du moins au dehors des poupées. Quant à la largeur de la barre , ou , pour mieux dire , de fi hauteur , elle doit être difpofée de manière que fon extrémité fupé- rieure foit un peu plus baffe que le centre des pointes des poupées , pour les raifons que je dirai ci-après , en parlant de la manière de tourner. J^oye^ la fig. 2 ^ çoS MENUISIER, m. Part. SeB. 111 Chap. XIIL . où la barre de fupport eft repréfentée en coupe , & fon angle extérieur arrondi , Planche ce qui eft nécelîlùre pour qu'on puifle incliner l'outil en dehors autant qu'on le juge à propos. Les fupports s'écartent du devant des poupées autant que l'exige le diamètre de la pièce qu'on tourne , ôc on les arrête en place par le moyen d'une vis de preflîon taraudée dans la joue de la poupée , ainfi qu'on peut le voir à celle L, I , & à celles 1 8z L ,fig. ^ Ô' 4.. Quand les poupées font écartées l'une de l'autre autant qu'il eft poffible , ( c'eft-à-dire , que la longueur de l'établi peut le permettre), & qu'on craint que la barre de fupport ne ploie fur fa longueur , ou que , pour quelque raifon , on ne veut pas que cette barre aille d'une poupée à l'autre , on la fait porter par un fupport S ,fig. I , lequel eft afTujetti fur le banc par le moyen d'un morceau de bois T, qui palIe entre les deux jumelles, en deflbus defquelles il eft arrêté à clef, ainfi que les poupées. Ce fupport S , diifere de ceux placés dans les pou- pées , en ce que fon montant & la cheville de devant font d'une feule pièce entaillée pour placer la barre de fupport ; Se on doit avoir grand foin que le delTus de cette entaille foit parfaitem.ent de niveau avec le deffus de la tige de l'autre llipport , ainfi que je l'ai obfervé dans cette figure. La barre de fupport entre , ainfi que je l'ai dit plus haut, jufte entre le man- tonnec & la cheville des fupports ; cependant il eft bon , pour plus de folidité , de mettre des vis dans l'épaiffeur des mantonnets, lefquelles fa/îènt preflîon fur la barre , & par conféquent l'empêchent de fe mouvoir & de fe déranger de fà place. La perche à laquelle eft attachée la corde du Tour , doit être d'un bois ferme & liant , comme le Charme , le Frêne & même le Buis , lorfqu'il n'eft pas trop noueux , de la longueur de 7 à 8 pieds , & de 2 à 2 pouces & demi de dia- mètre par fon plus gros bout , lequel doit être attaché au plafond de l'Attelier , de manière qu'elle puifle tourner aifément ; l'autre bout de la perche doit être un peu plané en deflbus jufqu'à environ le quart de fa longueur , à compter du gros bout , parce que c'eft à peu-près à cette diftance qu'on place le chaflîs fur lequel la perche porte. Ce chaflîs n'eft autre chofe qu'une traverfe d'environ 3 pieds de longueur , aflèmblée par fes deux extrémités dans deux montants de 8 à ro pouces de haut , fortement attachés au plafond de l'Attelier. La corde s'at- tache au petit bout de la perche , laquelle doit être placée de manière que quand elle eft abaiflee à la moitié du chemin qu elle doit faire lorfqu'elle eft entraînée par la corde , cette dernière fe trouve perpendiculaire à Taxe de l'ouvrage qu'on tourne , & par conféquent avec les pointes des poupées , ou du moins à une ligne horifontale menée de l'une à l'autre. La corde doit avoir une ligne & demie à 2 lignes de diamètre ; & il faut lui faire faire deux tours fur l'ouvrage , en obfervant que le fécond fe trouve eri face en lecombant , pour joindre la pédale au point U , Jig. i , afin qu'en appuyant Sect. II. Notions élémentaires de l'An du Tour , SCc 507 appuyant fur cette dernière , elle entraîne la corde , & par conféquent l'ouvrage , 1 ' ; & l'oblige à tourner à la rencontre de l'outil , qui , par ce moyen , mord delTus. Planche Voye[ La pg. I . La corde doit être placée à la gauche de l'Ouvrier , du moins c'eft l'ordinaire, quoiqu'il y ait des occafions oi!i on la place à droite ; & c'eft pour cela que la perche pofe fur un chaffis de 2 pieds de largeur , afin d'avoir la liberté de la placer à droite ou à gauche , félon qu'on le juge à propos. La marche ou pédale eft fimple , c'eft-à-dire, compofée d'un feul morceau ds bois de a à 3 pieds de longueur , ou compofée de plufieurs morceaux, comme celle U ,Jig. I , laquelle eft ainfi difpofée , parce que la corde palîîuit par der- rière le banc & au-deffus des jumelles , comme on peut le voir dans cette figure , & que l'indique la ligne lm,Jlg. 2 , il faut que cette pédale foit très-longue, ce qui oblige à y mettre une entre-toife XY,fig. i , afin que le Tourneur puilTe également fe fervir du pied droit & du pied gauche , & avoir en même temps un autre point d'appui en Z , qui augmente un peu la puiflànce de la prefllon, & diminue par conféquent de la réfiftance qu'oppofe le choc de l'outil & la perche qui tend à fe redrelTer. Ces fortes de marches n'ont d'autre avantage que de faire parcourir de plus grands efpaces à la corde, ce qui eft nécelTaire quand on a des ouvrages d'un gros diamètre à tourner, où il faut, autant qu'il eft poflîble , que la partie où eft placée la corde ne foie pas d'un trop petit diamètre , parce que l'outil oppo- feroit trop de réfiftance ; hors ce cas , il vaut mieux faire pafter la corde entre les deux jumelles, comme l'indique la ligne Ln ,fig. 2 , parce qu'alors le ïourneut peut pofer fon pied tout proche de la corde , ce qui le fut jouir de toute la force , & le fatigue beaucoup moins que quand la branche de la marche eft prolongée jufqu en m , où il ne jouit pas de la moitié de fa force , ce qui l'oblige d'appuyet davantage. Le banc du Tour, ainfi que je viens de le repréfenter avec fes poupées & fes fupporcs , eft propre pour les gros ouvrages , & conftruit de la manière la moins coûteufe polTible , ce qui eft très-eftentiel pour la plupart des Ouvriers ; cependant comme on n'a pas toujours de gros ouvrages à tourner , & qu'il eft même très-rare que cela foit, fur-tout pour les ouvrages d'Ebénifterie dont il eft ici queftion , on peut faire des bancs de Tour moins grands , comme je fai dit plus haut, avec des poupées & des fupports auffi moins gros, ainfi que celles repréfentées fig. r , 2 (S' 3. Ces poupées ditférent de celles dont j'ai parlé ci- defilis , non-feulement par la grofi'eur , mais encore par la forme , celles dont je parle ici étant ravalées fur leur largeur, pour faire approcher la barre de fupport aufli proche de l'ouvrage qu'il eft poifible , ou du moins que peut le permettre la groffeur des pointes , d'après lefquelles il faut toujours laifl"er une joue d'une force raifonnable. La queue de ces poupées ne defcend qu'à-peu-près aux deux tiers d^ MekUISIEH, III. Part. III. SeS. ï 1° 5o8 ME NUIS lE R,in. Pan. SeS. 111. Chap. XIII. : l'épaifTeur des jumelles , en defTous defquelles on les arrête par le moyen d une Planche ^ ^ ^ ^ ^ ^ p^fg direétement fur les jumelles , mais fur une efpece de pladne de fer ou de cuivre B B , fut laquelle on obferve une faillie de y à d lignes d'épaiiïeur , & d'une largeur égale à la diftance qu'il y a entre les deux jumelles , afin qu'en ferrant la vis cette platine ne tourne point avec elle. L'écrou de la vis A fe place au milieu de la queue ou tenon de la poupée, au nud de fon arrafement , comme on peut le voir à la Jîg. i & à la Jig. 2 , où la place de l'écrou efl; vuide. Les fupports C , D, des poupées dont je parle , fe font en fer ou en cuivre , afin de tenir moins de place dans les poupées , où on les arrête avec des vis de preffion à l'ordinaire. Quant aux pointes , on les fait toutes droites , comme celles repréfentéesjî^. p (& 10 ; ou bien quand les poupées font très-petites , & qu'on craint que les pointes étant placées trop près du bord des poupées , ne les faflènt fendre , on y met des pointes coudées , comme la figure 7 ou la figure 8 , ce qui eft égal. Ces pointes , ainfi que les deux autres , font deffinées au lîxieme de l'exécution ; au lieu que les figures r , 2 , 3 , 4 , 5 & 6 , ne le font qu'au douzième , c'eft- à- dire , au pouce pour pied. Quand on tourne des pièces très-longues comme , par exemple, des pieds de lits à colonnes , on fupprime une des poupées du Tour ; & à f alignement de celle qui refte , on pofe dans le mur de l'Attelier ( ou , quand il n'eft pas poffible de le faire, dans un poteau poftiche , ) une pointe comme celle repréfentée^. 6 , qu'on ôte quand on veut, c'eft-à-dire , quand l'ouvrage eft fini. La barre des fupports , repréfentée dans cette Planche , ne diffère de celle dont j'ai parlé ci-deffus , que par la grandeur prife fur toutes fes dimenfions , en obfervant cependant qu'elle foit aflèz forte pour réfifter au choc de l'outil. Les fupports & les barres dont je viens de parler , ne fervent que pour tour- ner l'ouvrage à bois de fil, comme le repréfente la fig. 30 ; & lorfqu'on veut tourner l'ouvrage à bois de travers , comme à la fig. 3 2 , on fe fert d'un fupporc repréfente 4 <§■ J , lequel eft compofé de deux parties E, F , qu'on fépare lorfqu'on le juge à propos , n'étant retenues enfemble que par des Visa , a, donc la tête faite en forme de T , eft enterrée dans la pièce mobile du fùpport , où font pratiqués un ravalement & une rainure , pour laifler à cette pièce la liberté de fe mouvoir horifontalement quand on juge à propos de le faire , ce qui eft néceflàire en raifon des différents diamètres des pièces qu'on tourne , vu que le deflùs de la pièce E eft dilpofé en pente en relevant de droite à gauche , pour fervir de point d'appui au Tourneur , & qu'il faut toujours que l'outil prenne , à peu de chofe près , dans le diamètre horifontal de la pièce à tourner, indiquée par une ligne ponéluée qui pafle de la pointe de la poupée fig. l , à celle Jzg. 6. La pièce F , du deflbus de ce fupport , eft à peu-près difpofée comme une poupée , du moins dans fa partie inférieure , dans laquelle on fait palTer une, clef pour l'arrêter en deffous des jumelles, ou bien une vis , comme aux fig. i (S' 3, Sect. II. Notions élémentaires de l'An du Tour, ÔCû. 909 Au-devant du fupport F, on fait un ravalement fur lequel vient s'appuyér la — ^ planche E , ou partie fupérieure du fupport, à la place de laquelle on peut mettre Planch. une lunette bcde,qm n'eft autre chofe qu'un morceau de bois, ou quelque- 3 fois de cuivre, percé au milieu d'un trou rond un peu évafé, pour retenir la pièce qu'on faitpaffer dedans. Les lunettes fervent quand, par quelque raifon, on ne peut pas faire ufage des deux pointes du Tour , comme , par exemple , dans le cas on une pièce devroit être percée au Tour par le bout; dans ce cas , dis-je, on place un des bouts de cette pièce fur la pointe de la poupée à gauche, & l'autre dans la lunette, dont le diamètre doit être ajufté avec celui de la pièce qu'on veut percer, ou l'extrémité de cette dernière avec l'ouverture de la lunette, comme cela arrive quelquefois. Quand on tourne fouvrage à bois de travers, comme le repréfentent les figures II, 13 & 14, & encore mieux celle 32, on le place fur des outils nommés mandnns, dms lefquels entrent les pointes des poupées , & qui reçoi- vent la corde du Tour. Les mandrins propres au Tour à pointe , ( qui eft celui dont je parle ici ) font de différentes formes & groifeurs , en raifon des différentes fortes d'ouvrages où ils fervent. Quand , par exemple , l'ouvrage n'eft pas d'un grand diamètre , & qu'il n'eft pas expofé à beaucoup d'efforts en le tournant , on fc fert d'un mandrin/^, i r , dont le bout qui doit porter l'ouvrage , eft armé de trois pointes de fer, comme celles/, ^, h ,fig. 12 , lefquelles fufEfent à retenir l'ouvrage en place. Quand ce dernier eft d'un diamètre affez conCdérable pour faire craindre que les pointes du mandrin ne foient pas fuHîfantes, on fe fert d'un mandrin à vis, repréfenté fg.13, dont la vis G H paffe au travers de l'ouvrage , & eft percée d'un trou conique à fon extrémité , pour recevoir la poupée à droite du Tour ; cette vis eft arrêtée dans le mandrin par le moyen d'une goupille , & on perce dans le mandrin un trou 1 , dans lequel on fait paffer une broche de fer , par le moyen de laquelle on defferre la vis qui tient l'ouvrage furie mandrin, laquelle tient d'autant plus fort, qu'elle fe ferre toujours en travaillant. 11 y a des ouvrages qui ne peuvent être percés à leur centre , comme celui dont je viens de parler, & qui cependant font d'un très - grand diamètre , comme , par exemple , des ronds dont on orne les pilaftres & les banquettes des croifées ; dans ce cas on fe fert d'un mandrin _fig. 14, dont la vis eft courte, Se fe monte fur un plateau de bois d'environ un pouce d'épaiffeur , comme celui L M, fur lequel on place l'ouvrage NO, qu'on y arrête avec trois ou quatre clous déliés & fins , pour qu'ils marquent moins ; & on doit avoir attention en attachant l'ouvrage fur le plateau , que leurs fils foient croifés , afin qu'ils fe foutiennenc mutuellement. Quand fouvrage eft d'une certaine conféquence , on fait auffi très-bien de rapporter deffus une calle de bois P , dont l'épaiffeur foit fuffifante pour recevotf t)io ME NU ISIER, m. Part. SeB. îll Chap. XÎIL =: la pointe du Teur , qui alors ne marque point l'ouvrage , comme il arrive à tous les ronds où on ne prend pas cette précaution. Voy. lafig. 32 , où eft repréfentée une pièce montée de cette manière. Dans le cas où on ne voudroit pas fe fervir de la poupée de la droite du Tour , on pourroit faire un mandrin qui fe plaçât d'un bout fur la poupée à gauche , & de l'autre dans une lunette , de manière que toute la face de l'ouvrage feroit libre , ce qui feroit très-avantageux, & pourroit, dans le cas dont je parle , tenir lieu de Tour en l'air, dont je ne parlerai pas ici , vu que ce détail appartient à l'Art du Tour proprement dit, dont la defcription , faite par M. Hulot, va paroître incelîàmment, à laquelle ceux qui voudront prendre des connoi/fances plus étendues de ce bel Art , pourront avoir recours , me bornant ici à en donner quelques notions les plus fîmples , dont la connoiflànce eft abfolument néceflàire aux Menuifiers , de quelqu'elpece qu'ils foient. Les outils propres à tourner, font, après le Tour (qui eft le principal de tous ), les Gouges, /7ij-. ij & i6;lesFermoirsou Cifeaux, quelquefois nommés PA;z««, fig. 17 (& iS; les Grains-d'orge 19 (& 20; les Cifeaux proprements dits , nommés Cifeaux à plancha , fig, 21 (& 2a ; les Becs- d'âne , ^g. 23 (§ 24 ; les Gouges plates ou à planches , fig. 2^ (& 26 , & les Crochets, foit en bec-d'âne comme la^^o'. 27 , en gouge plate comme la fig. 28 , ou en grain d'orge comme h fig. %<). Ces différentes fortes d'outils peuvent fe réduire à cinq efpeces ; fàvoir, les Gouges creufes & les Fermoirs , dont le taillant qui eft toujours à deux bifeaux , eft quelquefois incliné comme dans cette figure , ou bien droit , c'eft-à-dire , perpendiculaire avec les côtés de l'outil; ces deux premières efpeces fervent à tourner les bois tendres à bois de fil. Les trois autres efpeces ne fervent qu'aux bois durs & aux bois de travers, & font tous à un feul bifeau ; favoir, les Ci- feaux proprement dits & les Becs -d'âne, les Grains -d'orge & les Gouges plates , foit que ces derniers outils foient droits ou à crochets. Tous ces dilîerents outils font plus ou moins grands. Il y a , par exemple , des Becs-d'âne depuis une ligne jufqu'à un demi-pouce de largeur , & ainfl des autres , ceux que j'ai repréfentés ici étant de la grandeur la plus ordinaire , qui eft un pied de fer. Tous ces différents outils s'aifùtent fur la meule avec les afBloirs & la pierre à l'huile , félon qu'il convient à la forme de chacun d'eux, en obfervant cepen- dant que les outils à planche ayent le fil en dellus , le frottement de l'ouvrage tendant toujours à le rabattre en deffous. Il y a deux manières de tourner , comme je l'ai dit plus haut ; favoir , à bois de fil & à bois de travers ; dans fun ou fautre cas , il faut d'abord com- mencer par ébaucher l'ouvrage le plus près poffible ; enfuite de quoi on le place fur le Tour, après l'avoir cintré d'abord; quand il eft entre les pointes, on vérifie s'il eft biea cintré en le faifan: tourner quelques tours , pour connoîcre s'il Sect. II. Nouons élémentaires de l'Art du Tour, SCc. 5)ir s'il n'eft pas plus d'un côté que d'un autre ; enfuite de quoi on ferre & arrête les r "-"-" " — poupées de manière qu'elles tiennent la pièce ferme , fans cependant en empê- Planche cher le mouvement ; enfuite de quoi on commence à tourner , ce qui fe fait de ^ ' °' la manière fijivante. On commence par pofer le pied droit ou le gauche fur la pédale , (ce qui eft égal, car il y a des Tourneurs qui fe fervent également de l'un ou de l'autre ) pour mettre la pièce en mouvement ; puis , quand ce font des bois tendres qu'on veuc tourner à bois de fil, on prend le manche de la gouge delà main droite, qu'on tient renverfée en deiîbus, & de la main gauche on faifit la gouge vers fon extrémité , & on l'appuie fortement fur la barre du fupport , en obfervant de l'incliner de manière que fon taillant prenne un peu au-delTus d'une ligne horifontale palTanc au centre de la pièce , avec la circonférence de laquelle il faut que f intérieur du taillant de la gouge faife tangente , du moins à peu de chofe près. On pro- mené ainii la gouge tout le long de la pièce jufqu à ce qu'elle foit parfaitement: ébauchée de grofleur , ce qu'on connoît en y préfentant de temps en temps la compas courbe , fig. 3 r , autrement dit compas d'cpaiffeur, ouvert à la groifeut que la pièce doit porter. Quand on a ainfi ébauché à la gouge , on prend le fermoir dont le taillant efi incliné , Jig. 17 , qu'on tient de la même manière que la gouge , à l'exception qu'il faut relever un peu le côté i , Jîg. 30 , du fermoir , afin qu'il ne morde pas parallèlement avec l'axe de la pièce , mais incliné à cet axe d'environ 4^ degrés J cette inclinailbn eft néceflàire pour que le bois ne s'écorche pas en tournant, ce qui arriveroit infailliblement fi le taillant du fermoir étoit parallèle à l'axe de la pièce , & par conféquent mordoit dans toute là largeur. Le fermoir ainfi dilpofé, fe mené de droite à gauche dans toute la longueur de la pièce , jufqu'à ce qu'on ait atteint tous les traits formés par la gouge ; enfuite on finit l'ouvrage avec le fermoir droit ou plane , qu'on tient un peu moins incliné que l'autre , & qu'il efi bon de creufer un peu fur la largeur , afin qu'il falFe moins d'ondes fur la furface de la pièce qu'on tourne. La manière de tenir & de conduire la gouge & le fermoir telle que je viens 'de la décrire , & que je l'ai repréfentée Jîg. 30 , eft la plus ordinaire ; ce n'eft pas qu'on ne le puiife faire à rebours , au contraire , il y a des occafions où on eft' obligé de la faire ; alors on change l'outil de main , c'eft-à-dire , qu'on tient le manche de l'outil de la main gauche , & le fer de la droite , & qu'on le fait aller de gauche à droite. La gouge & le fermoir fuffifent pour tourner les bois tendres à bois de fil, foit que l'ouvrage foit tout uni ou orné de moulures creufes ou rondes ; dans le premier cas les gouges feules fuffifent , & dans le fécond les fermoirs ^ qu'il faut avoir grand foin de faire toujours prendre du milieu , du moins autant qu'il eft polfible , & d'éviter de faire toucher de l'angle , ce qui raye l'ouvrage. Quand on tourne des bois durs, comme l'Ebene , le Gayac Se autres , on [% Menuisier , ///. Fan. II J. Seci, Z 10 $13 MENUISIER, m Pan. SeB. III. Chap. Xlll ferc des outils à planche , qu'on dent droits dans la direction de l'axe de la pièce qu'on tourne ; de forte que ces outils grattent plutôt le bois qu'ils ne le coupent , ce qui oblige à les faire un peu épais , Se leurs bifeaux courts , en fuivant à peu- près l'inclinaifon de 45; degrés. On commence toujours les ouvrages dont je parle , avec la gouge pour ébaucher , & on les finit enfuite avec les cifeaux à planches , les becs-d'âne & les grains-d'orge , &c. L'ouvrage à bois de travers fe travaille de même que les bois durs dont je viens de parler , parce que les bois de travers ont beau être tendres, ils ne peu- vent fe couper à la gouge creufe & au fermoir , vu qu'ils préfentent akernative- ment du bois de fil & du bois de travers, & entre les uns & les autres des fils qui tendent à écarter ou à rapprocher l'outil , ce qui oblige à tenir ce dernier bien ferme fur le fupport, & à bien prendre garde qu'il ne morde trop , parce qu'alors on ne peut plus en être le maître , fur-tout à des ouvrages d'un dia- mètre un peu confidérable. Quand l'ouvrage , foit à bois de fil ou à bois de travers, eft entièrement ter- miné à l'outil , on le polit avec de la peau de chien , & enfuite avec de la prêle •qu'on paffe delTus en le faifant mouvoir comme lorfqu'on le tourne ; enfuite de quoi on y pafTe un peu de cire , & on l'elFuie avec un morceau de buffle ou de drap , & cela toujours en faifant tourner la pièce. Aux bois durs , à la place de la cire , on peut fe fervir d'huile d'olive , qu'on étend avec du buffle ou du chamois. Le Tour à pointe dont je viens de faire la defcription , fe fait auffi mouvoir par le moyen d'une roue d'environ 4 à J pieds de diamètre , qu'un homme fait tourner, ce qui eft très-commode, parce que non- feulement le Tourneur eft moins fatigué , mais encore parce que l'ouvrage ne tournant plus que d'un fens , l'adlion de l'outil devient continue , ce qui eft très-néceflaire pour les ouvrages d'un gros diamètre , qui , par ce moyen, font mieux & plus promptement faits. §. I. Des Taraux & des Filières en bois à l'ujage des Ebénijles. S I les Menuifiers-Ebéniftcs pouvoient faire ufage du Tour en l'air , ou fi , pour mieux dire, cette machine n'étoit pas d'une trop grande cherté, relative- ment aux moyens du plus grand nombre , les Filières en bois dont je vais faire la defcription , ne leur feroient pas auffi abfolument néceffàires qu'elles leur font pour faire les vis & les écrous de bois , ou , pour mieux dire, la place que ces vis occupent dans leurs ouvrages ,'qui , la plupart , ne peuvent s'en pafler, foit pour éviter la dépenfe des ferrures, foit pour donner la facilité de démonter ces mêmes ouvrages lorfqu'on le juge à propos , & cela fans qu'il y ait aucune ferrure apparente. Le Tarau repréfenté fig. 4 , eft un outil d'acier garni d'un manche de bois A -ff , de la même forme que ceux des Tarières; la partie inférieure C , de cet Planche Sect. h. §. I. Des Taraux SC des Filières en bois. 513 cutil efl taillée en forme de vis , dont les pas font en faillie d'après le nud de la tige , & interrompus par quatre coups de lime donnés fur les quatre faces , paral- lément à l'axe du Tarau , de maniera que ce dernier vu en defTous , comme la ^"^3 fig. 1 , repréfente quatre angles en faillie , lefquels font tous perpendiculaires au centre a; Se quand on fait ufage du Tarau , chacun des angles que préfentent les pas de la vis ainfi coupés , font autant d'outils qui coupent & emportent le bois qu'ils rencontrent , d'autant mieux qu'il eft Bon que le Tarau foit un peu diminué du bas pour lui donner de f entrée. Quand on veut faire ufage d'un Tarau , on commence par percer dans la pièce de bois qu'on veut tarauder, un trou d'un diamètre égal à celui du Tarau , pris du fond des filets ou pas de vis ; enfuite on fait entrer le Tarau dans ce trou j en le tournant de gauche à droite , avec la précaution de le graiffer & de le retirer de temps en temps, pour empêcher que le bois ne fe foule trop fort, & que les filets ne s'éclattent. Foyei lafig. 3, qui repréfente un Tarau qui eft à moitié chemin de répaiifeur de la pi^ce de bois DE, coupée pat la moitié de fà largeur. La Filière repréfentée/^. 6, p, 10 , ir (§• 13 , eft compofée de deux parties principales ; fivoir , de la Filière proprement dite , qui eft un morceau de bois plat, d'environ un pouce d'épaiffeur , fur 3 de largeur, & 9 à 10 pouces de longueur , y compris les deux manches F, G; de/fous cette Filière eft appliqué un morceau de bois H I , fig. 6 , d'environ 4 lignes d'épaiffeur , qu'on nomme conduite, & qui eft arrêté avec la Filière par le moyen de deux vis L, Tlf.'lef- quelles pafl"ent au travers de cette dernière , & font taraudées dans f épaifleur de la conduite , comme on peut le voir à la fig. 7 & à la^g-. 11, qui repréfentent la coupe longitudinale de la Filière & de la conduite. Dans le milieu de la longueur & de la largeur de la Filière , eft percé un trou 'N,fig. 9 , dans lequel on fait palTer le Tarau , comme à la fig. 3 , afin d'y for- mer des filets, & que l'intérieur de ce trou devienne un écrou, par le moyen duquel , ainfi que du fer placé dans l'intérieur de la Filière , on puiflè faire des vis en bois , comme je l'expliquerai ci-après. Ce fer , repréfenté fig. 14 , vu tant en dedans que de côté , & de face ou en dehors , doitêtre d'une épaiffeur un peu plus forte que la hauteur d'un des pas de vis , & être dilpofé de manière que fa coupe, prife fur la ligne ab,fig. 13 , ( laquelle eft un des rayons du cercle que forment les filets de l'écrou , avec lequel le devant du fer doit faire une tangente , ) il faut , dis-je , que cette coupe forme à l'extérieur un triangle équilatéral, dont le fommet foit au point b. Le dedans de ce fer doit être évuidé & affûté à vif à fon extrémité , pour qu'il puifi"e couper le bois & ne le foule pas, ce qui arriveroit néceffairemenc s il étoit plein comme au Tarau , où très-fouvent le bois fe refoule au lieu de fe couper , fur-tout aux bois tendres , où les filets s'égrènent , Se même les pièces fe fendent par l'effort que fait le Tarau , ce qu'on peut éviter en mettant la pièce à tarauder dans une prelTe ou dans un étau. MENUISIER,!!!. Pan. SeR. III. Chap. XIII. Le fer de la Filière en bois fe place dans une entaille faite dans TépailTeur de PxANCHE la Filière 5 en obfervant que fon angle b , flg. 13 , touche bien préciféraent au cercle intérieur du filet, & que l'arête du fer, vue fur fon épailTeur, vienne rencontrer l'arête du filet faiUant à ce même point , ainfi qu'on peut le voir à la fig. II , ce qui eft très-facile à faire , puifqu'il ne s'agit que de faire l'entaille dans laquelle le fer eft placé , un peu plus ou moins profonde. L'extrémité du fer du côté du taillant, ne doit pas être coupée perpendicu- lairement à fa face , mais au contraire un peu inclinée du côté de l'angle b ,jig. 13 , & cela afin qu'il ne prenne pas le bois de front , mais un peu obliquement , en commençant pat l'extérieur du cylindre fur lequel on veut faire un filet ou pas de vis , ce qui facilite l'évacuation du copeau , & en même temps empêche le bois de s'égrener, vu que fextrémité des filets eft toujours coupée la première. Le fer de la Filière doit être placé ttès-jufte dans fon entaille , tant fur la largeur que fur la profondeur, & fur-tout à fon extrémité c , fig. 13 , afin que lorfqu'on en fait ulàge , il ne puifle point reculer , quelque forte que foit la preffion du bois de la vis fur le fer , qui tend à s'écarter & à reculer , & qui , pat conféquent , a befoin d'être folidement appuyé fur tous les fens , & fur-tout à fon extrémité. Le fer d'une Filière s'arrête avec deux ou trois vis placées des deux côtés , comme à la fig. 1 3 ; cependant il vaut mieux y mettre un crochet comme celui repréfenté Jîg. 5 , lequel palTe au travers de l'épaiffeur de la Filière , en deffous de laquelle il eft arrêté avec un écrou , & vienr embra/Ter le fer dans fa largeur; quelquefois même on fait une entaille fur TépaiiTeur du fer, dans laquelle le crochet entre afin de l'arrêter d'une manière ferme & folide. Derrière le fer.àl'^ndroit de fon taillant, on fait dans toute la largeur en defTus du côté de la Filière , une entaille 0,fig. 13 , nommée lumière , laquelle fert à la fortie des copeaux ; cette lumière doit être d'une profondeur égale à celle de l'entaille où eft placé le fer , à laquelle elle fert de continuation. Voye-^ la fig, 6 & la fig. 8 , qui repréfentent la coupe tranfverlàle de la Filière. Que le fer foit incliné comme à la fig. 13 , ou qu'il foit parallèle avec les côtés de la Filière , cela eft égal, pourvu qu'il falfe toujours tangente avec le cercle intérieur des filets , c'eft-à-dire , que le devant du fer foit perpendiculaire avec le rayon du cercle pris à fon point de rencontre , comme je l'ai exprimé fig. 1 2 , où les lignes P ,Q, R, forment autant d'angles droits avec les rayons du cercle , auxquels ces lignes font tangentes. La conduite de la Filière eft percée d'un trou , dont le centre doit répondre bien exaflement à celui de la Filière , & dont le diamètre doit être égal au fond des filets de cette dernière , comme on peut le voir à la^o-. 1 1 , où les premiers pas de vis font fupprimés jufqu'à la rencontre du fer , ce qui eft néceflâire pour que ce dernier puilfe commencer à prendre fur le cylindre , qu'on fait palfer d'abord dans la conduite , qui fempêche de fe déranger lorfqu'on le taraude , ce qui fe fait de la manière fuivante. ■ , : •; . . On Sect. il §. I. Des Taraux 8C des Filières en bols, pij On commence d'abord par tourner un cylindre de la longueur & de la grofTcur convenables, dont on diminue un peu l'extrémité pour lui donner de Plani l'entrée; ce qui étant fait , on affiijettit le cylindre dans une prefle ou dans un ^ étau, (ce qui eft égal ) & on fait entrer l'extrémité du cylindre dans la conduite de la Filière, qu'on tient à deux mains par les manches ou poignées F, G, & qu'on fut tourner de gauche à droite , en appuyant légèrement deflus jufqu'à ce qu'il y ait quelques filets de faits, lefquels prenant dans ceux de la Filière , difpenfenc d'appuyer davantage. Quand la vis qu'on veut tarauder eft d'une certaine longueur , il faut avoir grand foin de retirer la Filière de temps en temps , pour frotter l'intérieur de cette dernière avec un morceau de fàvon , tant pour empêcher qu'elle ne s'échauffe trop par le frottement de la vis , que pour en faciliter le pafTage. Voye^ la Fig. 6 , qui repréfente une Filière toute montée & vue du côté de la lumière, avec un cylindre ST, dont la partie fupérieure eft taraudée comme je l'ai enfeigné ci-delfus. Lorfqu'il arrive que la pièce qu'on taraude a un arrafement , on fait defcen- dre la Filière jufqu'à ce qu'elle porte deffus; enfuite on ôte la conduite de cette dernière , qu'on fait encore defcendre autant qu'il eft pollible, de manière qu'il ne refte plus guère qu'un filet à faire pour atteindre l'arrafement , lequel filet s'achève au cifeau , pour que la vis foit parfaite dans toute fa longueur. Il y a des Taraux, & par conféquent des Filières de toutes fortes de pas , depuis 2 à 3 lignes de diamètre , jufqu'à un pouce , & même au-defîlis ; mais elles ne font guère d ufàge pour les Menuifîers. Chaque Tarau & fa Filière fe trouvent tout faits chez les Marchands ClincaiUers qui les vendent ; cependant il feroit fort aifé aux Menuifîers de les faire , fur-tout ayant les Taraux tout faits , qu'ils pourroient cependant au befoin , faire eux-mêmes , en prenant un morceau d'acier forgé & limé le plus rond poffible , fur la partie inférieure duquel ils feroient les pas de vis avec une lime en tiers-point , après les avoir tracés de la manière fuivante. On trace fjr un papier un parallélogramme V XYZ , fig. l , dont la largeur eft égale à la circonférence du Tarau prife à fa partie inférieure ; on divife cette largeur en fix parties égales , comme l'indiquent les lignes perpendiculaires de cette figure ; puis on prend la moitié d'une de ces divifions , qu'on porte de Z à è , ce qui donne l'inclinaifon du pas de la vis , qui , pour être bonne , doit être le douzième de la circonférence développée fur une ligne droite , comme dans cette figure. Quant à la diftance qu'il doit y avoir d'un pas de vis à fautre , elle ne doit pas être plus confidérable que celle d Z , c'eft-à-dire , d'un douzième de la circon- férence de la vis , ou un dix-huitieme au moins , fur-tout pour les vis en bois. Quand on a réglé la diftance d'un pas de vis à un autre , on trace fur le paral- lélogramme autant de lignes obliques parallèles à celles Yd, qu'on veut faire de pas de vis fur le Tarau ; ce qui étant fait, on colle le papier fur lequel ces Menuisier, IIL Pan. in.Scil. ' Aii 91(5 MENUISIER, m. Pan. SeS. III . Chap. XIII. divifions font tracées , fur la partie inférieure du Tarau , en obfervant que ce papier ne foin pas trop épais , qu'il foit d'une largeur bien égale à la circonfé- rence de ce dernier , & que les lignes horifontales qui vont d'une révolution à l'autre , fe rencontrent parfaitement. Quand ce papier eft fec , on prend une lime en tiers-point , & on lime l'intervalle qui fe rencontre entre chaque ligne oblique , formant autant delignes au pourtour du Tarau, jufqu à ce que les filets indiqués par ces lignes , viennent à vive arête. Si on opère jufte , il eft certain qu'on parviendra , par cette méthode , à faire des Taraux de toutes fortes de grolTeurs auffi parfaits qu'ils peuvent être fans être faits fur le Tout ni à la Filière en fer. Les Taraux une fois faits, il eft très-aife de faire les Filières , qui, pour être bonnes , doivent être faites avec du bois très-fec , & d'une qualité dure , comme le Buis , le Cormier , &c ; & pour bien ajufter la conduite de la Filière , il faut, après l'avoir percée ainfi que cette dernière, y placer un cylindre dont une partie de la vis foit faite comme celui S T ,fig. 6 , afin de centrer jufte la conduite , qu'on arrête enfuite lut la Filière pour y percer les trous des vis Z , iW; & après que ces dernières font placées , on finit la Filière à l'extérieur , ce qui ne fouffre aucune efpece de difficulté , vu que la forme extérieure des Filières , ni les orne» ments qu'on peut y ajouter , ne font rien à la bonté de ces outils, §. II. Des Machines propres à faire des Cannelures , tant fur les Cylindres que fur les Cônes. — " ■ Quand les parties coniques ou cylindriques qu'on tourne fur le Tour S Planche pointe , font d'une certaine longueur , il eft aifez difficile de les faire parfaite- ment droites félon la méthode ordinaire ; c'eft pourquoi j'ai cru qu'il étoit bon de donner ici une autre méthode félon laquelle on puiflë les faire très-droits, de telle forme qu'ils foient. Quand on veut dreifer fur le Tour des pieds de Table , ou toute autre pièce d'un diamètre inégal d'un bout à l'autre , comme celle A B , fig, i, on com- mence à la dreifer à la gouge & au cifeau à f ordinaire & le mieux poffible; après quoi on pofe des deux côtés des poupées , les deux barres de fupport CD & EF, dont les arêtes fupérieures fe dégauchiifent parfaitement bien entr'elles, & on élevé ou abaifîè ces deux fupports jufqu'à ce qu'ils foient de niveau avec les deux extrémités de la pièce AB, comme findiquent les lignes abSccd.Cs qui étant fait , on prend la varlope-onglet G H, qu'on pofe fur les deux fup- ports de manière que fon fer touche à peu-près le milieu de la pièce qu'on fait tourner à l'ordinaire ; Se quand elle celfe de prendre dans toute la longueur de la pièce , c'eft une marque certaine que cette dernière eft parfaitement droite , du moins autant que les deux fupports le feront eux-mêmes. Quand les pièces doivent être droites dans toute leur longueur , il eft affez indiiférent qu'on pofe la varlope - onglet perpendiculairement à la face des Planche SxcT. IL §. II. Machines propres â faire des Cannelures , ÔCc. 917 fupports, ou qu'elle leur foit inclinée, comme celle IL, f g. 2, ce qui eft même mieux, pour que le fer de la varlope ne prenne pas dans toute fa largeur. Mais s'il arrivoit qu'au lieu d'une pièce droite dans toute fa longueur, comme celle AB,fig.i, elle fût bombée comme , par exemple, le fût d'une colonne, il faudroit avoir grand foin de tenir la varlope-onglet perpendiculaire à la face des fupports , ainfi que celle MN,fig. 1 , parce que ces fupports devant être eux-mêmes bombés félon le renflement de la colonne , pour peu qu'on menât la varlope de biais , il eft certain qu'on la feroit hau/fer ou baifTer de l'un de fes bouts plus que de l'autre, ce qui ne pourroit être fans augmenter ou diminuer du fût de la colonne , ce qu'il faut abfolument éviter. Quand les pièces à drelTer à la varlope-onglet , font dans le cas dont je viens de parler , c'eft-à-dire , qu'elles font bombées ou renflées fur leur longueur , il faut avoir grand foin que les deux fupports CD&EF, foient bien également bombés entr'eux, & que quand on les pofe fur les poupées, ils foient bien exaftement vis-à-vis l'un de l'autre & de la pièce à dreffer ; c'eft pourquoi il eft bon de faire fur les uns & fur les autres des lignes de repaires , pour n'Être pas expofé à fe tromper en les pofant. ^ Les fupports fe pofent à la manière ordinaire , du moins pour celui C D ; & l'autre E F s'attache derrière la poupée avec des vis à tête , & dont l'écrou eft placé dans la poupée , ce qui donne la facilité de changer de fupport quand on veut , & de le hauflèr ôc baiflêr comme on le juge à propos , en y faifant dans fa largeur une mortaife de la groifeur du colet de la vis. Cette manière de dreifer fur le Tour les différentes parties , foit cylin- driques , coniques ou bombées , eft très-bonne , & devient même néceifaire quand ces mêmes parties font travaillées enfuite fur leur longueur , où on y fait quelquefois des cannelures ou autres ornements , lefquels exigent beau- coup d'exaâitude pour être bien faits. On a, jufqu'à préfent, cherché divers moyens pour canneler les parties rondes par leurs plans , & faire les diviflons de ces cannelures le plus jufte poffible. Quelques-uns de ces moyens ont très-bien réuflt ; mais comme ils font fort compliqués , & qu'ils demandent beaucoup de dépenfe , on ne peut guère s'en fervir pour les ouvrages dont il eft ici queftion , dont la grandeur exigeroit une machine extrêmement coûteufe , & qu'il ne feroit par conféquent pas à la portée de tous les Ouvriers d'acquérir. J'ai donc cru devoir donner ici le moyen de faire ces cannelures le plus facilement poflible , & cela par le moyen d'une machine très - fimple & conftruite prefque toute en bois , dont la première idée m'a été fournie par M. Ancelin le jeune , Compagnon Menui- fier , & à laquelle j'ai fait les additions & les changements que j'ai cru nécef- faires pour la perfeétionner. Cette machine ou outil propre à faire des cannelures , repréfentéey%-. 3 , 4 <§■ 5 , a environ 5 pieds & demi de longueur , fur un pied de largeur : elle eft 5iS MENUISÎE R,nL Part. Secl. III. Chap. XIII. ■ compofée de deux jumelles A B , CD , fig. y , de 3 pouces de largeur , fur 4 J?i,ANCHE polices d'épailTeur , & de deux traverfes E , F ,Jig. 4 <S' J , dans lefquelles elles font aflemblécs , ce qui forme un chaffis don: le vuide intérieur a environ 6 polices ; la face intérieure de ces jumelles eft ravalée d'environ un pouce de pro- fondeur, fur 2 pouces de largeur , & on fait deux rainures par les côtés de ce ravalement , pour y former des coulilTes , comme on peut le voir dans la fig. 7 , qui repréfente la coupe de la machine faite au double des figures 3 , 4 <§■ 5. Ces coulilTes font faites pour recevoir des chaflis G , H , I , qui y font retenus par des languettes , & qui reçoivent eux-mêmes deux collets L , M , qui y entrent tout en vie dans les deux rainures indiquées par les lignes a,b,c,d,às. manière que le collet Mpeut haulTer autant qu'on le juge à propos , ce qui fe fait par le moyen de la vis A^, laquelle eft placée au milieu de la traverfe / du chaffis mou- vant , &fert par conféquent de point d'appui aux collets L, M, comme on peut le voir dans cette figure (Se dans la figure 8 , qui repréfente la coupe des collets L , M, & par conféquent du chaffis qui les porte. Il y a dans la machine à canneler deux collets femblables, avec les chaffis qui les portent , lefquels chaffis différent entr'eux en ce que celui O ,fig. 4 , eft plein d'un côté , comme le repréfente plus en grand la figure 8 , & que l'autre P , mîme figure , eft abfolument vuide des deux côtés , le collet n'étant retenu dedans que par les joues des rainures , comme le repréfente la figure 7. Le chaffis du collet O n'eft ainfi plein d'un côté, que pourfervir de point d'appui àJa pièce qu'on travaille, laquelle alors vient butter contre, comme on peut le voir dans la figure 4 ; cependant on peut fe paffer de le faire plein , en ferrant bien ferme le bout de la pièce dans le collet, qu'on fait exprès de deux pièces, pour pou- voir le ferrer comme on le juge à propos , ce qu'on fait par le moyen de deux vis qui palTent au travers du collet fupérieur , &. dont les écrous font placés dans la partie inférieure. Il faut obferver que les têtes de ces vis ne doivent pas être apparentes, parce qu'elles nuiroient au paffage de la règle X Y, fig. 4, qui fert de conduite à l'outil, contre laquelle le deffi^s du collet doit porter ; c'eft pourquoi on enterre la tête des vis , qu'il eft bon de faire quarrée , afin de pouvoir les ferrer par lei moyen d'une clef creufe en forme de canon. Comme il fe trouve des pièces à canneler de différentes groffeurs , il eft néccffaire d'avoir plufieiirs collets de différentes ouvertures , qui tous aillent dans les chaffis ; & quand la différence de la groffeur des pièces n'eft pas fort confidérable , on peut fe fervir des mêmes collets , en les ouvrant un peu , ou bien en ôtant du bois de leur largeur , pour diminuer le diamètre de leur ouverture. Que ce foit les mêmes collets qui fervent à différentes pièces, ou qu'on en ait de différentes grandeurs d'ouverture , il faut toujours qu'ils foient conftruits comme ceux dont je viens de parler , que j'ai repréfentés fig. 7 8 , au double de Sect. il §. n, Machines -propres à faire des Cannelures , SCc. 919 de la grandeur des figures 3 , 4 & y ; & il faut avoir grand foin qu'ils entrent " très-juftes dans les chaffis qui les portent , tant fur l'épailTeur que fur la ion- Planche gueur, afin qu'ils ne falfent aucune e/pece de mouvement lorfqu'on vient à canneler la pièce. On doit avoir la même attention pour les chaiTis qui portent les collets , lef- quels doivent aulïï être très-juftes entre les deux jumelles, afin qu'il ne fe fafle aucune efpece d'ébranlement lorfqu'on travaille. Si on vouloit éviter la dépenfe , on pourroit fupprimer les vis N , N, fig. 7 (§• 8 , qui fervent à hauffèr les collets , & Y mettre feulement des cales qui les tiennent élevées à la hauteur néceftàire, ce qui deviendroit moins coûteux, fans que l'ouvrage fut moins bien fliit. Au-defflis du principal cliaffis de la machine à canneler , font placées trois traverfes Q, R,S ffig. 7 , lefquelles ont environ un pouce & demi à 2 pouces d'épai/Teur , & font toutes trois ravalées en deflôus dans la plus grande partie de leur longueur , ainfî que celle TU, fig. 7, afin de laifTcr paffer la règle X Y, fig. 4 (S' 5 , laquelle fert de conduite à l'outil Z ,fig. 4. La traverfe Q, fig. ^ , eS: placée à l'extrémité de la machine, où elle eft arrêtée en place, & on y trace une ligne e /, laquelle correfpond avec le milieu de toute la machine , Se par conféquent avec le centre des collets dans lefquels la pièce à canneler eft placée ; cette ligne e/^fert à placer le devant de la règle au centre de la machine. Se on arrcte cette règle en place par le moyen d'ime vis g , laquelle fait preffion delTus , ce qui eft fuffifant pour la tenir en place. La traverfe R n'eft pas arrêtée à demeure furie principal chaffis de la Machine» elle n'y eft aflujettie que par le moyen de deux vis /i, i, fig. ■) &j , dont la for- me des têtes eft barlongue comme un T, lelquelles têtes entrent dans des rainures /, m, pratiquées dans le deftlis des jumelles, de manière qu'on peut avancer ou reculer la traverfe R autant qu'on le juge à propos. Le corps de ces vis eft quatre pour qu'il ne tourne pas dans la traverfe R , &. ï\ n'y a que leur extrémité qui eft arrondie à l'endroit du filet pour recevoir i'écrou à aile qui fait preffion fur la traverfe , & la retient en place. Les rainures du deflîjs des jumelles , ainfi que celles des côtés intérieurs , fe font d'abord au bouvet & à la guimbarde à l'ordinaire , f.g. ri ; puis on les fouille de côté avec une autre guimbarde , dont le fer eft reployé en retout d'équerre , comme la fig. ra. Quand les rainures font d'une certaine longueur , comme celle des deux jumelles , on met ce fer dans une elpece de guillaume de côté , qu'on mené à la manière des becs-de-canne. La traverfe R eft auffi divifée en deux par une ligne n o, fig. y , laquelle fépond au centre des collets; & on y perce une mortaife d'environ 6 pouces de long , & de l'épaifleur du collet d'une vis attachée avec l'extrémité de la règle X y,/^. 4 <& J 5 afin qu'on puiffe faire mouvoir la règle à volonté, & la fixei enfuite en ferrant fon écrou. Menuisier , 111. Part, lll, Se(î, B ji 520 MENUISIER, m. Pan. SeB. 111. Chap. XIII. =:rîii_;-i^ La dernière traverfe 5', eft attachée à demeure fur les jumelles, à 3 ou 4 Planche pouces de diftance de la traverfe du bâtis , & on y ajufte une petite pièce mobile ^ à queue d'aronde , au milieu de laquelle eft tracée une ligne pq,qui répond au milieu de toute la machine , ainfi que celle des autres traverfes : cette pièce mobile fert d'alidade pour arrêter en place la platine divifée en parties égales, repréfentée dans la figure 6 , ce qui fe fait par le moyen d'une pointe placée au bout de cette pièce à queue , laquelle pointe eft correfpondante à la ligne;? ^, & entre dans les trous de la platine, qu'elle empêche par conféquent de tour- ner , ainfi que la pièce à canneler , au bout de laquelle cette platine eft forte- ment attachée par le moyen de deux vis; de forte qu'en faifant mouvoir la platine d'un point de fa divifion à un autre , la pièce à canneler fait le même mouvement toujours en parties égalés , & en rapport avec le nombre des divifions de la platine fur lefquelles on opère. P^oyei les Fig. 4, j eir 8. La platine à à'mCct,f.g. 6 , doit être de cuivre ou de fer-blanc, ce qui eft cependant moins bon ; Se elle doit avoir 7 à 8 pouces de diamètre , & être percé» à fon centre d'un trou s , pour y placer une pointe qui réponde au centre de la pièce à canneler, à laquelle la platine eft attachée par deux vis qu'on fait palTer dans les trous /■ & f , comme je l'ai dit plus haut. Ces trous doivent être un peu alongés , afin qu'on puiffe faire mouvoir la platine de droite & de gauche , pour <3es raifons que je donnerai ci-après. Quant aux divifions de la platine , il n'eft pas néaoffhh-e qu'elles foient en grand nombre , les trois nombres 24, 20& étant fuffifants pour faire des cannelures depuis le nombre j jufqu'au nombre 24 , c'eft-à-dire , qu'on peut faire avec ces trois premiers nombres , ceux ^ , 6 , 8, 10 & 12 , qui font ceux dont on fait le plus d'ufage dans le cas dont il eft ici queftion. Il y a une petite difficulté dans la manière dont l'alidade p q,fig. y, eft placée , parce que la pointe qui entre dans la platine étant toujours à la même hauteur,' il faut que tous les nombres de divifions de la platine foient fur la même ligne , ce qui pourroit y caufer de l'embarras, & expofer ceux qui font ufage de cette machine, à fe tromper , en prenant un nombre pour un autre ; c'eft pourquoi je crois qu'il feroit bon de faire mouvoir la pointe de l'alidade de bas en haut, de forte qu'elle rencontrât les différents cercles de divifions de la platine, tels qu'ils font marqués dans la figure 6. Quant à la manière de fe fervir de la machine à canneler, elle eft très-fimple: on commence d'abord par attacher la platine au bout fupérieur de la pièce qu'on veut canneler , en obfervant que fon centre réponde bien exadement au centre -de cette dernière, dont le bout doit être coupé bien quarrément avant de la tourner fur le Tour à pointe , afin que le trou de la pointe du Tour reftant appa- rent, puilTe fervir à centrer la platine. Ce qui étant fait, on place la pièce à canneler dans les collets , & par conféquent dans la machine , comme on le voie repréfenté^^. 3 <5 4 ; enfuite , après avoir fait choix du nombre & de la forme Sect. II. §. IL Machines propres à faire des Cannelures, ÔCc. o^t •des cannelures on place la pointe de l'alidade dans le premier point de diyifion =— de la p at.ne , dont le nombre répond h celui dont on a fait choix, & on com- P.anch. mence la cannelure , ce qui fe fait de la manière fuivante. 312, On commence par tracer à part le plan des cannelures, foit avec des filets comme la figure p , ou bien fans filets, afin de fe rendre compte de l'efpice nui doit régner entre les cannelures, de leur profondeur , ainfi que de celle des filets - ce qu, étant fait, on ajufte un bouvet A , dont le conduit porte fur la rede i?' (qui eft la même que celle XF,/^. 4 ^ ^ ) & ..j.fc^^j ^^^^^ de cette dernière , & de la profondeur du filet ; de forte qu'on pou/Te ce bouvec fur la pièce a canneler jufqu'à ce qu'il porte fur la règle , comme on peut le voir dans la figure 9. ^ Quand les filets font faits d'un côté à chaque cannelure, on creufe la gor,. de cette dernière avec un rabot rond.^.. 10, difpofé comme le bouvef I. 9 , en ob ervant de delTerrer les vis de la platine pour la faire tourner fur ÎC »eme de la largeur du filet , afin que l'angle u de la cannelure fe trouve pafT r par la igne du centre de la pièce , & foie par conféquent à-plomb du d ant d a règle , ce qui eft nécelfaire pour que la largeur du filet fe trouve dimi et raifon des différents diamètres de la pièce , que j'ai fait très-différents dans cette figure , pour qu on en fente mieux l'effet. Si la pièce à canneler étoit d'un diamètre égal d'un bout à l'autre , on pour-' roit fe paffer de change, la platine de place , & on obferveroit au rabot ro^d une pue d une epailTeur égale à la largeur du filet , comme je l'ai indiqué par desLgnesponaueesx .o,ce qui feroit égal, pourvu que le fer L atiuté fuivant la forme de 1 arc de cercle u i ,fig. 9. Dans le cas où il n'y auroit pas de filets aux cannelures, & qu'elles feroient d égale largeur , on feroit un rabot rond qui feroit la cannelure tout d'un feul T coup, & qu on placeroit perpendiculairement au centre de la machine ce au, obligeroit à reculer la règle XY, fig. 4 , ,,p, 3 J de la cannelure. U faudroit aufl. que le rabot rond eût deux points d'appui, l'un dehors qui portât fur la règle à l'ordinaire , & l'autre en dedans qui pôrrît fur k pièce même afin que la cannelure fût d'une profondeur égale des deux côté. & dans toute fa longueur , ce qui ne pourroit être fans cette précaution, fur- tout fi la canne ure etoit un peu large ; on pourroit même , pour plus de sûreté ' iaire a 1 outil deux conduits qui portaffent fur la pièce même tant en dedans qu en dehors ce qui ne changeroit rien à la manière d'opérer, fi ce n'efl qu'on fero.t oblige e reculer la règle de l'épaiffeur de ce dernier conduit , comme je I ai obferve a la figure i. ' Quand on a fait les filets , & commencé la gorge d'un des côtés des cannel- ures .comme je viens de l'enfeigner, & que je l'ai repréfenté fig. . , on change la platine e place & on fait correfpondre la première ligne df ces divifions à i arête de la canr^lure op^ofée à celle qui eft faite; enfuite on change la regl. ANCHE ce nui ME NVISIE R, m Pan. SeB. 111. Chap. Xltl. _ (Je fupport de côté , & on recommence l'opération à gauche comme on l'a faite PtANCHE à droite ; & quand on opère jufte , on peut être affuré d'avoir des cannelures très-bien faites & en peu de temps, celqui eft un double avantage. Voyeila Fig. 3 , qui repréfente cette féconde opération , & les filets fouillés d'un des côtés de la figure. Quand les pièces à canneler font d'un diamètre inégal , comme cel- les des figures 3 , 4, J & 9, de la Planche 312, en fuivant la méthode que je viens de donner, on eft sûr de faire les cannelures, leurs filets & les lifteaux qui les féparent, non-feulement parfaitement égaux entr'eux , mais encore d'une diminution de largeur proportionnelle aux différents diamètres de la pièce ; cependant il faut faire attention que cette diminution ne fe fait que fi:r la largeur, & qu'en faifant toucher le deffous de la pièce au-deffous de la règle , le bouvet ne peut pas manquer de faire des filets d'une profondeur égale d'un bout à l'autre , ce qui ne peut pas être dans le cas où la pièce à canneler eft d'un diamètre inégal ; c'eft pourquoi au lieu de mettre le deiTus de la pièce à canneler parallèle avec le deffous de la règle , il faut au contraire faire redef- cendre le petit bout de cette dernière de ce que le filet doit avoir moins de pro- fondeur de ce bout que de l'autre, comme je l'ai obfervéj%. J , ce qui ne foufFre aucune difficulté , finon que quand les pièces font un peu longues , la règle qui fert de conduite à l'outil , eft fujette à ployer un peu fur fa longueur , à quoi on peut remédier en partie , en la fai&nt affez large pour qu'elle porte d'un côté fur une des jumelles , & en plaçant de diftance en diftance entre ces dernières , des efpeces de goulTets qui la foutiennent & l'empêchent de ployer fous l'outil , fur lequel on ne doit pas appuyer beaucoup lorfqu'il eft près de porter fur la règle , qui d'ailleurs doit être faite de bois bien liant , très-droite & d'égale épaiffeut dans toute fa longueur , & d'une épailTeur capable de réfifter à une preffion médiocre. Si la pièce qu'on veut canneler étoit non-feulement d'un diamètre inégal d'un bout à l'autre, mais encore bombée fur fa longueur, comme, par exemple, le fût d'une colonne diminuée par le bas , on fe ferviroit toujours de la même méthode pour la canneler , à l'exception qu'on feroit porter la règle , lervant à conduire l'outil, fur le nud de la colonne dans toute fa longueur , & qu'au lieu de faire cette règle d'égale épailTeur dans toute fa longueur , on l'augmenteroir par les bouts en raifon de ce que les filets des cannelures doivent diminuer- à mefure que le diamètre de la colonne feroit moins gros , & par conféquènC les cannelures moins larges ( * ). Quant à la manière de terminer la différence de la profondeur des filefs des cannelures , elle eft très- facile : il ne s'agit que de tracer un triangle - reftangle (* ) On pourroit fe fervir de la machine dont je fais ici la defcription , ou du moins d'une à peu-près femblable , pour tracer les cannelures des colonnes d'un très-gros diamètre, ce qui feroit plus jufte iSc plutôt fait ^ue de les com- pafler Se de les tracer comme on fait ordinai- remenr. J'en ai fait exécurer en plâtre dont les cannelures ont été tracées de cette manière, lefquelles ont fort bien réufll , ôc qui ont été tiès-promptement faites. ABC, Sect. il §. II. Machines propres à faire des Cannelures , âCc, 923 ABC, fig. 4 , dont rhypotéaufe B C foit le côté de la pièce prolongé jufqu'à — — ce qu'il rencontre l'axe de cette même pièce auflî prolongé , ce qui donne un PtANcriE point Chors la Planche , auquel on fait tendre une ligne , qui eft le fond du ^' ^' ïilet, dans toute la longueur delà pièce, laquelle ligne part d'un pointa, donné par la partie du plan de la pièce , tracé à fon extrémité fupérieure. Ce qu'on fait pour avoir la profondeur du filet , peut également s'appliquer pour avoir la profondeur de la cannelure , qui , de plus , efl donnée par fa lar- geur , laquelle efl , pour l'ordinaire , le double de fa profondeur. Quand les gorges des cannelures font d'un diamètre & par conféquent d'une profondeur inégale , on ne peut pas les évuider entièrement avec le rabot rond à joue dont j'ai parlé ci-deffus , vu qu'en changeant de diamètre , elles changent de courbure ; c eft pourquoi on donnera au fer du rabot rond à joue , une forme femblable à l'arc de cercle du plus grand diamètre de la cannelure , & on ne le fera defcendre qu'autant que le permettrai profondeur du plus petit arc, eu égard cependant à ce que le bout inférieur de la pièce defcende en contre-bas de la règle , comme je l'ai dit ci-delTus ; enfuite de quoi on achèvera de donner à la cannelure la forme convenable avec un rabot rond ordinaire. Foy^ij; la Flg- a , où le fer du rabot rond eft difpofé comme je viens de findiquer. Quand il n'y a pas grande différence entre les deux diamètres d'une pièce, les difficultés dont je viens de parler fe réduifent prefqu'à rien , & je ne me fuis attaché à les faire connoître , que pour accoutumer ceux qui voudront donner à leurs ouvrages toute la perfeélion poffible , à ne rien négliger de ce qui pourra concourir à cette même perfection , & à s'accoutumer de bonne heure à ne rien regarder comme fuperflu dans la théorie , lorfqu'elle fervira à pcrfeélionner la pratique. Quand les cannelures des pièces ne font pas terminées par le bout comme celui £■ de la figure 6 , on les finit à l'ordinaire , c'eft-à-dire , avec le bouvet & le rabot rond , comme je l'ai enfeigné ci-delfus ; & quand elles font terminées comme la bout D, on commence d'abord par ébaucher le bout de la cannelure au cifeau Se à gouge , enfuite de quoi on fe fert du bouvet & du rabot rond , qu'on pouffe à la profondeur convenable ; puis quand la pièce eft hors de la machine , on finit le bout des cannelures avec la gouge , les cifeaux, & autres outils à manche qui peuvent être utiles , comme les burins , les grêles , les écouenes , &c. Cette manière de terminer le bout des cannelures , eft la plus ufitée , mais elle n'eft pas la plus parfaite ; parce que , quelque foin qu'on prenne , il n'eft guère pofTMe de le faire fans quelques inégalités , foit dans la profondeur des filets , Toit darft leurs contours qui font quelquefois jarréteux ; de plus , en creufànt le bout de la cannelure avec la gouge , il arrive auffi , quelque foin qu'on prenne, qu'on gâte les arêtes , foit de la cannelure ou des filets , ce qu'on ne peut éviter qu'en prenant beaucoup de précautions , ce qui demande un temps confl- dérable. Menuisier , III. Part. ni. Scci, Cii ri' MENUISIER, m. Pan. SeB. III. Chap. XIII. „ Cette difficulté a fait chercher des moyens plus sûrs & plus courts pour ter- PiANCHE ig bout des cannelures , & cela fans les ôter de delTus la machine , ce qui fe fait de la manière luivante. On prend une plaque foie de fer ou de cuivre ( ce qui eft égal )F G ,fig. 7 é- 8 , d'environ 2 lignes d'épailfeur , fur 2 pouces & demi à 3 pouces de lar- geur, & d'une longueur capable de recouvrir d'environ un pouce fur chaque jumelle de la machine , avec lefquelles on la retient en place par le moyen de deux vis H, /, dont la tige eft recourbée pour entrer dans les rainures des jumelles , ainfi qu'on peut le voir à la fig. 7 \ &■ on doit réferver deux épaula-: ments b, c, faillants en delTous de cette plaque , afin qu'elle entre jufte entra les jumelks , & qu elle ne puilTe pas s'écarter à droite ni à gauche. La plaque ainfi difpofée & arrêtée fur la machine, on y trace un trait au milieu des deux fens , & on a grand foin que celui de,fig.S, correfponde bien jufte au milieu de la machine. Ce qui étant fait , à la rencontre des lignes d,e,fg. 8 , on perce un trou rond d'un diamètre égal à celui de la cannelure , afin de' placer la fraife avec laquelle on termine la cannelure, comme je vais l'^xpli- •quer ci-après. Comme on fait des cannelures de différents diamètres , & que les unes onc des filets , & que les autres n'en onc point , il arrive que le trou du milieu de la plaque ne fauroit toujours être le même , ce qui fait une efpece d'inconvénient auquel on remédie en perçant un trou quarré au milieu de la plaque, dans lequel on ajufte d'autres petits morceaux de fer ou de cuivre h, i , 1 , m ,fig. S , percés chacun d'un trou rond , de différents diamètres, félon qu'il eft néceffaire, en raifon des cannelures qu'on a à faire , en obfervant toujours que le centre de ces trous réponde bien exaftement au milieu de la machine. Ce qui étant fait , on place la pièce à canneler comme je l'ai enfeigné ci- delfus , & on l'ajufte de maniera que le milieu de la cannelure réponde bien au milieu'de la ligne de,fg.S,& que celle/^, foit bien ajuftée avec celle ^0 , fg. 6 , qui eft le centre de l'extrémité des cannelures, laquelle ligne doit être également tracée fur les jumelles pour centrer la plaque, ainfi que je l'ai obfervé fg. 8 ; enfuite de quoi on fe fert de la fraife comme d'une mèche de vilebrep quin ,\om creufer le bout de la cannelure , comme on peut le voh fig. 7. Les fraifes propres à faire ces fortes d'ouvrages , font de deux efpeçes ; favoir, celles dont l'extrémité eft d'une forme cylindrique, comme la 9, & celles qui font terminées en forme de boule , comme hjig. 10 ; toutes les deux s'ajuftent dans un fût de vilebrequin , & doivent être faites d'acier taillées . en forme de fcies , ou , pour mieux dire , dentelées ; & on doit toujours y faire un repos, afin qu'elles n'entrent pas plus profondément qu'il ne faut, & que les filets & les cannelures foient tous d'une égale profondeur. Quand les cannelures ont des filets, on fe fert d'abord de la fraife cylin- drique , /^r. p , & on fait tout de fuite tous les filets des bouts des cannelures ; Sect. il §. II. Machmes propres à faire des Cannelures , ÔCc. oay enfuite, fans changer la principale plaque de fer F C, on change celle du ■— milieu, & on ea met une autre percée d'un trou dnnr 1^ ^,^n,„^ j • » d , . '•'"LJ > <Jont le diamètre doit être Planche égal a celui de la cannelure , pris du dedans des filets ; enfuite de quoi on fe ferc ^ de la fraife fig. lo, pour évuider le bout de la cannelure, ce qui ne fouffre aucune difficulté. Quand on fait ufage des fraifes pour finir les cannelures , il faut avoir g„nd foin de tenu- le vilebrequin bien d'à-plomb , pour que la cannelure foit biea jufte au milieu de la ligne de,j;g. 8 ; & quand on fera ufage de la fraife cylin- drique,/,.-, p , il faudra, après l'avoir fait entrer perpendiculairement , la pen- cher un peu de droite & de gauche , pour fuivre , autant qu'il eft poffible , le parallelifoe du cercle de la pièce à canneler , ce qui oblige à bomber un peu le deifus de la plaque de krAilm, ainfi que je l'ai indiqué à hfig. 5 , où cette plaque eft non-feulement bombée , mais dont le trou eft évuidé en dehors , afin qu en penchant la fraife elle ne s'écarte pas de fa place. J'ai dit plus haut qu'on pouvoit faire la plaque h II m, de fer ou de cuivre - cependant comme les fraifes font dentelées fur le côté , il y auroit à craindre qu elles n'élargifl^ent le trou de la plaque en frottant contre; c'eft pourquoi je croîs qu il feroit bon de faire la plaque d'acier trempé, & de faire les fraifes aufll d acier , mais non trempé , ce qui eft fuffifant pour travailler les bois. Quant à la forme & à la confiruélion des fraifes , je n'en parlerai pas ici davan^ tage , parce que je traiterai cet Article plus bas , en parlant des outils propres à percer les métaux. La machine propre à faire les cannelures dont je viens de faire la defeription , pourroit Être fufceptible de beaucoup d'augmentation Se même de perfedion • mais on ne pourroit le faire fans beaucoup la compliquer , & par conféquent là rendre plus coûteufe , ce qu'il faut abfolument éviter dans le cas dont il eft ici queftion , vu que les Ouvriers ne font pas en état de faire de grandes dépenfes en outils tels que celui-ci , qui , tout fimpfe qu'il eft, ne laiffe pas de devenir encore coûteux , proportion gardée avec les moyens du plus grand nombre , & le peu d'ufage qu'ils en font. f.III. Defeription de la Machine appellie communément Outil à ondes, & la manière d'en faire ufage de différentes façons. La Machine dont je vais faire la defeription, eft le plus grand & le plus ■ compliqué de tous les outils des Ebéniftes, fefquels en faifeicnt beaucoup ^''^l'™' d'ufage autrefois ; maintenant ils ne s'en fervent plus , depuis qu'ils ne font que ^ des ouvrages de bois de rapport, & qu'ils ont, pour ainfi dire, fait confifter toute leur feience à bien plaquer les bois. Cependant comme cet outil eft très- ingénieux, & qu'on ne le trouve nulle parc, j'ai cru ne pas pouvoir me difpenfei; jifi MENUISIER, ni. Part. SeE. III. Chap. XIII. Je le donner ici , afin de le conferver à la poftérité , fuppofé que cet Ouvrage Planche y parvienne (* ). ^ L ufage de l'Outil à ondes , repréfenté jîo'. l , eft de poufTer fur le bois des moulure'^ ondées ou guillochées , foi: fur le plat , foit fur le champ , ou même •de ces deux fens à la fois. Il ell compofé d'une caifTe ou boîte de 7 à 8 pieds de long , fur un pied de largeur , & 9 à 10 pouces de hauteur , le tout de dehors en dehors ; cette caiffe cfi: ouverte en delTus & par les bouts , de manière que l'écart des deux côtés ji'eft retenu que par des traverfes A , B, fig. i i& 2 , placées aux deux bouts de la boîte , où elles font afferablées à tenon & mortaife. A environ la moitié de la îiauteur de la boîte, eft placée une planche CD,fig.i, d'environ 2 pouces a'épaiJeur, nommée fommier , laquelle, pour plus de foiidiré , doit être em- boîtée par les bouts , & barrée en delTous. Cette planche ou fommier entre à couliffe dans les deux côtés de la boîte , ( qui ne doivent pas avoir moins d'un pouce & demi d'épailTeur ) & fert à porter les moulures à onder, comme je l'expliquerai ci-après , & qu'on peut le voir/^. 2 , qui repréfente la machine ■vue en deffiis. Au milieu de la boîte eft placé un chaflls quarté d'environ un pied de largeur, vu de côté , & qui excède de 9 à 10 pouces le delTus de la boîte , aux côtés de laquelle il eft arraché avec des vis , & dans lefquels il entre à tenon & en entaille , comme on peut le voir dans les développements de cette machine , repréfentée dans la Planche fuivante , fîg- $ & 6- Xa largeur de face de ce chaffis eft terminée par celle de la boîte , aux côtés de laquelle il faut que les montants de ce dernier affleurent intérieurement: ■c'eft dans ce chaffis qu'eft placé le reffbrt qui preffe fur le porte-outil E ,fig. r , lequel refTort s'abaiffe & fe hauITe à volonté par le moyen de la vis F,fig.-L & 1. Toute la machine eft portée fur un pied d'une conflruéfion folide , & évafé 'en forme de tréteau, pour lui donner plus d'empattement; la hauteur de ce pied doit être do 2 pieds 8 à 10 pouces , afin qu'il y ait environ 3 pieds de hau- teur depuis l'axe de la manivelle G , jufqu'à terre , ce qui eft la hauteur la plus convenable pour que la .perfonne qui tourne cette manivelle ait toute fa force , foit qu'elle foit élevée ou abaiflee. H y a dans cette machine deux mouvements ; l'un horifbntal , qui fe fait pat (*) 11 ne m'a pas été polTiblede trouver un Outil à ondes exiflant , pour en faire une bonne defcription ; je n'ai eu que deux fers , vendus avec d'autres fétailles , qui m'om cependant été très-utiles pour me fixer certaines grandeurs que je n'ai pu connoître dans la defcription que M. Félibienafaitedecet outil, laquelle defcription eft d'ailleuis très-fuccinfte , & même peu exafle , de manière qu'elle n'a pu fervir qu'à me donner une idée de cette Machine , que j'ai cnfuite arrangée de la manière qui m'a paru la plus convenable. Il eût été fort àfouhaiter que ceux: qui ont décrit cette Machine dans l'Encyclopé- die , etiffent fait quelque chofe de plus que de copier M. Félibien , au lieu d'en augmenter l'ob- fcurité & l'inexaflitude , ainfi qu'ils ont fait; ils enflent été utiles au Public, cS: en particulier aux Ebéniftes, auxquels ils auroient confervé, ou, pour mieux dire , rendu un de leurs princi- paux outils. le Sect. II. §. ///. De la Machine apellée Outil à ondes. 917 1-e moyen de la manivelle G ,fig. 1 , qui, en failànt tourner un pignon placé u ' dans l'intérieur de la boîte , entraîne le fommier A B, fig.z,Sc par conféquent Planché 1 ouvrage qui eft arrêté delTus. L'autre mouvement fe fait verticalement de haut-en-bas , & dépend du pre- mier ; parce que la tringle ou conduite ondée H. H ,fig. i & 2, qui eft arrêtée furie fommier, fe mouvant par conféquent avec ce dernier, fait hau (Ter le porte-outil F, Fig. i , qui redefcend auffi-tôt de lui-même , tant par fon propre poids , que par la preffion du re/Fort placé au-delTus. F^ojei la Fig. 4 , qui repré- fente une conduite ondée grande comme l'exécution ; & la Fig. 5' , une mou- lure toute ondée félon les finuofités de la conduite Fig-. 4. Voyez pareillement la Fig. 3 , qui repréfentc la coupe du porte - outil , dont je ferai la defcriptiori ci-après ; & la Fig. 6 , qui repréfentc un fer vu de face avec différents profils, le tout grand comme l'exécution. Les Figure i & 2 de cette Planche , repréfentent l'une la coupe tranfverlàle - de la machine , prife à l'endroit des pignons , & l'autre la coupe longitudinale Planche de cette même machine , afin de faire mieux connoître le détail de fa conftruc- ' ^' tion, Se le méchanifme de fes opérations. L'axe A B, Fig. r , doit être placé dans des collets de cuivre a, 6 , afin qu'il tourne plus doucement ; & on doit obferver à un des côtés de la boîte , une ouverture quarrée capable de laifler paffer les pignons C, D , fuppofé qu'il fût nécefîâire de retirer l'axe dehors ; les pignons C, D , engrainent dans des cré- maillères c ,d, Fig. i,&.E,F, Fig. 2 , lefquelles font incruftées dans le de/Tous du fommier G G, mêmes Fig. d'environ 9 lignes de profondeur , & on les y arrête avec des goupilles placées de diftance en diftance dans les côtés de ce dernier , en obfervant que les crémaillères foiSnt bien vis-à-vis l'une de l'autre, pour que les deux pignons C, D, Fig. r , falTent effort également de/Tus; cependant comme il pourroit arriver que les dents des pignons ne fuffent pas bien direélement vis-à-vis l'une de l'autre, on feroit très- bien, après avoir arrêté une des crémaillères, de ne pas arrêter Fautre qu'après avoir vérifié fi elle va bien avec fon pignon , afin de pouvoir la reculer ou l'avancer s'il étoic néceifaire. Ces crémaillères peuvent être faites de fer ou de cuivre , ce qui eft îndifFér rent , quant à la machine , quoiqu'il feroit bon qu'elles fuffent de cuivre , vu que le frottement des deux métaux différents eft plus doux & ufe moins que lî les deux parties , c'eft-à-dire , les pignons & les crémaillères étoient de même métal. Les tringles ou conduites ondées e ,f, Fig. l , & H, H , Fig. 2 & 6 , doi- vent pareillement être faites en cuivre , & elles doivent être reployées en retour d'équerre , pour avoir la liberté de les attacher avec des vis fur le fom- mier dans lequel elles font entaillées de toute leur épaiffeur , comme on peue le voir aux Fig. i & 6. Menuisier , III. Pan. III. Se&, D iç MENUISIER, m. Part. Sect III. Ckap. XIÎl Quand on pofe cas tringles fur le fommier , il faut avoir la plus grande atten* Planche don pour que leurs guillochis foient non-feulement bien vis^ à-vis l'un de l'autre , niais encore qu'ils correfpondent au même point de leur contour avec la touche du porte-outil qui vient porter dedus , comme on peut le voir à la Fig- 4 , qui repréfente la machine vue par le bout ; & encore mieux à la Fig.J , qui repré- fente le porte -outil auquel on a été la joue qui retient le fer en place , comme je l'expliquerai ci-après. Le porte-outil eft un chafîis IL, MN , Fig. 2 & y , d'environ 2 pieds de longueur, fur une largeur égale à l'intérieur de la boîte, moins le jeu nécelTaire pour empêcher le frottement , qu'on évite en diminuant de l'épailfeur des bat- tants dans toute leur longueur, & en y réfervant des talons par les bouts , pour que le chalfis porte contre les côtés de la boîte , & ne puiffe pas fe déranger lorfqu'on le fait mouvoir. Le chaffis du porte-outil eft attaché aux côtés de la boîte par le moyen de deux vis à tourillon , repréfenté Fig. 3 , grand comme moitié d'exécution , dont l'extrémité 0 , eft terminée en cône , & porte dans un collet de cuivre incrufté dans le côté de la boîte. Cette vis eft arrêtée en place dans le chafTis par un écrou placé dans le milieu de fon épaiffeur à l'ordinaire ; & pour empêcher que le mouvement du chaffis ne falTe tourner la vis , on y met un contre -écrou F en dehors , qu'on ferre contre le chaffis , ce qui empêche la vis de faire aucun mouvement. J^oyei les Fig. 3 (5 Comme il fe trouve des occafions où il eft nécelTaire d'élever le point de mouvement du porte-outil , on perce plufieurs trous dans le collet de cuivre attaché au côté de la boîte , comme je l'ai fait à la Fig. ■x. A l'autre bout du porte-outil , c'eft-à-dire, celui où eft adapté le fer, la tra- vcrfe /, Fig. 1 , doit être très-forte , & affemblée en chapeau , afin de préfenter une furface unie dans toute fi longueur , qui eft la largeur du porte-outil ; enfuite on applique deffus une pièce de fer attachée avec des vis à tête fraifée, d'une longueur égale à la largeur de ce dernier , & on la fait déborder d'environ j à 6 lignes par les deux bouts , pour faire deux touches qui portent fur les conduits ondés , & on fait une entaille dans le milieu de cette pièce de fer pour placer le fer de l'outil, comme on peut le voir à la Fig. /. Ce fer eft retenu en place par une joue ( foit de fer ou de cuivre , ce qui efl égal,) qu'on arrête en place parle moyen de deux vis à tête quarrée g, g, Fig. a , 4 (& 5 , dont l'écrou eft placé dans l'épaifteur de la traverfe du chaffis. Foy. la Fig. 3 de la Planche 3 14 , où j'ai repréfenté la coupe du porte-outil , avec la touche /, le fer Z , & la joue extérieure M , laquelle defcend le plus bas poffi- ble , c'eft-à-dire , jufqu'au-deffijs de la partie la plus creufe de ce dernier. Le deffous de la touche /, doit être le plus aigu poffible , ( fans cependant être à yive-atête) pour i^u'elle fuiye mieux tous les concours de la conduite Sect. il. §. ///. De la Machine appellée Outil à ondes. 519 ondée 7VO ; & il faut avoir grand foin que le point d'attouchement de la touche ' ' - foit dans la même direftion que le taillant du fer , comme je l'ai obfervé dans Planchs cette figure, afin que le mouvement de l'outil (qui fe fait en décrivant un arc de ^ cercle , dont le centre fe trouve à l'extrémité du chadis ) foit moins fenfibie ; à quoi j'ai en partie remédié , en éloignant ce point de centre ou de mouvement le plus qu'il m'a été poffible. Le poids du porte-outil feroit prefque fufiifant pour faire mordre le fer fur le bois; mais cependant il faut toujours y mettre un relTort, tant pour augmenter le poids de l'outil, fuppofé que cela foit néceifaire , que pour l'empêcher de furfauten Ce re/fort h i , Fig. 3 , ne porte pas immédiatement fur le porte-outil , mais fur un levier dont les branches font attachées librement aux montants du chaffis mobile de la boîte en m , Fig. 2 y , & dont l'autre bout porte fur la traverfe du porte-outil en /z , ce qui augmente en même temps la force & félafticité du reffort , dont la partie fupérieure eft arrêtée en delTous de la tablette O , Fig. 3, avec la vis P, dont l'écrou eft placé dans le deffus du chaffis Ç>; cette vis fert, comme je l'ai déjà dit , à augmenter ou à diminuer la preffion du reffort ; & la tablette O , dans laquelle paffe l'extrémité inférieure de la vis, ne fert à autre chofe qu'à la retenir en place , & à appuyer le talon 0 du reffort. Comme cette tablette eft mobile , on f arrête du côté oppofé à la vis avec deux goupilles i qu'on place au travers des montants du chaffis , comme l'indiquent les points p,p. J ai fait la tête de la vis P en forme de piton, pour qu'on ne puifle pas la ferrer ou la defferrer en touchant deffiis, & qu'on aye befoin d'un petit levier ou manivelle pour le faire , afin que ceux qui approchent de la machine lorf- qu'elle eft ajuftée , ne puiifent pas y rien déranger en y touchant. C'eft cette même raifon qui m'a fait préférer les vis à tête quarrée pour ferrer la joue du porte-outil , parce qu'il faut une clef pour faire mouvoir ces fortes de vis , & qu'on peut f ocer de deffous les mains de tout le monde , & par confé- quent empêcher qu'on ne change rien à l'outil. Quant à la manière de fe fervir de cette machine , elle eft très-fimple : on commence par corroyer des tringles de bois à la largeur du profil dont on a faic ' choix , & on les met de même d'épai/feur , en raifon de la faillie de ce même profil , & de la faillie des ondes ; ce qui étant fait, on met dans le porte-outil un fer uni, qu'on ajufte à la hauteur que doit occuper la faillie de la moulure y . puis on arrête la tringle corroyée fur le fommier , par le moyen de petites pointes de fer placées fur le dernier de diftance en diftance , & on fait mou- voir la machine en tournant la manivelle, ce qui fait avancer le fommier en avant , & par conféquent la tringle qui eft attachée deftis , laquelle , après avoir paffé à plufieurs reprifes fous le fer uni , fe trouve ondée à fa furface. Quand la tringle eft ainfi diipofée , on ôte le fer uni , & oa y fubftitue celui qui eft profilé , & on recommence l'opération jufqu'à ce que le fer ne trouve . plus de bois à mordre , & que par conféquent la moulure foit parfaitement finie-ij ^30 MENUISIER, m. Pan. SeEt. IIL Cnap. XIII. > Il faut avoir grand foin, avant de pouffer la moulure, de vérifier fi la tringle Planche tie bois efl: placée bien parallèlement, ce qu'on conr.oît en la faifant palTer de ^ toute fa longueur fous le fer qu'on tient élevé au-defTus , & on ne doit l'arrêter à demeure fur le fommier, qu'après avoir pris cette précaution. H faut auffi obferver que les pointes qu'on place dans le fommier pour arrêter les moulures , fe trouvent au milieu de leur largeur , & qu'elles ne failliffent pas affez pout rencontrer le fer & y faire des brèches , ce qu'il faut avoir grand foin d'éviter. Le fer de l'Outil à ondes fe place toujours perpendiculairement, ce qui faic qu'il gratte plutôt qu'il ne coupe , ce qui ne peut être autrement , vu que fi on l'inclinoit à la manière ordinaire des outils de moulures , il écorclieroit le bois lorfqu'il vient à remonter, ce qui arrive à chaque ondulation ; de plus , le fer ainfi incliné ne fe trouveroit plus dans la même direélion dans toutes fes parties, ce qu'il faut éviter autant qu'il efl poflîble. Comme on peut faire plufieurs fers différents, il faut faire attention qu'ils foient tous de même largeur, afin qu'ils remplilTent tous également l'entaille faite dans la pièce qui porte les touches ; il faut aufli avoir attention qu'ils foient tous de même épaiffèur , & que cette épailTeur foit un peu forte, pour mieux réfifter à l'effort que fait le bois en paffant deffous. La manivelle avec laquelle on fait mouvoir fOutil à ondes , peut fe placer foit à droite de la machine , comme à la Fig. 6 , ou bien à gauche , comme aux Fig. X 4, ce qui eft affez indiffèrent, chacune de ces manières ayant leurs inconvénients & leurs avantages ; parce que fi on la place à droite , ce qui eft la maniera la plus naturelle , puifqu'on fait effort en pouffant , on ne voit pas bien l'ouvrage , derrière lequel on fe trouve placé ; fi au contraire on la place à gauche, on voit très-bien l'ouvrage, mais on eft obligé de faire tourner la manivelle à rebours ; c'eft pourquoi , pour obvier à ces deux inconvénients , j'ai cru qu'il valoir mieux difpofer les deux bouts de l'axe pour recevoir chacun une manivelle , comme à la Fig. ^ , de manière qu'on puiflè s'en fervir comme on le jugera à propos , foit à droite , foit à gauche , ou même des deux côtés à la fois. L'Outil ou Machine à ondes, tel que je viens de le décrire, & que l'a repré- PiANCHE fenté M. Félibien , n'eft difpofé que pour faire des ondes fur le plat ; cependant ^ ■ comme il feroit quelquefois à fouhaiter qu'il en fît fur un autre fens, c'eft-à- dire, fur le champ, j'ai cru devoir chercher les moyens de le faire fans rien déranger à la machine , du moins quant à fon enfemble , n'y ayant que le chaflis du porte-outil de changé , comme je vais l'expliquer. Lechafîis du porte-outil propre à faire des moulures ondées fur le champ, s'attache aux côtés de la boîte de la même manière que le chafîîs dont j'ai fait la defcription ci-deffus: il ne diffère de ce dernier que parla partie antérieure, laquelle eft compofée de deux traverfes A ôc B , Fig. 3 (S' 5 , diftantes de 3 pouces l'une de l'autre , pour pouvoir placer le porfe-outil C, qui y eft arrêté par Sect. II. §. 111. De la Machine appellce Outil à ondes. 931 pat deux languettes , de manière cependant qu'il puilTe couler librement entre ~ les deux traverfes, dont une, c'eft-à-dirc , celle -ff, eft faite de deux pièces Planche attachées enfemble par le moyen de deux vis; de forte que lorfqu'on veut ôter ^ le porte-outil , on enlevé la pièce de defTus B , qui n'eft aucunement adhérente au chaflls , au lieu que celle Z) y eft alFemblée à tenon & mortaife. V jye^ la Fig. I, qui repréfente le chaflîs vu en perfpeilive, & coupé dans fa partie anté- rieure pour en faire mieux connoître l'enfemble. Les touches de ce chaffis font arrêtées dans les deux battants flir la ligne du milieu du porte-outil , aux points E , F, Fig. j , afin d'être toujours dans la même diredtion du fer de l'outil , & elles defcendent en contre-bas du chaffis de ce qu'il eft néceflairc pour qu'elles portent fur les conduites ondées , & qu'elles faffènt faire au chaffis fon mouvement ordinaire. T^oje^ Li Fig. 2 , qui repré- fente la coupe de la machine, prife au milieu du porte-outil. Se par conféquent à l'endroit des touches. Le fer G , Fig, 1, 3 (5 5 , du porte-outil, eft placé perpendiculairement dans ce dernier , & y eft arrêté par une vis de preffion noyée dans l'épaifleur du bois , comme on peut le voir à la Fig. 'y ,& fon profil eft taillé par le côté, de manière qu'il faut autant de fers qu'on veut avoir de différents profils. L'aélion de ce fer fe fait ainfi qu'on peut le voir par le côté , Se elle eft excitée par la preffion du reffort///, Fig. 2 & ^, lequel eft attaché par le haut au chaffis en H , & vient faire effort contre le porte-outil en /, vis-à-vis l'endroic du profil du fer , de manière que ce chaffis a deux mouvements à la fois ; favoir , celui d'ondulation , qui eft vertical , & qui eft commun, au chalîis & au porte- outil ; & celui de ce dernier , qui , eu fuivant le mouvement d'ondulation , a un autre mouvement horifontal de droite à gauche , qui eft caufé par l'aélion du reffort qui fait mordre l'outil fur le bois , lequel n'eft pas attaché à plat fur le fommier comme ci-devant, mais au contraire fur le champ , & contre une joue ou conduite L L,Fig. 2 (S y , qu'on attache avec des vis fur le fommier, comme on peut le voir dans cette dernière figure & dans la Fig. 4 , qui repréfente le porte-outil & le chaffis vus par le bout. Si on vouloir que les moulures fulîènt ondées fur le plat & fur le champ , on fe ferviroit toujours du même chaffis , dans lequel on met un autre porte-outil 'M N, Fig. 6, y (S' 9 , différent du premier en ce qu'il eft beaucoup plus court que l'autre, & qu'au milieu de fon épaiffeur, & fur le bout oppofé au reffort, ii y a une touche de fer M , laquelle defcend perpendiculairement, & vient por- ter contre une conduite ondulée O O , Fig. 6,j & ^, qui donne au porte- outil un mouvement d'ondulation horifontal , qui , joint au mouvement d'ondu- lation vertical du chaffis , remplit les conditions demandées , c'eft-à-dire , pro- duit des moulures ondées fur le plat & fur le champ. Voye^ la Fig. 8 , qui repréfente le chaffis & le porte-outil vus par le bout. La conduite ondée O O, eft reployée deux fois en retour d'équerre , comme Menuisier , III. Pan. III. Scc% E ir =932 ME NUIS lE R , m. Pan. SeS. III. Chap. XIII. r ^ on peut le voir dans la Fig. 6 , afin que la partie ondulée foit élevée au - delTus Planche du fbmmier, & qu'on ait de quoi l'attacher lut ce dernier, ce qui fe fait avec des vis qui paffent au travers de la première conduite pour fe tarauder dans le bois , ou bien on fait ces vis à petit filet , & on les fait prendre dans la pre- mière conduite qui alors leur fert d'écrou. De quelque manière que ces vis foient difpofées , il faut toujours faire dans la partie inférieure de la conduite O O , Fig. 9 , au travers de laquelle ces vis paffent, des mortaifes de la largeur du collet des vis, & d'une longueur allez confidérable pour qu'on puilTe avancer ou reculer cette conduite autant qu'il fera néceflàire , pour que les parties {aillantes de ces ondulations répondent avec celles des autres conduites du fommier , ou bien la faillie des premières avec les parties creufes de ces dernières , ce qui dépend du goût ou de la volonté de celui qui fait ufage de cet outil , dont je ne ferai pas une plus ample defcrip'^ tion, vu que je l'ai détaillé avec beaucoup de foin dans les trois Planches 314 , 31 J & ^16 , dont l'infpeélion feule des figures doit donner une idée allez jufte de ce qui concerne la théorie de cette machine ; quant à la pratique, je ne fau- rois en dire davantage, vu que je n'ai jamais fait ufage de cette machine, ni même été à portée de le faire , puifque je n'en ai point vu en nature, & que celle-ci , à la forme générale près, que j'ai tirée de l'œuvre de M. Félibien, eft toute entièrement de ma compofition ; ce qui fait que loin d'être aulTi parfaite qu'elle pourroit l'être , elle a peut-être encore bien des imperfetîlions qui n'au- roient sûrement pas échappé à quelqu'un plus verfé que moi dans la compofition de ces fortes de machines , qui n'ont de vrai mérite qu'autant qu'elles font d'une compofition fîmple , d'un ufige facile , & fur-tout peu coûteufes , vu qu'elles font plutôt faites pour les Ouvriers que pour les Curieux , qui , fouvent , n'en font jamais ufage. Section Troisième. Defcriptlon des Outils de Serrurerie dont l'ufage ejl néceffaire aux Ebéniflcs; . Le s Outils de Serrurerie à l'ufage des Ebéniftes , font les Etaux de toutes Flanche fortes , les Limes , les Outils propres à percer le fer ou le cuivre , tels que les Forets, les Tourets, les Drilles ou Trépans , &c. enfin les Outils propres à ferrer l'ouvrage , comme les Vilebrequins de fer, avec toutes les pièces qui s'y adaptent, comme les Mèches de différentes façons, les Fraifes & les Equar- riiToirs ; enfin les Cifeaux à ferrer, les Becs -d'âne crochus ou Dégorgeoirs, les ChalTe-pointes. Les Etaux , Fig. 1 Ô' 2, font des outils de fer dont l'ufage eft d'arrêter ferme en place une pièce qu'on veut travailler , <Sc de la préfenter à plat foit parallè- lement , foit inclinée à f horifon. Ils font compofés de deux principales pièces nommées mords ou mâchoires , dont une A , eft attachée contre un établi j & Sect. m. Defcripdon des Outils de Serrurerie, SCc. 535 l'autre B, fe meut par le moyen d'une vis CD , laquelle la fait ferrer du haut autant qu'on le juge à propos ; en relâchant la vis , la mâchoire B s'écarte , ( du Planche moins autant que la longueur de la vis peut le permettre , ) & cela par le moyen ^ ' ^' d'un relîôrt F attaché contre l'autre mâchoire A , lequel fait efFort contre la mâchoire mobile. Lavis fe ferre & delîerre par le moyen d'une manivelle E, qui paiTe au travers de fa tête , de manière qu'on ferre l'ouvrage entre les deux mâchoires autant qu'il eft nécedâire. L'intérieur de la partie fupérieure des mâchoires, efl dentelé, ou pour mieux dire taillée comme une lime, afin que les pièces qu'on ferre entre, y tiennent plus folidement , ce qui eft bon pour celles qui font brutes , ,& qu'on ne craint pas de gâter ; mais il n'en eft pas de même pour celles qui font finies, ou pour les pièces de bois que ces dents peuvent gâter en s'imprimant defflis , ce qui a fait imaginet de garnir les deux mords de l'Etau avec des morceaux de plomb Fig. G , qu'on nomme morJac/ies , lefquels ferrent la pièce fans la gâter, le plomb étant un métal beaucoup plus mou que le fer & le cuivre. Quand les pièces qu'on veut ferrer dans l'Etau , font bien polies , ou qu'elles font aflez tendres pour qu'on craigne que les raordaches de plomb ne les.meur- trin\;nt, on fe fert d'une mordache de bois, Fig. 3, dont l'intérieur a , eft garni de buffle collé defTus ; quelquefois au lieu de buffle , on y met deux mor- ceaux de liège de J à (î lignes d'épailfeur , lelquels reçoivent toutes les parties fàillantes de la pièce qu'on ferre dans l'Etau , fans en gâter aucune. Les mordaches de bois , pour être bonnes , fe font en noyer ou tout autre bois liant ; ce n'eft autre chofe qu'un morceau de bois d'environ un pouce <St demi d'épailfeur , fur 3 à 4 pouces de largeur , lequel eft refendu au milieu de fon épaiffeur jufqu'à environ un pied de fon extrémité inférieure. La longueur des mordaches en bois , doit être égale à la hauteur de l'Etau , plus 3^4 pouces dont elles doivent le furpaffer , afin que lorfqu'on l'incline pour en faire ufage,' il porte toujours à terre. Il y a trois fortes d'Etaux ; favoir , les Emux à pied, comme les Fiir. i (§• 2 les Etaux à patte , fig. p, qui différent de ces derniers non-feulement par la for-; ce , mais encore par la manière de les arrêter , & les Etaux à main, F ig. ïo& ii. Les Etaux à pied s'arrêtent à l'établi par le moyen de deux tirants de fer G y H , Fig. 7 , lefquels font attachés fur l'établi avec de bonnes vis en bois. Le bout de ces tirants qui eft taraudé , palTe au travers d'une bride de fer /, laquelle eft retenue par deux écrous qu'on ferre autant qu'il eft néceflâire pour que la mâ- choire de l'Etau tienne folidement. Quelquefois les deux tirants fe font d'une feule pièce, comme dans cette figure, ce qui eft très bon ; mais ces fortes de tirants ont le défaut de ne pouvoir fervir qu'au même Etau , & deviennent plus coûteux que de deux pièces: c'eft pourquoi on leur préfère ces derniers, aux- quels on fait un petit talon pour appuyer le derrière de la mâchoire de l'étau. Les brides ainfi attachées fur l'établi , failliiFent de toute leur épailTeur, Je 534 ME NU ISÎE R, III. Part. Sea. III. Chap. XIÎÎ. = crois qu'il feroit mieux de les entailler dedans , ce qui feroit plus propre & beau- coup plus folide. On feroit auffi très-bien de faire une entaille fur le devant de l'établi, pour recevoir la mâchoire de fétau , comme je l'ai obfervé aux Fig. 7 (5 8 , à condition toutefois qu'on fe fervira toujours du même Etau , ôc qu'on ne le changera pas de place. Le bas des Etaux à pied porte immédiatement par terre , & on fait entrer la pointe dans un morceau de bois fcélé dans le plancher , aiîn qu'ils tiennent mieux le coup lorfqu'on flappe defTus , ce qui arrive quelquefois. Les Etaux à patte , Fig. (j , s'attachent fur l'établi , & y font arrêtés en deflbus par le moyen d'une vis , à l'extrémité de laquelle il y a une petite pla- tine armée de pointes , lefquelles entrent dans l'établi lorfqu'on ferre la vis O. Il y a de petits Etaux à patte qu'on attache fur un morceau de bois d'environ un pied de long, de forte qu'on les tranfporte où on veut, foit fur l'établi, où on les arrête avec le valet , ou par-tout ailleurs. Les Etaux à main, Fig. lo ô ii, fervent à tenir de petites pièces qu'on veut limer. Il y en a de différentes grandeurs ; celui qui efl: repréfenté ici à moitié de l'exécution , efl de la moyenne grandeur. Comme les Etaux à pied ne lailTent pas de coûter cher quand ils font bons & bien faits , & que les Ouvriers n'ont pas toujours le moyen d'en faire la dépenfe, ils en font de bois, comme celui repréfenté Fig. 4 <& y , lefquels, ftns être fore chers , ne lailTent pas de leur bien fervir ; cJe plus , ces Etaux ont l'avantage de s'ouvrir parallèlement par le moyen d'une entre-toife MN , per- cée de plufieurs trous , laquelle eft alTemblée dans la mâchoire mobile , & pafîe au travers de l'autre mâchoire , contre laquelle on l'arrête par le moyen d'une broche de fer à la diftance qu'on le juge à propos , ainfi qu'aux prelTes d'établi , auxquelles ils font prefque femblables. Pour rendre ces Etaux plus folides , on garnit de fer leur extrémité fupérieure , de forte qu'on:»peut également s'en fervir pour les métaux comme pour le bois,' Cet Etau s'arrête h fétabli comme celui de fer dont j'ai parlé plus haut , ou bien fimpleraent avec un lien de fer reployé autour & attaché fur fétabli avec des vis , comme on peut le voir aux Fig. ^ & S. Le bout inférieur de la mâchoire dormante fe fcele en terre , ou bien efl: attaché avec une forte vis L, contre la traverfe de l'établi , à f endroit de laquelle il eft entaillé. Les Etaux doivent être difpofés de manière qu'on puilTe s'en fervir aifément , ceft-à-dire, que leur hauteur, prife du deffus des mâchoires, foit en raifon de la hauteur de celui qui en faitufage , lequel étant droit devant l'Etau, doit trou- ver entre le deffus de ce dernier jufqu'à fon menton , une diftance égale à la longueur de fon avant-bras , pris depuis la paume de la main jufqu'au coude , •de manière qu'en s'appuyant le menton fur la main , le coude pofe fur l'Etau , ce qui donne de hauteur à ce dernier depuis 3 pieds 3 pouces , jufqu'à 3 pieds Se demi du deffus des mâchoires. > Les Séct. III. Defcription des Outils de Serrurerie y dCc, 93 1 Les Ecaux ne fe pofenc pas contre les établis ordinaires , Icfquels feroienc f trop bas ; mais on les attache à des établis faits exprès , lefquels font ordinaire- Planche ment pofés contre l'appui de la boutique, & expofés au meilleur jour poflible. ^ La hauteur de ces établis eft d'environ 2 pieds 9 pouces , fin- i j à 18 pouces de largeur ; & il eft bon d'y faire un rebord en devant de 6 à 8 lignes de hau- teur, pour retenir les pièces qu on pofe delTus. Le de/fous de ces établis fe fait fouvent en forme d'armoire fermée , ou on y pofe feulement une ou deux tablettes, avec un rang de tiroirs en deffous de la table , pour pouvoir placer & ferrer les ouvrages & les outils de Serrurerie dépendants de cet établi. La Figure 1 2 repréfente Une Pince ; la Figure r 3 , uneTenaille à boucle, propré àfaifir de petites parties ; &la Figure 14, un Etau à main fait en bois, lequel peuÉ fervirau défaut de celui de fer, F/^. 10 & il.Onobfervera que ces trois figures^ ainfi que cette dernière, font deffinées à moitié de grandeur d'exécution. Les Figures r , 2 , 3 , 4 & j , repréfentent deux Limes de différentes efpeces , ~'~ ' '' ■ fàvoir , les Figures i & 2 , une Lime d'Allemagne ; & celles 3 , 4 & y , une Fl^'^^™^ Lime d'Angleterre. Ces Limes différent entr'elles par la forme & par la taille , c'eft-à-dire , par la manière dont elles font dentelées. Les Limes d'Allemagne font d'une forme longue , laquelle vient en diminuant par les deux bouts , tant flir la largeur que fur l'épaiffeur , non pas en ligne droite, mais par des courbes prelqu'infenfibles. Les Limes d'Angleterre font plus courtes en proportion de leur largeur , laquelle eft prefqu'égale d'un bout à l'autre : elles font plus minces que les Limes d'Allemagne , viennent en diminuant par le bouc , qui eft très- mince , & ont les faces un peu bombées , comme on peut le voir aux Fig. 3 & p La taille des Limes d'Allemagne a deux inclinaifons différentes ; la première; qui monte de droite à gauche , eft fort inclinée ; & la féconde, qui monte de gauche à droite , eft prefqu'horifontale ; au contraire , la taille -des Limes d'An- gleterre eft égale , de forte que fes grains repréfentent des lofànges couchés , produits par des triangles équilatéraux , ce eft faite à rebours de celle des Limes d'Allemagne , c'eft-à-dire , que la féconde taille eft faite en montant de droite à gauche , ce qui ne fait rien à la chofe , parce que finclinaifon & la diftance des tailles étant parfaitement égales , il importe fort peu laquelle eft la première. Il n'en eft pas de même des Limes d'Allemagne , on il faut abfolument que la féconde taille foit difpofée comme je l'ai dit ci-deflus, & toujours de gauche à droite , ce qui eft néceffaire pour qu'en faifant ufage de ces Limes , le fens oi"! elles mordent foit toujours oppofé à la force qui les fait mouvoir , & qu'elles ne remontent pas fur l'ouvrage malgré l'Ouvrier, ce qui arriveroit néceflliiremenc fi cette taille étoit difpofée de droite à gauche. Il y a des Limes de toutes formes Se de toutes grandeurs , depuis un poucô jufqu'à une ligne de diamètre ; mais on les diftingue ordinairement par la grof^- feur de leurs grains , qui , étant plus ou moins ferrés , les rendent plus douce» Menuisier , ///, Pan. III. Secl^ F 1 1 MENUISIER, 777. Pan. SeB. 111 Chap. XIII. r.:^_L^ ou plus rudes ; c'eft pourquoi on divife les Limes en trois efpeces ; favoir, les Planche grôfTes ,^ui fervent pour ébaucher l'ouvrage fortant de la forge , ( & qui ne font ^ ' • guère utiles aux Menuifiers ) les bâtardes , qui fervent à lui donner la forme convenable , & les fines , qui fervent à le finir. Dans chaque efpece de Limes ily en a de plus ou moins greffes pour le grain, dont on fait ufage félon les différents befbins. Quant à la forme des Limes, il y en a de parallélogrammes par leur coupe, d'autres triangulaires , qu'on nomme Tiers-points , de tout-à-fait rondes, qu'on nomme Queues de rat ; de demi-rondes , qui font plates d'un côté & rondes de l'autre; d'autres enfin qui font bombées des deux côtés. Il y a des Limes plates dont un des côtés n'eft pas taillé comme le repréfente la Fig. 3 ; ce qui efi très- commode pour limer dans les angles rentrants dont il y a un côté auquel on ne veut pas toucher. Chaque Lime eft ordinairement garnie d'un manche de bois avec une virole de fer ou de cuivre au bout fupérieur , pour empêcher qu'il ne fe fende lorfqu'on enfonce la foie ou queue de la lime dedans. La grolTeur du manche doit être à peu-près en rapport avec celle des Limes ; cependant on ne doit pas leur don- ner moins de 3 pouces de long , ni plus de 5 pouces , fur un diamètre propor- tionné. Voyez celui de la Figure 9 , qui eft de la moyenne grolTeur. Lorfqu'on veut limer une pièce quelconque , on la met dans l'étau , en obfervant qu'elle l'excedc alTez pour ^u^ la Li,ne ne porte pns delTus ce dernier ; enfuite on prend le manche de la Lime de la main droite , avec laquelle on l'em- poigne tout uniment, fans pofer le pouce ni le doigt index de/Tus, comme le font plufieurs Limeurs , à qui cette attitude roidit les nerfs des doigts , & leur rend le tad obtus , de manière qu'ils ne peuvent plus faifir de petites pièces. On prend de même le bout fupérieur de la Lime de la main gau che, qu'on fait porter au fond de la paume de la main, puis on fait aller la Lime fur l'ouvrage en appuyant de/fus autant qu'on le juge à propos, & en obfervant de mener la Lime bien de niveau , afin de ne pas limer rond. Il y a trois manières de mener la Lime, ou, pour mieux dire, de limer- favoir, en long , en travers & à la main. Lorfqu'on lime en long , on pofe il Lime diagonaleraent fur l'ouvrage la plus inclinée qu'il eft polTible, afin de mieux dreffer la pièce; lorfqu'on lime en travers, on la tient perpendiculaire ri la pièce , ce qu'on fait également pour les pièces de plat ou de champ. Lorfqu'on lime à la main , ce qui n'eft que pour les petites pièces, on faifit la pièce à limer avec fétau à main , qu'on tient de la main gauche, en appuyant la pièce qu'on veut limer fur un morceau de bois placé dans l'étau; alors on prend la Lime de la main droite, dont on fe fert à l'ordinaire. Quand on veut limer diagonalement ou en ekanfrein , comme difent les Ou- vriers , on met la pièce dans un petit étau nommé tenaUIes à chanfrein, donc les mâchoires inclinées à 4; degrés , difpofent la pièce de manière qu'on y faitle 5ïcr. ///. Defcnpdon des Outils de Serrurerie, t§Cc. 53^ chanfrein fans haufler ni bailler la Lime. Je n'ai pas donné de figure de ce: étau , — ■ qu'on pofe dans l'étau ordinaire, parce qu'il eft très-rare que les Menuifiers en Planche fa/Tent ufàge. Celui qui lime doit fe tenir le plus droit pofllble , le pied gauche en avant contre le pied de l'étau , & le droit en arrière , la pointe en dehors , afin d'avoir un point d'appui plus confidérable, & par conféquent plus de force: il faut aulîî éviter de fe balancer le corps , tout le mouvement devant être dans les bras. On lime non-feulement le fer & le cuivre , mais encore les bois durs , qu'ort met dans l'étau à l'ordinaire , & qu'on finit de même avec des Limes douces • cependant comme il fe trouve quelquefois beaucoup de bois à ôter, on ébauche avec la Rape à bois, F'ig. 6 , laquelle diffère des Limes par la forme de fa taille | qui, au lieu d'être formée par des fentes , eft enlevée à coups de poinçon , ce ^ qui fait une quantité de trous dont la bavure relevée donne autant de crochets ' fur la furface de la Rape , lefquels prennent beaucoup plus de bois'que les Limes.' Il y a des Râpes de différents grains , ce qui les rend par conféquent plus ou moins rudes. Leur forme ordinaire eft demi -ronde; cependant il y en a de plates , & qui ont un côté de lifFe comme les Limes dont j'ai parlé ci-de/Tus. Les Râpes fe mènent comme les Limes ; c'eft pourquoi je n'en parlerai pas davantage; Avant de terminer ce qui concerne les Limes, je vais faire la defcription des Ecouenes & des Grêles de différentes fortes , çomme étant toutas des outils à manche , dont l'u/àge eft d'unir /oie le bois ou les métaux. Les Ecouenes Fig. 7 8 , font des efpcces de limes dentelées fur leur lar- geur en forme de fcie , de manière qu'elles préfentent une continuité de tran-> chants à peu-près femblables à celui d'un rabot de bout, lefquels dreffent & unifient bien mieux une partie d'ouvrage quelconque , que ne feroient la rape & la lime , qui, quelque douces qu'elles foient , font toujours des rayures, fur-« tout dans les angles rentrants ou dans les filets creux dans lefquels elles paffenc toujours à la même place. Il y a deux fortes d'Ecouenes , celles en forme de lime , comme les Fcg. 7, 8, 9, 10, ir, 12, 13 (S- 14, qui, à proprement parler, ne font que des Grêles ; & celles Fig. 17 , 18 Cr 19 , qui font de vraies Ecoimnes ou Ecouenes. Les Grêles font de différentes formes & grandeurs : il y en a de larges & plates à manche droit , comme la Fig. 7 , & d'autres dont le manche , ou , pour mieux dire , la foie eft coudée pour que la main ne porte pas fur f ouvrage ; d'autres qui font étroites , & qui diminuent par le bout fupérieur , comme les Tig. 10 & IX ; d'autres au contraire dont ce bout eft le plus large , pour entrer dans des cavités , comme des mortaifes & autres parties creufes dont on veut parfaitement évuider l'intérieur ; d'autres dont la partie dentelée eft arrondie ; d'autres triangulaires; enfin de petites, comme les Fig. 13 & i^^ dontfulàge eft de nétoyer les filets & les angles rentrants. Quand les Grêles font d'une certaine largeur, comme la Fig. 7 , on inclins $3S MENUISIER, m. Part. SeEl. 111. Chap. XIÏl. _ un peu leur denrelure , pour les raifons que j'ai données en parlant de la taillé Planche des Limes d'Allemagne. Aux grandes Ecouenes , comme à la Fig. ij) , non- ^ feulement la dentelure eft inclinée, mais on la fait un peu bombée fur fa'lon- gueur , afin que chaque dent prenne moins de matière à la fois , & ne la heurte pas de front. Les grandes Ecouenes font de deux fortes ; favoir , celles qui font plates 8c d'un feul morceau d'acier , comme les Fig. IJ & ; Si celles qui , comme la Fcg. i8 , font beaucoup plus hautes , Se font compofées d'autant de morceaux ou lames d'acier qu'elles ont de dents , entre lefquels font placés à force des morceaux de bois qui les Ibutiennent , & qui , par conféquent , empêchent l'Ecouene de brouter. Cette efpece d'Ecouene a l'avantage de fervir beaucoup plus long-temps que l'autre , parce qu'à mefure qu'elle s ufe, on peut affûter les dents & en ôter jufqu à ce qu'elles n'ayent que 3^4 lignes de hauteur. Les Ecouenes font d'acier non trempé : on les alRite avec des limes ; Se on Tedreffe leur fil avec un affiloir d'acier trempé, repréfenté Fig. & 16 : cet. affiloir eft monté dans un manche de bois , pour qu'on s'en ferve plus aifément. En général , les Ecouenes ne fervent guère que pour les bois durs , la corne , l'os & l'ivoire ; cependant lorfque les petites Ecouenes font trempées , on peut s'en fervir pour les ouvrages de cuivre. Je n'entrerai pas dans un plus grand détail touchant l'ufage des Ecouenes ; parce que cela regarde la troifieme efpece d'Ebéniflerie donc je traiterai ci- après. Après les Limes , font les Outils propres à percer le fer , le cuivre , & même les bois difficiles & autres matières , comme l'écaillé , l'ivoire , &c. ." ' Ces outils font les Forets Se les pièces qui en dépendent , comme l'Archec Planche ^ Palette , les Tourets , Se le Drille ou Trépan. Les Forets , Fig. <) & 10 , font des outils d'acier dont un des bouts A , Figi (} , eft affilé pour entamer la pièce qu'on veut percer ; & l'autre B, eft arrondi en forme de goutte , pour entrer dans les trous de la Palette , Fig. 13. Le corps du Foret eft quarré jufqu'à environ le tiers de fa longueur , Se eft d'une forme un peu pyramidale , pour que la boîte ou bobine C , au travers de laquelle il palTe , y tienne d'une manière fixe , Se qu'elle le fafle mouvoir avec elle , malgré la réfiftance qu'il éprouve en perçant la pièce , foit de bois ou de métal. Les Forets différent entr'eux par leur grandeur Se par la forme de leurs bifeaux : ceux propres^ à percer le fer font quarrés par le bout , & ont deux bifeaux comme les Fig. p (& 10 ; ceux propres à percer le bois , ont le bouc triangulaire , & n'ont de bifeau que d'un feul côté ; Se ceux à percer l'or , l'ar- gent & le cuivre , font de la même forme que ces derniers , à fexception qu'ils ont quatre bifeaux , deux de chaque côté , comme aux Fig. 7 (& 8 , & qu'ils doivent être trempés ; au lieu que ceux propres à percer le bois , l'ivoire, &c. n'ont pas befoin de l'être. li 3'S Sect. III. Dcfcrîption des Outils de Serrurerie , SCc. 939 ïl y a des Forets de différentes gro/Teurs, félon que l'exige la groffeur des trous qu'on veut percer ; cela oblige à avoir autant de boîtes qu'on a de fi'ANCHE Forets , ce qui ne laifTe pas que de gêner ; pour remédier à cet inconvénient , on a imaginé de faire une boîte à Foret D E , Fio. 8 , dans laquelle on adapte autant de Forets qu'on le juge à propos , ce qui eft très-commode, parce que la dépenfe de cette boîte une fois faite , on n'a plus befoiii que de Forets , ce qui eft une chofe peu chère & bientôt faite , puifque ce n'eft que des petits mor- ceaux d'acier qu'on a feulement foin de limer & ajufter d'un bout à la groffeur du canon conique de la boîte à Foret , & qu'on affûte & ajufte de l'autre , félon qu'on le juge à propos. L'Archet , i^/^. II, eft un morceau d'acier, ou le plus fouvent un bout de fleuret monté dans un manche de bois , & on fait une entaille au bout du fleuret , dans laquelle on attache le bout d'une corde de boyau , dont fextré- mité vient rejoindre le manche auquel elle eft arrêtée, comme on peut le voit dans cette figure. Il y a des Archets qui font de différentes grandeurs; celui qui eft repréfenté ici eft des plus grands, La Palette, repréfentée Fig. 13 , n'eft autre chofe qu'un morceau de bois d'environ un pied de long , (y compris le manche, ) fur lequel eft attaché un morceau d'acier où font percés plufieurs trous , dans iefquels on fait entrer l'ex^ trémité B du Foret, Fig. <? , lorfqu'on veut en faire ufige. Le deflbus de la Palette doit être un peu creux fur la longueur, afin de ne point bleffer celui qui perce au Foret , ce qui fe fait de la manière fuiyante. On commence par placer dans l'étau la pièce qu'on veut percer au Foret • enfuite , après avoir fait choix du Foret dont on a befoin , on prend l'Archet , dont on fait tourner la corde un tour fur la boîte du Foret, en obfervant qu'elle foit affez tendue pour qu'elle la faffe mouvoir en frottant de/Tus ; puis on prend la Palette de la main gauche , & on la pofe fur fi poitrine , afin de recevoir le bout du Foret , dont la pointe pofe contre la pièce à percer , de manière qu'il fe trouve pris entre celui qui perce & cette dernière ; enfuite de quoi on prend le manche de l'Archet de la main droite , & on le fait aller & venir de manière qu'il fait tourner le Foret , qui , par ce moyen , entre dans la pièce qu'on veut percer. Lorfqu'on perce au Foret, il faut avoir grand foin qu'il foit pofé bien per- pendiculairement de tous les fens avec la pièce qu'on veut percer ; & lorfqu'elle eft d'une certaine épaifleur , on fait très-bien de la retourner plufieurs fois dans l'étau pour redreffer le trou , fi par hafard il n'étoit pas bien perpendiculaire avec la pièce. Comme il y a des Forets d'un très-petit diamètre , & qui , par conféquent , ont befoin de moins de force pour les faire mouvoir , on y met de petites boîtes de cuivre , comme à la l'ig, 7 , ce qui devient moins lourd & moins embarraf- fànt que les boîtes de bois. Menuisier , ///. Pan. III. Se&. G ix ■540 ME N U7SÎE R, ÏÏI. Pan. SeË. 111. Chap. XlII. ■ Quand les Forets font II petits , qu'on craint qu'ils ne puiffenr pas fupA Flanche poi-tei- l'effort de FArchet , on les met dans des boîtes à Forets , dont l'extrémité ^ de la tige eft fendue comme un porte-crayon , pour pouvoir y placer le Foret , qui y eft retenu avec une boucle. Voyei la Fig. 6, qui eft delfinée grande comme l'exécution , ainfi que la Fig. 7. On perce à l'Archet non-feulement avec des Forets tels que je les ai repré- fentés ci-delTus , mais sncore avec des Fraifes , lefquelles font de différentes fortes ; les unes , comme la Fig. 5 , fervent à évafer les trous pour faire les noyures des têtes de vis ; d'autres , comme la Fig. 4, qui fervent à évuider des trous le plus régulièrement poffible , après avoir percé un trou avec le Foret à l'ordinaire, pour placer le petit goujon qui eft placé à l'extrémité de cette Fraife pour la tenir en place ; Se d'autres qui ne defcendent qu'à une certaine profondeur , comme la F;^. 3 , fans parler de beaucoup d'autres plus ingénieufes les unes que les autres, & dont la defcription n'eft pas du relTort de cet Ouvrage. Les Tourets, Fig. i & 2 , fervent auffi à percer au Foret , qu'on fait mou- voir de même avec f Archet ; toute la différence de cette manière de percer à celle dont j'ai parlé ci-deffus , confifte en ce que c'eft le Touret qui demeure en place , & qu'on tient l'ouvrage de la main gauche avec laquelle on l'appuie contre le Foret , qu'on fait toujours mouvoir avec TArchet à fordinaire. Il y a des Tourets de fer , comme la Fig. i ; d'autres de bois , comme la Fig. 2 , qui font moins coûteux, & ne laiifent pas de fervir tout auffi bien. Les Drilles ou Trépans fervent à percer des pièces dont la furface eft difpofée horifontalement , comme celle F G , Fig. 12 : ils font compofés d'une tige ou tringle de fer , dont l'extrémité inférieure eft difpofée pour recevoir des Forets ou autres inftruments de cette efpece , qu'on change comme on le juge à propos. Un peu au-deffus de la mortaife faite pour faire fortir le Foret , eft adaptée une maffe de cuivre ou de plomb 71 , Fig. 12 <& 14 , pour augmenter le poids du Trépan , & pour lui donner un mouvement de vibration affez fort pour faire tourner le Foret , & par conféquent tout le Trépan fur lui-même , malgré la réfiftance de la matière qu'on perce. Le haut de la tige du Trépan eft percé d'un trou dans lequel palTe une corde laquelle eft attachée par les deux bouts à une traverfe de bois M , au travers de laquelle paffe la tige du Trépan. La longueur de la corde doit être bornée de manière que la traverfe defcende le plus près de la maffe 7 L , qu'il eft poffible; Quand on veut faire ufage du Trépan , on pofe la pointe du Foret à fendroit qu'on veut percer , & on la retient en place avec les doigts de la main gauche , en lui laifTant cependant la liberté de tourner quand il eft néceffaire ; puis on fait tourner la traverfe M N fur elle-même , de manière que la corde s'entortille autour de la tige du Trépan , ce qui la raccourcit , & fait par conféquent remonter la traverfe en contre-haut, comme de MïOôidcNa P; ce qui étant fak,onprend Sect. m. Defcrîpdon des Outils de Senurerie , SCc. ut la traverfe avec la main droite , & on appuie defll,, nnnr 1. f ■ defcendre, en obfe.anc de foulager la f^ain lo 2^ eft .^^^P'^-^ =^ drP nfin I r, -H W'iqucUe elt entrain de defcen- Planche d e afin que e Dnlle ne trouvant po.nt doppofidon dans le mouvement qui ^ lur eft >mp„n,e par le développement de ia corde, puilTe tourner encore Z v:te & avec allez de force pour entortiller la corde de l'autre fens , & par co . fequent fa,re remonter la traverfe ; après quoi on recommence la même opér non jufqu a ce que le trou foit percé. ^ Quand on veut changer les Forets du Trépan, on fait paiTer une lame de fer , F^g.p , dans la morta.fe , & on fait une pefée qui les fait fordr . ce qui eft for facde, purfque la mortaife qui reçoit le Foret eft dune form coniqu Je n'entrerai pas ici dans le détail de la conftruaion de cet inftrument, ainfi quà des autres outds dont je parle ici, qui fe trouveront a.npiement décrit aillem ce qu. de pu. eft étranger à mon fu;et. Les MenuiLrs-Ebéniftes ache ~...o...ts,.nes'^^^ Les Outils de Serrurerie dont il me refle à faire la defcription , font ceux qui fervent le plus parfculiérement à la ferrure de louvrage , comme les VilebL luins & les Mèches de toutes fortes , les Qfeaux à ferrer , &c Le Vilebrequin , Fi^. I , eft ordinairement tout de fer , excepté la poignée " ^, qui eft de bo>s,.& Une noix B , dans laquelle la branche du Vilebre ^"-"^ qum tourne , ce qui eft très-commode, parce qu'en empoignant cette noix elle refte fixe dans la main , & ne la fatigue pas tant que le frottement des Vilebre quins de bois, qu il feut en même temps tenir ferme & lailTer tourner dans la înain Ces Vilebrequins font très-commodes, & n'ont d'autre inconvénient que de gêner pour les IMeches, qu'il faut faire exprès pour qu'elles puiffent aller dans a boite C, & y être arrêtées avec une vis D ■ ces Mèches fervent pour percer le bois ; favoir , celle qui eft dans le Vilebrequin , qui eft une Mèche de Menui^ fier ordinaire ; celles Flg. 8 >5 , qui ne font propres que pour les bois tendres ■ & cellesFz^.-. lo & ir, qui fervent aux bois durs, ainfi que la première , & qu on appelle ordinairement Mèches de Fémurs. Les Mèches différent entr'elles pour la forme, comme on peut le voir aux figures ci-delfus , mais encore pour la groffeur; car on en fait depuis une ligné jufquà fix de diamètre, dont «n fait ufage félon les différents befoins, en obfervant toujours de faire tourner le Vilebrequin de gauche à droite en pouf- fant la main en dehors, les Mèches étant difpofées de manière qu'elles ne pren, droient pas fi on le tournoit de l'autre fens. Les Figures 12 & 13 , repréfentent une Mèche à i'Angloife, laquelle a la propriété de ne jamais faire d'éclats, & de ne point s'écarter de l'endroit où on MENUISIER, III. Part. SeB. lÏÏ. Chap. XIIÎ. ■ ' - l'a placée, dans lequel elle eft retenue par la pointe a , Fig. 12 (& 13 , tandis Planche q^g l'autre pointe b , qui eft moins longue que la première , trace ou , pour ^ mieux dire , découpe le cercle que la Mèche doit occuper; enfuite de quoi l'autre côté de la Mèche qui eft recourbé en c , Fig, 13 , coupe & enlevé le bois de la pièce qu'on perce. On peut enc-ore mettre d'autres outils que des Mèches dans les Vilebrequins, comme, par exemple , des Fraifes, ainfi qu'à la Fig. 14, (ou d'autres de difFé' rentes formes dont j'ai parlé ci-defflis ,page()i/\ , en donnant la defcription d'une Machine propre à faire des cannelures ) , des EquarrifToirs & des Tournevis. Les EquarrifToirs Fig. 1 j , font des morceaux d'acier trempé , à fix ou huit pans, affûtés bien à vif, lefquels fervent à grandir & à évafer les trous déjà percés. Le Tourne-vis , Fig. 16, eff fort commode pour ferrer facilement les vis de telle groffeur qu'elles puiffent être, le Vilebrequin donnant beaucoup plus de puiffance que les Tourne-vis ordinaires. Les Figures 2 & 3 repréfentent un Cifeau à ferrer , lequel eft tout de fer, ou, pour mieux dire , n'a pas de manche. Ce Cifeau eft plus à l'ufage des Serruriers- Ferreurs que des Menuifiers, lefquels préfèrent de fe fervir de leurs Cifeaux ordinaires ; en quoi ils font mil , celui dont je parle ici étant très-commode pour faire des entailles propres à placer les ferrures & autres ouvrages de cette elpece. Les Figures 4 & J , repréfentent un outil nommé Ernpenoir , dont l'u/âge eft particulier aux Ebéniftes , lefquels s'en fervent pour ferrer leurs ouvrages ; c eft une efpece de Cifeau , ou , pour mieux dire , de Fermoir reployé par les deux bouts , de manière qu'en frappant defTus avec le marteau , il coupe parallè- lement à fa tige en £ , & perpendiculairement à cette même tige en F. Cet outil eft très-commode pour faire des entailles dans les deftbus & autres en- droits où on ne peut pas fe fervir des Cifeaux ordinaires; c'eft pourquoi on fait très-bien d'en avoir de plufieurs grofl'eurs : celui qui eft repréfenté ici eft deffmé à moitié de grandeur d'exécution , ainfi que le Cifeau à ferrer , & le Bec-d'âne crochu , Fig. 6 & j , lequel diffère des Becs-d'ânes ordinaires en ce qu'il n'a pas de manche , & qu'il eft: très-mince , fon ufige étant d'évuider de petites mortaifes ; c'eft pourquoi chaque Bec-d'âne a un bout plus mince & moins faillant que l'autre , du moins pour l'ordinaire, La Figure 17 repréfenté un outil nommé Ç haffe -pointe , qui fert à fonder les trous des ailerons des fiches avec la pointe G , & à en repouffer les pointes avec le retour H , qui fert également à cet ufage , comme à retirer le Chafîê- pointe lorfqu'il eft trop engagé dans un trou. Voilà , en général , le détail des Outils tant de Tour que de Serrurerie , donc l'ufage eft néceffaire aux Menuiflers-Ebénifles , lefquels j'ai traité le plus fuccinc- tement poffible, ne m'étant attaché qu'à ceux qui étoient les plus néceflàires, defquels même je n'ai fait que donner une idée tant de leurs formes que de leurs ufages , Sscr. m. §. /. Manière déferrer l'Ebénifterie. ^43 ufages, fans entrer dans un détail particulier de leurs conftrucftions, ni des augmen- — cations ou changements qu'on a faits & qu'on pourroi: faire à chacun d'eux , lef- Pi-anche quels doivent être décrits dans les Arts oh ils appartiennent en propre, & sûre- ment beaucoup mieux que je ne puis & ne me fuis propofé de le faire ici • la defcription que j'en ai faite , quoique très-abrégée , paroîtra encore trop éten- due & même inutile à ceux qui ne connoi/Tent les Arts que par leur nom , & qui les lifent plutôt pour s'amuferque pour s'inftruire ; c'eft pourquoi on pourra avoir recours aux différents Arts qui tiennent au mien, dans lefquels on trouvera le détail d'une infinité d'Outils & d'Inftruments de toutes les efpeces , dont on pourra fe fervir avec beaucoup d'avantage. §• I. Manière de ferrer l'ÉbéniJlerie. Les ferrures qu'on adapte à la Menuiferie, font de deux efpeces; favoir/ celles qui fervent à la folidifier & à en joindre les parties les unes avec les autres , comme les équerres & autres ferrures plates , & les fiches de toutes les efpeces ; & celles qui fervent à tenir les portes & les tiroirs fermés , ce qui comprend les ferrures de toutes les façons. La conftruâion de ces deux efpeces de ferrures , eft abfolument du relfort du Serrurier ; elles fe trouvent pour l'ordiV naire toutes faites chez les Marchands. Cependant dans les ouvrages d'Ebénif-, terie de quelque conféquence , il eft quelquefois néceffiire de les faire exprès / du moins en partie; c'eft pourquoi il faut que les Menuifiers-Ebéniftes connoif- fent bien cette partie de la Serrurerie , non pas pour la faire , mais pour la bien conduire , & donner au Serrurier toutes les mefures & les renfeignements néceffaires pour que la ferrure rempliife bien l'objet qu'on s'en étoit propofé : il y a mêiue certaines ferrures qui exigent , pour être parfaitement bien faites, que les Menuifiers en ajuftent une partie des pièces que les Serruriers ne pourroient pas faire, à moins qu'ils ne fuifcnt Menuifiers eux-mêmes, ( ce qui eft toujours la même chofe) tant la partie de la Serrurerie dont je parle, eft intimement liée à la conftrudion de la Menuiferie , dont elle eft quelquefois en partie ou totalement recouverte. Ce que je dis eft fi vrai , que malgré les Règle- ments des Serruriers , qui défendent aux Menuifiers de ferrer leurs ouvrages eux-mêmes, les Menuifiers-Ebéniftes font en poflelfion de le faire , non par un accord fait entr'eux & les Serruriers , mais parce que c'eft la raifon qui l'exige , & qu'elle eft toujours écoutée lorfqu'elle eft favorable aux intérêts de ceux qui auroient droit de la méconnoître (*). (*) Ce ferait une chofe également curieufe & utile , qui le détail de l'efpece de Serrurerie dont je parle ici. Combien de ferrures ingé- nieufes font ignorées des Ouvriers mêmes , aux- quels ce détail deviendroit d'un très-grand fe- cours ! Tel , par exemple , emploie tout ce qu'il a de génie pour compofer une forte d'ouvrage qu'un autre a fait avant lui , & peut-être mieux, ce qu'il ignore abfolument 5 au lieu que ' ' le favoit, le temps & l'indulitie qu'il a mis à compofer une pièce qti'il a cru neuve , il les emploieroit à la perfcaionner , Se les Arts avan- ceroient par conféquentplus vîie vers le point da perfeaion dont ils peuvent être fufceptibles ; ce qui ne pourra être qu'autant qu'on multipliera les connoiffapces , en les mettant à la portée de tout le monde , Se fur-tout des Ouvriers. Menuisier , 111. Pan, 111. Secî. H u MENU I S 1ER, m. Part. Sea. 111. Chap. XIIl. Les ferrures plates , celles que les plates-bandes , les équerres, &c , s'in- Planche cruttent ordinairement dans le bois , tant pour qu'elles y tiennent plus folide- ment , que pour plus de propreté ; & on les y arrête avec des vis à tête fraifée, comme aux Fig. 19 , 2° » =2 & 23. Ces incruftations fe font à l'ordinaire avec le Couteau de taille , les Cifeaux , lesTrufquins & les Scies à découper, & même les Guimbardes, félon que l'exigent les différentes pièces à incrufter , lefquelles doivent être les plus égales d'épaiHeur & de largeur qu'il eft poffible , & fur-tout bien drelTées à la lime fur le cliamp , & un peu dégrailTées ou en chanfrein ou en delTous , ( ce qui eft la même chofe ) afin qu'elles joignent mieux avec le bois qu'elles ferrent lorfqu'on les fait entrer dedans , & qu'elles n'en arrachent point les vives-arêtes lorfqu'on veut les ôter de place , ce qui arrive quelquefois, foie en les ajuftant, ou lorf- qu'elles font tou.t-à-fait placées , & qu'on eft obligé de les retirer pour quelque raifon que ce foit. l^oyeila Fig. 19 , qui repréfente la coupe de l'équerre, Flg. 22 , laquelle eft difpofée comme je viens de l'expliquer ci delfus. Les têtes des vis qui attachent ces fortes de ferrures , doivent être fraifées , c'eft-à-dire , qu'il faut qu'elles affleurent le delTus de la pièce , & qu'elles foient difpofées en goutte de fuif, comme celle /, Fig. 19 , afin qu'eUes retiennent l'équerre en place. On vend ces vis toutes faites , & on les ajufte dans les troi des équerres , en grandifTant ces derniers avec la Fraife , Flg. 14 ; & pour qu les têtes des vis joignent mieux en place , on les frappe dans un tas ou eftamp d'acier , Fi<r. 21, dont la cavité M, eft d'une même pence que celle de la fraiil-, pour que la tête de la vis porte dans toute fon épaiffeur , ainfi que la Fig. 19 , de manière qu'elle joigne toujours quand même on en ôteroit fur l'épaiffeur, ce qui peut arriver quelquefois. Au lieu de frapper ainfi la tête des vis , je crois qu'il vaudroit mieux faire une fraife creufe comme celle N, Fig. 21 , dans laquelle on feroit tourner la tête de la vis par le moyen du Tourne-vis, Fig. i5, monté dans le fût du Vilebrequin, comme je l'ai repréfenté Fig^ 18 , de manière que l'on pourroit y ajufter des têtes de vis de différentes groJleurs , ce qui ne peut être de la première manière dont j'ai parlé ci-deiTus, où il faudroin autant d'eftampes qu'on auroit de différentes groffeurs de vis. En ajuftant les têtes des vis , il faut avoir grand foin qu'elles défaffleurent un peu le deffus de la pièce qu'elles arrêtent , afin qu'on puilfe les affleurer après qu'elles font en place , en donnant un coup de lime deffus , ce qui eft beau- coup plus aifé à faire que de diminuer de l'épaiffeur de la pièce qu'on arrête , ce qui ne doit môme pas être, parce qu'on ne fauroit le faire fans les dépolir, ( fuppofé qu'elles le foient) & fans les creufer , ainfi que le bois avec lequel elles affleurent. Ce que je recommande par rapport aux têtes des vis , doit , à plus forte raifon , s'obferver pour les équerres ou autres pièces qu'on incrufte , lefquelles doivent bien portei au fond de leurs entailles, & défaffleurer un peu le deffus du bois.. ■ous .10 ^ Sect. m. ^. I. Manière de ferrer l'Ebénifterie. 94 j ahn quonfmc toujours h même de donner un coup de lime deiTus pour les ^ affleurer & les polir enfuite, ce qu'on ne doit jamais faire qu'après avoir pofé P^-^^^'" toutes les vis , fans cependant les ferrer tout-à-fait , de crainte qu'elles ne tien- ' ndnt pas affez folidement dans le bois lorfqu'on vient à les mettre à demeure Les vis à tête fraifés font très-propres ; & lorfquelles font bien ajuftées, eUcs femblent être du même morceau de la pièce qu'elles arrêtent , à l'exception de entaille faite pour placer le Tourne-vis, à quoi on pourroit remédier en faifant les têtes des vis plus épailTes qu'elles ne doivent être, de l'épai/Teur de cette entaille, comme à la Fig. 20 ; de forte qu'après avoir ferré la vis , on puiffe oter cette épaiffeur avec la lime, & par conféquent affleurer la tête de la vis avec la pièce qu'elle arrête. Foye^ La Fig. .3 , où eft repréfentée une vis O ave^ «ne tete en faillie , & une autre vis P, laquelle affleure l'ouvrape , & où il n'y a d apparent que le joint , qui n'efi pas fenfible dans l'exécution. Cette manière de faire les têtes des vis, eft très-propre ; mais elle a le défaut dette peu commode ; car une fois leur tête affleurée, on ne peut plus les ôter lans rompre le bois , ce qui ne laiiTe pas d'être fort incommode. Quand le der- rière de l'ouvrage n'efi pas apparent, & qu'on peut y mettre des vis à écrou , il n y a pas de difliculté pour noyer les têtes de ces dernières , de manière qu'elles ne foient en aucune façon apparentes, foit que la place où elles font pofées loit une partie lilTe, ou qu'elle foit fufceptible de quelque forme contournée . comme il arrive quelquefois dans des parties de rapport fervant à orner l'ouvrage. En général, il faut bien prendre garde, lorfqu'on incrufie foit du fer ou dj cuivre dans des parties dafFemblage , que les pièces de bois qui les compofent , foient parfaitement bien feches, afin qu'elles ne falTent aucun effet lorfqu'elles font ferrées ; car autrement le bois qui veut fe retirer & qui fe trouve arrêté par les ferrures; fe fend & fe déjoint par-tout, ce qu'il faut avoir grand foin d'éviter. Les ferrures fervant à lier enfemble les parties de Menuiferie ouvrantes, comme les portes & autres , avec les parties dormantes fur lefquelles elles font Planche ferrées, font les fiches à vafes & à nœuds, Fig. r <§ 2 ; les couplets & les char- nieres ,Fig.^&^ ; les charnières plates ou à briquets , Fig. 16; Se les pivots de toutes fortes, Fig. 14 (5 ly. Les fiches à vafes font de deux pièces fur la hauteur, dont celle ^ , qui porte le gond , fe pofe dans le bâtis, perpendiculairement à fa face • & l'autre partie de la fiche fe pofe dans le battant de la porte , parallèlement à fa face , comme on peut le voir à la Fig. y. Quand on veut pofer ces fortes de fiches, on commence par prendre avec un compas la moitié de leur diamètre , afin de tracer fur le. battant de la porte & du bâtis, le milieu de Tépaiffeur des mortaifes deftinées à recevoir les 'ailerons de la fiche ; au battant de la porte , on porte ce demi-diametre du devant de la feuillure & fur le bâtis , d'après le nud du recouvrement de la porte , comme je l'ai obfervé à la Fig. 546 MENUISlER,ni.Part.Sea.niChap.XnL Quand les mortaifes font tracées , on commence d'abord par percer celles Planche qui fe font dans le battant de la porte , dans lequel on pofe & arrête la partie fupérleure de la fiche à demeure ; puis on met la porte à fa place , & on trace fur le bâtis le deffous de la fiche, ce qui donne le delTus de la mortaife qu'on doit faire dans le bâtis. Cette méthode eft celle des Serruriers ; cependant quand on travaille jufte , il importe fort peu par laquelle des deux parties de la fiche 11 faille commencer. Les mortaifes dans lefquelles on place les aîlerons des fiches , s'ébauchent d'abord à l'entrée avec le cifeau ; puis on y fait plufieurs trous de mèche per- pendiculairement, fort près les uns des autres, puis d'autres en pente qui traver- fent les premiers. Ce qui étant fait, on donne plufieurs coups de cifeaux pour couper le bois qui refte entre les trous de mèche , & on achevé de les évuider avec le Bec-d ane crochu , fur la tige duquel on frappe pouj le faire entrer de force dans la mortaife. Cette manière de faire les mortaifes pour recevoir les différentes parties de ferrures , eft la plus uficée , & celle dont fe fervent les Serruriers ; cependant elle eft fujette à beaucoup d'inconvénients , parce qu'il n'eft guère poffible de percer tous les trous de mèche dans le même plan & d'une égale profondeur , & qu'il eft fort à craindre qu'en évuidant les mortaifes, on ne faffe éclatter les joues en refoulant le bois fur lui-même; c'eft pourquoi je crois qu'il vaut mieux faire ces mortaifes avec un Bec-d'âne très - mince , à la manière des Menuifiers » & de les recaler enfuite au Cifeau , fi cela eft néceffaire , ce qui eft beaucoup mieux que de l'autre façon , dont on ne doit fldre ufage que quand l'ouvraga fera de nature à ne pouvoir pas porter fur quelque chofe qui foutienne le coup du Bec-d'âne , & ne le faire même qu'avec beaucoup de précaution. De quelque manière qu'on fafl"e ces mortaifes , il faut toujours avoir foin qu eUes foient très-juftes , fur-tout fur la longueur , où il eft bon que l'aîleron de la fiche force un peu , afin qu'elle tienne plus folidement dans la mortaife ; c'eft pourquoi il faut que l'aileron foit un peu diminué du devant, afin qu'il ferre davantage en l'enfonçant tout-à-fait , ce qu'on ne doit faire qu'autant que l'on eft bien sûr qu'il ne la faudra pas retirer. Les ailerons des fiches font ordinairement percés de deux trous , ainfi que celui B, F/g. I , dans lefquels paffent les pointes qui fervent à les arrêter dans le bois ; & avant de mettre les ailerons dans les mortaifes , on les place fur la partie de la porte ou du bâtis qu'ils doivent occuper , & on marque ces trous avec une pointe : on y perce enfuite un trou de mèche de la groffêur de la pointe , qu'on a foin de ne pas faire palier plus avant que la joue de la mortaife dans laquelle la pointe doit entrer, afin qu'elle tienne mieux dans fautre joue , où de plus on n'eft pas bien sûr de la place qu'elle doit occuper. Quand les fiches font en place , & que les deux parties fe dreffent bien enfem; ble, comme la Flg. 9 , on les pointe pour les arrêter en place , ce qui fe fait de la manière fuivante. Séct. III. /. Man'ierè de ferrer VÈbénifierié. p47 On prend le Challe-pointe & on l'enfonce dans le trou h , Fig. ç , du bas de ' l'aileron , & on fonde en frappan: tout doucement deflus avec le marteau , pour Pi-anchk connoître fi le trou de l'aileron fe rencontre bien jufte avec celui qu'on apercé dans le bois; s'il arrive qu'il rencontre bien ( comme cela doit être ) , on enfonce davantage le Chaffe-pointe , en obfervant de le faire fuir du côté oppofé au corps de la fiche, afin qu'en mettant la pointe du même fens , elle tende à la faire approcher. Quand on a ainfi fondé & fait la place de la pointe , on enfonce cette dernière avec le marteau, jufqu'à ce qu'elle affleure le deflus de l'ouvrage , moins ce qu'il eft néceflaire pour qu'on puifle dreflër le defllis de cette pointe avec une lime , pour la faire affleurer plus proprement : on pointe de même l'autre trou a ; puis on fait la même opération à la partie inférieure de la fiche , qui fe pointe fur le champ du battant, comme à la Fig. y. Cette manière d'arrêter les fiches fur l'ouvrage , eft la plus ufitée; mais elle a le défaut d'être peu propre , vu que les têtes des pointes font toujours appa- rentes , quelque foin qu'on prenne pour les bien affleurer ; de plus , ces pointes ainfi enfoncées , ne laiflent plus de moyens pour pouvoir retirer les fiches , fup- pofé que cela fût néceflàirc , comme il arrive quelquefois , à moins que de faire des trous à la furface de l'ouvrage , pour avoir de la prife pour faifir la tête des pointes , foit avec des Tenailles ou avec un Pied-de-biche de fer ; ce qui eft fort défagréable , & ne peut même pas être dans un ouvrage propre. On peut obvier à cet inconvénient , en arrêtant les fiches avec des pointes à têtes faiUantes , comme celle c , fig. J , ce qui donne , à la vérité , la liberté de les retirer lorfqu'on le juge à propos , mais ce qui augmente le mauvais elTec des pointes apparentes ; c'eft pourquoi je crois qu'il vaut mieux , pour éviter: toute difficulté , ne point percer les ailerons des fiches qu'ils ne foient pofés en place , ce qu'on peut aifément faire avec un Foret , & les arrêter enfuite avec des vis , foit à tête ronde , comme celle d, même Figure, ou à tête fraifée noyée dans l'ouvrage , & qu'on poferoit par derrière au lieu de les mettre en parement , comme on fait aux pointes. L'expédient que je propofe ici pour arrêter les fiches , eft très-commode , peu difficultueux j & même guère plus cher que la manière ordinaire ; l'ouvrage en eft beaucoup plus propre , & peut fe démonter comme & quand on le juge à propos. Je fai bien que ce n'eft pas la coutume de le faire ainfi ; mais il ne faut jamais s'attacher aux anciennes coutumes quand on trouve des moyens de faire mieux. Quand il y a plufieurs fiches à vafes au-deflus les unes des autres, il faut avoir grand foin qu'elles portent toutes également : c'eft une erreur de croire qu'il faut laifl"er du jeu à celles du haut , comme le penfent quelques Ferreurs , parce qu'en mettant tout le poids fur une feule fiche , on la fatigue davantage ; & pour peu qu'elle foit lâche dans là mortaife , on la fait forcir dehors , ce qui n'arrive pas lorfqu'elles portent toutes également. Menuisier, III. Pan. III. Secî, In 948 MENUISIER, III. Pan. SeQ. III. Chap. Xlîl. '-' ' — r Les fiches à nœuds ou à broches, Fig. 2 , (5 <§ lo , fe ferrent de la même Planche manière que celles dont je viens de parier , du moins quant aux précautions qu'il ^ * ' ■ faut prendre tant pour faire les mortaifes , que pour les pointer ; il n'y a que la dif- pofition de leurs mortaifes qui n'efl pas la même, parce que ces fortes de fiches fe ferrent toujours fur l'arêce des joints , où elles entrent du quart de leur diamètre de chaque côté , ce qui oblige de/aire leurs mortaifes en biais dans l'épailTeur du bois , inclinées à peu-près à 4^ degrés , ou d'onglet , ce qui eft la même chofe ; de forte que le milieu de ces mortaifes vient rencontrer l'angle du bois ,' qu'on creufe ordinairement en forme d'un quart de cercle , pour contenir le nœud de la fiche , dont le centre doit être au milieu du joint & au nud de l'ou- vrage , qu'elle défafBeure de la moitié de fon diamètre , comme on peut le voir à la Fig. 6, Ces fortes de fiches fe féparent en deux parties entaillées l'une dans l'autre , & on les réunit par le moyen d'une broche de fer qu'on ôte quand on le juge à propos ; quelquefois cette broche n'excède pas la longueur de la fiche , où elle eft rivée à demeure , de forte que les deux parties de la fiche ne peuvent être féparées. Ces fortes de fiches fe nomment fiches de brifures ; & lorfqu'on en fait ufage , on ne pouflè pas de quart de cercle ( ou congé , ce qui eft la même chofe) fur l'arête du joint; mais on y fait Amplement une entaille, pour qu'elle entre dans chaque arête du quart de fon diamètre , comme à la Fig. 6. Que les fiches fe féparent ou non , il faut toujours que la partie de la fiche où il y a plus de nœuds , ainfi que celle C , Fig. 1 , foit ferrée dans la partie dor- mante , afin d'oppofer plus de réfiftance au poids de la partie ouvrante , dans laquelle on place l'autre partie de fiche D , qu'on pointe ordinairement la der- nière , ainfi qu'aux fi ches à vafes. Les Figures j Se ïi, repréfentent une autre efpece de ferrure nommée Cou- plets , laquelle diffère des fiches à nœuds, en ce qu'elle n'entre pas à mortaife dans le bois , mais au contraire elle s'applique delTus , & y eft attachée avec des vis , ou , ce qui eft mieux , elle eft entaillée comme à la Fig. 1 1 , de manière qu'elle affleure avec le nud de l'ouvrage. Ces couplets _ différent encore des fiches à nœuds, en ce que le nœud des premières eft tout en faillie en delTus , comme on peut le voir à la Fig. 7 , qui repréfente le couplet tout ouvert de E en F, & reployé fur lui-même de F en G , où on peur remarquer un petit efpace entre fes deux branches , lequel efl: donné par ce dont le diamètre du nœud du couplet furpaffe l'épaiffeur de ces deux branches , qui , pour joindre l'une contre l'autre , devroient être d'une épaiflèur égale au demi-diametre du nœud, comme il arrive quelquefois aux charnières ainfi que je le dirai ci-après. Quand on emploie des couplets à de l'ouvrage couvert de bois de placage , comme à la Fig. 3 , il faut toujours que le centre du nœud de ces couplets foie Sect. III. §. I. Manière de ferrer l'Ebéniflerie. $45? au mà du deffijs de l'ouvrage , & même l'excède un peu , afin que quand on le fait mouvoir , les deux parties plaquent facilement l'une fur l'autre , ce qui Pi ^nche oblige quelquefois ou à groffir le nœud , ou à le reployer en retour d'équerre , ce qui ^^ut encore mieux que de groffir le nœud, qui ns fauroit jamais êtrô trop petit. On pourroit encore , pour plus de folidité » dans le cas où on ne pourroit ou on ne voudroit pas mettre de fiches à nœuds , reployer les couplets en retour d'équerre, comme csuxg,h, FIg. 3 , qu'on fcrreroit & pointeroic à l'ordi- naire. Les charnières , Fig. 4 , 8 e?" 12 , ne différent des couplets , qu'en ce qu'on les pofe fur le champ , & non fur le plat de l'ouvrage ; & que lorfqu'elles fonC fermées, leurs deux ailerons fe touchent prefque , ce qui eft nécelïiire pour que les deux parties qu'elles uniffent étant ouvertes , leurs ailerons affleurent le nud du bois , à moins qu'ils ne foient recouverts de bois de placage , ou bien d'une petite feuille du même bols , comme je l'ai indiqué dans la Fiir. 8. Toutes les ferrures dont je viens de parler font excédentes au nud de l'ou- vrage, ce qui, dans certaines occafions, devient nuifible ; c'efl pourquoi on fe fert quelquefois d'une autre efpece de ferrure nommée Couplée ou Charnière à briquet, repréfentée Fig. 13 & 16. Les briquets ont deux centres de mouvement , l'un en : , & l'autre en /, Fia-, 13 , ce qui facilite leur ouverture , & forme deux nœuds en delTous , le deiîLs étant uni comme je l'ai déjà dit. Les deux parties qui compofent les couplets ou charnières à briquets, s'incruf- tent dans l'ouvrage fur lequel elles font attachées avec des vis , comme celle cotée H, Fig. 13 <S> id, ou bien font reployées en retour d'équerre pour être fer- rées à la manière des fiches à vafes , comme celle cotée /, même Fiawe De quelque manière qu'elles foient difpofées , il faut toujours que les briquets L L , qui les lient enfemble , foient les plus courts qu'il ^eft poffible , afin qu'ils foient moins apparents. Cependant il eft bon d'obferver que quand les briquets font fort courts , & que par conféquent les centres de mouvement font fort proches l'un de l'autre , on eft obligé de dégraifler un peu les arêtes des joints félon que l'indiquent les arcs m, n, Fig. 13, afin qu'ils puiffent ouvrir , ce qui ne pourroit être autrement, puifque les centres de mouvement z, /, font en deflous du nud de l'ouvrage. On remédie en partie à cet inconvénient, en plaçant les centres de mouve_ ment le plus haut poffible, ainfi que je l'ai fait ici; mais quelque chofe qu'on faffe , il n'eft pas poffible d'éviter d'abattre un peu l'arête des joints , qui s'écor- cheroient d'eux-mêmes fi on ne le faifoit pas , & arràcheroient les ferrures , ce qu'il faut éviter ; cependant comme le joint ainfi dégraifle fait toujours mal , on pourroit, dans le cas feulement où il n'y auroit qu'une partie de mobile. I p^o MENUISIE R, m. Pan. SeB. III. Ckap. XlII. comme celle cotée M, Fig. 13 , on pourroit, dis- je, faire le joint de cette PiANCHE partie mobile en faillie jufqii'en o , & cela félon que l'exigeroit l'arc donné par le centre de mouvement oppofé, Se même un peu plus, pour que le joint fe dévêtifle plus facilement. Cet expédient eft le feul dont on puilTe fe fervir pour que les joints des parties ferrées avec des briquets , forent très-fins , & on pour- roit s'en fervir très-avantageuferaent dans le cas où les deux parties des char- nières H Scl, Fig. 16, feroient recouvertes de placage, & qu'il n'y auroic d'apparent que les briquets L,L, qu'on pourroit même, à toute rigueur, cou- vrir de bois de placage , quoique cela foit peu folide. Les Figures I4,l7,iy&i8, repréfentent , tant en plan qu'en élévation ; des ferrures nommées Pivots perdus ou à tête de compas. Ces fortes de ferrures font faites pour lier enfemble des parties faifant avant ou arriere-corps les unes f.u- les autres , & auxquelles on ne veut pas que la ferrure foit apparente , du moins autant qu'il eft pofilble. Quand la partie ouvrante A'', Fig. 14, eft dans un angle rentrant, il faut que la branche du pivot foit coudée en retour d'équerre jufqu'à l'angle du corps {aillant , au point y? , & on y fait la rivure ou centre de rnouvement q , le plus près de la rive de l'avant-corps qu'il eft poffible , afin que qiiand la porte eft ouverte, comme dans cette figure, cote O , l'ouverture que la branche du pivot occupe fur la face de l'ouvrage , de ^ à r, foit moins confidérable , ce qui fait re/îbrtir un peu la branche du pivoc quand la porte efi ouverte, mais cela ne fait rien à la chofe , puifqu'elle eft faite pour être vue étant fermée. La crapaudine , ou , pour mieux dire , la gâche du pivot , eft attachée fur le champ du battant du bâtis P, dans le fond de la feuillure de s à t , d'où elle fe recourbe en retour d'équerre pour former un enfourchement, lequel vient juP qu'à l'angle de l'avant-corps p , auquel elle affleure des deux fens. Voye:^ la Fig. 17 , où la crapaudine ou gâche du pivot eft apparente , & ce dernier recourbé pour entrer dedans. Il faut faire attention que la branche du pivot attachée fur la porte TV, Fig. 14, ne peut être apparente fur la face , vu qu'elle eft incruftée dedans depuis le devant de la feuillure , & que fi je l'ai faite apparente dans la figure 17, ce n'a été que pour mieux faire connoître fa conftrudtion ; car non - feulement cette branche de pivot eft recouverte de bois fur le champ ; mais elle pourroit l'être auffi fur le plat , en la recouvrant de bois après qu'elle auroit été arrêtée , ce qui dilpenlèroit d'y faire un retour d'équerre. On pourroit faire la même chofe à la crapaudine , tant fur la face de là branche que fur la face , qui doic affleurer l'angle de l'avant-corps , qu'on pourroit diminuer de l'épaiflêur du bois de placage, ou de ce qu'on voudroit laifl^r fi l'ouvrage étoit fait en plein bois, de manière que de tout le pivot & de là crapaudine , il n'y auroit d'apparents que le côté & le bout de la partie faillante du premier , c'eft-à-dire , depuis l'angle Sect. m. I. Manière de ferrer VEbéniflenc. 95 r I angle rentrant jufqu'au point ^i,, & de ce point jufquà celui r , ce qui eft fort peu de cLofe (*). Quand ce font les parties ouvrantes qui font avant-corps, comme celle Ç , Fig. , laquelle eft repréfentée ouverte en E, leurs pivots fe font à peu-près de la même manière que les précédents, à l'exception que c'eft la crapaudine arrêtée fur la partie dormante S , qui eft en faillie , & non le pivot , & que c'eft la branche du pivot adhérente à la partie ouvrante, qui porte l'enfourchement, afin que quand on ouvre cette dernière , il n'y ait qu'un jour dans les ferrures , ou du moins qu'une partie de fer apparente. Voye^ la Flg. 18 , qui repréfente 1 élévation du plan , iv,.. i; , & où la branche du pivot eft apparente , quoi- qu elle foit conftruite de manière à être incruftée dans l'épaifleur de la porte , ainfi qu'aux figures 14 é^* 17. Les efpeces de pivots dont je viens de faire la defcription, peuvent non- feulement s'appliquer aux extrémités des parties ouvrantes, mais encore dans leur longueur , afin de les empêcher de voiler , ce qui n'apporte aucun change- ment a leur conftrudion , excepté que leurs branches, au lieu d'être horizon- tales, font difpofées perpendiculairement pour être attachées fur le champ des battants, ce qui oblige à les reployer au milieu de leur longueur, pour avoir une partie fiillante , comme dans le cas de la figure 14, ou bien pour former un enfourchement ou gâche , comme à la figure r Voilà, à peu de chofe près, le détail de toutes les ferrures fervant à lier eri- femble les parties ouvrantes de la Menuiferie dont il eft ici queftion , & que les Menuifiers font en pofTeflion de pofer eux-mêmes. Ce n'eft pas qu'on n'en puiff-e faire d'autres que celles que j'ai préfentées ici ; mais telles qu'on les ima- gine , elles tiennent toujours de ces dernières , foit en tout ou en partie ; de plus , ces ferrures extraordinaires ne fe font ordinairement qu'en raifon des difficultés qui fe préfentent dans la conftrudlion des différents ouvrages , qui , par leurs formes ou leurs ufages , demandent des ferrures d'une forme différente de l'or- dinaire, ce qui ne peut être prévu ici , où je ne dois donner que des règles générales appliquables à des cas particuliers. En général, les ferrures dont je viens de parler, font faites de fer ou de cuivre , & par des Ouvriers qui ne s'occupent que de cette partie ; cependant dans le cas de ferrures extraordinaires, ou deftinées à des ouvrages de confé- quence , il feroit bon que ce fût les Menuifiers qui les conftruififl"ent , ou du moins qui en fiffent des modèles en bois , & qu'ils préfidafl^ent à la conftrudion de ces fortes de ferrures, qui doivent être faites pour la Menuiferie, & non (*) Lorfque je donne des moyens de cacher les ferrures , ce n'eft pas que je prétende qu'il y ait beaucoup de mérite à cacher celles qui doi- vent être apparentes ; au contraire, je fouhaite- rois que toutes les fetrures des parties qui doivent ouvrir, fuITent apparentes, & entraflent même pour quelque chofe dans leur décoration, & qu on ne cachât que celles qui font placées à des parties qui , quoiqu'ouvrantes , ne femblenr pas faites pour 1 être, comme celles dont il eft ici queftion, qui font des avants & arrieres-corps de Menuiferie quelconque, dont la décoration n annonce pas une porte ou toute autre panis ouvrante. ^ Planche jai. Menuisier , III. Pan. III. Sc3. K ; P5 3 ME NU IS lE R,III. Part. Sea. 111. Chap. XI IL =5=: pas cette dernière pour les ferrures , comme il n'arrive que trop Ibuvent. Planche Les Ebéniftes doivent aulTi avoir grand foin , avant de conftruire leurs ouvrages, de fe rendre compte de l'efpece.de ferrure qui y fera employée, afin de déterminer au jufte les parties de leurs ouvrages où les ferrures feront appliquées , & cela en raifon de la forme que ces dernières doivent avoir , ce qui exige d'eux beaucoup de connoiflànce en cette partie de la Serrurerie , laquelle eft intimement liée à la Menuiferie dont je parle. En pofant les ferrures de l'Ebénifterie , il faut avoir grand foin de le faire avec toute la précaution & la précifion poffibles , afin de ménager également l'une & l'autre , fur-tout 'quand l'ouvrage eft fait en bois précieux , 6c que la ferrure eft polie ; c'eft pourquoi il faut éviter de frapper fur l'une ni fur f autre avec le marteau , mais au contraire fe fervir d'une cale de bois doux , £ir laquelle on frappe pour faire entrer les ferrures à leur place , ou pour faire hauffer ou baiffer les parties qu'on ferre, qu'il faut beaucoup ménager , furtout lorfque c'eft de l'ouvrage de placage , qu'on ne ferre fouvent que lorfqu'il eft fini, quoiqu'il y ait des occafions où on le ferre avant de le plaquer, ce qui demande moins de précaution pour la propreté , fans pour cela difpenfer de toutes celles que j'ai recommandées ci-deffus , dont on ne doit jamais s'écarter , fous quelque prétexte que ce puilfe être. §. II. De la manière de polir le fer & le cuivre relativement a l' Ebenljlerie. Dans les ouvrages d'Ebéniftcrie de conféquence , la ferrure , foit en fer ou en cuivre , doit être d'une riclieffe & d'un plus beau fini qu'aux ouvrages ordinaires, ce qui oblige à la polir ; or , comme ce font les Ebéniftes qui font une partie de ces ferrures , (ou du moins qui doivent préfider à leur conftruc- tion ) & qui les pofent en place , il eft néceflàire qu'ils connoiffent les différentes manières de polir le fer & le cuivre , & cela relativement à leurs ouvrages. Le fer fe polit ordinairement à l'huile avec de fémeri & des bois à polir, foit de noyer ou tout autre bois tendre , & d'un grain fin & égal, qu'on taille & difpofée de la même manière que pour le poli au bois dont j'ai parlé , page 860. L'émeri ou émeril eft une pierre -métallique qui fe trouve dans les mines d'or, de cuivre & de fer, à la mine duquel elle eft à peu-près femblable ; mais elle eft beaucoup plus dure que ce dernier métal , ce qui la fait mettre au nombre des mines réfra6laires. Il y a de l'émeri de différentes couleurs ; il y en a de rou- geâtre, & de gris-noirâtre, qui eft le plus commun & celui qui eft le plus dur , & par conféquent le plus propre à polir le fer & l'acier. L'émeri propre au poli , eft réduit en poudre très-fine qu'on broie, ou, pour mieux dire, qu'on délaye avec de l'huile d'olive ; & pour avancer l'ouvrage , & rendre en même temps le poli plus parfait, on a de fémeri pulvérifé à trois degrés de fineffe , dont on fe fert l'un après fautre , en commençant , comme S^c^- II- §• //■ Manière de polir le fer ÔC le cuîvre, p;, de raifon par le p us gros , qui commence à ôcer cous les traies de la lime douce & en finilTant par le plus fin , qui, à fon tour, efface les traits que le premier & le fécond emeri peuvent avoir faits eux-mêmes , quoiqu'ils foient déjà très-fins Avant de polir une pièce quelconque avec l'émeri , (-ou, comme on dit communément, avec la potée d'émeri) il faut d'abord commencer par la fimr a la lime douce aulfi parfaitement qu'il eftpoffible, de manière qu'il ne paroiife à fa furface aucune inégalité, ni même aucun trait des limes dont on s'eft fervi précédemment ; ce qui étant fait , on met la pièce à polir dans l'étau, puis on prend du gros émeri délayé avec de l'huile à la confiftance d'une bouillie un peu claire , fans cependant fêtre trop; puis on prend un bois à polir qu'on tient des deux mains , comme une lime , avec lequel on étend fémeri fur l'ouvran-e , en appuyant de/Tus autant qu'il eft néce/Taire pour faire mordre l'émeri Les bois à polir doivent être menés le plus droit poflible, c'eft-à-dire de mveau , afin de ne pas frotter plus fur les bords que fur le milieu de l'ouvr4e • ceft pourquoi je crois qu'on feroit très-bien de les faire un peu bou.es en defFous ce qui feroit beaucoup plus commode que s'ils étoient parfaitement droits. Il faut auffi avoir foin de les mener en croifant d'abord en contre-fens des limes, puis en fens contraire de la première opération, afin d'effacer les traits des limes , qui doivent abfolument difparoître au premier émeri , dont on doit faire ufage jufqu'à ce qu'il n'en paroifFe plus du tout; enfuite on prend de 1 emeri plus fin , avec lequel on efFace les craies du premier , ainfi de fuite juf- qu'à ce que l'ouvrage foit parfaitement poli ; après quoi on l'e/Tuie avec un linge , & on le frotte enfuite, fi on le juge à propos , avec du tripoli pulvérifé & un morceau de buffle ou de chamois, ou même de chapeau, cette dernière opération n étant guère en ufàge. Quand on veut donner aux ouvrages de fer ou d'acier , un poli plus parfait que celui de l'émeri, après avoir fini ce dernier comme je viens de le dire ci deffus , on prend de la potée d'étain & de la potée d'acier , ( cette dernière au double de la première , ) broyées enfemble avec de l'huile , & qu'on étend avec des frottoirs de buffle ou de chamois attachés fur des bois à polir. Ce dernier poli eft très-beau; mais on en fait peu d'ufage pour les ouvrages dont il eft ici queftion. Lorfque la furface de l'ouvrage qu'on polit , n'eft pas exactement plane & à Vive-arête , & que ce même ouvrage doit être poli des deux côtés , on le mec toujours dans l'étau , du moins par un bout; & pour accélérer l'ouvrage on prend deux bois à polir, qu'on met l'un deffus & l'autre deffous , & qu'on faifit par les bouts à l'ordinaire. Cette manière de polir eft très-commode non- feulement parce qu'on va plus vîte , mais encore parce qu'on a moins befoirt d appuyer, vu que la prefTion des deux mains eft plus que fuffîfante. On fe ferc de différents bois pour polir , félon les formes & les- finuofités de 1 ouvrage , ainfi que je l'ai dit plus haut ; & dans le cas d'une pièce parfaitement <5 j4 ME NU I S I E R, m Part. SeR. ///. Chap. Xlll. ronde , comme , par exemple , une tringle , on pourroit fe fervir de deux mor- PiANCHï ceaux de bois de noyer, creufés comme des mouilles à tenir les fers à chauffer , lefquels envelopperoient la pièce dans toute fa furface , foit qu'on poliffe les pièces fur le tour ou à la main. Le cuivre fe polit de deux manières ; favoir , à l'eau & à l'huile , ou autre- ment dit au gras. Ce dernier poli eft le plus ufité , & fe fait de la manière fuivante. On commence d'abord par finir l'ouvrage à la lime à l'ordinaire , enfuite , quand ce font des pièces plates & unies , on prend une pierre de ponce bien unie en delTous , on la trempe dans de l'huile , & on en frotte la pièce à polir de tous les fens poffibles , afin d'ôter tous les traits de lime ; après quoi on prend de cette même pierre de ponce pulvér-ifée , dont on fait ufage de la même manière que de l'émeri dont j'ai parlé ci-deff"us : après la pierre de ponce , on peut fe fervir de charbon , puis de tripoli réduit en poudre impalpable , délayé avec de l'huile , & appliqué fur l'ouvrage avec la peau de bufBe ou de chamois. Quand la furface des pièces n'eft pas plate , & qu'on ne peut pas faire ufage de la ponce en maffe , on fe fert de celle qu'on a réduite en poudre & paffée au tamis de différentes groffeurs, & on l'applique fur fouvrage de la même manière que fémeri fur le fer. Quand les pièces qu'on polit peuvent fe placer fiir le tour , on prend un morceau d'étoffe de laine fur lecjuel on met de la potée de poncé , & on appuie fortement contre la pièce en faifant mouvoir la main de différents fens pendant que la pièce tourne. Ce poli eft plus en ufage que celui à feau , parce qu'il eft plus prompt & plus aifé à faire que ce dernier , & qu'il préferve , en quelque façon , les pièces du verd-de-gris , l'huile dont On fait ufage s'introduifant dans les pores du cuivre ; toute la difEculté qu'il y a , c'eft que les pièces de cuivre ainfi polies ne peuvent pas être vernies , vu que l'huile s'oppolè au mordant du vernis. On pourroit cependant parvenir à ôter toute l'huile d'une pièce , en la fini/Tant avec du tripoli employé à fec ; mais cela demanderoit trop de temps & de peine : il vaut mieux les polir tout de fuite à l'eau , ce qui fe fait de la manière fuivante. On commence par fe munir d'un petit baquet rempli d'eau à environ la moi- tié de là hauteur , au-deffus duquel eft placée une planche un peu inclinée en dedans , pour faciliter l'écoulement de l'eau qu'on jette deffus ; enfuite la pièce étant finie à la lime , on la place lut la planche , où on l'arrête par le moyen de quelques clous , ou d'un taffeau attaché fur la planche au bout oppofé au côté où fe place la per/bnne qui polit; ce qui étant fait, on prend une pierre de ponce très-unie, avec laquelle on frotte la pièce à l'ordinaire , en obfervant de la mouiller de temps en temps , ainfi que la pierre de ponce , qu'on trempe dans l'eau tout uniment. Après la pierre de ponce , on fe fert du charbon de hêtre ou de bois blanc , Sect. IV. Des différents Ouvrâges d'Ebéniflerle pleine , SCc. pyj blanc , ( celui de fufaiii eft le meilleur ) dont on a grand foin d oter 1 ecorce & ■ " les nœuds , qui pourroient rayer l'ouvrage , & on affûte ce charbon en bifeau Planche par le bout , puis on s'en fert avec de l'eau, ainfi que de la pierre de ponce , afin d'ôter les traits faits par cette dernière. Quand la pièce eft parfaitement polie au charbon , on la lave bien avec de l'eau claire , 8c on l'efluie bien par-tout j pour qu'iln'y refte point d'humidité , & on achevé de la polir à fecavec le tripoli & les bois à polir garnis de peau de buffle ou de chamois , ce qui donne un très- beau poli , après lequel on peut vernir les pièces avec un vernis connu fous le nom de vernis d'Angleterre , dont je donnerai la compofition dans la fuite. Ce vernis a non-feulement l'avantage de préferver les pièces de cuivre du verd-de- gris ; mais il leur donne encore une belle couleur luifante , approchante de celle de l'or. Je ne m'étendrai pas davantage fur le poli des métaux, vu que cette partie n'eft qu'acce/foire à celle dont je traite ici , & qu'elle eft traitée plus amplemenu dans d'autres Arts , ou du moins elle doit l'être ; c'eft pour cette raifon que j'ai traité cette matière très-fuccinélement & fans aucunes figures , quoiqu'elles foient très-néceffaires dans d'autres Arts que le mien. m Section Qu A T R I E M Si Defcription de différents ouvrages d'Ebéniflerle pleine ou d'ajjhnblage en général. Ta I déjà dit dans le cours de cette Partie de mon Ouvrage , que fous le nom SEbéniJîeric pleine, on comprenoit tous les ouvrages de cet Art faits d'affèm- blage , & dont la furface extérieure étoit de même bois que le refte de f ou- vrage. Cette efpece de Menuiferie ne diffère donc de celles dont j'ai fait la defcription précédemment , que par le choix de la matière , & la précifion avec laquelle font traités les différents ouvrages , dans le détail defquels je n'entrerai ici qu'autant que ces mêmes ouvrages appartiendront précifément à l'Ebénif- terie , & qu'ils n'auront, pas été déctits dans la Partie de mon Ouvrage qui traite des Meubles de toutes les efpeces ; & cela eft d'autant plus naturel, qu'une partie des Meubles dont j'ai fait la defcription ci-devant , comme les Tables de nuit & de toilette , les Bureaux & les Secrétaires de toutes les efpeces , Ibnc faits par les Ebéniftes , du moins pour l'ordinaire ; c'eft pourquoi on pourra avoir recours à la féconde Seflion de la troiiieme Partie de mon Ouvrage, où ces différents Meubles font très-exaélement décrits , du moins autant qu'il m'a été poffible. Les ouvrages qui me reftent à décrire préfentement , font les Métiers de différentes fortes, les Tables en guéridons & autres, les Pupitres, tant à pieds que de table , & les Boîtes ou Caffettes , connues fous le nom de Nécef- fa'ires ou Boîtes de toilette , ce qui terminera ce Chapitre , ne voulant pas Menuisier, III. Part. III. SeS. L is 956 M E NUI SI E R , lll. Pan. Sed. IIL Chap. XIIL m'étendre davantage fur le détail des ouvrages de l'Ebénifterie pleine, vu que ce ne feroit qu'une répétition de ce que j'ai dit ailleurs ; ou bien fuppofé même que quelques ouvrages n'ayent pas été décrits dans la partie du Meuble , ou dans le préfent Chapitre , comme ce ne pourroit être que des ouvrages de fantaifie , ou faits à l'inftar des premiers , j'ai cru pouvoir me difpenfer d'en parler ici , afin de ne point augmenter inutilement cette partie de mon Ouvrage. §. I. Defcripdon de différentes fortes de Métiers à broder. =-= La Figure i de cette Planche repréfente un Métier à broder mobile , tout 'CHE monté fur fon pied , lequel eft compofé de deux montants A , B,fig. i <§■ 4, & d'une entre-toife C D,fig. l. Le Métier proprement dit , eft compofé de quatre pièces principales ; favoir , les deux enfubles E F&, G H, Se deux traverfes ou jumelles 1 8cL, lefquelles reçoivent le bout des enfubles. La longueur de ces fortes de Métiers eft d'environ 4 à J pieds de dehors en dehors , fur 18 à 22 & même 24 pouces de largeur , pris de l'extrémité des tra- verfes, lefquelles ont 14 à 15 lignes d'épaiffeur , fur 2 pouces & demi à 3 pouces de largeur au milieu de leur longueur , laquelle eft chantournée , comme on peut le voir Jig. 4. Les enfubles doivent être cylindriques dans toute leur longueur , (du moins pour l'ordinaire) & avoir 2 pouces de diamètre au plus, & être garnies , par cha- que bout , d'un cylindre ou frette de fer M, fig. 2 , dont l'extrémité fupérieure N, eft taillée en forme de crémaillère, par le moyen de laquelle, & du crochet ou cliquet O ,jig. 3 , on arrête & tend l'enfuble autant qu'on le juge à propos. Au milieu de la crémaillère , & par conféquent du bout de l'enfuble , eft placé un tourillon P , qui pafte au travers de l'épaiflèur de la traverfe , & qui eft taraudé pour recevoir une vis qui l'arrête avec cette dernière. La partie du tou- rillon qui entre dans la crémaillère , doit être quarrée , pour qu'elle ne tourne pas dedans , & on l'arrête avec l'enfuble par le moyen d'une goupille qui pafle au travers de la frette M , & du tourillon. Il y a un autre trou a ,fig. 2 , percé dans la frette , & qui paffe au travers du tourillon , lequel trou fert à placer une broche de fer avec laquelle on tend & détend l'enfuble. Aux deux extrémités intérieures du Métier , font placées deux tringles de fer cdôcefyfig. 1 , vers les extrémités defquelles fontfoudées, en retour d'équerre à chacune, deux autres tringles taraudées dans une partie de leur longueur, &qui paflent au travers des traverfes , oia elles font arrêtées avec des écrous à ailerons, de manière qu'on les allonge ou les raccourcit autant qu'on le juge à propos, ou du moins autant que leur longueur peut le permettre , ce qui eft nécefîàire pour pouvoir tendre l'étoS^e, qui eft arrêtée fur là longueur, parle moyen des cro- chets , au travers de la tête defquels paffent les tringles c dScef. Il faut obferver que les tringles qui font foudées en retour d'équerre de ces Sect. IV. §. /. Des différentes fortes de Métiers à broder. 957 dernières , font un peu trop proches de leur extrémité, & qu'il eft bon de les — — - rapprocher un peu plus en dedans de chaque côté , afin que les tringles c d Se Planche ef, ploient moins fur leur longueur , lorfque l'étoffe fait effort pour entraîner ^ les crochets. Quant à ceS derniers , on les fait tels qu'on les voit repréfentés dans cette figure , ou bien on fait entrer leur tête dans un anneau double , dans une des mailles duquel paffe la tringle, ce qui ne fait rien à la chofe, puifque dans l'un ou l'autre cas les crochets peuvent aller & venir le long de cette der- nière comme on le juge à propos. Les traverfes du Métier font jointes avec l'extrémité fupérieu'w des pieds , par le moyen d'une ferrure repréfentée/.. 4,^&6, laquelle laiffc au Métier k liberté de fe mouvoir verticalement , comme on peut le voir fig. 4. Cette ferrure eft ordinairement de cuivre, & elle eft compoféo d'une princi- pale pièce QRS,fig.^, dont l'extrémité fupérieure eft reployée en retour d'é- querre , pour pouvoir être attachée en deffous de la traverfe dans laquelle on l'incrufte , & avec laquelle on l'arrête par le moyen de deux vis dont la tige & la tête font quarrées , du moins la première ; car il eft bon que la dernière foie un peu barlongue. P"ojei les fig. ^ & 6. Le milieu de la pièce QRS,fig.j,ea percé pour recevoir une vis avec laquelle on l'arrête avec l'extrémité fupérieure du pied ; & à environ iS à 20 lignes du centre de ce trou , eft pratiquée une rainure circulaire tracée de ce même centre , laquelle donne paffage à une autre vis, dont l'écrou faifant preffion fur les bords de la rainure , arrête le Métier à telle inclinaifon qu'on le juge à propos , comme le repréfente la figure 4. Voyc^ la fig. 6 , qui repréfente la coupe de la figure y , dans laquelle on peut voir la forme & la difpofition des vis tant du centre que de la rainure , ainfi que la coupe de deux platines de fer ou de cuivre ( ce qui eft égal ) , incruftée des deux côtés du pied , pour empêcher que la preffion des vis ne le falîè fendre. Les Figures 2 , 3 , j & 6, font deffinées à moitié de grandeur d'exécutibn , pour qu'on puiffe mieux juger de la forme & de la grandeur des ferrures , donc je ne fais pas une plus ample defcription , vu que leur conArudion appartient à d'autres Ouvriers , n'y ayant que leur pofe qui foit du reffort des Ebéniftes , à qui , par conféquent , ce que je viens de dire peut être fufEfant. Les pieds des Métiers dont je parle , peuvent être pleins ou évuidés , comme ' celui repréfenté7%. 4, ce qui eft indifférent. Quelle que foit leur forme , il faut toujours que leur hauteur ne furpaffe pas 2 pieds & demi du deffous des traverfes du métier, & que leur extrémité inférieure foit affemblée dans un patin d'en- viron 18 pouces de longueur, afin de donner à ce dernier une affiette fuffifante. C'eft a.u travers de ce patin que paffe la vis de l'entre-toife , qu'il eft bon d'incrufter dedans le patin de 2 lignes au moins , pour l'empêcher de tourner* Cette incruftation eft fuffifante , & affoiblic moins le patin que ne feroit un ou deux tenons, qui , d'ailleurs , deviennent inutiles brfqu il y a une vis, comms dans cette figure. ME NV ISIEP^, m Pan. Sect 111. Chap. XIH. Les enfubles font garnies dans toute leur longueur d'une fangle faite exprès* qu'on attache delTus avec des clous à tête plate ; quelquefois on y met des clous à tête dorée ou argentée , ce qui dépend de la volonté ; mais quels qu'ils foient, ii faut toujours qu'ils foient placés très-droits & fort proches les uns des autres , afin que l'étoife qu'on coud avec les fangles foit également tendue dans toute la longueur des enfubles , les autres côtés étant retenus pat les crochets des deux bouts du Métier , auxquels on fubftitue quelquefois des rouleaux ou enfubles de côté , femblables à celui AB,fig.^, lequel eft terminé à fes extrémités par une ferrure femblable à celle des grandes enfubles : ce rouleau ou enfuble de côté eft arrêté avec la traverfe du Métier , par le moyen de deux platines de fer ou de cuivre , repréfentées fig. 6 & 7 , lefquelles reçoivent le tourillon du rouleau , & viennent s'alTembler à tenon quarré dans la traverfe du Métier , par derrière laquelle on les arrête avec un écrou , comme on peut le voir à hfg. 7. Sur cette platine eft attaché un cliquet cintré , qui fuit le contour de la platine , & par conféquent de la crémaillère , qu'il arrête avec le redent a , fig. 7 ; de forte qu'à mefurc qu'on tourne le rouleau pour tendre l'étoffe , il fe trouve arrêté en place. Voy. la fig. 5 , qui repréfente le cliquet vu par derrière , avec la crémaillère vue par le bout. Les Métiers à pied , tels que je viens de les décrire ; content très - cher , fur- tout par rapport à leurs ferrures ; c'eft ce qui a fait imaginer de la fupprimer , & d'y fubfdtuer un affembkge de bois mobile , qui équivaut en quelque façon à la ferrure dont j'ai fait la defcription ci-deffus. L'aiFemblage mouvant des Métiers avec leurs pieds , fe fait de la manière fuivante. On fait un montant d'environ 8 pouces de largeur , & environ 4 pouces da hauteur , ( pris du delfous de la traverfe indiquée par les lignes ponâuées a,b, fiff.iê'^), qu'on alTsmble dans la traverfe à double tenon & mortaife ; enfuite on ravale la partie inférieure de ce montant , ou , pour mieux dire , on y fait un tenon dont fextrémité eft arrondie en demi-cercle , & le centre eft en C, fig. 3 , qui eft le centre de la vis A,fig.2.,S: par conféquent celui du mouve- ment ; l'arrafement de ce tenon eft aulfi circulaire , & cela pour porter & en même temps embraffer le bout du pied qui entre delfous à rainure & languette , ou , pour mieux dire , en enfourchement ; de forte que quelqu'inclinaifon qu'on donne au Métier , il foit toujours folidement arrêté , ainfi qu'on peut le voir à la figure l , où j'ai indiqué , par des lignes ponduées , f inclinaifon que peut avoir la traverfe du Métier , qu'on tient autant incliné qu'on le juge à pro- pos par le moyen de la vis B,fig. 3. La languette que forme le bout des pieds , n'eft pas à vive-arête , mais en doucine , afin qu'elle falfe un meilleur eiîet par le côté , ce qu'on peut obferver Ihfig. I & à la fig. 1 , qui repréfente la coupe tant de la traverfe & de fon montant , que du pied pris au milieu de fa largeur , ce qui fait qu'on ne voit que la languette du montant , & non pas le tenon qui eft plus loin. Cette Sect. if. §• /• Des différentes fortes de Métiers à broder, pyj) Cette manière de conftruire L'affèmblage des Métiers avec leurs pieds j eft peu - " "■ Coûteufe & très-folide , & en même temps très-propre , fans pour cela être em- Planche barraffante , comme on peut le voir dans les trois figures ci-defFus , fur le détail defquelles je ne m'étendrai pas davantage, vu que l'infpedlion feule des figures doit être fuffifante. Il fe fait d'autres petits Métiers mobiles repréfentés^^. S & ç , lefquels diife- rent de ceux dont je viens de parler , non-feulement par la grandeur , qui eft 1-éduite environ au tiers , mais encore par la forme , qui eft différente. Les petits Métiers dont je parle , fe placent ordinairement fur les genoux ou fur une petite cable placée devant la perfonne qui en fait ufage ; ils font compo- fés de deux enfubles d'environ l8 pouces de longueur, & 12 à i J lignes de diamètre. Ces enfubles font arrondies dans toute leur longueur , excepté vers les bouts , qu'elles reftent quarrées , afin d'y faire deux mortaifes perpendiculaires Tune à l'autre , dans lefquelles entrent les traverfes ou lattes C D Se EF,fig. 5 , lefquelles ont environ i J à 18 lignes de largeur , fur 3 d'épailfeur au moins , 6 12 à 15 pouces de longueur. Ces lattes font percées de deux ou trois rangs de trous fur la largeur , difpofés diagonalement , afin d'y placer des chevilles de fer qui retiennent les enfubles écartées autant qu'on le juge à propos. Au milieu de la largeur & de la longueur des lattes , eft affemblé un morceau 'de bois de,fig.9, de 3 à 4 lignes d'épailfeur, & d'environ 3 pouces quarrés , dont fextrémité inférieure eft terminée en demi-cercle. La partie fupérieure de cette pièce eft taraudée du deiïïis de la latte , pour recevoir un écrou ou ofTelet qui l'arrête avec cette dernière , comme on peut le voir fig. S & ç. Chaque bout du Métier eft porté par un pied de 8 à 9 pouces de hauteur , dont le haut eft ouvert en enfourchement pour recevoir la pièce de, qui y eft arrêtée au point /, par le moyen d'un petit tourillon de fer ou de cuivre. Vers le bas de l'enfourchement eft placée une vis g, laquelle fait prefllon fur la pièce Je , & par fon moyen arrête le Métier comme on le juge à propos , foit qu'on veu'ille qu'il foit horizontal , comme dans hfg. 9 , incliné ou perpendiculaire , comme je l'ai indiqué dans cette figure par des lignes ponftuées. Les deux pieds font ordinairement tournés & fe montent fur une petite table .ou plateau , en deffous de laquelle on les arrête avec des écrous en oITelets. Cette table eft fupportée par quatre petites poires , dont la hauteur doit être aifez con- fidérable pour empêcher que les écrous & le bout des vis ne frottent en deffous de la table lorfquon la place en quelque lieu droit & uni , comme une table , une commode , &c. Il y a des Métiers à mettre fur les genoux , de différentes grandeurs; celui dont je viens de faire la defcription, eft de la grandeur la plus ordinaire , quoi- qu'il y en ait de plus grands & de plus petits. Les grands Métiers dont fe fervent les Tapiffiers , les Couturières & les Bro-' deurs , font à- peu-près de la même forme que ceux à mettre fur les genoux , » Menuisier , ///. Pan. III. 5«7. M 1 1 9^0 MENUISIER, III. Part. SeB. lU. Chap. XlII. ^î^s» l'exception qu'ils n'ont point de pieds , qu'ils font portés fur des tretaux , & qulîs Planche font beaucoup plus grands , y ayant de ces Métiers dont les enfubles ont depuis 6 pieds jufqu'à 12 , & même i J pieds de longueur, fur2 à 3 & même 4 pouces de diamètre , & les lattes à proportion. La conftruélion de ces Métiers, ainfi que ceux à mettre fur les genoux, n'a rien de particulier , fi ce n'eft que las mortaifes des bouts des enfubles doivent être faites avec beaucoup de jufte/Te & de précautions, afin d'éviter les éclats ; c'eft pourquoi après qu'on a percé la première mortaife , il faut la remplir par un faux tenon qui entre très-jufte fur l'épailTeur, afin de foutenir le bois lorf- qu'on fait la féconde mortaife, laquelle eft perpendiculaire avec la première. ' Après les Métiers à broder mobiles, foit à pieds, foit à mettre fur les genoux , ^2^"'^ font ceux qu'on nomme communément Métiers à tambour , repréfentés dans cette Planche , ^o-. i , 2 eb' 4 , lefquels font ainfi nommés à caufe de la forme du Métier proprement dit , laquelle eft ronde & difpofée à peu-près comme la caifîè d'un tambour. 1 Le Métier à tambour eft compofé d'un pied Se de fon tambour , lequel eft le métier fur quoi on monte l'étoffe , comme je le dirai ci-après. Le pied eft compofé d'une table d'environ 10 pouces de longueur, fur 8 à 9 de largeur , & 6 à 8 lignes d'épailTeur, au pourtour de laquelle eft rapporté un rebord fiillant en deffus de 3 à 4 lignes. Ce rebord doit être joint en onglet par les quatre angles de la table ; & pour que cette dernière /bit aflez fblide, il eft bon d'y mettre des emboîtures par les bouts , jointes à rainures & languettes au moins, & collées ainfi que les rebords, qu'on feroit très-bien de faire à même les emboîtures , du moins ceux des bouts, d'après lefquels font placées des boîtes A D ,fig. 2 <& 4 , d'environ 2 pouces de hauteur, fur 2 pouces & demi à 3 pouces de largeur , & d'une longueur égale à la largeur de la table , prife du dedans des rebords. Chaque boîte eft féparée en deux par une petite cloifon , comme le repré- fente la figure 3 , & eft fermée en delfus par des couvercles ouvrants à couliffes, comme aux_^^. 3 (§■ 4 , ou à cylindre , comme je l'expliquerai ci-après. Le corps des boîtes ne doit pas être pofé à plat fur la table ; mais il faut qu'il y foit affemblé à rainure & languette , tant les pièces du pourtour , que la cloi- fon de féparation intérieure , comme on peut le voir fg. 3 , & encore mieux dans la figure J , qui eft defllnée au double de cette dernière. Au milieu de la largeur de la table , & d'après la largeur des boîtes , font placés les deux pieds ou montants ^C,^g. 2, qui font, pour l'ordinaire, tournés en forme de baluftres , & qui fervent à porter le tambour ou métier; ces pieds fè montent à vis dans l'épailTeur de la table , comme on peut le voir à la fig. 6 , ce qui eft fujet à une petite difficulté , parce que comme le haut des pieds doit être quarré , & une de leurs faces parallèle avec le devant de la table , il n'eft pas polfible , en faifanc la vis, de s'alTurer fi, quand le pied fera monté, il fe trouvera à la Segt. IV . §. I. Des différentes fortes de Métiers à broder. place qui lui convient , du moins quant à fa diredion ; c'eft pourquoi on corn- ■ mence par faire la vis de la partie inférieure du pied , & on le monte en place : on Planche retouche fur fon arrafement que jufqu a ce que fes faces foient dans la dirediorj qui leur convient; après quoi on l'établit & le trace de hauteur, pour le tourner enfuite & y faire les entailles nécelTaires pour recevoir le mantonnet qui porte la partie intérieure du tambour, lequel cft compofé de deux parties, ou, pour mieux dire , de deux cerces concentriques qui fe conftruifent de la manière fuivante. On prend deux cerces de boilTelerie , foit de chêne ou de hêtre , ou , ce qui efl encore mieux, de noyer, qu'on met d'abord de largeur; favoir , celle du dedans à environ 20 lignes, & l'autre un peu plus, comme on peut le remar- quer à hfig. 6 , où la coupe de la cerce E , eft plus étroite que celle F; enfuite on les met toutes deux d'épaiffeur à une ligne & demie au plus , en obfervanc que cette épailleur foit bien égale dans toute leur longueur, afin qu'elles ploient également. Ce qui étant fait, on coupe de longueur la première cerce, en obfervant qu'elle fuive bien à fon intérieur un cercle dont le diamètre foit égal à la diftance qui fe trouve du dehors en dehors des deux montants B C ,f!g. 1 ; & pour mieux y réuffir, il efl: bon de faire un plateau de bois bien rond , fur lequel on fait ployer la cerce , & qui fert à la tracer jufte , & à l'attacher fur le mantonnet abcd,fig.j & 6 , où ce dernier eft repréfenté en coupe. Le mantonnet a environ 2 pouces de largeur, fur 6 lignes d'épaiffeur ; il efl: ravalé dans fa partie fupérieure pour porter la cerce avec laquelle il affleure , & dans fa partie inférieure pour affleurer avec le nud du pied qui^'efl; entaillé pour le recevoir. La longueur du mantonnet eft d'environ 3 pouces & demi , & fà partie inférieure eft arrondie en demi-cercle pour pouvoir tourner facilement fur l'entaille du pied , avec lequel il eft arrêté par le moyen d'une vis de cuivre ( ou de fer , ce qui eft égal , ) à tête plate , dont l'écrou eft placé dans l'épaiffeur du pied, comme je l'ai repréfenté/^. (j. Foye^ lafig. 10 , qui repréfenté le man- tonnet vu en deflus avec les deux bouts de la cerce qui viennent fe joindre au point/; Se la figure 8, qui repréfenté le bout du pied vu du côté de fon entaille. La féconde cerce fe difpofe comme la première , à l'exception que le joint fe fait à recouvrement de ^ à A ,fg. 1 1 , qui repréfenté cette cerce vue en delTous , de manière qu'il fufEt de bien coller le joint, qui d'ailleurs eft retenu par le cercle C,/^. 6 , du delfus, lequel retient la cerce dans la forme qui lui eft convenable. Le cercle G fert non-feulement à retenir la cerce, mais encore à porter un petit bourrelet d'étoffe qu'on attache defllis. Pour que ce cercle foit folide, il faut le faire de quatre morceaux au moins, collés à recouvrement, comme je l'ai obCervéfig. 4. Au-deffous de la cerce extérieure , il y a un autre cercle H,J^g. 6 , qui reçoit à feuillure le bas de cette dernière , ce qui vaut mieux que de rapporter un Cmple recouvrement , comme on le fait quelquefois ; ce cercle çSa MENUISIER, IIL Pan. HT. SeB. Chap. XIII. - s'arrondit fur l'arête , & On doit avoir grand foin qu'il affleure l'intérieur de la Planche cerce , avec laquelle il ne doit paroître faire qu'un quand ils font bien collés enfemble. VoyeTjafig. 9 , qui repréfente la cerce extérieure avec le mantonnet, fa vis & l'extrémité fupérieure du pied , le tout grand comme rrioitié de l'exé- cution , ainfi que les fig. 6 , 7, 8 , 10 11. Lorfqu'on ajufte la féconde cerce , il faut qu'il y ait peu de jeu entre elle & la première , parce qu'il eft néceflàire qu'elles tiennentaffez l'une avec l'autre pour que le fécond cercle ne fortepasde lui-même, mais qu'il ait feulement la liberté détourner horizontalement, afin qu'on puifretravaillerl'étoffequieftattachéefur le cercle extérieur , de tel côté qu'on le juge à propos , fans pour cela mouvoir le pied du Métier , auquel tient le premiercercle qui n'a qu'un mouvementvertical, pendant que le cercle extérieur enadeux ; fivoir, un vertical , qui lui eft commun avec le premier fur lequel il eft placé , & un autre mouvement horizontal en tournant fur ce dernier, ainfi que je viens de le dire plus haut. La pièce ou petit montant / ,fLg. 1 , n'a pas plus de a pouces de haut , & fert à paflèr une brochette de fer qui a un petit bouton ou manche de bois à un bout, & qui de l'autre entre dans le bas d'un des pieds ou montants du Métier; cette biochette a envi- ron j à 6 pouces de longueur , & eft utile à ceux qui font ulàge de ce Métier. ; J'ai dit plus haut que les boîtes du Métier à tambour étoient quelquefois fer- pLANCHE mées à cylindre , cette fermeture n eft autre chofe que plufieurs petits morceaux de bois minces collés lur une toile , de manière qu'ils fè ploient aflèz pour paflèr dans une rainure pratiquée dans les deux côtés de la boîte , tant en delFus qu'en deffous , ce qui oblige d'y mettre un double fond , pour lailTer le paflage de cette fermeture , comme on peut le voir aux fig. i (& a , qui repréfentent les coupes tranfverfales & longitudinales d'une boîte ainfi difpofée, fijr la conftruélion de laquelle je ne m'étendrai pas davantage, vu que j'ai traité très au long cette par- tie dans la defcription des Bureaux à cylindres , page 725» à fuiv. féconde Partie de la troifieme Seâion de mon Ouvrage. Les Figures 3 & 4 repréfentent la coupe & l'élévation d'un Porte-aiguille propre à broder au tambour , delTmé dans là grandeur naturelle. Ce n'eft autre chofe qu'une efpece d'étui dont la partie fupérieure eft creufée , &fert à placer les aiguilles à broder ; & l'autre , c'eft-à-dire , l'inférieure , fe démonte & fert à placer l'aiguille qui eft toute montée & retenue en place par une vis qui fait preffion contre. Cette vis eft taraudée dans l'épaiffeur du Porte - aiguille , qui eft fait foit d'ivoire ou d'os , ou même de bois ; & comme ces matières ne pourroient pas avoir beaucoup de folidité , vu la petiteffe de l'objet , on y met une virole , foit d'argent ou de cuivre , dans laquelle la vis tient beaucoup mieux que dans l'ivoire ou le bois , ce qui en même temps folidifie beaucoup le bas du Porte- aiguille , que je n'ai repréfenté ici , ainfi que cette dernière , que pour en don- ner une idée , vu que leur conftruélion n'eft pas du refîbrt des Menuifîers-Ebé- niftes , qui pourroient cependant bien les faire , fuppofé qu'ils eulîcnt les outils néceifaires pour cel^ Les Sect. if. §. /. Des dif créâtes fortes de Métiers à broder. ^6^ Les Figures J & 7 repréfentent un Métier nommé Mûler à fila : il efl corn- , pofé dune table , fur le derrière de laquelle eft une boîte à peu-près femblable Pianche à celles du Métier à tambour; à la droite de cette table, eft une pelote ou couffin rembourré , pour pouvoir y placer des épingles. Au milieu de la longueur de la table , & un peu fur le derrière, eft placé un pied en forme de baluftre , d'environ 2 pouces de hauteur, & qui eft percé dans toute fa longueur , pour donner paffage à une vis A B , fig. , h. tige & à tête quarrée , laquelle s'arrête en delTous de la table. Au-delTus du pied eft placé un cerceau , au travers duquel palTe la partie fupé- rieure de la vis , dont l'écrou porte fur ce dernier , & l'arrête fur le pied d'une manière fixe , du moins autant que la délicatelTe de l'ouvrage peut le permettre. Le cercfcu a la forme un peu plus alongée qu'un demi-cercle , & il eft percé par les deux extrémités pour recevoir des vis placées aux deux bouts d'un rouleau ou cylindre, par le moyen defquelles & de leurs écrous, on arrête ce dernier avec le cerceau , de manière qu'il ne tourne qu'autant qu'on le juge à propos. Ce cylindre doit avoir environ 6 lignes de diamètre , & être percé vers fes deux extrémités pour placer de petites chevilles , avec lefquelles on arrête le fil des filets. Les Figures 6 &. S repréfentent un autre Métier à filet , dont la boîte eft fur le côté , comme aux Métiers à tambour : celui-ci a deux montants & deux rou- leaux ou cylindres , qui font arrêtés avec les montants par le moyen d'un écrou en ofTelet , ce qui eft moins coûteux que d'y mettre des écrous , & par confé- quent des vis de cuivre, comme on le pratique ordinairement; quand on fait les vis des cylindres en bois, comme elles ne peuvent être que très-foibles , on fait très-bien de noyer l'extrémité des cylindres dans l'épaiffeur du montant , afin que la vis ne portant rien , foit moins expofée à fe rompre. Fbjq la Fig. 10 , où j'ai repréfenté un bouc de cylindre ainfi dilpofé , & deffiné grand comme l'exécution. On fait encore des Métiers à filet dont le cylindre fe trouve enfermé dans une efpece de boîte en plein bois , ouvrante à charnière , de maniera que quand on n'en fait pas ufage , on ferme la boîte , & fouvrage qui eft commencé fe trouve renfermé avec le cylindre. Je n'ai pas fait de deffin de cette efpece de Métier , vu qu'il n'y a pas grande différence de ceux dont je viens de faire la defcription , & qu'on ne finiroit jamais s'il falloir donner des exemples des divers ouvrages de ce genre , qui varient plus ou moins , félon le goût Si le génie des différents Artiftes. Mmi/ISIER , ///. Part. m. SecL N lE 5x£?4 ME NUISIE R, III. Pan. SeB. III. Chap. XIIL §. II. Defcripdon d'une Imprimerie de Cabinet. - " 1 t Avant de pafTer à la defcriptiôn des Guéridons de différentes efpeces , j'ai Cru Planche ne pouvoir pas me difpenfer de donner ici un exemple de PrelTes de cabinet , tant pour l'impreffion des caraderes de fonte , que pour celle des planches gravées en taille-douce , parce que non-feulement la conftruâion de ces différentes Preffes appartient à l'efpece de Menuiferie dont je parle , mais encore c'eft que quoique très-utiles, elles font très-rares, & que lorfqu'un Menuifier eft appelle pour en conftruire une (fur-tout celle d'impreffion , ) il eft très-embarraffé de la forme êc des proportions qu'il doit lui donner, & cela faute d'en avoir vu d'autres déjà exécutées. Des deux fortes de Preffes dont je vais faire la defcriptiôn, celle d'impreffion en lettres, repréfentée fig. i , eft la plus compliquée , & demande beaucoup de foin de la part de l'Ouvrier , pour que toutes les parties qui la compofent concourent à en rendre fufage facile & commode , comme je l'expliquerai ci- après , lorfque j'aurai fait le détail des Gaffes deftinées à contenir les lettres ou caraâeres de fonte fervant à f impreffion. Ces Gaffes repréfentées/^. 2 , 4 (& 9 , font des efpeces de caiffes découvertes , divifées en un nombre de caffetins, dans chacun defquels on place des caradleres de même efpece. Il en faut toujours deux, comme les fig. 4 d?" 5) ; la première , qui eft divifée en deux parties fur la largeur (ainli que la féconde , ) fe nomme le haut de la CaJJe ou CaJJeau du haut, & contient 49 caffetins de chaque côté, lefquels caffetins font tous d'égale grandeur. Le bas de la Caffe ou Caffeau du bas, contient J4 caffetins de différentes grandeurs, difpofés dans l'ordre & la proportion de la figure 5) , foit que la Caffe foit grande ou petite, comme dans cette figure. La Caffe , ou , pour mieux dire , les deux Caffeaux fe placent fur des efpeces de pupitres inclinés à peu-près félon un angle de 45 degrés, & élevés d'environ 3 pieds à 3 pieds 6 pouces depuis le plancher jufqu'au deflôus du premier Caffeau. Ces pupitres font de fimples bâtis aux Caffes ordinaires, qu'on nomme Rangs de CaJJes; mais pour celle dont il eft ici queftion , repréfentée fig. a (5 3 , ce pupitre eft de Menuiferie d'affemblage, & n'a qu'environ 8 à 9 pouces de hauteur du de- vant, afin qu'étant pofé fur le Bureau vu en coupe/^. 3 , il fe trouve à la hau- teur convenable pour qu'on puiffe travailler à la Caffe. L'intérieur de ce pupitra doit être vuide du plus grand côté, afin de pouvoir y placer foit l'ouvrage déjà compofé , ou les différents uftenfiles dont on peut avoir befoin , comme le Viforium, les Mordants, les Galées , Se les différentes pièces de Garniture faites en bois. Le Viforium, J eir (5, eft un petit montant d'environ un pied de longueur, fur a à 3 pouces de largeur, & un pouce d'épaiffeur par le bas , fa partie fupérieure Sect. IV. §. II. Defcrîptîon d'une Imprimerie de Cabinet. étant ravalée à l'épailTeur de 3 à 4%nes, & au bas de ce ravalement on ^ obferve un petit enfourchement , lequel fert à retenir le bas de la copie qu'on Planche place fur le Viforium, & qu'on y arrête par le haut avec un ou deux Mordants repréfentës fig. 7 , qu'on fait en bois tout uniment , quoiqu'on pourroit très- bien , fur-tout dans le cas dont il eft ici queftion , les faire en cuivre , ainfi que le Viforium , qui alors pourroit être moins gros que celui repréfenté ici , fig. j & 6. Le bas du Viforium eft terminé en pointe, ce qui eft nécelTaire pour pouvoir le placer dans un trou fait dans un des côtés de la Gaffe, fur laquelle il doit s'élever perpendiculairement , Se toujours à la gauche de celui qui travaille. Les Galées font de petites planches difpofées en quarré - long, & garnies de rebords par trois côtés , de 3 à 4 lignes de haut tout au plus , afin de pouvoir lier les pages qui font compofées, & que la ficelle prenne les lettres à environ la moitié de leur hauteur , qui eft de 10 lignes & demie. Il y a des Galées qui font compofées de deux planches fur l'épaifTeur, dont une , qui eft celle de defFus , entre jufte entre les rebords de la première , & , ce qui eft encore mieux, àcoulilfe dans ces derniers; cette féconde planche de Galée eft terminée par un manche , pour pouvoir la retirer toute chargée de la compoficion. Cetta féconde efpece de Galée n'eft guère d'ufage que pour les grands ouvrages, comme les In-fo/io ou les in-quarto ; c'eft pourquoi je n'en donne pas de figure ici, non plus que de la première , qu'il eft très-aifé de conftruire fans le fecours d aucune figure. Les pièces de Garniture , font les Bois de fonds , comme celui repréfenté Jig. 10, les Bifeaux , les Coins & les Réglettes. Les Bois de fonds font des pièces de bois de 2 pieds de longueur, fur différentes largeurs , félon celles des marges' intérieures de l'ouvrage , tant de largeur que de hauteur. Ces bois font tous d'une égale hauteur, qui eft 7 lignes, Se on y poufla fur la face de delTus, une, deux ou trois petites gorges, félon leurs différentes largeurs , pour qu'au premier coup d'œil on puilTe aifément les reconnoître. Les Bois de fonds doivent être faits avec de bon bois plein , égal , fins nœuds ni rebours , Se être bien parfaitement d'égale largeur d'un bout à fautre , Se fur-tout bien d'équerre , parce que pour peu qu'ils déverfent en dedans ou en dehors , ils font rompre la forme , & par conféquent perdre tout l'ouvrage , ce qui s'appelle, en terme d'Imprimerie , yTuVe un pâté. Les Bifeaux différent des Bois de fonds , en ce qu'ils ne font pas d'égale lar- geur d'un bout à l'autre , ce qui eft néceflàire pour pouvoir placer entr'eux & le chaffis de fer , des coins qui ferrent & arrêtent l'ouvrage en place. Les Bifeaux & les coins doivent être de même épaifl^eur que les Bois de fonds , avec lefquels il faut qu'ils aflleurent. On fait auffi des Feuillets & Réglettes en bois , dont la hauteur doit être égale à celle des quadrats & des Bois de fonds , qui eft , comme je l'ai dit , de 7 lignes, & dont l'épaiffeur varie félon les différents ouvrages. Il y a de ces Réglettes qui n'ont qu'une demi-ligne d'épaiffeur & même moins ; alors on les Blanche <j66 ME NUI S 1ER, III. Part. SeB. El Chap. XIIL ~. nomme Feuillets ; & d'autres qui font plus fortes : on obferve dans toutes ces gradations de Réglettes, de leur donner l'épailfeur de corps des différents carac- tères ; mais <lans tous les cas il faut qu'elles (oient d'une épailleur parfaitement égale dans toute leur longueur; c'eft pourquoi il eft bon de les faire pafferpar le tire-filet dont j'ai donné la defcription ci-devant, page 833. Pour peu qu'on faffe d'ouvrage confidérable , il faut toujours plufieurs rangs de Gaffes femblables ; c'eft pourquoi il eft toujours bon d'en faire deux ou même trois paires pour les Imprimeries de Cabinets dont il eft ici queftion , afin qu'on puiffe en changer quand il en fera befoin , le pupitre n'étant pas affez large pour pouvoir placer deux Gaffes à côté l'une de l'autre , ce qui ne peut être autrement , vu qu'il faut que ce pupitre , & la Preffe toute montée , puiffenc être contenus dans l'intérieur du Bureau lorfqu'on n'en fait point ufage. Les Gaffes de rechange fe placent fur des tablettes pofées dans les intervalles qui reftent entre le deffus du pupitre , comme je l'ai indiqué par des lignes ponc- tuées ab 8c cdffig. 3 , qui repréfente la coupe du Bureau prife un peu au- devant de la cloifon qui fépare la place de la Preffe avec celle de la Gaffe , laquelle cloifon eft d'autant plus néceffaire , qu'elle fert en même temps de battement aux portes , & de foutien au deffus du Bureau , dont la forme & la conftruftion n'ont d'ailleurs rien de particulier , & qu'on peut faire plus ou moins riche que celui qui eft repréfenté ici , en obfervant toutefois qu'il foie d'une grandeur capable de contenir la Caffe & la Preffe , & qu'il ne fbit pas trop haut , pour qu'on puiiîè aifément faire ufage de cette dernière , qui n'a que 27 pouces de hauteur , afin de diminuer celle du Bureau autant qu'il eft poffible, & que le deffus de la forme fe trouve à environ 3 pieds & demi de hauteur. — La Preffe d'impreffion , Jig. i , eft compofée de trois parties principales ; Planche favoir ,.le corps de la Preffe , dont la conftruélion eft toute du reffort du Me- nuifier; celle qui occafionne Se qui réfifte à l'effort de la preffion , autrement dit, du foulage , & celle fur laquelle fe fait le foulage , & qu'on nomme le train de la PreJJe. Ces deux dernières parties font compofées de Menuiferie & de Serrurerie , lefquelles doivent être bien faites l'une pour l'autre , afin qu'elles tendent également à la perfeélion de l'ouvrage. Le corps de la Preffe eft compofé de deux montants A,B, fig. 1 & 2 , nom- mées jumelles, affemblés par le haut dans une traverfe ou chapiteau C , & pat le bas dans des patins D , qui font prolongés en arrière pour recevoir le der- rière de la Preffe , qui eft élevé au-deffus du paffage du train , &. fur lequel on place l'encrier ; le devant des patins eft prolongé en devant pour recevoir le bout du berceau de la Preffe , fur lequel roule le train , comme je le dirai ci- après (*). (*) Aux grandes PrefTes les patins ne vont pas plus loin que le devant des jumelles ; mais com- inc celle ci eft beaucoup plus petite, j'ai cru pouvoir m'écarter des règles, ou , pour mieux dire , de l' ufage reju , vu "jue cela ne fait rien au me'chanirmc de la Preffe, qui eft même plus folide ôc plus agre'able à voir étant conftruitâ comme je lai repréfentée ici, que félon la méthode ordinaire. La Sect. if. $, //. Defcription d'une Imprimerie de Cabinet. La féconde partie de la PrelTe eft compofée de la vis & de fes dépendances , -- de deux fommiers £ , F, & du berceau G H; ces deux fommiers font afTemblés Planche dans les jumelles à tenons libres, qui paflent au travers de ces dernières, & celui du hautE, paffe en enfourclicment fur ces mêmes jumelles, afin de lui donner une épaiffeur a/Fez confidérable pour pouvoir contenir l'écrou de la vis qui eft placé au milieu , & qui y eft arrêté par le moyen de deux boulons à vis qui paiTent au travers de deux oreilles réfervées en deffous de lecrou , & en retour d equerre de fon épailTeur ; cet écrou doit être quarré par fon plan , d'une forme un peu conique , & entrer dans le fommier jufqu'aux trois quarts de fa hauteur , ou , pour mieux dire , de fon épaiffeur : il feroit même bon qu'on y réfervât un retour en delTous au pourtour , de la même épailTeur que les oreilles , dans lefquels palTent les boulons , ce qui , en affurant l'écrou davantage , don- neroit la liberté de le faire plus haut , & d'y réferver même une partie faillante , laquelle pafferoit toute au travers du fommier , & feroit évuidée en godet pour recevoir l'huile qu'on met ordinairement dans l'écrou pour faciliter le mou- vement de la vis. Les mortaifes des jumelles dans lefquelles palTent les tenons des fommiers , doivent être plus longues que la largeur de ces derniers , fur-tout en deffus de celui du haut, & en delfous de celui du bas ; cette plus grande longueur des mortaifes fe remplit par des morceaux de feutre ou bien de carton, afin que quand on fait mouvoir la vis , la réfiftance des fommiers foit moins ferme , & devienne même un peu élaftique ; ce qui eft nécefïïiire pour faire de belle impreffion , & que l'œil ou la partie faillante de la lettre ne s'émoulTe pas ou ne crève pas le papier ; ce qui rend en même temps le coup plus doux à l'Ouvrier qui tire le barreau. La vis eft toute du reflbrt du Serrurier , fi ce n'eft fa boîte /, & fa tablette L. La boîte eft un morceau de bois d'une forme quarrée , & percé au milieu de fa grolfeur d'un trou conique , dans lequel paffe la tige de la vis pour aller s'ap- puyer fur la crapaudine de la platine de la Preffe , qui eft incruftée dans un mor- ceau de bois droit & très-uni, qui fert à appuyer fur le caraétere: ce morceau ou platine de bois a , à la Prelle dont je parle , 7 pouces de longueur , fur J de largeur. La tablette L , dans laquelle paffè la boîte de la vis , eft compofée de deux morceaux joints enfemble fur leur longueur , & entaillés au milieu de leur lon- gueur félon la groffeur de cette dernière. La tablette entre à tenon dans les deux jumelles , avec lefquelles elle eft arrêtée par le moyen de deux coins a,b,qwi doivent avoir de largeur à leur bout le plus étroit , au moins Tépaiffeur de la tablette , afin de pouvoir la dévêtir quand on le juge à propos , ce qu'on fait en ôtant les coins , & en la failànt remonter en contre-haut. Le berceau C H, eft un chaffis dont la largeur extérieure eft égale à celle de la Prelfe , prife entre les deux jumelles , & d'une longueur alTez confidérabie pour Menuisier , III. Pan. III. Secl. On 5,68 MENUISIER, m. Part. III. SeS. Chap. XIII. * qu'il puifîe porter le corps du crain en entier lorfqu'il eft hors de deflous la Preffe, comme on peut le Voir à la figure l , Pl. ^26. Ce cliaflîs paflè jufqu'au fond du derrière de la PrelTe , avec lequel il eft arrêté par des vis. Il eft compofé de deux battants & de deux traverfes , dans lefquelles font aHemblées deux autres pièces c, d, fig. 2 , nommées poutrelles , dans lefquelles font incruftées des bandes de fer fur lefquelles gliffc le train de la PreJe , comme je le dirai ci-aprcs. La diftance des poutrelles entr'elles , doit être en raifon de la longueur de la platine , dont elles foutiennent l'effort , de manière que le milieu de chaque bande de fer foit à peu-près au quart de la longueur de la platine , comme on peut le voir dans la figure 2. Le deffous du berceau doit être bien droit, & en général très-jufte d'épaif- feur , afin qu'il porte également fur le fommier du bas , qui le foutient à l'en- droit de l'effort du foulage. Le bout du berceau eft porté par un pied en forme de T , & qui eft mobile à volonté. lei j'ai mis deux pieds adhérents au patin de la Preffe , ce qui ne fait rien , du moins quant à celle dont il eft ici queftion. En deffous du berceau de la Preffe , & entre les deux poutrelles , eft placé un cylindre de bois en forme de bobine , dont l'axe eft arrêté avec les battants du berceau , & eft terminé par un bout en forme de manivelle , pour y placer une poignée avec laquelle on fait tourner le cylindre , & par conféquent le train de la Preffe , & cela par le moyen d'une corde attachée d'un bout à l'extrémité du train, d'oià elle vient faire deux tours fur le cylindre, en defcendant de gauche à droite ; f autre bout de cette corde paffe au travers de la table du train , & vient s'attacher fur un petit treuil , avec lequel on la bande à volonté. Ce treuil eft placé entre les deux montants du chevalet qui fert à porter le timpan lorfqu'il eft ouvert. La troifieme partie de la Preffe eft le train \ il eft compofé d'une table ef, d'une largeur égale à celle du berceau , fur une longueur à peu-près égale. Sur un des bouts de cette table , eft placé à demeure un chaffis ou coffre M N, d'une largeur égale à celle de cette dernière , & fur environ un quart plus de lon- gueur que de largeur. Les bois de ce chaffis n ont qu'environ i pouce & demi de largeur h cette Preffe , & entourent un morceau de marbre O, quifert à porter la forme , & par conféquent à appuyer l'extrémité inférieure de tous les carac- tères placés dans le chaffis de fer qui les entoure , comme on peut le voir à la Les quatre angles du coffre font garnis d'équerre' de fer nomméss cornières , qui font faillantes en deflus pour arrêter la forme en place ; & deux de ces équerres portent des charnières avec lelquelles on joint le timpan au coffre. Dans le cas d'une petite Preffe comme celle-ci , on fait très-bien de faire ces équerres doubles, c'eft-à-dire, d'une pièce par chaque bouc du coffre, &d'y Sect F. §. IL Defcnption d'une Imprimerie de Cabinet. 060 prendre auffi les charnières , comme je l'ai obfervé à hfig. 2 , ce qui eft beau- — coup mieux que de les rapporter comme on le fait ordinairement. Planche Le train de la PreiTe eft arrêté avec le corps de cette dernière , par le moyen de deux cordes ou courroies de cuir nommées vaches, lefquelles non: de lon- gueur que ce qui eft néceffaire pour qu'en faifant mouvoir le train , il ne forte que d'environ un pouce au-delà du devant de la platine , ce qui eft fuffifant pour lai/Ter pafTer le timpan , qu'on appuie fur le chevalet , dont la traverfe du haut doit être affemblée en chapeau, & avoir de longueur la largeur du timpan au moins, afin de le fupporter à l'endroit de ces battants. La hauteur du chevalet doit être difpofée de manière que lorfque le timpan eft ouvert, il fafl-e avec le defTus du coffre un angle d'environ 140 degrés , ce qui eft néceffaire pour que la frifquette étant ouverte , elle foit un peu inclinée en arrière , comme je l'ai indiqué par des lignes ponduées ,fig.x, oxx j'ai pareille- ment indiqué les révolutions tant du timpan que de la frifquette , entre lefquels on place le papier à imprimer. Le derrière de la Preffe doit auffi être difpofé de manière que quand on fait avancer le train jufqu'au fond, il n'avance pas plus qu'il ne faut, pour qu'au fécond coup de Preffe la platine pofe toujours en dedans de la traverfe du der- rière du timpan , entre laquelle , & cette dernière , c'eft-à-dire , la plaîîne , il eft néceffaire qu'il y ait au plus un pouce & demi de jeu , pour que la preffion de la platine ne déchire pas le parchemin donc le timpan eft garni, & que les blanchetsou garniture du timpan fe trouvent toujours entre la lettre & la platine Aux grandes Preffes, on fait les timpans en bois , avec la traverfe de devant en fer , pour donner paffige à la platine de la Preffe : mais à celle-ci on l'a fait tout de fer ; c'eft pourquoi je n'en parlerai pas davantage ( * ). Au-deffus du derrière de la Preffe , fe place l'encrier , qui eft une efpece de caiffe de bois , laquelle n'a que trois côtés , comme on peut le voir à la/^. i , P/. 32(5 ; & quand on veut que l'encre fe conferve propre , lorfqu'on n'en fait pas ufage , on y met un couvercle dont le rebord de devant defcend jufqu'au bas de l'encrier , & dans le deffus duquel on fait un trou pour paffer le manche du broyon e,fig.8, même Planche , ôc une entaille pour donner paffage à celui de la palette f. Je n'entrerai pas dans un plus grand détail pour ce qui regarde les Preffes , vu que ce détail entraîneroit néceffairement un très-grand nombre de figures , que je n'ai pas voulu faire ici, parce que ce n'étoit pas leur véritable place , d'autant plus qu'il me fuffifoit de donner une idée des petites Preffes , qui font très-rares , qu on pourra tres-bien conftruire d'après ce que j'en ai dit , lorfqu'on voudra fe donner la peine d'en voir de grandes , & les bien examiner , non pas lorfqu'on n'en fait point ufage , mais au contraire lorfque les Lnprimeurs travaillent , afin (*) J'ai dit les timpans en parlant de plu- fieurs preffes , ayant toujours confidéré le timpan comme un, quoique compofé de deux ehaffis, dont je n'ai pas fait de defcription , vu qu'à la preffe dont je parle ils font tout de fer, & que leur conflruSion regarde uniquement le Serrurier, 5-0 MENUISIER, 111. Pan. SeS. III. Chap. XUl. d'en bien connoître le méchanifme , & être en état de diftinguer les chofes qui PtANCHE ç^^^ eflèntielles à la confttuaion des Preffes, d'avec celles qui ne leur font qu'accelToires , ou qui n'y font faites d'une certaine façon , que parce que c'eft un ancien ufage qu'on ne veut pas ou qu'on ne penfe même pas à changer ; cette route n'efl; pas la plus commune; mais c'eft la feule qui foit bonne , n'étant pas poffible qu'on pui(fe jamais parvenir à bien faire les inftruments , les outils ou les machines fervant à un Art quel qu'il foit, fi l'on n'a de ce même Art des connoilfances au moins théoriques , qui font cependant encore bien loin de celles que donnent la pratique , quoi qu'en puifTent dire ceux qui croient con- noître parfaitement un Art, lorfqu'ils font parvenus à en connoître à peu - près le nom & la forme des outils (*). La Preife en taille-douce , repréfentée 3 (& 4 , eft beaucoup moins com- pliquée que celle dont je viens de faire la defcription: elle eft compofée de deux jumelles affemblées par le haut dans un fommier ou chapiteau , & par le bas dans des patins ou dans un bâtis de Menuiferie , comme je l'ai fait ici. Entre ces deux jumelles font placés deux rouleaux ou cylindres de bois , dont les bouts diminués en forme de tourillons, entrent dans les entailles des jumelles, qui n'ont de largeur que le diamètre de ces tourillons , excepté la partie fupé- rieure d'une de ces entailles , qui doit être aifez large pour laiffer pafTer le quarré P du rouleau fig. 6 , & fon collet. Les rouleaux ou cylindres portent , favolr, celui de de/Tous , fur des collets ou boîtes de bois Q ,fig. 3 , qui font garnies de fer poli en dedans , afin que les tourillons des cylindres s'ufent moins , & qu'ils tournent plus aifément ; le rou- leau de deflus , au contraire , appuie contre une pareille boîte ; & l'efpace qui refte entre le delTus des boîtes & le fond des entailles des jumelles , eft rempli par des morceaux de cartons , ce qui eft néceifaire pour augmenter ou diminuer la preffion des rouleaux , & en même temps la rendre plus élaftique. Aux deux côtés des jumelles , & au niveau du delfus du rouleau du bas , moins 334 lignes de jeu qui font nécefTaires pour éviter le frottement de la table de delfus , font deux autres tables nommées Forçants , lefquelles fervent à foutenit la table R S , Cm laquelle on place les planches qu'on veut imprimer. Cette table doit être diminuée par les deux bouts , afin de lui donner de laprife entre les deux rouleaux qui l'entraînent en tournant. On donne du mouvement à ces rouleaux par le moyen d'une croifée qui entre à quarré dans le bout du rouleau fupérieur , & qui eft retenue en place par le moyen d'une cheville, ou, ce qui eft mieux, d'un écrou , comme je l'ai obfervé ici , 3 , 4 (5 5. Cet écrou , ainfi que fa vis , peuvent être faits en bois ; cependant dans une petite Preife comme celle-ci , je crois qu'on feroit très-bien de rapporter une vis de fer dans le milieu du rouleau , & d'y mettre ( • ) Ces fortes de Preffes , ainfi que celles en | lefquelles même doivent obtenir une permiffion tàille-douce dont je vais parler, ne peuvent être pour les faire conftiuue. d'ufage quepoutlespetfounesdeconûdctation, | Sect. IV. §. //. Defcrïptioii ctune Imprimerie de Cabinet, pyr par conféquenc un écrou de fer ou de cuivre , ce qui vaudroit mieux qu'un de - — ' — — bois, qui ne peut jamais être bien folide , fur-tout quand il elt petit comme à Pi-anche la Preflè dont je parle. ^ Aux Prefîes en taille-douce ordinaires , le rouleau du defîous efl: toujours d'un diamètre plus fort que celui de defflis , d'environ un quart ; je n'en ai pu favoir la raifon , ceux mêmes qui en font ufage ne m'en ayant pas donné d'autre, finon que c'étoit la coutume. La croifée eft compofée de deux pièces de bois affemblées en entaille à moitié de leur épaiileur; & on doit avoir foin que le trou par où pafîe le quarré du cylindre foit fait fur la diagonale , afin qu'il tende moins à fiire fendre le bois j que Cl les cotés de ce trou étoient parallèles avec le fil de la pièce. Voye^ la fis- Les Preffès en taille-douce ordinaires ne font pas pleines par le bas comraé celle-ci , leurs portants n'étant foutenus que par de petites colonnes ; & je n'ai fait de cette manière celle dont je viens de faire ladefcription, que pour qu'elle foit plus ornée , & que la partie inférieure puiife fervir d'annoire pour y ferrer les uftenfiles dont on a befoin pour imprimer en taille-douce. Cette Preife eft difpofée pour être placée fur un Bureau de pareille hauteur que celui de la PrelTe d'impreffion , & dans lequel on puiife la ferrer ainfi que cette dernière ; on peut même ne faire qu'un Bureau pour les deux PrelFes , fuppofé que la place le permette. En général , les PrelTes de Cabinet peuvent être très-riches , tant pour le travail que pour la matière ; cependant il ne faut pas que cette richeffe nuife à la facilité de leur fervice , ni à leur folidité , fur-tout celle d'impreffion, laquelle fouffrant beaucoup d'effort , demande beaucoup de folidité , ce qui oblige à y mettre des armatures de fer pour prévenir toute efpece d'ébranlement. Ces arma- turcs, lorfqu'elles font apparentes , doivent entrer pour quelque chofe dans leur décoration , afin de ne pas paroître rapportées après coup , comme il arrive quelquefois. Lorfqu'on veut faire ufage des deux Preffes , il faut qu'elles foient arrêtées à demeure fur le Bureau , par le moyen de quelques boulons ou toute autre fer- rure, qu'on fera les plus propres pofllble , 6c toujours analogues avec leur décoration , du moins autant que faire fe pourra. Si je n'ai donné aucune mefure particulière des Preffes dont je viens de faire la defcription , c'eft que comme elles font toutes deux hors de la grandeur ordinaire , il importe peu que les parties de détail qui les compofent foient plus ou moins grandes , pourvu qu'elles concourent toutes à l'effet général. Celles qui font deffinées dans cette Planche étant d'une alfez bonne proportion , on .pourra en connoître toutes les dimenfions , par le moyen de l'échelle qui efl au bas de la Planche, fur laquelle ces Preffes ont été conftruites au fixieme de grandeur de l'exécution , ainfi que les figures du bas de la Planche 326'. ' Menuisier , II J. Pan. iU. Seci. Pu S)7a MENUISIER, III. Part. SeB. IIL Chap. XIIT. §. III. Defcription de différentes efpeces de Guéridons & de Tables. ' Les Guéridons, /7^. r, a (S' 3 , font des efpeces de pedtes tables d'une forme Planche ronde, montées fur un feul pied, dont on faifoit beaucoup d'ufage dans le der- ' nier fiecle , où on leur donnoit jufqu'à 2 pieds & demi & même 3 pieds de hauteur, leur ufage étant de porter la lumière & autre chofe dont on peut avoir • befoin pendant la nuit. Maintenant qu'aux Guéridons on a fubftitué les Tables de nuit, la hauteur des Guéridons eft réduiteà 2(5 ou 28 pouces, &ils ne fervent qu'à placer la lumière foit proche le feu ou ailleurs : dans ce premier cas , on y ajoute une traverfe ou main en faillie , ainlîi que celle a b , fig. 2 , dans laquelle on place un écran , qu'on arrête avec une vis à la hauteur qu'on le juge à propos: cette main fe monte à vis dans le pied du Guéridon , afin de pouvoir l'ôter quand on le juge néceflàire. Le deiTus ou la table d'un Guéridon , eft ravalé en deffus pour qu'il y ait un rebord au pourtour , qui ordinairement eft orné de moulures , ainfi que le deflbus de la table ; il fe monte à vis , comme le repréfente la figure 3. Le pied ou plateau du Guéridon , eft aulTi rond & orné de moulures , & il reçoit pareillement le bas de la tige ou montant repréfenté Jîg. i (& 2. Le deflbus du plateau eft fupporté par trois ou quatre boules ou poires pour l'élever au-deiïiis du carreau , afin que les inégalités de ce dernier ne le falTent pas vaciller ; c'eft pourquoi il vaut mieux ne mettre que trois points d'appui que quatre. Les Guéridons dont on fait ufage à préfent , font beaucoup plus bas que celui repréfenté fig. 2 , dont ils différent encore par la forme de leurs pieds , qui au lieu d'être pleins , font compofés de trois pieds ou patins qui s'aflèmblent dans le montant qui porte la table , lequel eft corroyé à fix faaes ( du moins par le bas ) , defquelles fix faces trois font occupées par les patins , qui y font aifemblés à queue d'aronde , comme je l'expliquerai ci-après. V jyei la fig. 6, qui repré- fente une petite Table ou Guéridon moderne; & la fig. 10 , qui repréfente fori pied vu en plan. Le defiTus des Guéridons dont je parle , fe fait le plus léger poflîble ; c'eft pourquoi quand on veut qu'avec cette légèreté il ait toute la folidité néceflîiire , on fait très-bien de le conftruire d'alTemblage , afin qu'il ne fe tourmente pas , ainfi que je l'ai repréfenté fig. 9. Ces deffus fe montent toujours à vis avec la tige du pied , & cela par le moyen d'une maffe ornée de moulures qu'on rapporte en deffous , dans laquelle eft percé le taraud , ou , pour mieux dire , l'écrou de la vis. Il y a de petites Tables en Guéridons , dont le deflus eft d'une forme quarrée , ainfi que le repréfentent les fig. 7 , 8 (5 i r , & dont le même deffus a un mou- vement vertical , de manière qu'on peut l'incliner autant qu'on le juge à propos ^ ce qui fe fait de la manière fuivante. Sect. IV. §. ///. Description des Guéridons ÔC des Tables. 573 On rapporte en deiïbus de la Table une traverfe c j, dont le milieu a - environ 4 pouces de largeur; ce milieu eft aminci, ou , pour mieux dire, ravalé ^^■^^'^^^ des deux côtés à l'épaiiTeur de 7 à 8 lignes , afin de pouvoir entrer dans un enfourchement pratiqué dans la partie fupérieure du pied , avec lequel il eft arrêté par le moyen d'une goupille ^, qui fert de centre de mouvement à la Table , qu'on retient de niveau ou inclinée , comme on le juge nécelTaire , par le moyen du demi-cercle/^, qui eft arrÊté d'un bout avec la traverfe e 'd & par conféquentavec la Table, ÔC le demi-cercle pafTe dans une mortaife flitc dans l'épaifTeur du pied , où on l'arrête en place par le moyen d'une vis de pref- fion placée dans l'épailTeur de la joue de la mortaife. Foye^ les fi^^. 7 <§■ 8 qui repréfentent la Table vue de face & inclinée , félon que je l'ai indiqué^. 7 par une coupe fuppofée de la Table. ° ' Le deffus de ces Tables ou Guéridons , s'incline ainfî pour avoir la liberté d'y écrire & d'y lire plus commodément , fur-tout des in-folio , fur lefquels il faut être couché pour pouvoir les lire étant placés fur des Tables ordinaires , c'eft-à- dire , dans une fituation horizontale. Comme on peut faire ufage de ces fortes de Tables pendant la nuit, & qu'é- tant inclinées , il n'eft pas pofllble d'y placer une lumière , on a imaginé de faire des portes - bougie fig.^^ê^, lefquels ne font autre chofe que de'petits mor- ceaux de bois de a à 3 pouces de longueur, fur 7 à 8 lignes de largeur , & 2 d'épaiffeur au plus ; chacun de ces morceaux font joints enfcmble à1eur extré- mité , par une goupille de fer ou de cuivre rivée des deux côtés, & on a foin que ces rivures foient peu ou même point excédentes ; & pour qu'elles ne détruifent point le bois, on garnit chaque pièce d'une petite platine de fer incruftée dedans , comme on peut le voir à la^^»-. y. Les pièces du porte-bougie font ordinairement au nombre de (î ou 8 , donc une eft arrêtée avec le pied de la Table ou Guéridon ; Se la dernière , qui eft celle de de.Tus , porte une bobèche avec fa platine , comme on peut le voir à la fig- 4- On fait encore d'autres Tables ou Guéridons nomr»ées à l'Angloife, appa- remment parce qu'elles ont été inventées en Angleterre. Ces Tables , repré- ^^^'^ fentées/^. 2 (5 J , ont deux mouvements , l'un horizontal , & l'autre vertical comme le repréfente la figure 2. Le mouvement horizontal fe fait de la manière fuivante. Au haut du pied qui eft terminé par une tige menue en forme de pivot, eft placée une cage ou lan- terne compofée de deux fonds , & de quatre petits piliers en baluftres qui les foutiennent , ou , pour mieux dire , qui les lient enfemble ; la hauteur de cette lanterne eft de 4 pouces au moins de dehors en dehors , fur 738 pouces quarrés. Le fond du deffbus eft percé au milieu de tous les fens , pour laiffer paffer la tige du pied, qui vient entrer dans le fond du de/fus jufqu'à la moitié, ou tout au plus jufqu'aux deux tiers de fon épailfeur , comme on peut le voir à hfg. % , & CHE ^74 MENVISIE R, m. Part. SeB. III. Chap. XIII. ■ encore mieux à la fig. 7 , qui repréfente une partie de la coupe de la lanterne , Planche avec la tige du pied de Table , qu'on arrête avec la lanterne par le moyen d'une clef paflee au travers de la mortaife A, même figure. A un des côtés du fond fupérieur de la lanterne , font réfervés deux goujons qui entrent dans des talTeaux ab Sied, fig. 1 , lefquels fervent en même temps à arrêter la lanterne avec la Table , & à la diriger de manière qu'elle ne puiffe pas s'écarter de côté ni d'autre lorfqu'on la fait mouvoir horizontalement. Quand la Table eft abaiflee fur la lanterne, elle eft arrêtée avec cette dernière par le moyen d'une petite ferrure e, dont le pêne prend dans le deffùs de la lanterne. Fojq lesfig. i , 3 <& 4 , où cette ferrure eft rcpréfentée -tant en coupe que vue en deffus & en dedans , le tout deffiné , ainfi que la figure 7, à moitié de l'exécution. Les patins du pied de la Table dont je fais la defcription , font au nombre de trois , difpofés triangulairement , comme les repréfente la figure 3. On les affemble à queue d'aronde dans le montant, en obfervant que leur arrafement porte également de chaque côté , afin qu'ils fuivent bien leur direâion , & qu'ils joignent en même temps par-tout, ce qui eft très-elTentiel pour la folidité de l'ouvrage. Quand les patins font bien ajuftés , on les colle ; & pour qu'ils retiennent mieux en place , on ajoute en delTous de la tige du pied un bouton ou cul-de- hmpeff,fig. 2 (& 4 , lequel entre à goujon dans la tige , & recouvre en même temps les affemblages des patins , qu'il retient en place. F oyei la fig. 8 , qui repréfente le deffous de la tige du pied avec fes patins , indiqués par des lignes ponduées ; & la fig. p , qui repréfente la partie fupérieure de cette même tige vue en deffus, 11 fe fait encore d'autres efpeces de Guéridons , qui ne fervent que dans les grands appartements ; ce n'eft, à proprement parler , que des candélabres def- tinés à porter des girandoles & des arbres de lumières. Ces fortes de Guéridons font ordinairement très-hauts , & font foutenus foit par des gaines ornées de trophées ou de guirlandes , des grouppes d'enfants , ou toute autre partie de fculpture , qui dépendent du goût de celui qui préfide î la décoration des appartements dans lefquels ces Guéridons font placés. Comme la Sculpture fait prefque tous les frais de ces fortes d'ouvrages , & que les Menuifiers ne font qu'en préparer les maffes , je n'en parlerai pas davantage , d'autant mieux que cette préparation regarde les Menuifiers de bâtiment , & non pas les Ebéniftes pour lefquels je parle préfentement. §. IV. Sect. IV . §.ÎF. Defiription de différentes fortes de Pupitres- 975' §. IV. Defiription de différentes fiinei de Pupitres. J'a I déjà fait mention des Pupitres dans la féconde Seftion de la troifieme — — Partie de mon Ouvrage , en pariant des Tables à écrire ; ceux dont il eft ici Pla queftion , fervent à placer des livres, foit pour lire ou pour chanter , ou , pour ^ mieux dire , y lire de la mufique. Les Figures i , 2 & 4 de cette Planche , repréfèntent un Pupitre à pied & à crémaillère, par le moyen de laquelle on haulTe ou baiflè le Pupitre félon qu'on le juge néceflàire , foit qu'on veuille s'en fervir debout ou affis. Le Pupitre , proprement dit , eft compofé de deux tables inclinées à l'horifon d'environ 30 degrés , ou qui forment avec ce dernier un angle de 60 degrés, ce qui eft la même chofe. Ces tables fe font en bois plein découpé à jour , ou bien d'alTemblage , ce qui eft égal , vu que dans l'un ou l'autre cas il faut toujours qu'ils foient liés enfemble par une pièce y^,/^. 2 , nommée fommier , avec laquelle on les afl*emble à rainures & languettes , en obfervant que les languettes foient faites dans le fommier , afin que le pied du Pupitre qui porte fur ce der- nier, ne tende pas à faire ouvrir le joint , ce qui arriveroit nécelfairement fi le fommier portoit les rainures. Au bas de chaque table du Pupitre eft affemblé, en retour d'équerre , un rebord ou bande B, laquelle faillit d'environ un pouce & demi , & dont l'ufage eft de porter le livre & de l'empêcher de gliiTer ; c'eft pourquoi il eft bon qu'elle relevé un peu du devant , comme je l'ai obfervé à la figure 2. L'écart des deux tables du Pupitre eft retenu par une traverfe ou entre-toife C D, placée au milieu de la longueur des tables ; cette entre-toife fert non-feule- ment à entretenir l'écart des tables du Pupitre, mais encore à donner palTage à la tige £ du pied , & par conféquent à empêcher le Pupitre de vaciller en aucune façon. La tige du pied de ce Pupitre , eft corapofée de deux parties , l'une E F, qui eft mobile , Se dont l'extrémité fupérieure fert à porter le Pupitre ; Se l'autre G H, qui eft adhérente au pied repréfenté en plan fig. 4. Ces deux parties font parfaitement femblables , du moins dans leurs parties inférieures , comme on peut le voir à la^^. 2 & à la fig. 6 , qui en repréfèn- tent la coupe , ou , pour mieux dire , le plan ; & elles font retenues enfemble par la tablette IL, fig. lô 2, Se pat le lien MN, même figure. La tablette IL, repréfentée en plan ,fig. j , eft arrêtée à demeure dans la partie fupérieure du montant G H, fig. 2 , dans laquelle elle entre en entaille , afin d'y être arrêtée d'une manière fixe , pendant qu elle laifle couler librement l'autre montant £ ; le lien M N, au contraire , eft affemblé à queue avec ce dernier , & lailTe le partage du montant G H. Foye^ la fig. 8 , qui repréfenté le lien vu en plan. Menuisier , ///. Pan. lll. Secl. Q i r Planche 330. Planche 331. 5,75 MENUISIE R, IIL Pan. SeE. III. Chap. XIIL • Quand on veut haufler le Pupitre , on leva le montant E F , & 011 on le retient élevé à la hauteur qu'on defire par le moyen de la boucle O P, repréfentée en plan ,fig.^, laquelle a une dent a , fig. 9 , qui entre dans les crans !>,/>, de la crémaillère , 7%. i , taillée fur le devant du montant mobile. Cette boucle eft arrêtée avec le montant G iï" au point c , fig. 2 , qui eft fon centre de mouvement, & autour duquel elle fc meut librement. Voy.la Fig. 3 , qui repréfente une partie des deux montants avec la boucle , tant de niveau qu'inclinée, pour porter le montant mobile. Voyez auffi la 10, qui repré- fente ce même montant vu de face , aflèmblé avec fon lien vu en coupe. Cette figure , ainfi que celles 3 , 6 & 7 , font deffinées à moitié de l'exécution , & cotées des mêmes lettres que les figures i , 2 & 9. Le Pupitre tourne librement fur le montant E F, qui lui fert de pivot ; cepen- dant comme il n'entre que d'environ un demi-pouce dans le fommier du Pupitre , il arrive très-fouvent que ce dernier fort de fa place pour peu qu'on le levé ou qu'on le faflè tourner brufquement. Je crois qu'il feroit nécelFaire qu'on l'arrêtât , foit par le moyen d'une vis placée dans la partie fupérieure du montant ou pivot , & dont la tête fût en delTus du fommier, ou bien par le moyen d'une clavette placée en deffus de l'entre-toife CD, fig. 2 , ce qui eft égal , pourvu que le Pupitre foit arrêté folidement : cette obfervation eft eifentielle à tous les Pupitres tournants fur pivot, à moins que leur extrême lourdeur ne les mette hors de la portée d'être renverfés, comme, par exemple, les Pupitres d'Eglife , nommés auffi Lutrins , dont la feule pefanteur fuffit pour les arrêter en place , ayant , pour la plupart , 2 à a pieds & demi de largeur , & étant conf- truits en plein bois d'environ un pouce d'épai/Feur. Le montant G H ,fig. 2 , s'alTemble à tenon & mortaife dans une pièce de bois taillée à 6 faces , laquelle reçoit les trois pieds ou patins Q,R, S ,fig. 4 , qui y font afl"emblés à queue , comme on peut le voir à la fig. 7 ; Se pour que ces affemblagcs foient plus folides, on ne les perce pas au travers de la pièce du milieu , mais on les fait feulement defcendre jufqu'à 233 lignes du deflbus de cette pièce ; & quand les patins font alfemblés & collés , on les recouvre par une pièce triangulaire def,fig. 4 , dont le fil doit être oppofé à celle de deflbus_ On met des portes-bougie à ces fortes de Pupitres : il y en a où ils font atta- chés au m.ontant E F ; d'autres les pofent fur de petites entre-toifes placées aux deux extrémités des tables du Pupitre , ce qui eft d'autant mieux , qu'on raccour- cit par ce moyen les portes-bougie , qui , lorfqu'ils font trop longs , font fujets à pencher en devant , tant par leur propre poids que par celui de la bougie. '- Il y a d'autres Pupitres qui ne différent de ceux dont je viens de faire la def- cription , que par leur grandeur , Se par la forme de leur pied, qui n'a guère que (î à 8 pouces de hauteur, pris du de/Tous du Pupitre, ainfi qu'aux fig. 9 & 10. Ces fortes de Pupitres fe nomment Pupitres de table , parce qu'ils ne peuvent fervir qu'étant placés ainfi , vu le peu de hauteur de leurs pieds , gui fouvent au lieu Sect. IV. §. IV. Defaiption de différentes fortes de Pupitres. (J77 d'être en piédouches comme ceux-ci ^ n ont fimplement qu'un montant avec un ■ patin triangulaire, fans aucune façon. V oye^ la fig. 13 , qui repréfente le pié- Pianche douche vu en delTus , avec l'entre-toife du Pupitre, & fes affèmblages h queue d'aronde. Les Figures 7, 8, 11 & 12 , repréfentent un autre Pupitre de table, lequel n'a pas de pied , & ne fert guère que pour la leâure. Ce Pupitre eft compofé de deux chaffis ferablables pour la grandeur , & qui font ferrés au point a ,fig. 5 ; celui de delfus, qui efl le Pupitre proprement dit, a une traverfe cd, fig. la , placée un peu plus bas que le milieu de fa hauteur ; au milieu de cette tra- verfe eft ferré un montant e f, lequel fe rabat de e enf, pour foutenir le Pupitre à telle élévation qu'on juge convenable , comme on peut le voir à la fig. 8 , dans laquelle j'ai indiqué par des poncluations , les différents degrés de hauteur donnés par la diftance de la crémaillère g h, vue en coupe dans cette figure , & en face dans la figure 11 , qui repréfente le chaflls de delfous vu de face , lequel chaffis eft , à proprement parler , le pied du Pupitre ; ce Pupitre eft d'autant • plus commode, qu'il peut fe baiffer autant qu'on le juge à propos, & fe reployec tout-à-fait fur lui-même quand on n'en fait pas ufage. Les Figures 1,2, 3 & 4 , repréfentent une autre elpece de Pupitre , lequel n'eft d'ulàge que dans les Eglifes. Ce Pupitre fe fait en plein bois , & a cela de particulier , que quoique mobile , il eft d'une feule & même pièce , fins avoir befoin d'aucune efpece de ferrure , comme on peut le voir aux figures ci-defllis. La conftruélion de ces fortes de Pupitres eft cependant très-fimple ; on com- mence d'abord par corroyer un morceau de bois de la longueur & de l'épai/feur convenables, pour pouvoir contenir celle des deux pièces A, B ,fig. 2 (S" 4, 6 le jeu qu'il doit y avoir entr'elles, lequel doit être le moindre poffible , c'efi- à-dire , la place de la fcie , Se ce qu'il faut ôter de bois pour replanir les pièces quand elles font refendues. Quand le bois eft ainfi corroyé , on trace la charnière de la manière fuivante. Après avoir déterminé la hauteur du pied du Pupitre , prife du delTous de la charnière, on trace fur le côté de la pièce Jig.^, la hauteur de la charnière, qui doit être égale à fépailTeur des deux pièces prifes enfemble , comme f indiquent les lignes il &: mn, tracées un peu en pente pour empêcher que le Pupitre n'ou- vre quarrément tout-à-fait ; ce qui eft d'autant plus néceflâire , que ces Pupitres font déjà très-penchés , & que l'arc de cercle que forme la charnière dans l'angle Offig. 2 , tend à écarter le livre & à le faire couler dehors. Quand la hauteur de la charnière eft tracée , du point p , comme centre , on décrit un cercle qui touche aux lignes il Scmn, moins ce qu'il faut pour le paffage d'un cifeau très-mince , lequel cercle donne la forme delà charnière, qu'on ne doit découper qu'après avoir pris un calibre de l'extérieur des nœuds. Ce qui étant fait, on trace, fig-6, la face des charnières d'après les lignes il&.mn,Sc on les divife en nombre impair P7§ MENUISIER, m. Pan . Sed. III. Chap. XlîL , fur la largeur, en obfervant qu'il y ait un peu de jeu entre les traits qui défignent Flanche leur féparation , parce qu'il eft néceffaire pour le paffage d'un couteau à fcie très-mince , avec lequel on coupe l'efpace ^r, _/% qui refte après que les nœuds ont été découpés des deux côtés , comme le repréfente la figure 6. Après qu'on a ainfi évuidé & découpé la charnière , on chantourne le deflbus du pied, comme , pat exemple , la fig. 3 ; puis on refend les deux parties A,B, fur l'épaiffeur , tant en deiïus qu'en deflbus de la charnière ; & quand on a tra- vaillé jufte , les deux pièces doivent s'ouvrir toutes feules. Quand les pièces A , B, font ainC féparées , on les finit au rabot & à l'ordi- naire , foit que le Pupitre foit deftiné à être peint & fculpté , comme il arrive quelquefois, ou bien qu'on le laiffe dans fa couleur naturelle, avec un poli, comme c'eft l'ufage. Il eft cependant bon d'obferver que quand il y a de la fculpture fur les Pupi- tres dont je parle , cette dernière foit faite avant que de refendre les deux pièces A,B ,aBn qu'en faifant la fculpture on ne foit pas expofé à gâter la charnière ni à la brifer. Ces Pupitres ne fe font jamais feuls , mais deux à la fois , Se cela par rapporï à la grande perte de bois qu'il y auroit depuis s jufqu'à c , fig. 4 , fi on n'en pre- noit pas deux l'un fur l'autre , en augmentant à la longueur ordinaire du Pupitre , celle de la pièce ^, plus ce qu'il faut pour le paffage de la fcie. En fuivant cette méthode , on épargne près d'un pied de bois pour les deux , ce qui eft fort à confidérer , vu que ces Pupitres fc font toujours en beau bois de noyer , du moins cela doit être ainfi. §. V. Defcrlption de différentes Boîtes de toilette. ' Le s Boîtes de toilette connues fous le nom de Nécejfaires, font de petites ' Planche -^^[Ç^^ coffres de bois , fervant à ferrer les uftenfiles de toilette , & à les tranfporter dans les voyages. Elles font corapofées de deux parties ; favoir , de la boîte proprement dite ,{ig. i & 2 , (dont la conftruélion eft toute du reflbrt du Menuifier , ) & de la garniture , laquelle eft faite par des Ouvriers qui ne s'occupent que de cette partie , & qui ne travaillent qu'après les Ebé- niftes , puifqu'ils ne peuvent faire leur garniture qu'en raifon de la grandeur de la boîte , & du nombre & de la forme des pièces qu'on veut placer dedans. Cette garniture eft une elpece de petit coffre percé à fa furface , pour que les divers uftenfiles de toilette , comme les flacons , les peignes , &c , puiffent entrer dedans, & y être contenus de manière qu'ils ne puiffent vaciller en* aucun fens ; c'eft pourquoi les parois de chaque vuide font garnis de bois dans leur pourtour , & enfuite recouverts d'étoffe , pour que le bois ne touche pas aux pièces qu'on place dedans. Cette garniture eft pour l'ordinaire adhérente à l'intérieur Sèct.IV. s. Defcrîptton de différetïtei Boîtes de toilette. ^79 1 intérieur de la boîte , avec laquelle on l'arrête à demeure , & le joint fe cache ■■ par le moyen de l'étoffe de la garniture qu'on attache fur cette dernière. Planche Il y a des Néceffaires où la garniture eft mobile , afin de réferver en de/Tous ' & par conféquent au fond de la boîte , un efpacc pour ferrer des chofes qu'on ne veut pas lai/Ter fous la vue : dans ce cas on fait une féconde cailTe qui en- tre jufte dans la prémiere, ainfi que celle cdef,fig.^, dans laquelle oii place la garniture à l'ordinaire. Cette féconde cailfe doit être faite très-jufte , pour que fon joint ne foit pas apparent , dût-on être obligé d'y pratiquer un petit trou pour donner pafiàge à l'air qui l'empcchcroit d'entrer fins cette précaution. Le fond de cette féconde caifle fert ordinairement de couvercle aux caifes pratiquées dans le fond de la première ; cependant je crois qu'il vaudroit mieux y mettre un delTus ouvrant à fecret, afin que fi on Ôtoit k féconde caiffe, on ne pût pas fouiller dans le fond de la boîte , à moins qu'on ne fût le moyen d'ouvrir le deffus qui la couvre, La féconde caiffe doit être auffi arrêtée avec la première , par le moyen de quelque re/Tort caché dans l'épaiffeur de cette dernière , de manière que quand le tout eft en place , les deux caifil-s femblent n'en faire qu'une , & par conféquent trompent ceux qui voudroient fouiller dans les caffes du fond, dans lefquelles, comme jel'ai dit, on place les chofesles plus précieufes , comme l'or & les diamants qu'on eft obligé de porter en voyage. L'intérieur du deflus des Néceffaires eft quelquefois garni d'une glace , la- quelle ne doit pas porter à plat fur le bois , mais en être ifolée d'une bonna ligne au moins , par le moyen d'un ravalement qu'on fait au bois du deffus , lequel ne porte la glace que par fes extrémités, afin que le tain ne s'écorcha pas par le frottement , ou que fi le bois travaiUoit , il ne fît pas fendre la glace , qu'on retient en devant avec des pointes recouvertes par un cordonnet collé au pourtour de la glace , comme on peut le voir dans cette figure. Quelquefois on fait des faux-fonds qui portent la glace , comme celui ^2 ^ , ce qui donne le moyen de pratiquer uri vuide dans le deffus , qu'on ferme, ainfi que celui de dsffous, par le moyen de quelque reffort caché dans i'épaiffeur diJ bois. On fait des Néceffaires de toutes fortes de grandeurs , depuis 6 pouces de lar-' ge-ur, jufqu'à deux pieds & même plus. Les plus communs font faits en bois de noyer , toujours affemblés à bois de fil , & on garnit leurs angles avec des cornières de cuivre ou de fer poli , comme à la figure r . Quand les boîtes font grandes , on y met encore une ou deux équerres fur la hauteur , qu'on arrête * ainfi que celles des angles, avec des vis dont la tête eft noyée en parement, de manière qu'elle n'eft pas apparente, furtout quand la' garniture ( c'eft-à-dire , les équerres & les vis ) eft de cuivre. Aux grandes Boîtes de toilette , on met deux maini par les côtés, pour pou- voir les tranfporter aifément , & aux petites on n'en met qu'une placée au rniiieu du deffus. Menuisier , ///. Part. lU. Scd. % j tu 5So ^ MENUISIER, ill. Pan. SeB. lïl. Chap. XIIL Il y a de ces dernières dont l'intérieur eft vuide , c'eft-à-dire, fans garniture ; ces petites Boîtes ne fervent, pour l'ordinaire , qu'à ferrer les bijoux, & alors elles prennent le nom de Cojfre. On en fait de très-riches , tant pour la qualité du bois que pour la garniture ou ferrure extérieure , qui eft quelquefois d'argent ou de cuivre doré , difpofée au pourtour en diverfes bandes contournées , tant pour les orner que pour les rendre plus folides , ce qui , à mon avis , n'eft pas fort utile , vu que ces petits coffres font, par leur peu de volume , encore plus aifés à emporter qu'à être forcés. Ces Coffres font quelquefois ornés de Marqueterie de placage ; mais comme cela eft peu folide , je crois qu'il vau- droit mieux les conftruire en plein bois , foit de cèdre ou de tout autre bois précieux & odorant , & y incrufter ce qu'on jugera à propos. On peut faire des doubles fonds aux Coffres dont je parle, & les faire ouvrit à fecrets , dans le détail defquels je n'entrerai pas , vu qu'ils cefferoient d'être fecrets s'ils étoient connus de tout le monde, & que de plus ce détail , quoique du relTort des Ebéniftes , m'entraîneroit au-delà des bornes que je me fuis prefcrites. Les Figures 3 , 4 & J , repréfentent un petit NécelTaire de poche , à l'ufàge des hommes qui voyagent, & auxquels les chofes vraiment néceffaires peuvent fufKre ; c'eft une boîte de (î à 7 pouces de long , fur 4 pouces & demi de large , «Se 2 pouces un quart de haut , divifée en deux parties fur f épaiffeur , lef quelles parties font elles - mêmes divifées en plufieurs caflès ; fàvoir , celle A , fig. 3 , pour placer un peigne ; celle B, pour placer un couteau à ôter la pou- dre , & une brolfe à dents. La partie ovale C, doit être garnie de fer-blanc verni ou de plomb laminé très- mince , & fert de vafe pour délayer le favon avec une brofle , qui fe place , lorfqu'on n'en fait pas ufage , dans la caffe D , laquelle doit auffi être garnie , pour que l'humidité ne gâte pas le bois. La cafle E,fig. J , doit recevoir le rafoir ; celle F, des cifeaux ; & celle G , le cuir. Chacune de ces caffes doit être bien exaélement de la grandeur de chacune de ces pièces , pour qu'elles ne balottent point ; c'eft pourquoi il eft bon que celle F , dans laquelle on place les cifeaux, foit diminuée tant fur l'épaiflèur que fur la largeur , félon la forme de ces derniers , qu'il faut avoir , ainfi que le rafoir , avant que de décider de la grandeur des cafles & de leurs formes. Les trois caffes E, F, G , font fermées par une couliiTe H , fig, 4 , qu'on doit faire du même morceau que le bout de la boîte , afin que le joint foit moins fenfible ; & pour que le bout de cette coulifle fût moins apparent , on pourroit y ajufter une pièce à bois de fil , pris du même morceau que le côté de la boîte ; ce qui , au refte , n'eft pas fort nécelfaire , n'y ayant pas grand mérite à cacher des chofes , lorfqu'elles font faites pour être vues. Comme il pourroit arriver que la couliffe vînt à fe retirer, 6c par conféquerft Sect. IV . §. F. Defcriptîon de différentes Boîtes de toilette. 98 1 fortir d'elle -même j félon In poficion du la Boîte fè trouveroin j 011 feroit très- — «»* bien de l'arrêter par le moyen d'une goupille placée dans l'e'paifTeur du bout Pi-anche de cette dernière , afin qu'on ne pût ouvrir la couiilTe qu'après avoir ouvert le couvercle de la Boîte , qu'on peut fermer à clef, ainll qu'aux autres Néceflaires. Le couvercle de cette Boîte eft auffi garni d'une glace , afin qu'il ne manque rien à cette Toilette portative , qui peut être utile aux hommes de tous les états. Les Figures 6 ,j ,t , , 10 Se ix , repréfentent une autre elpece de Boîte utile aux Peintres en miniature , autant finguliere par fà forme que pour la diffi- culté de fon exécution ; c'eft un livre de la forme d'un in-douze , dont les deux delTus^/z, il,fig. 6 (Sj), fe féparent du dolTeret , & par conféqucnt du corps du livre , avec lequel ils ne tiennent que par le moyen d'un ravalement à queue d'aronde pratiqué dans leur épaiffeur , comme on peut le voir àla figure 8 & à la figure I I. Les deux defTus étant ôtés , le livre paroît ainfi qu'à la figure 11 , c'eft- à-dire , creufé de chaque côté d'un renfoncement L , dont la grandeur eft indi- quée par des lignes ponduées , & la profondeur fur la coupe/a. 8 ; c'eft dans ce renfoncement qu'on place des deffins qui font retenus par la pièce à queue ' qrs t,<^m leur fert de cadre, laquelle ne peut être retirée qu'après avoir fait fortir le dolFeret qui entraîne après lui une maffe fig. 7 (S" 10 , creufée en /, dé même que la figure 1 1 , dans laquelle elle entre comme dans une mortaife. Les renfoncements/, font recouverts par deux autres pièces à queue m n , 0/7 , qui leur fervent de cadres , ainfi que ceux de la figure i r , de manière que dans le même livre on peut mettre quatre deffms féparés les uns des autres fans crainte qu'ils ne fe froiffent ni fe maculent ; ce qui eft un très -grand avantagé pour ces fortes d'ouvrages. Je n'entrerai pas dans un plus grand détail pour ce qui regarde k conftrucftion de la Boîte dont je viens de parler, parce que l'infpeâion des figures doitfufnré pour en bien faire connoître toutes les parties , qui font plus aifées à defllner & à décrire , qu'à bien exécuter; car un Livre tel que celui que j'ai vu , & d'après lequel j'ai fait ma defcription , peut bien pafler pour un chef d'œuvre d'exécu- tion ; & je puis afllirer que je n'ai jamais rien vu de mieux ajufté , môme en métaux. MENUISIER, IlL Pan. SeB. 111 Chap. XIK CHAPITRE QUATORZIEME. De la troijieme efpece d'Ebénifterie en généraL Ij a troifieme Se dernière efpece d'Ebénifterie dont il me refte à traiter, eftj comme je l'ai die au commencement de cette partie de mon Ouvrage , celle où , avec le bois , on emploie les métaux , l'écaillé, l'ivoire & autres matières , & même les pierres précieufes. Cette efpece d'Ebénifterie eft nommée , pac les Ouvriers , Marqueterie ^ pour la diftinguer de celle où l'on n'emploie que du bois de placage. Cette dénomination , quoique la plus généralement ulîtée , ne me paroît pas jufte, parce que l'Ebénifterie dont je parle , eft plutôt une efpece de Mofaïque très-riclie , par le moyen de laquelle on peut repré- fenter toutes fortes de fùjets , fînon coloriés comme dans les ouvrages de Mofaïque ou Peinture en bois , du moins par le mélange & l'oppofition des différentes matières qu'on y emploie , qui fe détachent les unes des autres , & forment des Tableaux de la plus grande beauté , dont la belle exécution le di/pute fbuvent à la richefle de la matière. Cette précieufe Ebénifterie eft très-ancienne ; car fans avoir recours aux témoignages des Auteurs anciens , fouvent peu véritables ou mal entendus , on voit encore des ouvrages de cette efpece dans une des pièces de la Gallerie de Florence , digne de l'admiration des connoiffeurs & de la magnificence des Médicis , qui les firent faire. C'eft d'après ces beaux ouvrages qu'on en a fait d'autres en France , fi toutefois ceux qui y écoient n'y •avoient pas été apportés du temps des Reines Catherine & Marie de Médicis Depuis ce temps le goût de ce bel Art s'eft maintenu en F^rance jufqu'à (*) II y a dans un fallon de la Gaîlerie de Florence , nommée la Tribune , une armoire en forme de tabernacle ou de cabinet , compofée de jaffie, d'agate, & de toutes forces de pier- res précieufes, où l'on a employé, en forme de clous , des topazes, rubis, faphirs & émerau- des ; à la partie fupérieure on a place une perle d'une groITeur extraordinaire. Cette armoire efl: garnie de quatorze colonnes de lapis-lazuii , dont les bafes 6c les chapiteaux font d'or malîîf; elle efl de plus ornée de bas-reliefs d'or , exécu- tés avec beaucoup de foîn. Voyagz en Italie, Tome II, page 245. Ce bel ouvrage , dit le même Auteur , m'a rappelle ceux qui étoient autrefois à Verfailles, 3c dans le Garde-meuble à Paris ; & je ne doute pas qu'ils ne fuHent auflî venus de Florence dans le temps de Catherine 5c Marie de Aîédicis: on en a dépecé une partie pour enrichir le cabinet du Jardin Royal à Paris , où il n'y a pas de plus beaux échantillons de pierres dures , que les colonnes d'améthyfie qu'on en a retirées. Idem. On voit encore dans les Appartements de Saint-Cloud & de Chantilly , des cabinets de cette efpece, qui , quoique moins riches que ceux dont il eft parlé ci delTus , font d'une très-grande beauté. Il s'en trouve aufli chez quelques particuliers riches , qui en connoiffent le mérite, iSc qui les confervent avec beaucoup de foîn; & on voit dans beaucoup d'Eglifes à Paris, des tabernacles travaillés dans ce genre , qui font très-riches , tant pour le travail que pour la matière ; entr'aurres celui du maître- autel des Filles de la Vifiration , rue Saint Jacques , qui efl d'cbene , avec des chapiteaux & des bafcs de colonnes en argent , ainfi que les autres ornements qui y font. Les plus moder- nes de CCS différents ouvrages , font au moins du dernier fiecle; & on n'en fait plus mainte- nant , parce que , dit-on , ce n'efî: plus la mode ; comme ù ce qui efl vraiment beau , ne Pctoit pas toujours , Se que des ouvrages de fculpture & de dorure , fouvent très médiocres ( comme on n'en fait que trop maintenant ) fuffent préféra- bles aux chefs-d'œuvre du dernier fiecle, qu'on la Sect. I. Madères qu'on emploie dans la y. efpece d'Ebéniflerie. 983' la fin du dernier fiecle ; mais préfentement on ne fait prefque plus d'ouvrage d'Ebéniflerie de cette efpece, C ce n'eft quelques petits ouvrages, & deà boîtes de pendules , ce qui parmi les Ebéniftes a fait donner "le nom dé Tenduliftes à ceux de leurs Confrères qui s'occupent particulièrement de cé travail. Je ne m'étendrai pas beaucoup fur cette dernière efpece d'Ebéniflerie , non pas parce qu'elle n'eft plus à la mode , mais parce que je n'ai pas aiTez d'expérience pratique fur cette matière , & qu'il ne m'a pas été poifible de trouver tous les fccours dont j'aurois eu befoin pour entrer dans tous les détails qu'exige la pratique de ce bel Art. Je me contenterai de le décrire dans fon état adluel, & d'indiquer les moyens de le remettre dans fon ancien état j efpérant d'ailleurs que quelqu'un plus habile que moi achèvera ce que je nè fais qu'ébaucher ici. Les outils propres à travailler la troifieme efpece d'Ebéniflerie , font à-peu- près les mêmes que ceux des autres Ebénifles , dont j'ai fait la defcription dans le courant de cette Partie de mon Ouvrage ; c'eft pourquoi je n'en parlerai pas davantage , & je paflèrai tout de fuite à la pratique de l'ouvrage , après avoir dit quelque chofe des matières qui entrent dans fi conflruaion , ce qutî je vais faire dans la Sedion fuivante. Section Première. Defcription des difir entes matières qu'on emploie dans la conjlrucîion de la troifume efpece d'Ebéniferie. Les différentes matières qu'on emploie dans la conftruâion de la troifieme elpece d'Ebéniflerie ou Marqueterie proprement dite , font , ( làns y comprend dre les bois précieux & aromatiques dont j'ai fait la defcription au commen- cement de cette Partie, p. j6j & fuiv.) de deux efpeces, les unes animales & ies autres métalliques. Celles de la première efpece font l'écaillé de tortue , l'ivoire , la corne , la nacre de perle , le burgaut & la baleine ; enfin celles ne regarde plus , & auxquels on a fubrtitué d'élégantes fuperHuicés , q ii n'ont d'autre mé- rite que celui d'une mode paiïagere, qui cft bien- tôt effacée par une autre , qui elle même n'exilîe pas plus long-temps que le caprice de ceux qui l'ont inventée. Il eft vrai que les ouvr.igcs qu'on fait maintenant ont beaucoup d'apparence , & coûtent peu cher en comparailbn de ceux du dernier liecle; m^iis auffi font-ils moins àmz- bles & moins précieux , tant pour le travail que pour la matière , qui fouvent ne vaut rien; ce qui , au fond , n'eft pas un grand mal , puif- qu'on en donne plus qu'il ne faut pour l'argent qu'ils coûtent ; & que d'un autre côte le fort de CCS fortes d'ouvrages eft de ne devoir durer qu'autant qu'ils plaifcnt. Mais le véritable mal Menuisier , 111. Pan. UL Secl> qui en réfultejc'efi le tort qu'ils font aux Arts, en détruifant parmi les Ouvriers le goût des belles chofes , l'émulation & le deffein de bien faire , & en leur en faifant même perdre l'ha- bitude , fuppofé qu'ils rayent ; car rien n'e/i fl rare que de trouver des Ouvriers Irabiîes dans cette partie de i'Ebénillerie , fi ce n'ell quelques anciens qui y ont travaillé ou vu travailler; autrefois ; car pour les jeunes , le plus grand nombre ne ta connoifienc pa^ C'eft avec regrec que je dis ici des chofes fi peu honorables pour un fic;cle qui palTe pour celui des Scien- ces ; mais cela n'en eft pas moins vrai , tant pour la parrie de l'Art dont je traite , que pour beaucoup d'autres qui font dans le même cas, S lï 584 MENU I SIE R, III. Pan. SeB. III. Chap. XIF. ■de la féconde efpece , font le cuivre , 1 ecain , l'argent & l'or. Comme toutes ces matières font de nature différente , & qu'elles demandent à être diverfement travaillées, il m'a paru néceffaire d'en donner ici une defcription, qui , quoiqu'abrégée , puiffe mettre les Ouvriers à portée de connoître la nature de ces différentes matières. §. I. De l'Ecaillé. O N nomme Ecaille , la couverture d'un animal nommé Tortue, lequel eft amphibie & teftacée , c'eft-à-dire , couvert d'écaillés. Cette couverture eft plus ou moins grande, félon la grandeur de l'animal , & eft d'une forme ovale & convexe à-peu- près comme un bouclier ancien : elle n'eft pas d'une feule pièce ; mais elle eft compofée de plufieurs pièces de différentes formes & grandeurs , qui recouvrent les unes fur les autres , & ont un mouvement de compreffion ou de dilatation félon la volonté de l'animal , & cela par le moyen des mufcles qui attachent les écailles au carapace ou toîc de la Tortue. Il y a des Tortues dans les mers d'Afie & d'Afrique ; mais les plus belles font celles qu'on prend aux environs de l'Ifle de Quibo , dans la mer du Sud , oià il y en a de quatre fortes ; favoir, 1°. la Tortue Jranche , qui eft d'une moyenne grandeur , & qui n'eft recommandable que pour fa chair, qui eft très-bonne à manger : elle a auffi des écailles ; mais elles ne peuvent fervir à rien à caufe de leur peu d'épailTeur : 2°. la Carette ou k Caret , qui eft plus petite que la première , & dont la chair n'eft pas fi bonne , mais qui , en revanche , donne de belles Ecailles dont les Tabletiers font beaucoup d'ufage , & qu'on emploie auffi dans les beaux ouvrages d'Ebénifterie : 3°. la kaouanne ou cahoane ; en Anglois , loger-liu ; & en Efpagnol , caivava. Cette efpece de Tortue eft beaucoup plus grande que les deux premières. Sa chair n'eft pas bonne à manger ; mais on en tire de l'huile. Ses Ecailles font beaucoup plus grandes que celles du Carret ; mais elles font plus minces & bien moins eftimées : ce font ces Ecailles dont les Ebéniftes fe fervent le plus commu- nément, tant parce qu'elles font moins chères, que les autres , que parce qu'étant plus minces , ils ont moins d'ouvrage à y faire pour les mettre d'épailTeur , & par conféquent moins de déchet. La quatrième efpece de Tortue eft la plus grande de toutes ; elle n'eft abfolument bonne à rien , fi ce n'eft à faire de l'huile à brûler. Il y a auflî des Tortues de terre ; mais les unes n'ont pas d'Ecaillés fur le carapace , & l'Ecaillé de celles qui en ont ne peut être d'ufige pour les ouvrages d'Ebénifterie ; c'eft pourquoi je n'en parlerai pas davantage. L'Ecaillé ou toît du Carret , eft compofée de treize feuilles ; favoir , huit plates , qui font placées aux deux côtés , & cinq qui font bombées , & qui font placées lùr le dos. Ces dernières font les plus épaiffes , &c font Sect. I. Matières quonemploie dans la 3'=. efpece d'Ebénifierie. 985 prefque égales d'épaiffeiir dans toute leur fuiface. Quant aux huit autres, il y en a quatre d'une forme oblongue, &à-peu-près parallèles; & les quatre au- tres font arrondies d'un côté pour fuivre le contour que forme le carapace » fur & à l'extrémité duquel elles, font placées. Ces Ecailles , ainfi que les quatre autres , ne font pas abfolument droites fur leur furface ; mais elles font toutes un peu bombées , fur-tout ces dernières , c'eft-à-dire , celles des extrémités. Les arêtes des unes & des autres font amincies à rien fur les ex- trémités , ce qui ne laiffe pas de faire beaucoup de perte , à moins qu'on ne foude pkifieurs de ces morceaux les uns avec les autres , comme le font les Tabletiers pour différents ouvrages. La plus grande longueur des feuilles de Carrette eft de douze à quinze pouces, fur fept à huit pouces de large. Le côté de la chair des feuilles d'Ecaillé , c'eft-à-dire , celui qui eft concave , eft toujours le moins beau , & fà furface eft prefque toute couverte d'une elpece de vermiculure blanche , qui fe deffine aiïèz bien. Je ne fai fi ce n'eft pas la marque de leur adhérence avec le tiffu membraneux qui les tient avec le carapace ou toît de l'animal. L'Ecaillé a trois couleurs diftinélives ; favoir , le blond , le brun & le noir clair. Quelquefois une ou deux de ces trois couleurs dominent , mais elles font rarement feules ; & j'ai vu dans un grand Magafin d'Ecaillé une feuille totalement blonde , que le Marchand eftimoit beaucoup , comme une cho{e très-rare. Il y a auffi , fur-tout dans le Carret, des feuilles qui font jafpées & mêlées de brun minime de différentes nuances , & de blanc , dont quelques endroits ont de l'orient comme la nacre de perle. En général l'Ecaillé eft tranfparente , dure & très-fragile ; car quoiqu'elle foit à-peu-près du genre des cornes , elle eft beaucoup moins liante que ces dernières , ce qui vient de ce qu'elle a moins de parties graffes qui en lient les parties les unes avec les autres. ' L'Ecaillé eft cependant très-malléable , & acquiert beaucoup de ductilité , fbit par le moyen du feu ou de l'eau bouillante ; mais lorfqu'elle eft refroidie , elle refte dans la forme qu'on lui a donnée , & devient auffi caftante qu'auparavant. Quoique l'Ecaillé foit très-pleine , elle eft fujette à fe retirer à la chaleur ; c'eft pourquoi on doit avoir grand foin qu'elle foit très-feche quand on l'em- ploie, parce que lorfqu'elle eft humide, pour peu qu'elle éprouve un peu de chaleur , elle fe retire confidérablement. L'Ecaillé a une propriété très-finguliere ; c'eft qu'on la fbude fans avoir befoin d'aucun agent que ce puifle être , comme je l'expliquerai en parlant dé la manière de travailler l'Ecaillé. '^10 ,§5 MENXJtSIÊR, m. Part. Secl. lll. Chap. XIV. §. II. De l'Ivoire. L'Ivoire eft une fubftance offeufe , qu'on tire des dents, ou, pour tnieux dire , des défenfes de l'Eléphant : on les nomme les marfils ou morfils lorfqu'elles font en pièces , & on ne leur donne le nom d'Ivoire , que lors- qu'elles font débitées. Les défenfes d'Eléphant viennent d'AOe & d'Afrique : ces dernières font les plus petites , & n'ont qu'environ quatre pieds de long ; au lieu que les premières en ont jufqu'à dix. Les plus petites fe tirent de la côte d'Afrique , fur-tout de Riofrefca, de la rivière de Gambie , du Sénégal , & de la côte des Dents. Celles d'Afie fe tirent de l'Ifle de Ceylan & des Royaumes de Chine , de Pégu , de Siam & d'Oracan. On dit que les Ivoires de Ceylan ne jaunif- fent jamais ; c eft pourquoi on les vend plus cher que les autres. Quoique l'Ivoire foit du genre des os, il eft beaucoup plus compaél & plus pefant que ces derniers ; fes pores étant très-ferrés le rendent capable de rece- voir un très-beau poli qui fe conferve long-temps. On diftingue deux fortes d'Ivoire ; favoir , le verd & le blanc. On peut les diftinguer tout deux à la couleur de leur écorce ; l'Ivoire verd a l'écorce brune & noirâtre , & un peu claire ; & l'Ivoire blanc a l'écorce blanche , ou citron un peu fombre. Ces marques ne font pas bien certaines , & il eft bon de couper le bout de la défenfe pour juger de la véritable couleur de fon intérieur. On préfère l'Ivoire verd au blanc , parce qu'il a les grains plus fins , & qu'il eft par conféquent moins poreux que le blanc qui a fouvent des grains défagréables à voir , & qui a le défaut de devenir jaune avec le temps ; au lieu que dans l'Ivoire verd , les grains ne font pas ou du moins très-peu vifibles , & que la petite teinte de verd fe pafFe en très-peu de temps , pour faire place h un très-beau blanc de lait , qui a l'avantage de ne point jaunir. L'Ivoire verd a le défaut d'être plus fragile que le blanc , & il fe retire davantage que ce dernier ; ce qui , en fuivant l'analogie des bois durs ou tendres , ne devroit cependant pas être ; mais ce n'eft pas en cela feul que la nature s'écarte ou du moins femble s'écarter des règles qu'il nous a plus de lui prefcrire. On ne peut pas redreffer l'Ivoire au feu , ainfi que l'Ecaillé ; il faut le débiter à la fcie , puis le drelfer à la lime , comme fi c'étoit un morceau de cuivre ou d'autre métal. Les morfils ou défenfes d'Eléphants font un peu courbes fur leur lon- gueur , & fe terminent en pointe : ils ne font pas pleins dans toute leur longueur ; & en les débitant , il faut avoir grand foin de prendre intérieu- rement la profondeur de la cavité pour les fcier à cet endroit, afin de la ménager davantage. §• Sbct. 7. Madères qu'on emploie dans ta 3^ efpece d'Êbénifierie, 587 §. ni. De la Corne, La Corne dont les Ebéniftes font ufage, eft une efpece de Corne blan- che , qu'on vend à Paris fous le nom de Corne d'Angleterre , d'où elle eft apportée dans de petits barils. Ce font de ces Cornes dont les Fer- blantiers font ufage pour fermer les lanternes. On en vend de plus ou moins épaiffes : celles qui font les plus blanches, qui n'ont point de taches, & qui font bien tranfparentes , font les plus recherchées par les Ebéniftes , à moins qu'ils ne veuillent en faire de faulfes écailles ; alors ils fe fervent de la Corne rouife , qui imite en quelque façon le clair de fécaille , dont ils contre- font les nuances avec de la couleur, comme je le dirai en fon lieu. Je ne m'étendrai pas davantage au fujet de la Corne , parce qu'on la trouve par feuille toute apprêtée , & qu'il ne s'agit que du choix lorfqu'on veut en faire em- plette. Quant à fon ufige , j'en parlerai en traitant, de la pratique de la Marqueterie. §. IV, De la Nacre de perle. O N nomme Nacre de perle , ou Qmplttnent Nacre , la coquille d'une efpece d'huître , dans laquelle fe forment les perles. Ces huîtres font trois ou quatre fois plus groflès que les huîtres ordinaires. La Nacre eft pef inte & très-dure ; fon extérieur eft d'un gris roufsâtre & tout ridé ; mais les premières feuilles extérieures de cette coquille , une fois enlevées ( ce qui peut fe faire par le moyen de f eau-forte & du tourret d'un Lapidaire , ou même tout fimplement du frottement d'une meule à l'eau ) , elle paroît auffi belle qu'en dedans , où & couleur eft d'un beau blanc argentin très-luifant , lequel eft mêlé des plus belles couleurs de l'iris ou arc-en-ciel ; de manière qu'on y voit tout à la fois des teintes de jaune , de rouge , de violet , de bleu & de verd , lefquelles changent inceffamment félon qu'on regarde la Nacre en différents fens , ce qui eft caufé par les diverfes manières dont les parties qui compofent la Nacre , reçoivent la lumière , & la réfléchilfent à nos yeux. Ce changement de couleur fe nomme orieni ; ainfi on dit que la Nacre à un bel orient , quand ces changements de couleurs font très-variés , & la différence de ces dernières bien fenfible. La Nacre a encore la fmgularité de paroître ondée à fa furface , quoi- qu'elle fok parfaitement unie ; & cette apparence approche fi fort de la vérité , qu'on la touche quelquefois pour s'affûrer , par le taél , de l'illufion qu'elle fait aux yeux. Ces ondes & ces changements de couleurs ne font apparents que parallèle- ment à la furface de la Nacre ; car quand elle eft refendue , fon épaiffeur eft d'une couleur égale & unie , d'un blanc mat , tirant fur le gris-vineux. Menuisier , IIL Fart. III. Seci. T 11 $.8S ME NU 1 S 1E R , m: Pan. SeS. Hî. Chap. XIV. . . La Nacre eft extrêmement dure ; on ne peut l'entamer qu'avec la fceî t après quoi on la dreiTe fur le grès, comme je le dirai en fon lieu. La Nacre a le défaut d'être très-caflânte, & quelquefois piquée de vers , même bien profondément. Elle fe fend aufli quelquefois fur fon épaiffeur qui fe fépare par feuillets ; «e font ces feuillets ou couches qui étant plus ou moins opaques les uns que les autres , ou du moins difj3ofés les uns fur les autres d'une manière ondulée & peu parallèle , donnent naiffance aux ondes & aux différentes couleurs qu'on iemarque à la furface de la Nacre. Les plus belles Nacres viennent des Indes Orientales. On en pêche auffi en Amérique & fur les côtes d'Ecoffè. Il y a une efpece de Limaçon de mer , nommé Burgaut ou Burgaux , Sc par les Ouvriers Burgos , 'qui fe trouve dans toutes les Mes de l'Amérique , dont la coquille donne une fort belle efpece de Nacre ; mais comme les plus grandes de ces coquilles ne font pas plus grolTes que le poing , on n'en peut tirer que de très-petits morceaux , vu qu'elles n'ont d'orient , ainfi que les Nacres de perles, que du côté de leur furface, ou du moins parallèlement à cette dernière. Le Burgaut a quelquefois des couleurs plus vives que la Nacre de perles , à laquelle on le préfère ,. fur-tout quand on n'a befoin que de petites parties : du refte il fe refend & fe travaille de même que la Nacre. §. V. De la Baleine. L A Baleine efl: peu en ufage en Ebénifterie ; cependant on pourroit en tirer un très-bon parti pour des filets noirs , ou tout autre ouvrage. La Baleine proprement dite eft tirée des fanons ou efpeces de lames qui fervent de dents au poiflbn qui porte le nom de Baleine. Ces fanons font compofés d'une fubftance filandreufe recouverte d'une fubftance à-peu-près femblable à la corne de bouc. La Baleine fe polit très-bien. Il y en a de grife & de noire ; cette dernière eft la plus belle , & on doit la préférer pour les ouvrages d'Ebénifterie. §. VI. Du Cuivre. Le Cuivre eft un métal moyennement pelant, d'une qualité dure, fbnore & élaftique ; fa couleur eft d'un rougeâtre brillant : quoiqu'il foit un peu moins duflile que l'argent , on en fait des fils très-déliés par le moyen de la filière. On diftingue deux fortes de Cuivre ; favoir, le Cuivre naturel, qui eft celui dont je viens de parler , qu'on nomme Rofette ou Cuivre rouge , & le Cuivre fadlice , nommé Cuivre jaune ou Laiton , lequel eft compofé d'environ deux tiers de rofette , & un tiers de terre calaminaire , autrement dit , calamine , laquelle , en changeant la couleur du cuivre ne lui ôte pas fa duâilité , pour- Vu qu'on le travaille à froid en le faifant recuire de temps en temps ; car loif- qu on veut le forger à chaud , il fe brife Si fe met en pouiTiere , ce qui elî Sect. I. Matières qu'on-êinpïoie dam lay. ejpece d'Ehénîflerie. 589 caufé par la différence des matières qui réfiftant plus l'une que l'autre à l'adion du feu, fe détruifent lorfqu'on veut les forger à chaud. Le Cuivre jaune eft moins pefant que le rouge , & cette différence eft comme de à 648. LesEbéniftes ne font ufageque deCuivre jaune, foit pour les orneménts qu'ils adaptent à leurs ouvrages , foit pour faire des pièces de marqueterie, on ils emploient du laiton en table, qu'ils choififfent dans les magafins à l'épaiffour qui leur eft convenable. Ce n'eft pas qu'ils ne puffent fe fervir également de Cuivre rouge, ce qui feroit même très-bien dans certaines occafions , comme, par exemple, fi on l'incruftoit dans de l'Ebene , où il trancheroit moins que le Cuivre jaune ; mais enfin ce n'eft pas la coutume , de laquelle on feroit très- bien de s'écarter quelquefois , comme je le dirai en fon lieu. Les tables de laiton doivent être choifies les plus égales d'épaiffeur qu'il eft poflible , fans aucune inégalité ni cavité ou gerçures à leurs furfaces , afin qu'étant employées, elles foient fufceptibles d'un beau poli, ce qui eft très- efl-entiel pour les ouvrages de Marqueterie, où le moindre défaut dans le Cuivre feroit beaucoup de tort à l'ouvrage. §. VIL De ÎEtain. L' E T A I N eft le plus léger de tous les métaux ; fa couleur eft blanche à-peu-près comme celle de l'argent: il eft flexible & mou , & fait du bruit lorfqu'on le plie. Il s'allie bien avec touts les métaux ; mais il leur ôte leur duailité , & les rend caftants comme du verre. Il vient de l'Ëtain de divers pays, comme de la Chine, du Japon & des Indes Orientales , particulière- ment de Malaga. Il en vient auflî de Bohême; mais le plus eftimé eft celui d'Angleterre , connu fous le nom IEtain de CornouaiUes & de Devonshire , Provinces d'Angleterre, (ju'on nomme à Paris £mm fin. Comme l'Etain en général eft un peu mou, il eft bon de l'allier d'un peu de rofette , ce que les Potiers d'Etain appellent donner de l'aloi , lequel n'eft autre chofe que deux à trois livres de rofette fondues à part^ dans lefquelles on mêle à-peu- près autant d'Etain, & quelquefois une livre de bifmuth ou Etain de glace; puis on mêle le tout dans cent livres d'Etain fin en fufion , ce qui le raffermit , le rend plus fonore & plus fufceptible de recevoir le poli. Les Ebéniftes font peu d'ufage d'Etain maintenant, quoique cela fafte de très-belle marqueterie: on trouve de l'Etain par table chez les Potiers d'Etain , qui les planent & les poliffent pour les vendre aux Graveurs de mufique ; & ces tables pour- ïoient très-bien fervir aux Ebéniftes , comme je le dirai ci-après. Au défaut des planches planées , on pourroit en difpofer au laminoir ; mais celles qui font planées , font meilleures pour recevoir la gravure , & pai conféquent pour les ouvrages de Marqueterie. 10 ME NU I S 1ER, m. Pan. Sect lit Chap. XÎV. §. VIII. De l'Argent. L'A R GE N T eft , après l'or , le plus beau des métaux ; fa couleur eft blanche & brillante lorfqu'il eft poli ; il eft médiocrement dur , plus pefant que le cuivre , mais moins que l'or, là pefànteur étant à-peu-près de 717 livres le pied cube , & à celle de ce dernier à-peu-près comme 5 eft à 9. Apres le fer , c'eft le métal qui fe travaille le mieux , foit à froid & à chaud ; & il prend fous le marteau toutes les formes qu'on juge à propos de lui donner, L'Argent a befoin d'un peu d'alliage pour fouffrir le travail ; la moindre quantité de cet alliage eft d'un trente-deuxième , & au plus d'un douzième. L'alliage de l'Argent fe fait avec de la rofette la plus pure , ce qui le rend très- élaftique. On peut avoir, au moyen du laminoir, des feuilles d'Argent de telle épailfeur qu'on le juge à propos , ce qui eft très-commode pour les ouvrages d'Ebénifterie , où on l'emploie avec le cuivre , ou même avec 1 or , ou bien tout feul avec de l'écaillé. §., I X. De L'Or. L' O R eft le plus précieux & le plus eftimé de tous les métaux ; il eft aulTi le plus compaél; & le plus pefant; car un pied cube d'Or pefe 1325 livres 4 onces. C'eft un métal parfait , inaltérable , d'une couleur jaune qui a peu d'éclat. Il n'eft ni élaftique ni fonore ; mais il eft très-duélile & malléable , même plus que l'argent , lorfqu'il eft allié convenablement ; alors il acquiert beaucoup d 'élafticité , foit qu'on le travaille avec le marteau à chaud ou à froid , & même au laminoir. L'alliage de l'Or fe fait avec de l'argent ou de la rofette ; on préfère cepen- dant cette dernière , parce que l'alliage de l'argent blanchit la couleur de l'Or ; au lieu que la rofette l'augmente. L'alliage de l'Or le plus fin eft ordinairement d'un vingt-quatrième , c'eft-à-dire , que fur vingt-trois parties d'Or on y ajoute une partie de cuivre ; cependant pour lui donner plus de fermeté on l'allie d'un fxieme ; c'eft ce qu'on appelle de l'Or à vingt karats ; mais l'alliage le plus ordinaire eft un douzième ou ce qu'on appelle de l'Or à vingt-deux karats , ou Or de Couronne. L'Or fe travaille & fe polit très-bien ; il eft d'un bon ufage pour les ouvrages de Marqueterie , où on l'emploie avec l'argent , l'écaillé & la nacre de perle ; quelquefois on l'emploie feul avec ces deux dernières matières ; & alors pour donner plus de beauté à l'ouvrage , on y met de l'Or de difiFérentes couleurs, comme de l'Or blanc , de l'Or jaune , de l'Or rouge & de l'Or verd , &c. Après avoir traité fommairem.ent des différentes matières propres à être employées dans la dernière efpece d'Ebénifterie , il me refte à parler des agents qui Sect, I. Madères qu'on emploie dam la 3c. efpece d'EbénïJlerie. qui fervent à les lier entr'elles , & au fond de fouvrage , ainfî que ceux qui fervent à retenir les joints des métaux , ou , pour mieux dire , à les fouder. Les premiers font différentes fortes de colles & de maftics , & les féconds des efpeces de compoficions de métal, qu'on nomme foudures , lefquelles diffé- rent félon les métaux qu'on veut fouder, & qui doivent toujours être d'un titre beaucoup plus bas que ces derniers , afîn d'entrer plus vite en fufion , comme je le dirai en fon lieu. Je ne parlerai pas de la colle forte , vu que j'en ai traité dans la première Partie de mon Ouvrage, page 80. Cependant je ne faurois trop recommander aux Ebéniftes de ne fe fervir que de bonne colle d'Angleterre , pour toutes les parties de leurs ouvrages quelconques, celle de Paris ne valant abfolumenc rien pour coller l'écaiUe & les autres matières dont j'ai parlé ci-deffus , y ayant même des occafions où , à cette dernière , il faut fubftituer la colle depoiffon, donc je vais parler. §. X. De la Colle de PoiJJon. L A Colle de poilTon eft la meilleure qu'on puifTe employer pour coller les bois durs & les métaux ; elle eft faite avec la peau & les parties nerveufes & mucilagineufes de certains grospoilTons qui fe trouvent dans les mers deRuffie ; auffi n eft-ce que dans le Nord que fe fait la Colle de poiffon , d'où les Anglois & les HoUandois nous l'apportent , fur-tout du port d'Archangel , où il s'en fait un grand commerce. La bonne Colle de poiflbn n'a point d'odeur, & doit être d'une couleur blanche , claire & tranfparente ; & il faut faire atten- tion fi elle n'eft point fourée , c'eft-à-dire , mêlée de parties hétérogènes. Pour faire fondre la Colle de poiffon , on s'y prend de la manière fuivante • on commence par couper la Colle par petits morceaux , puis on la met dans un pot de terre ou un vafe de verre avec de bonne eau-de-vie , en obfervanc que cette dernière furnage la Colle ; puis on bouche le vafe , qu'il ne faut emplit qu'à moitié , & on met le tout fur les cendres chaudes jufqu'à la parfaite diffo- lution de la Colle ; ou bien on coupe la Colle comme ci-delfus , & on la met tremper dans de feau-de-vie jufqu'à ce qu'elle foit araolie; enfuite on la fait fondre au bain-marie à l'ordinaire. Il y a des Ouvriers qui , au lieu d'eau-de-vie , ne mettent dans la Colle de poiffon que de l'eau ordinaire , à laquelle ils ajoutent une gouffe d'ail , ce qui eft affez bon , mais qui ne vaut pas l'eau-de-vie , avec laquelle même on peut mettre un peu d'ail , ce qui ne peut qu'augmenter la force de la Colle, On peut faire la même chofe à de bonne Colle d'Angleterre , c'eft-à-dire , y mettre de l'eau-de-vie & de l'ail. Je f ai fait plufieurs fois , & cela m'a toujours bien réuffi ; je crois même que dans le cas où on n'auroit que du bois à coller avec de fécaille ou autres matières fur lefquelles la chaleur a beau-^ Menuisier , 111. Pan. III. Secl. V 1 1 S.pa MENUISIER, III. Part. Sed III Chap. XIV. coup d'aaion , & dont par conféquent elle ouvre les pores , on pourroit fc paflèr de cette dernière Colle, ainfi qu'on le fait touts les jours. §. XI. Bu Ciment ou Maflic. O N nomme Ciment ou Majlic , une compofition quelconque , dont la nature glutineufe Se tenace eft propre à lier & arrêter enfemble plufieurs pièces, foit qu'elles foient homogènes les unes aux autres, ou qu'elles foient hétérogènes , ou , pour parler un langage plus connu , foit qu'elles foient de ' même ou de dilïerentes efpeces. On fait diverfes fortes de Ciment; celui qui fert le plus généralement pour arrêter les métaux , eft compofé de quatre parties de poix-réfine , deux parties de cire jaune , & une partie de poix noire. On fait fondre toutes ces drogues enfemble dans un vafe vernilTé & à très-petit feu , & même fur 'des cendres chaudes; quand ces matières font parfaitement fondues , on y mêle de la poudre de brique pulvérifée & palTée au tamis de foie , & on en met une quantité fufEfante pour donner au Maffic la confiftance d'une pâte molle , qu'on a foin de bien remuer , afin que toutes les parties foient bien mêlées les unes avec les autres. On fait d'autre Maftic qui eft prefque femblable à ce dernier : il eft compofé de quatre parties de poix-réfine broyée , d'une partie de cire jaune, & d'une partie de brique pulvérifée. Ces deux efpeces de Maftics s'emploient à chaud. Pour les verres & les pierres tranfparentes , & même les marbres , on fait un Maftic compofé de chaux vive pulvérifée, de farine de feigle & de blancs- d'œufs mêlés enfemble avec de l'eau falée , ou bien une partie de chaux vive pulvérifée, deux parties de brique pafTée au tamis de foie, &le tout détrempé dans de l'huile de noix. ^ Il y a d'autre Maftic fervant au même ufage , & aux mofaïques de verres & d'émaux, qui eft compofé de chaux, de pierre dure mêlée avec de la brique bien pulvérifée , de la gomme adragant & des blancs-d'œufs ; mais celui dont on fe fert le plus communément pour ces fortes d'ouvrages , eft compofé de chaux éteinte à l'air , de la poudre de marbre ( ou bien du blanc d'Efpagne , ce qui vaut autant ) broyés enfemble avec de l'huile de lin , & réduit à la confiftance d'une pâte molle , à laquelle on donne plus ou moins de corps , félon qu'on augmente ou diminue k quantité de poudre de marbre ou de blanc d'Efpagne. C'eft ce Maftic qui fert à la conftrudion des mofaïques de Rome , à l'exception qu'à la place de la poudre de marbre ou du blanc d'Efpagne on y emploie de la pierre tendre de Tivoli , autrement dit Tiiur du temps des anciens Romains. Si je me fuis un peu étendu furies différentes fortes de Maftics, c'eft qu'ils font d'un grand ufage dans les ouvrages d'incruftation , où l'on em- ploie des métaux ou des pierres dures. S^CT, I. Maderesgu'on emploie dans la y. efpeced'Ëbénîflerie. ^ §. XIL Des différentes fortes de Soudures. La Soudure eft, comme je lai dit plus haut, un métal allié de manière qu II eft plus fufible que celui avec lequel il s'unit , & dont il arrête les diffé rentes parties. Chaque métal doit avoir une Soudure qui lui foit propre, laquelle eft plus ou moins forte , à raifon de la force des pièces qu'on veut fouder & de la manière dont on les foude. On appelle Soudure forte , celle qui appro- che le plus de a nature du métal qu'on veut fouder , & qui , pa, conféquent , eft moms fufible que la Soudure foible qu'on emploie aux petits ouvra.es dont le peu de capacité fait craindre que la chaleur du feu ne les fa/fe fondre ce qu. oblige à n'employer à ces fortes d'ouvrages que de la Soudure à très! Das titre, & par conféquent fort aifée à entrer en fufion , On trouve de la Soudure toute faite ; cependant il arrive quelquefois qu'il n eft pas tres-aife d en avoir , ou que ceux qui en vendent font myftere de eurs^procedes. Je vais donner la manière de faire les différentes Soudures, dans le même ordre que j'ai fuivi en faifant la defcription des différents métaux Pour fane la Soudure forte pour le cuivre, il faut mettre dans un creufet Soudur. dix livres & demie de laiton en mitraille; quand il fera bien fondu & très- P°" chaud, on y jettera trois livres & demie de zinc (qui fondra très-promptement) • on remuera la matière ; & fitôt qu'on s'appercevra que lezinc fera parfaitement fondu, onyjettera cinq onces d'étain fin. On remuera encore le tout un moment & on jettera la matière à terre dans un endroit propre , & le plus mince qu'il ferl poffible ; puis on pilera le tout dans un mortier, & on lepalTera dans des cribles dont les trous feront de différentes groffeurs , pour avoir des grains de Soudure d une force convenable à celle de l'ouvrage qu'on veut fouder. On fait encore de la Soudure pour le cuivre avec de la rofettc & du zinc feulement : elle eft plus ou moins forte en raifon de la différence qu'il y a dans la quantité de l'une ou de l'autre de ces matières. La plus forte, eft de cinq parties de rofette , contre une de zinc ; la moyen ne eft de trois parties de rofette contre une de zinc ; & la plus foible eft de deux parties de rofette contre une de zinc. Cette dernière Soudu«; eft très-fufible ; mais elle a le défaut d'être très-aiguë. On fait de la Soudure pour fouder le laiton, avec de ce dernier mêlé de zinc ; mais je crois qu'il vaut mieux fe fervir de la Soudure moyenne de rofette dont je viens de parler ci-deffus ; & dans le cas de petits ouvrages, on feroic beaucoup mieux de fe fervh- d'une Soudure compofée de deux parties d'argent & d'une partie de laiton. ° Pour faire la Soudure de cuivre dont je viens de parler, on commence par faire fondre la rofette dans le creufet; puis quand elle eft en fufion, on y iMle le zinc ; & lorfque tout eft bien mêlé , on le jette dans une lingotiere • 594 MENUISIER, III. Tan. Secl. IIL Chap. XIK puis quand le lingot eft froid , on l'applatit au marteau en lames très-mmces ; pour en faire des paillons de Soudure. Soudure La Soudure d'étain fe fait avec de letain fin & du plomb neuf, dont on poud'^tain. g„Yi,onune partie ou une partie & demie, contre cinq d'écam, quon fait fondre enfemble; & pour saffurer fi cette Soudure eft à fon vrai degré on en prend quelque peu , qu'on verfe fur une brique bien feche. Si quand la Soudure eft refroidie , il paroît à fa furface comme des petits yeux moyen- nement brillants, c'eft un figne quelle eft bonne pour fouder letam. Si au contraire ces yeux étoient très-grands & brillants , il faudroit y mettre un peu plus de plomb. En général, la Soudure eft matte & blanche quand letam domine trop, & elle eft matte & grife quand c'eft le plomb qui domine. Soudure La Soudure d'argent fe fait en mettant dans un même creufet neuf , trois parties de bon argent au titre de onze deniers , avec une partie de laiton ; on ■ les fait fondre , puis on les verfe dans une lingotiere ; & après que le lingot eft refroidi , on le forge à froid pour le réduire en lames très-minces & en faire des paillons. Si en forgeant cette Soudure elle vient à fe fendre , il faut la remettre au feu & la lailTer refroidir avant que de recommencer à la forger. Cette Soudure fe nomme Soudure au tiers : on en fait auffi au quart & au fîxieme ; cette der- niere eft la plus forte de toutes. Soudure La Soudure d'or eft compofée d'une partie d'or , de deux parties d argent , pour l'or. & d'une partie de lofette. Quand on veut qu'elle foit plus forte de couleur , on augmente la quantité de for. Cette Soudure fe fait de la même manière nue celle d'argent ; c'eft pourquoi je n'en parlerai pas davantage. Il feroit très-difiicile de faire ufage des Soudures dont je viens de parler , pour la réunion des différents métaux, fi on n'y joignoit le borax , efpece de felou fubftancefoffile blanche & tranfparente, à- peu-près femblable à de 1 alun ; le borax a la propriété de faciliter la fonte des métaux d'en réunir toutes les parties , & de les garantir des impreffions de fair & du feu . en les envelop- pant d'une efpece de verre mince ; c'eft pourquoi on l'emploie dans les Soudures , parce que non-feulement il précipite la fufion de la Soudure & l'empêche de fe brûler avant que d'entrer en fufion , mais encore parce qu il la rend plus coulante , & l'attire à lui dans toute la partie de la pièce ou on la ne faut pas employer le borax fans auparavant l'avoir fait calciner , ou , pour parler plus jufte , l'avoir fait fondre à part, ce qui fe fait en le mettant dans un creufet , autour duquel il faut faire un feu modéré , parce qu il fe vitrifiroit à un trop grand feu ; c'eft pourquoi il faut avoir loin de le retirer du feu lorf- nu'il ne bouillonne plus: il faut auffi que le creufet foit grand; car quand le borax eft en fufion, il s'élève beaucoup. La plupart des Ouvriers ne font pas tant de façon pour faire fondre le borax, ou, comme ils difent communément , le f Jre calciner : ils fe contentent de le mettre chauffer fur une pelle de fer, & ils le retirent lorfqu'il celfe de bouillonner. Sect. h. Ouvrages ùà Vùn emploie la y. efpece d'Ebénifterie. Je ne m'étendrai pas davantage fur la defcription des matières qui entrent dans la conftruâion de la troifieme efpece d'Ebénifterie ; il me fuffit d'en avoir donné une idée, pour que les Ouvriers qui liront cet Ouvrage, foient en état d'en pouvoir faire la jufte différence , & de les mettre en ufage avec connoif- fance de caufe. Quant aux autres matières , comme les verres coloriés , les émaux , les marbres & les pierres précieufes , telles que le lapis , les agates , les cornalines , les calcédoines , les émeraudes , les turquoifes & mêr.i.e les rubis & autres , je n'en parlerai pas du tout , parce qu'abfolument parlant , le travail de ces différentes matières n'eft pas du reffort des Ebéniftes , auxquels cependant ces connoiffances ne feroient pas tout-à-fait inutiles , fi les bornes que je me fuis prefcrites , & encore plus le peu de connoiffances-pratiques que j'ai des différents talents où on fait ufage de ces matières, ne m'obligeoient de renoncer à un travail abfolument au-deffus de mes forces , quelque defir que j'aye d'être utile à mes Confrères. Section Secohdej Des Ouvrages auxquels on emploie la troifieme efpece d'Ebènijlcrie. J'ai dit plus haut qu'on ne faifoitprefque plus ufage de la troifieme elpece = ^-'' ' ■ d'Ebénifterie , fi ce n'étoit pour orner quelques Boîtes de pendules ; or , comme je n'ai pas donné d'exemples de ces fortes de Meubles dans la féconde Seélion de cette troifieme Partie de mon Ouvrage, vu que la conftrudlion des Boîtes de pendules eft abfolument du reffort des Ebéniftes , je ne puis me difpenfer de donner le détail de ces fortes d'ouvrages, & la manière d'en difpofer les maffes , foit pour recevoir de la Marqueterie ou de l'Ebénifterie de placage , ou Amplement de la peinture , comme cela eft fort à la mode à préfent. On diftingue deux fortes de Boîtes de pendules ; favoir , les grandes , qui ont cinq à fix pieds de hauteur , & les petites , qui n'en ont guère que deux , & qui font ordinairement fupportées par des pieds en confoles. On fait encore de plus petites Boîtes que ces dernières ; alors elles prennent le nom de jyorK- montres. Ces fortes de Boîtes n'ont pas de pieds ou fupports en confoles , & n'ont guère qu'un pied à quinze pouces de hauteur. Les Ebéniftes ordinaires , c'eft-à-dire , le plus grand nombre , ne font pas les bâtis de leurs Boîtes eux-mêmes ; mais ils les font faire par des Ouvriers qui ne s'occupent que de cette efpece de travail , & qui y mettent tout le moins de matière &de façon qu'il leur eft poffible ; cependant il y en a d'autres qui font affez curieux de leurs ouvrages pour les faire eux-mêmes , ou pour les faire faire chez eux, afin de veiller à leur exécution, & qui n'y font employer que de bon bois de chêne de Vofges très-fec ; mais , comme je viens de le Menuisier , IIL Parc. III. Secî. X ii 1 995 MENUÎSIE R, m. Part. III. SeB. Chap. XIV. ■ dire , ce n'eft pas le plus grand nombre des Ebéniftes qui prennent cette pré- ?i.ANCHE caution : d'où il s'enfuit qu'il y a tant d'ouvrages mal-faits & peu folides. Les grandes Boîtes font celles où on place ordinairement des pendules à fécondes , dont le mouvement eft réglé par un régulateur ou pendule de trois pieds huit lignes & demie de longueur , ce qui fait que ces Boîtes ont à-peu- près cinq pieds & demi à fix pieds de hauteur , y compris la lanterne ou partie fupérieure dans laquelle eft placé le mouvement de la pendule , & le piedeftal fur lequel la Boîte eft pofée. La largeur la plus ordinaire de ces Boîtes , eft de quinze à dix-huit pouces dans leur partie la plus large , la- quelle ne peut pas avoir moins de dix pouces à un pied intérieurement , pour ne pas nuire aux vibrations du pendule , qui font de deux à deux pouces & demi de chaque côté de la lentille ou poids qui eft placé au bas de la verge du pendule. Quant à leur épailTeur ou profondeur , elle doit être de cinq à fix pouces de dedans en dedans , c'eft-à-dire , du devant du fond au derrière de la porte de la Boîte. La forme de ces fortes de Boîtes eft affez arbitraire, pourvu qu'elle ne nuife en rien au jeu de la machine qu'elles renferment ; cependant celle qui eft deiTinée fig. 5 , eft dans la forme la plus généralement fuivie. Cette Boîte eft compofée de trois parties , favoir , la lanterne A , le corps de la Boîte B , dc le piedeftal C ,fig. y. Il y a beaucoup de ces Boîtes auxquelles on fait tenir enfemble le corps & le piedeftal , ce qui les rend plus folides , mais ne change rien à leur conftruélion. Quant à la lanterne , elle eft toujours mobile, & elle eft arrêtée avec le corps de la Boîte par le moyen de deux coulilfes à queue placées au-deffus des deux côtés de la Boîte , comme on peut le voir fig. 6 , dont la moitié , cote D , repréfente la Boîte dans toute fà hauteur & vue de face ; & cette même Boîte , cote E , vue en coupe pareillement dans toute fa hauteur. La lanterne n'a point de fond , ou , pour mieux dire , de derrière , parce qu-j c'eft celui du corps de la Boîte , qui étant prolongé jufqu'en haut , qui lui en fert. Le pourtour de la lanterne eft collé à bois de fil, c'eft-à-dire, difpofé comme des douves de tonneau , lefquelles font arrêtées d'un bout avec la face de la lanterne , dans laquelle il faut les faire entrer à rainures & languettes , ce qui vaut mieux que de les coller Amplement à bois debout , & de les arrêter avec des chevilles à colle. Par-derriere , le pourtour de la lanterne enveloppe le fond de la Boîte qui entre tout en vie dedans ; cependant je crois qu'il vaudroit mieux tenir le diamètre de ce fond un peu plus large d'environ cinq à fix lignes , & faire une feuillure au pourtour de l'intérieur de lalanterne, dans laquelle ce fond entreroit , ce qui garantiroit mieux la pendule de la pouffiere , qui entre prefque toujours par le joint de la lanterne avec le fond de la Boîte. Comme ces fortes d'ouvrages font faits pour être revêtus foit de bois des Indes ou de Marqueterie , leurs bâtis ne font que des malTes unies collées le plus folidement poflîble, en obfervan: toujours que ces collages ne préfentent Sect. II. Ouvrages où Von emploie la 3.. efpete d'Ebénifterle. 997 •pas de bois de bout , du moins qu'autant que cela ne fe pourra pas faire au- trement; c'eft pour cetteraifon qu'on colle le pourtour de lalanterne par ccrces ou douves. Quant à fa face, elle eft faite en plein bois d'environ un pouce d'épailTeur , difpofée perpendiculairement, & on y colle des maifes ou tapées pour en augmenter l'épaiffeur aux endroits où cela eft nécelîâire. Comme ii y auroit à craindre que cette maife ne fe cofinât fur fa largeur , il feroit bon de l'emboîter à bois de fil par le bas ; ce qui vaudroit mieux que de fe contenter d'y appliquer une petite tringle à bois de fil, c'eft-à-dire, en travers, comme on le fait ordinairement. Le corps de la Boîte eft compofé de deux côtés chantournés ,& par confé- quent compofés de plufieurs morceaux collés les uns fur les autres , d'un derrière qui monte jufqu'au haut de la lanterne , mais qui ne defcend que jufqu'à la hauteur du piedeftal, (parce que l'efpace qui refte jufqu'en bas eft rempli par une porte qui s'ouvre par-derriere quand on le juge à propos) , & d'un devant compofé de deux pièces , dont une, qui forme le devant du piedef tal, eft adhérente avec les côtés; & l'autre, qui eft mobile , forme ce qu'on appelle la porte de la Boue. Cette porte ouvre du deffus du piedeftal jufqu'au deflbus de la lanterne ; & il eft bon de l'emboîter à bois de fil par les deux bouts , pour lui donner plus de folidité. Toute la face d'une Boîte de pendule telle que celle que je décris , eft or- dinairement cintrée en plan , comme l'indique la fig. 10, ce qui oblige à coller , tant fur la porte que fur le devant du piedeftal , des mafles qu'on met ordinairement en fapin , parce que , dit-on , ce bois prend mieux la colle ; mais la véritable raifon pour laquelle on le préfère , c'eft qu'il coûte moins chi que le bois de Vofges tendre &fec, qui feroit d'un bien meilleur ufage; bois fe détruifant moins vite , n'étant pas fujet aux vers comme le fapin. Le bombage de la porte de, la Boîte , n'eft pas égal dans toute fa longueur ; il eft bon qu'il foit un peu plus confidérable vers le bas , à l'endroit de l'ou- verture ovale qu'on y pratique pour laifTer voir la lentille du pendule , ainfi que fes mouvements de vibrations ; & il faut faire attention , en faifant ce bombage , que tout le pourtour de l'ouverture ovale foit dans un même plan , c'eft-à-dire, que toutes les arêtes de cette ouverture fe dégauchilTent, foit qu'elles foient parallèles avec le derrière de la porte , ou qu'elles y foient inclinées. Cette obfervation eft très-elFentielle , parce que cette ouverture étant fermée par une glace plane , il eft nécelTaire que la place qu'elle doit occuper le foit auffi. Ce que je dis pour l'ouverture du bas de la porte , doit s'appliquer à celle de la face de la lanterne dans laquelle fe place le cadran , ou pour mieux dire , au travers de laquelle on l'apperçoit. On aura la même attention pour la conftruftion du devant du piedeftal , tant pour les collages que pour le rendre plus folide , en l'emboîtant des deux bouts à bois de fil. er ce ÇpS MENUISIER, IIL Part. Secl. III. Chap. XIV. _ le piedeftal tient avec le corps de la Boîte , comme dans hfig.Ci Planche on joint le devant du piedeftal avec les côtés qui defcendent jufqu en bas , & ces derniers s'appliquent fur le derrière de la Boite , où ilferoit bon qu'ils en- trafTent à rainure Se languette , ainfi que dans le devant , ce qui eft beaucoup plus folide que de les coller à plat-joint , comme on le fait ordinairement. Comme le derrière ne defcend que jufqu'à la hauteur du piedeftal , il faut qu'il foie emboîté par en bas , & que cette emboîture s'alfemble par les bouts • dans les côtés de la Boîte , qu'on doit tenir plus large à cet endroit de l'é- pailTeur du derrière , à moins , & ce qui feroit mieux , qu'on ne fit defcendre le fond jufqu'en bas , & qu'on y évuidât enfuite la place de la porte , enlailTant de chaque côté un battant d'environ trois pouces de largeur , ce qui n'empê- cheroit pas de mettre une emboîture par le haut de l'ouverture affemblée à l'ordinaire , & à rainure & languette par les bouts. De quelque manière qu'on s'y prenne', il faut toujours mettre une traverfe par le bas de cette ouverture , tant pour fervir de battement à la porte, que pour recevoir le fond du piedef- tal , qui doit être aflemblé à rainure & languette dans le pourtour de ce dernier. 11 eft bon auffi de pafler une ou deux barres à queue par-derriere & fut l'épailTeur du derrière de la Boîte , pour qu'il ne fafle aucun effet. Les côtés, comme je fai dit , fe collent à bois de fil , & il faut les emboîter par les bouts pour y faire la languette ou queue qui entre dans les côtés de la lanterne ; cependant je crois qu'il vaudroit mieux que ces queues fuiTent prifes à bois de bout , & que comme le bois eft épais en cet endroit , on rapportât l'emboî- ture qui porte la faillie de la corniche à tenon flotté d'après ces queues , comme on le peut voir dans la fig. 6 , cote E. Quand on met un focle fous les Boîtes de pendules , comme je fai fait ici > il fe conftruit à f ordinaire , c'eft-à-dire , qu'on f aflimble à bois de fil , du moins par-devant , & que fon deflus eft collé à rainure & languette au pourtour. Voje:^ les fig. 6 (& 7 , qui repréfentent une Boîte de pendule tant de face qu'en coupe & de côté , conftruite comme je viens de l'expliquer , Se félon le delTein repréfenté J. Les Boîtes de pendules dont je viens de parler , font fufceptibles de beau- coup de richefîè , tant dans la façon que dans la matière. Quant à leur for- me , elle peut varier félon la volonté de ceux qui les font faire , en obfer- vant toujours que la pendule y foit à fon aife , & que du milieu ou centre du cadran , jufqu'au milieu du trou ovale de la porte de la Boîte , il y ait trente- quatre pouces de diftance ; parce que la longueur du pendule étant de trois pieds liuit lignes & demie depuis fon point de fufpenfion jufqu'à fon centre d'ofcillation , qui eft un peu plus haut que le centre de la lentille , la diftance de trente- quatre pouces eft à peu de chofe près ce qu'il faut pour que le centre de la lentille fe trouve vis-à-vis du trou ovale de la porte de la Boîte , ce qui reviens 333- Sect. II. Ouvrages où l'on emploie la ^e. efpêce crEbéniflerie. 9^9 ïevient affez bien en fuivant la mefure que je donne ici , parce que le point -— ^ de fufpenfion du pendule fe trouve , du moins dans les horloges ordinaires ; Planche à environ trois pouces au-delTus du centre du cadran ; au refte on ne doit jamais faire de ces fortes d'ouvrages, fur-tout quand ils font un peu confé- quents, fans auparavant confulter l'Horloger qui doit faire la pendule , qui doit donner les mefures générales de la Boîte , pour ce qui a rapport à fon ouvrage , & la manière dont il veut qu'elle foit placée , afin que travaillant d'accord enfemble , la Boîte foit faite pour la pendule, & non pas au hazard , comme il arrive quelquelois. Après que l'Horloger a donné la mefure de fon pendule , ou du moins a marqué la diftance qui doit fe trouver du centre du cadran à celui de la lentille, il faut encore faire attention à quelle diftance du plancher fe trouvera le trou ovale, ou pour mieux dire , le centre de la lentille , parce que plus il fera bas , & plus il faudra haulfer le premier , & cela par la raifon que le point de vue étant plus élevé que ce trou , il faut néceflâirement que le centre de ce dernier fe trouve fur une ligne prife du centre de la lentille & tendante au point de vue , qu'on fuppofe être élevé à cinq pieds trois pouces , & éloigné du de- vant de la Boîte d'une diftance à-peu-près femblable. Ces fortes de Boîtes font ordinairement ornées de bronze , ou, fjour mieux dire , de cuivre fondu , & enfuite reparées & dorées , foit feulement en or de couleur ou bien en or moulu , ce qui eft très-rare , vu que cette dorure coûte fort cher. Les ornements de cuivre qu'on métaux pendules, font la princi- pale caufe pour laquelle une forme de pendule une fois à la mode , toutes celles qu'on fait enfuite lui relTemblent , vu que pour établir une fonte nou- velle , cela coûte fort cher , -parce qu'il faut d'abord faire des dcffeins , eniliite des modèles en bois , fur lefquels on fait , avec de la cire , les modèles des ornements , tels qu'ils doivent être exécutés en cuivre ; au lieu qu'on a bien plutôt fait de fondre des ornements fur une fonte déjà faite (*). Quoi qu'il en foit , on a fait des Boîtes de pendules dont il eft ici queftion de différentes formes : on en a fait à gaîne , en pyramide ; préfentement on en fait dont le corps relTemble à un piedeftal fur lequel pofe la partie qui ren- ferme la pendule. De ces diflFérentes formes , celles en pyramides , repréfen- tées fig. 8, 9 (S" 12, me paroît la meilleure ; c'eft pourquoi j'en donne ici une deffinée de face & de côté. Cette Boîte , ou du moins une à-peu-près fem- blable, a été exécutée en bois des Indes par M. Lancelin le cadet, qui m'en (*) Ce que je dis ici touchant les ornements des pendules , peut 5c doit même s'appliquer à tous les ouvrages d'Ebénifterie dans la décora- tion defquelson fait ufage des bronzes , donc la forme une fois décidée borne nécelTairemenc celle des ouvrages où on les emploie. Si on faifoit bien attention à ceci , on feroir moins étonné du peu de génie & de la monotonie qui Menuisier , III. Pan. III. Secl, règne dans les ouvrages modernes de ce genre , Se qui femblent avoir été tous faits dans le même moule, ce qui ell en partie vrai ; & on ferpic encore bien moins furpris du prix que coûtent des ouvrages faits exprès , qui , lorfqu'ils font bien exécutés , coûtent très-peu en compa- raifon des autres qu'on fait à la douzaine, fans s'embarrafler s'ils feront bien ou mal. Y II ïooo MENUI SIE R, m. Pan. Secl III. Chap. XIK a communiqué le deflein , auquel j'ai fait quelques changements qui m'ont PLANCHn par" nécelTaires. .333- Cette Boîte a fix pieds de hauteur du deflus du vafe qui couronne lapyramlde^ & la même hauteur de cadran que celle repréfentèe Jig. y , dont elle diffère non-feulement p:ir la forme générale , mais encore parce que fa porte eft ou- verte dans toute fa hauteur , & que la lanterne eft auffi ouverte par les côtés, comme on peut le voir fig. p ; de forte que tout le mouvement de la pendule eft apparent. La lanterne eft mobile comme dans l'autre Boîte, & n'a pas de fond, ainfi que cette dernière ; ce qui eft nécefTaire pour que 1 on puiflè placer commodément le mouvement de la pendule, & l'ajufter en place; c'eftpour cette raifon que ces fortes de Boîtes doivent être difpofees de manière que leurs faces puiffent s'ouvrir dans toute leur hauteur , du moins du delTus du piedeftal. La pyramide & le piedeftal de la Boîte, S & p, tiennent enfemble pour qu'elle foit plus folide ; & toutes les bordures ou moulures qui portent les glaces , tant de la porte que de la lanterne , font en cuivre. Quant à là confirudion , elle peut être faite en placage ; mais celle que j'ai vue exécutée, eft faite en plein bois , aflèmblé- avec toute l'adreffe & la folidité poffible , & le détail de fa conftruélion mériteroit une très-longue dift^ertation , que je ne pourois pas faire ici fans augmenter confidérablement cette Partie de mon Ouvrage. L'intérieur des Boîtes de pendules dont je viens de parler , doit être liiTeSc Vuide dans toute leur étendue , foit qu'elles foient conftruites en plein bois, ou qu'elles foient couvertes de placage en dedans , ce qui eft très-rare, n'y ayant guère que la porte qui le foit ordinairement, afin qu'étant ouverte , elle pa- . roiffe plus propre.. Quelquefois on y fait des couliffes en dedans des deux côtés, à la hauteur du deffus de la porte , lefquelles fervent à placer le fupport du mouvement , qui eft conftruit foit en fer ou en bois ; cependant comme ces fupports ne font pas toujours conftruits de la même façon , je crois qu'on feroit beaucoup mieux de ne point faire des coulilTes , à moins que l'Horloger n'en demandât , Se qu'il ne difpofât de leur forme & de la hauteur où elles doivent être placées. L'ouverture des portes des Boîtes de pendules fe fait toujours de droite à gauche , du moins autant qu'il n'y a pas des raifons qui empêchent de le faire autrement ; leurs charnières fe placent aux endroits les plus élevés de leur contour , 8c elles doivent être conftruites de manière qu'elles tendent à faire une ligne droite de f une à l'autre , comme àe a a. b , fig. 6 ; Se on doit autant qu'il eft poflible , faire enforte qu'elles ne foient pas apparentes. Se qu'elles foient cachées dans les ornements de bronze. La ferrure fe place dans l'épaifTeur du côté , & on la fait aflez petite pour qu'elle ne foit pas du tout apparente , ainfi que fon entrée , qui ne doit pas avoir plus de trois à quatre lignes de hauteur , tout au plus. Sect. II. Ouvrages où l'on emploie la 3^. efpece d'EèénîJîerie. looi Les petites pendules , ainlî que celle repréfentée fig. 2. , font prefque les — — -— ~~ feules auxquelles on emploie les revêcifTements d'écaillé & de cuivre ; elles Planchs font compofées de la Boîte de pendule proprement dite , de fon couronnement & de fon cul-de-lampe ou amortiflement renverfé , qui fert à la fupporter. Le corps de la Boîte j^. 3 (5 4 , eft compofé de deux chaflls , dont un forme le devant, & l'autre le derrière ;ces chaflls lailTent un vuide d'environ fix pouces dans le milieu de leur largeur , & font contournés à l'extérieur félon le deflein de l'ouvrage repréfenté Jig. 1. Le vuide du chaflls du devant doit être ter- miné trois pouces plus haut que le centre du cadran, & defcendre de trois à quatre pouces en contre-bas de ce même centre. Il y a des pendules , comme celle-ci , fig. l , cote F , par exemple , où ce vuide eft prolongé jufqu'au defTus du double fond ou plancher de la Boîte ; il y en a d'autres où on fait deux ouvertures , ftvoir , celle du haut , pour faire place au mouvement , & une autre au-deflbus , dont le centre eft à environ fix à fept pouces de celui dU cadran. Cette dernière ouverture eft faite pour faire appercevoir la lentille du balancier , & eft recouverte par des ornements & des figures bronzées. L'ouverture du chaflls de derrière defcend jufqu'au delTus du premier fond j & a environ un pied de hauteur , comme on le peut voir à la fig. i , cote G , & àhfg. 4. Cette ouverture eft remplie par une porte qui eft recouverte de marqueterie comme le refte de l'ouvrage. Les chaflls ou bâtis de devant & de derrière font joints enfèmble par quatre traverfes qui fuivent le contour extérieur de la Boîte ; celles du haut font or- dinairement cintrées plein-cintre, & celles du bas feulement bombées en-defllis, comme on le peut voir fig. 3. La longueur de ces traverfes doit être de trois à trois pouces & demi , pris à l'extrémité de leur arrafement extérieur , ce qui fait environ quatre lignes de moins que ces longueurs pour la profondeur inté- rieure de la Boîte , parce qu'il faut faire un ravalement fur fépaifl^èur des bat- tans des chaflls , Se des feuillures aux traverfes pour recevoir les portes de côté de la Boîte , qui font toutes de cuivre , c'eft-à-dire , leur bordure , & remplies par des glaces , ainfi que la porte qui ferme l'ouverture du devant de la pendule. La Boîte de la pendule eft fermée haut & bas par des fonds à l'or- dinaire ; celui du bas doit être placé de manière qu'il laiflè la place d'un dou- ble fond ou plancher qu'on garnit de marqueterie , lequel doit être mobile & placé un tant foit peu plus bas que le defllis de la traverfe du chaflls de de- vant , comme on le peut voir à la fig, i. L'autre fond fe place au nud de l'ou- verture quarrée du haut , à moins que l'Horloger ne le voulût autrement. Le couronnement de la Boîte eft compofé de trois morceaux joints d'onglets , & contournés à l'extérieur félon que f exige le deflein Jlg. 1. Ces trois morceaux font collés fur un quatrième qui forme le defllis du couronnement ; & pour que les joints des angles tiennent plus folidement , on y place intérieurement des tafleaux de bois qui joignent des deux côtés de l'angle , & qui y font collés, Ï002 MENUISIER, m. Pan. Secl. ÎII. Chap. XlV. ■• couronnement eft arrêté avec la Boîte par quatre goujons de fer placés àfeS Planche quatre angles , & qui entrent dans cette dernière. Foyc^ la fig. i , cote G êchfig. 4, où ce couronnement eft vu en coupe. Le cul-de-lampe eft conftruit de la même manière que le couronnement comme on peut le voir dans les figures ci-deffus ; & quand il a beaucoup dl galbe ou de cintre, comme difentles Ouvriers , on colle plufieurs morceaux les uns fur les autres aux endroits où il eft nécelTaire , & en obfervant toujours qu'ils foient à bois de fil , pour que le placage tienne mieux. Le collage des culs-de-lampe & des couronnements dont je viens de parler , quoique très-fimple en apparence , demande cependant de l'attention pour en tracer les coupes , à caufe de l'obliquité des pièces qui les compofent ; mais fans avoir recours à la théorie de l'Art du Trait , chaque Ouvrier a fa méthode qui lui réuflît alTez bien , fur-tout pour des ouvrages qui ne font jamais apparents. La méthode la plus fimple , eft de commencer par tracer les coupes de cul-de-lampe comme à la fig. i , cote C , & à la fig. 4 , afin d'avoir la pente , ou , pour mieux dire , le hors-d'équerre de chaque pièce , ainfi que leur longueur intérieure ; enfuite quand les pièces font miles félon leur pente, on en trace les joints avec le triangle-onglet , fuppofé que les faillies de côté foient égales à celles de la face ; car fi elles ne l'étoient pas , comme dans les figures ci-def- fus , il faudroit tracer un plan de ces différentes faillies, 11 , afin qu'à leur rencontre on ait la coupe demandée & la véritable longueur des joints comme on le peut voir dans cette figure. ' Les Porte-montres différent des Boîtes de pendules dont je viens déparier en ce qu'ils n'ont pas de cul-de-lampe , qu'ils font plus petits de la moitié que ces dernières , & que leur couronnement s'ouvre en-delFus pour faciliter le palfage de la montre ou du réveil qu'on place dedans. La hauteur de ces fortes de Boîtes eft d'un pied au plus fur fix à fept pou- ces de largeur, & deux à deux pouces & demi d'épai/Teur de dehors en de- hor- Elles font compofées de deux planches de quatre à cinq lignes d'épaiiTeur ^ entre lefquellcs on colle d'autres morceaux de bois qui achèvent de lui donaer une épaiifeur convenable, & qu'on contourne enfuite de même que les plan ches de de]rus& de delTous, qui font toutes deux difpofées à bois de travers pour donner plus de foiidité à l'ouvrage. Vers l'extrémité fupérieure de la planche de devant , on fait un trou rond d'environ deux pouces de diamètre au plus , & on en abat les arêtes intérieures en chanfrein , afin que la montre approche tout contre le cercle de cuivre qui eft appliqué en-dehors. Tout le corps delà Boîte doit être plein jufqu'à environ un pouce en contre-bas de 1 ouverture delà face , & le refte doit former une efpece de coffre d'environ trois pouces de largeur , lequel eft fermé par le couronnement de la Boîte Sect. il Ouvrages ou Von emploie la f. efpece d'Ebénifterie. 1003 qui eft ferré fur le côté gauche avec une charnière , & arrêté à droite par ■ une petite ferrure placée dans TépailTeur du côté de la Boîte. Planckk Comme ces Boites ne font pas faites exprès pour les montres qu'on y place , on remplit ce qu'il y a de trop de grandeur dans le vuide intérieur , par des cales de bois qu'on ajufte en raifon de la groffeur de la montre qu'on veut y placer ; & il eft bon de garnir le tout enfuite avec de l'étoffe , pour ne point endommager la furface de la Boîte de la montre. ^ Les Porte-montres font ornés de bronzes , ainfi que les autres Boîtes de pendules dont j'ai parlé ci-devant , foit qu'ils foient revêtus de Marqueterie , ou bien fimplement peints & vernis , comme on en fait beaucoup à pré- fent. En général , quand les Boîtes de pendules font difpofées pour être peintes vernies ^ elles le conftruifènt de la même manière que quand elles doivent être recouvertes de Marqueterie , à l'exception que dans le dernier cas il faut diminuer 1 epaiflèur de cette dernière d'après les contours donnés fur le def- fin de l'ouvrage ; au lieu que l'épaiflèur de la peinture doit être compté pour rien , ce qui oblige de finir les bâtis comme s'ils étoient apparents , du moins quant aux formes extérieures. Quand les Boîtes de pendules doivent être peintes & vernies , on les conftruit avec des bois blancs , comme le tilleul , & même le maronnier , & cela par la raifon que ces bois prennent , dit-on , mieux la peinture , ce que j'ai beaucoup de peine à croire , vu qu'on voit tous les jours de très-beaux ouvrages dans ce genre, appliqués fur des bois durs ; il y a tout à croire que c eft par une raifon d'économie qu'on emploie ces fortesde bois , ou bien peut être qu'ils exigent moins de préparation & de foin de la part des Peintres , qui font ces fortes d'ouvrages à un prix fi médiocre, qu'ils font obligés , pour pouvoir vivre , d'épargner la matière & les foins en les travaillant. Quant aux Boîtes de pendules qui font revêtues de Marqueterie , je ne ferai pas ici un détail des différentes formes qu'on peut donner à cette dernière , ce qui dépend abfolument du goût & du favoir faire de l'Artifte , & encore plus du plus ou moins de dépenfe qu'on veut faire ; de plus, ce détail devien- droit très-étendu , fans être abfolument utile , du moins quant à préfent , cette defcription de l'Art de l'Ebénifterie ayant plus pour objet la manière d'opérer que de donner des exemples des différentes fortes d'ouvrages dans la décoration defquels on fait ufage des diverfes efpeces d'Ebénifterie. Avant de paffer à la defcription du travail de fécaille & des autres matières , ^ qui entrent dans la conftruélion de la troifieme efpece d'Ebénifterie , je vais Pianche donner la defcription d'une machine nommée Croix ou Equerre mobile , laquelle ^^** fert à découper des ovales , & même à y poulfer des moulures , fuppofé qu'on ne le puifl^ pas faire avec un outil à conduite , comme cela arrive quelquefois; cette machine a l'avantage de contourner les ovales de la même forme que la tour , ce qui eft très-avantageux , quand il s'agit d'ajuller ou d'incruftet des Menuisier y III. Pan. lll, Secl. Z 11 Ï004 MË N UÎSÎÊ R, EL Part. SeB. ÎIÎ. Chàp. XÎF, ovales de cuivre ou d'autres matières faites fur le tour -, lefquelles font plus applaties fur les extrémités du grand axe , que celles qui font tracées au compas félon les différentes méthodes quelconques , ainfi que je vais l'expliquer. Soie le quart d'ovale ABC, fig. i , ( la partie devant être prife pour le tout) dont la longueur des deux axes a été donnée & tracée au compas, à l'ordinaire, ainfi que l'indiquent les lignes ponéluées de la figure , il faut pren- dre l'excédent du demi-grand axe A C , qu'on porte furie petit de -fîà D ; puis -après avoir divifé la diftance CD , en autant de parties qu'on le juge à propos j comme aux points a,b , c , d, c &~f, on prend la diftance C D , qu'on porte de chacun de ces points fur le grand axe A C , qu'ils touchent aux points g , h, i , l ,m.Sc n; puis des points de divifion du petit axe , & par ceux de ces derniers , qui leur font correfpondants , c'eft-à dire , qui en font autant éloignés que le point Cl'eft du point D , on mené autant de lignes tendantes à la circonférence de l'ovale , & on donne h chacune de ces lignes , ainfi prolongées , une longueur égale à celle du grand demi -axe, c'eft-à-dire , qu'on fait les diftances a o , b p , c q , d r , e s 8<.f t , égales à celles A C om B D :^ ce qui eft la même chofe ; & les diftances go , h p , i q , lr,!nf&.nt, égales à celles B C ; ce qui doit être , puilque celles ag ,h h , &c , font égales à celles C D ; puis par les points A , o , p , q , r , s , c ôc B , on fait paffer une courbe plus applatie que celle qui eft tracée au compas ; cette courbe eft celle que dé- crit le tour ovale , dont le méchanifine eft fondé fur cette démonfiration , la- quelle fert également pour la conftruâion de la croix ou Equerre mobile qui produit par conféquent les mêmes effets , comme on le verra ci-après. L'équerre ou croix mobile E F , G H , fig. 2 , eft compofée de deux pièces de bois affemblées quarrément & en entaille l'une dans l'autre ; dans le milieu de chaque pièce eft creufé un canal refouillé fiir les côtés, pour facili-' ter lepaffage d'un mantonet a b ,fig. 3 , & e/', Vig. 6, qui y eft retenu par deux languettes , mais qiji a la facilité de couler librement , comm.e on peut le voir dans la fig. 3 , qui repréfente la coupe d'une des branches de la croix , & de ce mantonet , dont le milieu eft percé pour faire paflage à un tourillon c , qui a une tète dans fon extrémité inférieure , pour l'empêcher de fortir du mantonet , dans lequel il faut qu'il tourne librement ; l'extrémité fupérieure de ce tourillon eft arrêtée à demeure avec une chape de fer ou de cuivre j ( ainfi que ce dernier ) Jlg. 3 eb" 4 , dans laquelle paffe la tringle ou tige IL, Jïg. 2 , & cote M, fig. 3 , & qu'on y fixe par le moyen d'une vis de preffion qui n'appuie pas direâement fur la tringle de bois , mais fur une lame de fer ou de cuivre attachée fur cette dernière , ou qui embraffe feulement la largeur de la chape , aux deux côtés de laquelle elle eft relevée , pour qu'elle ne puiffa pas s'échaper. On pourroit fe paffer de cette chape, en faifant, comme dans la Jîg, j,- im tourillon qui palîat au travers du mantonet & de la tringle de bois , qu'on S£CT. Il Ouvrages où l'on élnploie la y. efpece (TÈbéniftaic. loo) nrrêtei-oit âvec le tourillon par le moyen d'un écrou à aîierori , & d'une bafe ^-=2:^^ ïéfervée où rapportée au tourillon , en-deffijs du mantonet. Cette manière d'ar- Pi anck^ rêter la tringle avec le tourillon , eft plus limple que la première ; mais elle oblige à faire une rainure dans la tringle pour lailTer pafîage au tourillon lorf- qu'on veut avancer ou reculer la tringle , félon les ditïerents diamètres deS ovales. Le imntomt cf, fig. 6, doit être un peu barlông , afin que quand il fo trouve à la rencontre des rainures de deux branches , il no vacille pas, & fe trouve engagé dans l'une avant que de fortir de l'autre. On doit auffi avoir foin d'en arrondir les bouts , pour qu'ils glilTent plus aifé- ment d'une rainure dans l'autre , & qu'ils ne heurtent pas contre les angles dé la croix. Il faut toujours deux mantonets femblables pour arrêter la tringle fur )a croix , parce que pour faire fon opération , il faut deux centres de mouve- ment , comme on va le voir ci-après. Quand on veut faire uCge de cette machine, cela eft très-facilo ; car af>rès avoir déterminé les diamètres de fovale , comme ceuxvVO & F Q , on ajufte la croix au milieu de l'ouverture & de l'ouvrage , où on l'arrête avec des coins / comme dans cette figure , en obfervant que le milieu des rainures réponde parfaitement avec les axes de l'ovale ; puis l'outil étant placé à l'extrémité dd la tringle ou tige I L,fig.i., on fait mouvoir cette dernière jufqu'à ce qu'elle couvre la ligne N O; alors le mantonet n, fe trouve au centre de l'ovale, & on avance ou recule la tige jufqu'cà ce que l'outil touche le point O. Ce qui étant fait, on ferre la vis du mantonet u , pour aflîijettir la tringle / L avec ce dernier, ce qui donne le premier centre de mouvement. On fait la même chofe pour le fécond , c'eft-à-dire , qu'on fait mouvoir la tegle jufqu'à ce qu'elle couvre la ligne P Q , qui fait venir le mantonec X au centre de l'ovale ; alors on ajuile l'outil avec le point P , &. on ferre la vis du mantonet x , ce qui donne le fécond centre de mouvemeiit; après quoi on fait ufagede l'outil, en le faifint mouvoir de droit ou dé gauche, ce qui eft égal , parce que les mantonets ne peuvent pas fortir des rainures dans lefquelles ils font placés , & que dans tel cas que ce foit , la diftance du point u, au fer de l'outil, eft toujours égale au demi-diametre du grand axe; la diftance du points; à ce même fer , égale à la moitié du petit axe ; & la diftance u X , égale à l'excédent du demi-grand axe fur le petit, qui font les conditions demandées pour tracer un ovale comme celui de la fg. i , & par conféquenc d'une même courbe que celle qu'on fait fur le tour. Quant à Fextrêmité de la tige / L , on peut y placer des fcies , des couteaux de taille, &c, comme dans les compas à verge dont j'ai parlé , page 848 : on peut rnême y ajouter des outils de moulures de la même manière que les Maçons y adaptent des calibres. La croix peut être plus ou moins grande , félon les' dtffirents befoins, & par conféquent forte à proportion dans toutes fes parties y ioo6 ME NU I S 1ER, 111. Part. Secl. III. Chap. XIV. ' & quand elle fera d'une certaine grandeur, il fera bon d'y mettre des équerres Planche dans les angles , comme je l'ai fait ici , afin qu'elle ne puifle faire aucun mou* ^ vement. Pour ce qui eft de la conftrudlion des mantonets & des parties qui en dépendent , on pourra y ajouter ou augmenter ce qu'on jugera à propos , pourvu qu'ils reraplilTent le rr;ême objet, c'eft-à-dire , que le goujon tourne librement dans le mantonet, & que la tige foit arrêtée d'une manière fixe avec le goujon , & toujours avec la facilité de la changer de place quand il fera befoin. Il faut cependant faire attention que le mantonet doit être de deux pièces fur fa largeur , afin de pouvoir y placer le goujon , qu'on ne pourroit pas y faire entrer autrement , fans rendre là conftruélion très-compliquée ; Se pour que le frottement du goujon n'ufe pas trop vite le bois , il feroit bon d'y placer un canon de cuivre , comme je l'ai indiqué dans la fig. 3 , lequel pourroit être pareillement de deux pièces , & arrêté à demeure avec chaque côté du mantonet, qu'on rejoint enfuite avec des vis , dont les têtes doivent être noyées dans fépaiifeur du bois, afin qu'elles ne nuifent pas au paiTage des mantonets dans les couliffes des branches de la croix. Quand la pièce ne fera pas évuidée , comme celle fig. 1 , on attachera la croix mobile defTus ; cela ne changera rien à la manière d'opérer , fi ce n'eft qu'il faut , dans ce cas , fe fervir d'une tige IL, dont la partie qui porte l'outil , retombe davantage en contre-bas pour regagner l'épaiiTeur de la croix ainfî placée , c'eft-à-dire , attachée fur fouvrage. Section Troisième. De la manière de travailler les différentes matières qui entrent dans la conjlriiclion de la Marqueterie , comme l'Ecaillé , l'Ivoire , la Corne , &c. L'EcAi L LE eft la matière qui entre le plus communément dans la conf- truélion de la Marqueterie , foit qu'on la mêle avec le cuivre , l'étain , l'argent ou l'or , auxquels elle fert ordinairement de fond. Les feuilles d'écaillés font ordinairement bombées fur leurs furfaces , comme je l'ai dit plus haut ; c'eft pourquoi la première chofe qu'il y a à faire pour les rendre propres à être employées , eft de les redrelTer , ce qui fe fait de la manière fuivante. Après avoir fait choix des feuilles qu'on veut redreirer,on fait chauffer de l'eau dans un chaudron, /'i^. 15, ou tout autre vafe découvert, & capable de contenir les feuilles d'écaillé fans qu'elles touchent aux bords du chaudron , de crainte que la chaleur de ce dernier ne la brûle; puis quand l'eau eft bouillante, on trempe les feuilles dedans , & on les y laiffe féjourner jufqu'à ce qu'elles foien: fuffifamment amollies , ce qu'on connoîc en retirant une feuille avec des pin- ces, ou même avec les doigts, (car l'écaillé perd fa chaleur promptement) & fi SECT.ni.De la manierÈiè travailler les différentes Maùeres,SCc.i6ô7 fi étant dehors , elle ployé facilement par fon propre poids , c'eft un ligne certain qu'elle eft amollie au degré néceilaire ; alors on a une petite pre/Te fig. 7 8 , de la grandeur néceffaire pour pouvoir contenir la plus orande feuille d'écaiUe, & dans laquelle on met les feuilles ainfi amoUies , en obfervand quand il y en a plufieurs , démettre entre chaque, des plaques de fer ou de cuivre d'environ deux lignes d'épaiffeur , bien droites fur leurs furfaces , & qu'on a foin de faire chauffer auparavant, afin de conferver plus long-temps aux feuilles d'écaillés la duélilité qu'elles viennent d'acquérir parle moyen de l'eau bouillante. Quand les feuilles d'écaillé font beaucoup bombées, & qu'on craint qu'elles ne fe prêtent pas affez à l'aflion de la pre/Te, foit par rapport à leur bombage » ou parce qu'elles refroidiJlent trop vice , il faut, lorfqu'on a mis deux cil trois feuilles dans la preffe , ferrer médiocrement cette dernière , & on la plonge dans l'eau bouillante , qui ramollit l'écaiUe ; après quoi on achevé de ferrer la prelfe , & on la retire de feaupour lailfer refroidir fécaiUe peu-à-peu V ce qui vaut mieux que de la tremper dans de l'eau froide, qui faifit trop vite l'écaillé , & la rend plus calfante & plus fujette à fe tourmenter. Quand fécaille eft totalement refroidie , on la retire de deilous la prelTe ; Se elle fe trouve parfaitement droite , & conferye toujours cette nouvelle forme , pourvu qu'on ne la trempe plus dans l'eau bouillante ; car elle rede- viendroit courbe comme auparavant. Il faut aufli faire attention que fécaille s'étend & fe dilate à l'eau chaude , mais qu'elle fe retire en refroidilfant ; c'eft pourquoi quand on la contourne dans des moules , il faut que ces derniers foient un peu plus grands qu'il ne faut , afin de laiffer à l'écaillé le moyen de fe dilater librement, commejefexpliquerai ci-après. Quand les Ebéniftes redrelTent l'écaillé , ils n'y font pas grande façon • h plupart fe contentent de la mettre , au fortir de l'eau chaude , entre des plan- ches d'environ un pouce d'épaiffeur , & de les ferrer avec un ou deux valets , comme la fig. 14 , ce qui n'eft pas bon , parce que pour peu que l'écaillé ne foit pas affez chaude , on s'expofe à la faire caffer ; ou fuppofé qu'elle prêtei à un médiocre degré de chaleur ; elle ne refte pas droite quand on fôte de deffous les valets , ce qui oblige de recommencer l'opération : c'eft pourquoi il vaut mieux faire ufage d'une preffe & des fers chauds , comme je viens da le dire ci-defîus. Quant à la forme de la preffe , elle eft aflez arbitraire ; ce- pendant il feroit à propos qu'elle fût conftruite comme issfig. 7 (& 8 , c'eft-à- dire , quelle fût compofée de deux montants ou jumelles, avec une vis de prefi Con au milieu, afin que le mouvement de la preffe fe fît plus promptement. La vis , pour être bonne, doit être de fer, & être arrêtée avec la planche ou platine fupérieure de la preffe (de manière cependant qu'elle puiffe tournel librement ) , afin de la faire remonter quand on le juge à propos. L'écrou de cette vis eft placé dans le fommier duhaut, & on fait mouvoir la vis Menuisier , ///. Pan, 111. Secl, A la ïooS MENUISIER, m. Pan. SeE. 111. Chap. XIV, par !e moyen d'une manivelle qui paffe au travers de fa tête , comme on peut le voir dans les fig. j & Quant à la grandeur de cette prelTe, un pied de largeur fuffit entre les deux jumelles , ou quinze pouces au plus , ce qui eft fuffifant pour placer les grandes feuilles d'écaillés fur leur longueur. L'écaillé fe redrelTe auffi au feu , ce qui fe fait en la préfentant fur la flamme d'un feu clair , en obfervant de la mouvoir en tous fens & avec beau- coup de promptitude , parce que fi on la laiffoit un inftant fixe fur la flamme., elle fe brûleroit , & il fe formeroit fur fon épaifleur des efpeces de gerfures blanchâtres caufées par la trop grande aftion du feu , qui , fe fixant , défunic les parties de l'écaillé , & même les brûle. Cette manière de redrefler l'écaillé n'eft guère ufitée , tant par rapport aux accidents dont je viens de parler , que parce que beaucoup d'Ouvriers prétendent que le feu en gâte la couleur ; cependant les Couteliers ne font pas autrement pour redrelFer les manches de couteaux faits en écailles , qui , à la vérité, ne font que de petits morceaux qui font bientôt échauflïs ; ceft pourquoi ils fe contentent de les drelTer à la flamme d'une chandelle allumée. Quand l'écaillé eft dreflee, on la met d'épailTeur, foitavec le grattoir ,fg. 13, (qui eft une efpece de couperet à deux tranchants, lefquels n'ont chacun qu'un bifeau , comme on peut le voir dans cette figure , ) ou tout fimplement avec le rabot à dents , qui mord affez bien defi"us , ce que ne peut pas faire le fer du rabot ordinaire , parce que l'écaillé eft compofée d'une fubftance grave- leufe qui eii détruit bien vite le tranchant , ce qui fait préférer les fers brettés, les râpes & les limes qui n'attaquent là furface que par parties. Quand on veut mettre les feuilles d'écaillé d'épailTeur, on commence par les drelfer en-delTous , ( c'eft-à-dire , du côté qu'elles font adhérentes au corps de l'animal ) avec le rabot à dents ; enfuite on les retourne de l'autre côté pour les réduire à l'épaiffeur convenable ; & alors on fiit ufàge des râpes , du grattoir, & du rabot bretté. Cette opération demande beaucoup de précaution & d'ufage de la part des Ouvriers ; parce que quand l'écaillé eft trop épaiffe , & qu'il y a par conféquent beaucoup de matière à ôter , il arrive fouvent qu'on calTe la feuille d'écaillé , qui , comme je l'ai déjà dit , eft très-fragile , & qu'on ne peut conferver entière qu'en la traitant avec beaucoup de ménagement , en obfervant fur-tout qu'elle porte bien également dans toutes fes parties fur l'é- tabli lur lequel on la drefle. On ôte le furplus de l'épaiffeur des feuilles d'écaillé du côté du deflus , parce que celui de la chair eft ordinairement le plus beau , & où les nuances font les plus fenfibles , du moins à ce que difent les Ouvriers ; car je n'y ai pas vu une grande différence. L'épaiffeur de l'écaillé varie félon les différents ouvrages où on l'emploie ; cependant cette épaiffeur ne paffe guère une ligne & demie , & ne peut être moindre que trois quarts de ligne , parce que quand elle eft plus mince , elle Sect. llï. De la manière de travailler les différentes Matières. loop fe travaille difficilement, fon peu de confiftance l'expownt à fe rompre au ■: ' ■ v moindre effort. Flanchs Quelque épailTeur qu'on donne à l'écaillé , il faut avoir grand foin qu'elle foit égale par-tout, afin qu'elle foit également flexible ; & avant de la mettre en ufage,il faut la garder quelque temps dans un endroit fec & même un peu chaud , afin qu'elle fe retire fur elle-même avant que d'être employée. On ne cintre guère les feuilles d'écaillé ayant que d'être découpées & collées avec le cuivre , comme je le dirai ci-après ; cependant comme il pourroit arriver qu'on voulût la cintrer d'une certaine forme étant en feuille , on le fait de la manière fuivante. On commence d'abord par tracer à part le cintre que doit avoir l'écaillé lorfqu'elle fera moulée , comme , par exemple , la fig. p ; puis on fait le développement de ce cintre fur mie ligne droite fig. lo, pour avoir la longueur jufte de la feuille d'écaillé , qu'il eft bon de couper un tant foit peu plus longue qu'il ne faut. On fait enfuite le moule intérieur & extérieur , fig. r i , d'une forme femblable à h fig. 9 , en y obfervant , dans chaque partie , une rainure a b , dans laquelle l'écaillé puilTe entrer lorfque la chaleur de l'eau bouillante & la prefiion du moule la forceront de s'étendre. De quelque forme que foit le moule fig. ïl , il doit être compofé de deux parties évuidées à contre-fens l'une de l'autre , comme on peut le voir dana cette figure , & dans celles 12 & 17; chacune des parties doit être difpofée de manière qu'elles s'emboîtent l'une avec l'autre ; & pour qu'elles ne fe déran- gent en aucune manière , il eft bon d'y placer des goujons aux quatre coins comme je l'ai fait ici. Quand on veut mouler de l'écaillé , on ne la met pas toute droite dans le moule ; mais après l'avoir dreffée & mife d'épaifTeur , comme je l'ai dit ci- deffus , on la trempe dans l'eau bouillante ; & quand elle eft amollie , on com- mence par la cintrer à la main , à-peu-près félon la forme qu'elle doit avoir : enfuite de quoi on la met dans le moule, & ce dernier dans la preffe ifig.J ^ qu'on commence par ne ferrer qu'autant qu'il eft nécelTaire pour empêcher l'écaillé de glilTer, ce qui étant fait, on trempe le tout dans l'eau bouillante, & on ferre la vis de la prelTe à mefure qu'on s'apperçoit que l'écaillé ne fait pas de réfiftance. Quand le deffus du moule eft dcfccndu autant qu'il eft né- ceffaire , & que par conféquent l'écaillc a pris la forme du moule , on retire la preffe de f eau , & on laiffe refroidir le tout à l'ordinaire , ce qui ne fouffre aucune difficulté. Les moules dont je viens de parler , font ordinairement faits en bois dur , ce qui eft fuffifant quand on n'a pas beaucoup de pièces femblables à mouler , ou qu'ils font très-grands ; car autrement on feroit très-bien de les faire en cuivre,- parce qu'ils réfifteroient mieux à l'aélion de l'eau bouillante que ceux de bois ^ Sç, qu'ils conferveroient mieux leurs formes , & dureroient plus long-temps. îoio MENUISIER, III. Pan. SeB. 111. Chap. XIK I ' ■■ Il eft affez rare qu'on moule l'écaillé avant d'être découpée ; cependant Planche comme il y a des occafions où cela eft néceflaire , j'ai cru ne pouvoir pas me ^■^** difpenfer d'entrer dans quelques détails à ce fujet. J'ai dit plus haut qu'on foudoit l'écaiUe fans le fecours d'aucun agent , ce aui fe fait d'une manière très-fimple , quoique bien des Ouvriers en faffènt un grand myftere. Quand on veut fouder deux morceaux d'écaillé enfemble , on commence , après avoir marqué l'endroit du joint, par abattre le refte en chanfrein , comme de c à d , fig. 1(5; on en fait autant à chaque pièce , en obfervant que les deux pentes ou chanfreins ayent une même inclinaifon ; ce qui étant fait , on ks préfente l'un fur l'autre , pour voir s'ils joignent bien enfemble ; puis le joint étant bien , on met les morceaux l'un fur l'autre , & on les entoure de papier un peu fort , qu'on met en trois ou quatre doubles , & on arrête le tout avec du fil ; enfuite on fait chauffer des pinces affez épaiffes pour qu'elles em- brafTent toute la longueur du joint, qu'on ferre avec ces dernières jufqu'à ce qu'on s'apperçoive que l'écaillé devenue molle , ployé par fon propre poids, ou du moins obéiffe aifément fous le doigt ; alors on la retire des pinces Sc on la laiffe refroidir , & elle eft parfaitement fondée. Il faut prendre garde que les pinces ne foient trop chaudes ; car elles brû- leroient l'écaillé fans la fouder ; c'eft pourquoi , avant de ferrer le joint avec les pinces , il faut les effayer fur du papier ; & quand elles ne font que rouffirun peu ce dernier, fans cependant le brûler , c'eft un figne qu'elles font à un degré convenable de chaleur. Pour bien fouder ainfi l'écaillé , il feroit bon d'avoir des pinces faites exprès, dont les mâchoires un peu épaiffes , fuffent difpofées de manière que quand elles faifiroient l'écaillé & le papier qui l'entoure , elles fuffent exaélem.ent parallèles , afin que leur preifion fût parfaitement égale dans toute f étendue du joint : c'eft à-peu-près de cette manière que les Chinois foudent les cornes de leurs lanternes , comme on peut le voir dans le Journal Economique du mois de Septembre 175^, page ^2. On foude encore f écaille par le moyen de l'eau bouillante , ce qui fe fait de la manière fuivante. On difpofe le joint en flûte , comme je viens de le dire ci-deffus ; puis on met les deux morceaux ajuftés dans la preffe ,Jig. 7 <& 8 , entre deux morceaux de cuivre , en obfervant que les joints fe chevauchent un peu ; enfuite on ferre médiocrement la vis pour mieux affujettir les morceaux à leur place ; & quand on eft certain qu'ils font bien , on met le tout dans l'eau bouillante ; après quoi on achevé de ferrer la vis de la preffe pour faire prendre le joint de fécaille à mefure qu'elle s'amollit. De quelque manière qu'on foude l'écaillé, il faut avoir grand foin que les joints foient très-vifs & très-propres , parce que la moindre particule de graifîe ou 3H- SECTjILDela manière de travailler les differemes?/laneres,SCc. roir. ou d'ordure empêcheroit l'aâion de la foudure ; il fauc même éviter de paflèr fon haleine fur ces joints, ni d'y toucher avec les doigts. Planche Les Ebéniftes foudent peu l'écaillé , les uns parce qu'ils ne le favent pas faire, 8c les autres parce qu'ils ne s'en foucient pas , Se que d'ailleurs ce n'eft pas la coutume ; cependant cette reffource efl: fort avantageufe dans beaucoup d'occa- (ions où il faut de grands morceaux d'écaillé d'une même pièce , ou du moins qui femblent l'être. Quand on veut foudér deux morceaux d'écaille enfemble , il fauc les choifir de manière qu'afendroit du joint, leurs couleurs ou leurs nuances foienc à-peu- près femblables , afin que le joinc ne foie pas apparent, du moins autant qu'il eft polfible de le faire. Les Ebéniftes n'emploient pas l'écaiUe coûte nue , ceft-à-dire, qu'ils no. l'appliquent pas immédiatement fur le bois ; mais après l'avoir dreflee & mife d'épaiflêur , ils la doublent pour y donner du fond , 8c pour que la colle & les nuances du bâtis ne paroifTent pas au travers. Cecte doublure n'eft aucre chofe qu'une couche de noir ou de rouge étendue fur l'écaillé du côcé de la chair , & recouverte enfuite avec du papier qu'on y applique en même-temps que la couleur , laquelle ferc de mordant pour recenir le papier. Ces deux couleurs fe fonc l'une avec du noir de fumée , & l'aucre avec du vermillon, f un & l'autre décrempés & broyés avec de la colle de poiifon qu'on préfère à la colle d'Angleterre , non-feulement parce qu'elle eft plus tenace, mais encore parce qu'écant plus claire & limpide , elle ne gâte pas la couleur du ver- millon, qu'on doic employer le plus pur polfible, pour qu'il donne uneplus belle couleur à f écaille. Ces deux couleurs font les feules qu'on donne à fécaiUe , du moins pour l'ordinaire , & la rouge eft celle qui eft la plus uficée maincenanc. On pourroic cependant doubler l'écaillé avec d'autres couleurs , ce qui fe- roic très-bien dans différentes occafions , en donnant plus de variété aux ouvrages de Marqueterie. On double la corne de la même manière que l'écaillé , foie en bleu ou en verd , ou toute autre couleur. Le bleu fe fait avec de l'indigo , du bleu de Pruflè ou d'autres poudres de cette couleur. Le verd fe fait avec une poudre verte , que les Marchands de Couleur vendent fous le nom de verd calciné, qui n'eft autre chofe que du verd-de-gris cryftallifé nommé , par les Apothi- caires , cryjlaux de verdet. Le jaune , ainfl que les autres couleurs , fe fait avec différentes fortes de poudres qu'on trouve chez les Marchands de Couleurs , & on les broie , ainfi que toutes les autres , avec de la colle de poiffon. On emploie toutes ces couleurs à chaud, & on y applique tout de fuite du papier , comme je l'ai die ci-delTus.' Il y a de petits ouvrages de Marqueterie , comme des porte-montres 8c autres , où au lieu d'écaille , on emploie de la corne peinte par-derriere d'abord en rouge de vermillon appliqué par tache , ^ enfuite doublée avec du noir à Menuisier , ///. Pan. III. Sec?, JJ la soi= MENUISIE R , III. Pan. III. Secl. Chap. XÏV. l'ordinaire, ce qui fait une mauvalfe imitation de 1 écaille , qui ne peut guère Planche jjonnper, pour le peu de connoiffance qu'on ait ; Cependant on pourroit , avec un peu plus d'adrefTe , non-feulement imiter l'écaillé en peignant la corne pat- derriere , mais encore y peindre divers fujets qui fe trouveroient par ce moyen , à l'abri de tout accident , & qui dureroient très-long-teraps ; & pour peu que ces peintures fuflent bien faites, ce feroit encore un moyen d'augmenter la magnificence des ouvrages de Marqueterie. Quand les feuilles,, foit d'écaillé ou de corne , font doublées , on les laiffe fécher pour les découper enfuite comme je vais l'expliquer dans la Sedlion fuivan. te , quand j'aurai dit quelque chofe du travail de l'ivoire & de la nacre de perle. L'ivoire étant , comme je l'ai dit plus haut , une fubftance ofTeufe , on ne peut ni la fondre ni la redreffer , de forte qu'on -ne peut la mettre en état d'être employée qu'en la débitant à la fcie , tant fur la longueur que fur l'épaif- feur , & toujours aux dépens de cette dernière , ce qui ne produit cependant pas beaucoup de perte ; parce que pour peu qu'on ait d'ufage & d'adrefTe, on peut la refendre en lames très-minces, fans en caffer beaucoup , avantage qu'on n'a pas avec l'écaille , puifqu'il faut , pour la mettre d'épailfeur , en perdre une partie , ce qui eft quelquefois très-confidérable. On fcie l'ivoire avec une fcie à dépecer , dont j'ai donné la figure page 8or. La lame de la fcie avec laquelle on débite l'ivoire doit être trempée un peu mince, & avoir des dents d'une moyenne grandeur & parfaitement égales entr'el- les , afin qu'elles ne dévoyent pas, & qu'elles ne s'engagent pas dans l'ivoire, ce qui la feroit éclater. On fcie l'ivoire de deux manières , favoir , à fec & à l'eau. Cette dernière manière eft la plus ulitée & la plus avantageufe , fur-tout pour l'ivoire verte „ qui s'échauffe aifément par le frottement de la fcie , ce qui non-feulement la fait éclatter , mais encore en gâte la couleur , qui devient roulfe par l'effet de la chaleur ; à quoi on remédie en verfant un peu d'eau dans le trait fans retirer la fcie ( à-ceu-près comme font les Scieurs de pierres ) , ce qu'on doit faire d'abord qu'on fent la moindre réfiftance , afin de ne pas laiflèr à la fcie le temps de s'engager ni d'échauffer Fivoire. Quand on fcie l'ivoire à fec, d'abord qu'on fent que la fcie commence à s'engager , on la frotte avec un morceau de peau ou de laine , fur lequel on a étendu de la graiffe , laquelle facilite le palfage de la fcie , mais ce qui eft moins bon que l'eau , qui , en remplilfant le même objet , a de plus favantage de conferver la fraîcheur de l'ivoire. Quand on débite fivoire , ainfi que l'écaille & la corne , on la place dans l'étau ; & quand ce font de petits morceaux qu'on veut débiter , on les affure dans un petit étau , & ce dernier dans le grand , afin que les pièces foient expofées à moins d'effort, ce que, d'ailleurs un Ouvrier intelligent prévient toujours , foit en foulageant la main qui conduit la fcie , foit en foutenant de l'autre les morceaux qu'il débite. SectJH. De la mdniefe de travaUler les différentes Madères. 1013 ■'1' L'ivoire fe travaille aflez bien avec les outils ordinaires ; mais il vaut cepen- r-— — — «*, fiant mieux fe fervir des écouenes grandes & petites , & grêles , dont j'ai fait Planche la defcription page 937. On fe fert auffi de limes , tant pour la drefTer que pour en terminer les contours, quand ils ont été découpés à la fcie , fuppofé que cela foit néceiîàirei ' ^ De toutes les matières dont les Ebéniftes font ufkge dans la conftruaion de • ijUl'l  l'Ebéniflerie dont je traite maintenant, la nacre de perle eft la plus dure, la II '';'*!] plus ingrate & la plus difficile à travailler ; il n'y a que les fcies trempées , le grais & les limes qui mordent deffus ; de plus , commeelle eft très-caflante , ii faut beaucoup d'ufage & de foin pour la travailler. ' ' Quand on débite la nacre de perle , il faut avoir grand foin de fcier les mor- ceaux perpendiculairement à fa furface ; enfuite on la refend fur l'épailTeur , non pas pofitivement telle que celle dont on a befoin , mais plus qu'il ne faut pour les redrelTer enfuite fur la meule , parce qu'il n'eft pas fort aifé de la I ;. refendre bien droite. iflf'Q Il yadegroflès nacres qui fe fendent d'elles-mêmes fur l'épailTeur ; ce font " les moins belles ; & quoique très-grandes , il arrive fouvent qu'on n'en peut tirer que de très-petits morceaux , à caufe de la finuofité des fentes, ou , pour mieux dire , des différentes couches dont elles font compofées. Quand la nacre eft débitée , on la drelfe & la met d'épailfeur fur la meule i,' ce qui fe fait de la manière Suivante. On ajufte au-deflTus de l'auge de la meule un levier de bois e f, £0-. ô '"'1! Pl. aSo , dont le bout eft arrondi en forme de poignée , pour pouvoir appuyer ''t' fiir la nacre de perle qu'on pofe fiir la meule d'une main , en appuyant de 'È l'autre avec le levier autant qu'on le juge à propos. Lorf:iu'on dreflè ainfi la nacre , il faut avoir grand foin que la meule trempe ' lii! bien dans l'eau , parce que s'il arrivoit qu'elle fût à fec , cela échaufferoit la jl nacre , qui fe fendroit , ou du moins changeroit de couleur ; & pour que celui ' W^'M' qui travaille ainfi la nacre ait plus de force , & foit moins fatigué de la main dont il tient cette dernière , il feroit bon de faire un petit ravalement en-def- fous du levier, à l'endroit où il fait tangente avec la meule , afin d'appuyer & de retenir la nacre , que le mouvement de la meule tend toujours à emporter. La nacre , ainfi que l'ivoire , fe met à l'épaiffeur du placage ordinaire , c'eft- à-dire, qu'on lui donne tout au- plus une ligne , afin qu'en les incruftant , ils fe trouvent au nud de ces derniers. Je ne parlerai pas ici du travail des autres matières quî entrent dans la conP truélion de la Marqueterie , comme le cuivre , l'étain , &c , parce que les Ebéniftes les achètent tout apprêtées , c'eft-à-dire , mifes à répaifl"eur convena- ble , de manière qu'ils n'ont rien à y faire avant que de les découper , ainfi que je vais l'expliquer dans la Sedlion fuivante. Planche S3i- 1014 MENUISIE R,ni. Pan. Secl. lîL C'hap. XIV. Section Quatrième. De la manière de conjlruire la Marqueterie & de la terminer: ' La conftruaion de la Marqueterie , ou , pour mieux dire, de la Mofaïque en métaux, quoiqu'à-peu-près femblable à celle de la Mofaïque ou Peinture en bois , dont j'aifait la defcription , page 8(56 , & fiiiv. demande cependant d'être traitée à part , tant par rapport à certaines manières d'opérer , qui font différen- tes , qu'à la qualité des matières qu'on y emploie. Ces matières font dans la Marqueterie ordinaire , le cuivre & l'écaillé , l'un formant les deffeins , & l'au- tre le fond de l'ouvrage. Comme les matières qu'on emploie pour faire de la Marqueterie , même la plus commune , font d'une certaine valeur & affez difficiles à mettre en œuvre , on a cherché les moyens d'épargner en même-temps & la main-d'œuvre & la matière; c'eft à quoi on eft parvenu, en découpant deux feuilles de matières différentes (comme du cuivre & de l'écaiUe ) l'une fur l'autre , de manière qu'on a eu à la fois deux pièces de Marqueterie également découpées , dont les fleurs ou les ornements de l'une puifTent être placés dans les vuides de l'autre, dont, par conféquent , on avoit ôté les fleurs & les ornements pour les placer dans les vuide. de la première. Cette manière de découper la Marqueterie s'appelle travailler en contre-partie. La Marqueterie où Técaille fait le fond de l'ouvrage , & le cuivre les ornements , eft la plus belle , & fe nomme la partie , c'eft-à-dire , celle, qui a été le principal objet du travail; celle au contraire dont le cuivre fait le fond & l'écaillé les ornements , fe nomme contre-partie , & eft la moins efti- mée , quoiqu'on puilTe parvenir à la rendre très-précieufe , comme je le dirai en fon lieu. Quand on veut faire une pièce de Marqueterie quelconque, on commence par faire le deflein général de l'ouvrage, tel qu'il doit être exécuté, comme, par exemple, ï&fig. i , dont on prend un ou plufieurs calques , félon qu'il eft néceflàire , le deflein devant être confervé pour fervir à terminer l'ou-: Vrage. Enfuite on prend une feuille d'écaillé de la grandeur convenable , & une feuille de laiton, qu'on colle l'une fur l'autre avec de la colle ordinaire, non pas en totalité, mais feulement de diftance en diftance, ce qui eft fuffifantpour les afllijétir enfemble. Avant que de coller la feuille de laiton , il eft bon de la découvrir en-deflbus avec une groflê lime paflee en différents fens , ou bien avec le rabot de fer bretté , pour que , quand il eft découpé , il prenne mieux la colle. Quand les deux feuilles font ainfi jointes enfemble , on colle le calque fur Sect. ÎV. Manière de confirulre la MarqueteiieôC la terminer. 1015 fur celle de cuivre , & on laiffe le tout fécher , après quoi on les découpe ■ ■> avec la foie de Marqueterie de la même manière que pour la Mofaïque en Pi-anche bois. 35^' Comme les ornements de Marqueterie ou Mofaïque en métaux , font ordi- nairement très-délicats & d'une forme fouvent très-compliquée , il eft néceffaire de fe fervir de fcies extrêmement fines, qu'on fait fouvent entrer par de petits trous percés aux endroits qui font les moins apparents de l'ouvrage. Ces trous fe font avec le petit touret à main, repréfenté PL 319,^%. i & a. , ou bien au foret, ou même au trépan , fg. 12 , mcme Planche , ce qui dépend abfolu- ment des différentes occafions ou du goût de l'Ouvr'er , qui à beaucoup de légèreté Se d'adreffe , doit joindre beaucoup d'attention pour placer fa fcie, de manière qu'il voie toujours le trait du calque , Se qu'il découpe la plus grande quantité poffible d'ornements fans être obligé de retirer la fcie. Quand la pièce eft entièrement découpée, on fépare les deuxfeuillas l'une d'avec l'autre , foit en les plongeant dans l'eau chaude , ou Amplement en paffanc entre elles une lame de couteau très-mince , ce qui eftfufBfant , quand on a foin de ne mettre que de la colle peu épaiffe , Se Amplement ce qui eft néceffaire pour retenir les deux feuilles enferable , comme je l'ai dit plus haut; après que les feuilles font féparées , on les évuide , c'eft-à-dire , qu'on en fait fortir les ornements pour les replacer d'une pièce dans une autre ; Se alors chaque pièce refte évuidée, comme le repréfenté la Jîg.2. Dans le cas d'une grande pièce de Marqueterie , comme celle iepr.^fentée fig. I (5 2 , il n'eft guère poiTible de faire le tout d'un feul morceau , tanc par la difficulté de trouver des feuilles d'écaillés affez grandes , que par l'em- barras que caufe la grande quantité de contours dont cette pièce eft compofée ; c'eft pourquoi on fait d'abord à part les plate-bandes du pourtour , comme celles AB Se C D,Jîg. 3.; puis dans le corps de la pièce on fait des joints où les ornements fe coupent les uns les autres , Se où ils féparent le fond pat de grandes maffes , comme , par exemple , aux places E, F, G, H, I, Sec, ce qui eft une affaire d'expérience Se de goût, fur-tout pour l'écaillé, où il faut, autant qu'il eft poffible, que le changement de feuille ne foit pas trop apparent. Après que les feuilles , tant de cuivre que d'écaillé, ont été évuidées, ( les remplit par leurs ornements, qui alors ne font qu'en maffes , comme le ^'•'■"^"^ repréfentent les fig. j,^ & ^ , Se les fig. 2. , ^ & 6 ; les premières en parties, * Se les fécondes en contre-parties , c'eft-à-dire, que le fond des uns eft en écaille , & celui des autres en cuivre , comme on peut le voir dans ces figures , Se que je l'ai déjà dit. Chaque partie & contre-partie étant ainfî remplies Se bien affleurées à l'extérieur , ou , pour mieux dire , du côté qui doit être appliqué fur les bâtis de l'ouvrage, on colle le tout enfemble avec de bonne colle d'Angleterre , ou même de poiffon , Se on couvre toute la Marqueterie du côté Menuisier, III. Pan. III. Secl, G la PiANCHE joi6 ME NV IS lE R,III. Pan. Secl. III. Chap. XIV. ~~ = parement, avec du gros papier qu'on colle deffus , comme à la Mofaïqiie en bois , & on laifle le tout fécher avant de plaquer , ce qui fe fait à- peu-près de la même maniera que pour l'Ebénifterie de placage, à l'exception qu'on ne peut pas appuyer avec autant de force avec le marteau pour faire prendre colle au placage , ce qui oblige de le mettre en prefle avec des couf- fins ou fies de coutil remplis de fablon ou de grès très-fin , qu'on fait chauffer pour conferver plus long-temps la chaleur de la colle. Il eft même bon de mettre entre ces couffins & le delfus du placage , des morceaux de toile trempés dans de l'eau bouillante , & qu'on fait promptement fortir dehors en les tordant. Ces linges chauds & humides fervent à conferver l'écaillé dans un état de moUelfe qui la fait prêter à la preffion du poids qu'on met deffus , pour lui faire prendre colle. On lailfe le placage ainfi en prelTe jufqu'à ce qu'il foit entièrement refroidi, & que la colle foit feche; après quoi on îe laifTe quelque temps dans un endroit fec , où il n'y a point d'humidité à craindre , ni de trop grande chaleur , qui pourroit faire lever le placage. Quand l'ouvrage eft cintré fur le plan , la Marqueterie eft plus difficile à plaquer , parce qu'il faut la cintrer auparavant , c'eft-à-dire , après que les ornements & le fond ont été collés enfemble. Lorfqu'on veut cintrer une pièce de Marqueterie , après qu'elle a été cou- pée extérieurement félon la forme qui lui eft convenable , en fuivant le déve- loppement de la furface du cintre , on préfente la pièce au feu pour amollir l'écaillé , fans cependant faire fondre la colle , qui en retient les différentes parties ; puis on la pofe fur l'ouvrage à la place qu'elle doit occuper , & on la recouvre promptement avec des linges trempés dans de l'eau bouillante, on met par-deffus les couffins, & on ferre le tout enfemble comme fi on vou- loit la coller , en obfervant cependant de ne ferrer , foit la prefle ou les gober- ges , que petit à petit , afin de ne point forcer fécaille , qu'il vaut mieux faire chauffer à plufieurs reprifes pour parvenir à lui donner la forme demandée. Au lieu de cintrer ainfi la Marqueterie fur l'ouvrage , il feroit beaucoup mieux de faire des moules d'une forme femblable à ce dernier , tant en deflîis qu'en deffous , c'eft-à-dire , qu'au lieu du couffin , on fît une calle de bois cintrée à contre-fens de l'ouvrage , de manière que pour cintrer une pièce de Marqueterie , après l'avoir fait chauffer & même ployer à la main , on n'auroit qu'à la mettre entre les deux moules , en prenant toujours la pré- caution de mettre entre ces derniers & la pièce de Marqueterie , des linges trempés dans l'eau bouillante , ou même des couvertures de laine d'une moyen- ne confiftance. Cette manière de cintrer la Marqueterie , eft très-bonne , & étoit ancienne- ment en ufage ; je ne fai pourquoi on ne la fuit plus : il eft vrai qu'elle eft un peu plus longue que la première ; mais auffi a-t-elle l'avantage d'être beau- coup plus fîire & plus commode , tout ce travail pouvant fe faire dans une Sect. If. Manière de confiruire la Marqueterie ëC la terminer. 1017 prelTe & devant le feu , ce qui fait que les pièces de Marqueterie confervent plus long-temps leur chaleur, &fe prêtent par conféquenc mieux à i'eifort qu on fait pour les cintrer. Les delTus des moules dont je viens de parler , peuvent auffi fervir pour coller la Marqueterie cintrée , ce qui eft un double avantage. Quand la Marqueterie eft collée on la laiffe fécher , après quoi on la finit en commençant d'abord par Ôter le papier & la colle , après quoi on la drelTe' & l'unit avec des limes de différentes grolTeurs , puis on la racle avant que de la graver, pour achever de détailler & d'ombrer les ornements qui ne font qu en maifes , & qui ne peuvent avoir d'eifec que par le moyen de la gravure comme on peut le voir à hfig. j , qui repréfente une partie de Marqueterie' toute finie. ^ La contre-partie ,fig. 8 , fe finit de même , du moins jufqu'à ce que l'ouvra.« fo.t prêt a graver ; & comme dans cette efpece de Marqueterie , c'eft le cuivre qui fait le fond & l'écaille les ornements, on ne grave pas cette dernière, du moins pour 1 ordinaire ; mais après que l'ouvrage a reçu la première préparation du poli comme je viens de le dire, on enlevé toutes les parties d'écaillé lulceptibles de détails, comme les fleurs , les fruits & les figures & on remplit ces vuidespardes cornes diverfement coloriées, & même de la nacre de perle qu'on découpe d'après les parties d'écaillé qu'on a fuprimées , & qu'on colle enfuite comme les fleurs de la Mofaïque en bois ; ce qui é..n, fait on grave les ornements comme on a fait ceux de cuivre , comme je le dirai' ci- après. Quoiqu'en général la contre-partie de la Marqueterie foit la moins eftimée, on pourroit, comme je l'ai déjà dit , en tirer un très-bon parti ; on pourroic même , en facrifîant une partie de l'écaille qui en forme les ornements , en faire une Mofaïque très-brillante & très-riche , en y fubftituant des cornes diverfement coloriées & même peintes : on pourroit aufli y mettre d'autres mor- ceaux d'écaillé dont les nuances reviendroient au ton de certaines fleurs ou de tous autres objets qu'on voudroit repréfenter. Cette efpece de Mofaïque , exécutée par un habile Arrifte, feroit très-belle & n'auroit peut-être d'autre défaut que celui qu'on reproche aux anciennes Mofaïques de Sainte Sophie de Conftantinople , & de Saint Marc de Venife, dont les fonds dorés détruifent une partie de leur effet. Les Ebéniiles ne gravent pas leurs ouvrages eux-mêmes , ou du moins il y a des Ouvriers qui ne s'occupent que de cette forte d'ouvrage. Les outils propres à graver la Marqueterie, (du moins pour les métaux) font les mêmes que ceux des Graveurs en taille-douce ; favoir , des burins, des échopes , un ébarboir , un grattoir & un bruniffoir. ' Le burin, i 2, eft un morceau d'acier d'environ 4 à ; pouces de long, d'environ une ligne & demie en quarré , comme celui coté A , Eig. i , dont ioi8 MENUISIER, m. Part. SeB. III. Chap. XIK .. l'extrémité fupérieure eft afFûtée en bifeau d'un angle à l'autre. Il y a des Planche burins B, fig. 2 , lofanges par leur coupe ; ils font afFûtés des deux angles les plus éloignés , & fervent à faire des traits ou tailles plus profondes & moms larges que les burins quarrés. Les côtés oppofés au bifeau d'un burin fe nomment k ventre ; ils doivent être afRités très-vifs & bien droits. Les burins font montés dans de petits manches de bois blanc , dont on applatit un cÔté , afin que quand on grave , le ventre du burin fe trouve dans une fituation prefque parallèle avec l'ouvrage , & ne s'y engage qu'autant qu'on le juge à propos. Les échopes différent des burins , en ce que la vive-arête du ventre eft un peu ■ abattue, de manière qu'ils ne font pas pointus par le bout, mais qu'ils pré- fontent une petite face qui eft plus ou moins grande , folon qu'on a plus ou moins abattu l'arête du ventre de l'échope. L'ufage de cet outil eft de faire tout de fuite des tailles larges & quarrées dans le fond. Le grattoir 3 , n eft autre chofe qu'une lime en tiers-point, affûtée à vive-arête fur fos trois faces : fon ufage eft d'ôter les bavures ou barbes que fait fur le cuivre le paA^age du burin ou de l'échope. , L'ébarboir diffère du grattoir, en ce qu'il a quatre faces toutes affûtées a vives-arêtes : fon ufage eft à-peu-près le même que celui du grattoir , auquel on le préfère quelquefois dans les ouvrages fins, parce que fos tranchants font moins vifs. Le bruniffbir , 4 , ett un morceau d'acier trempé & parfaitement: poli, long d'environ trois à quatre pouces , & qui eft diminué vers fon extrémité fupérieure. La coupe de cet outil eft de la forme d'une olive très-allongée : fon ufage eft d'effacer les faux-traits faits fur le cuivre , en rapprochant les parties les unes contre les autres , ou , pour mieux dire , en refoulant la matière fur elle-même. Il faut auffi une pointe, flg. y, pour tracer fur le cuivre ; ce n'eft autre chofo qu'une aiguille à coudre ou toute autre broche d'acier trempée , montée dans un manche de bois , comme on peut le voir dans cette figure. Quand on veut graver les ornements fur la Marqueterie , il faut les deffiner fur le cuivre incrufté , ou les autres matières quelconques , ce qui eft un peu long , & même peu corred ; c'eft pourquoi il vaut mieux les calquer for le deffin même , ou for une copie bien faite , ce qui eft égal , pourvu que toutes les formes du deffin foient bien rendues. Pour décalquer ainfî les ornements, il faut enduire le cuivre avec une lé- gère couche de cire blanche , qu'on y applique après avoir chauffé le cuivre modérément ; puis quand la cire eft refroidie , on applique le calque defTus , après l'avoir auparavant frotté par-derriere avec de la fanguine pulvérifée , ou de la mine de plomb tendre ; puis avec une pointe on trace tous les contours du deffin ou du calque , qui , par ce moyen, fo trouvent appliqués for la cire. Sect.îF. Manière de conftmîre la Marqueterie ÔC la terminer. ioi<^ On ne décalque ainfi les ornements que quand ils font un peu confidéra- ==== bles ; car pour les petites parties , on fe contente de les deflîner fur la place. Planche Quant à la manière de graver fur le cuivre , c'eft à-peu-près la même chofe que pour les ornements de Mofaïque en bois dont j'ai parlé ci-devant , pa<re 884 ; c'eft pourquoi je n'en parlerai pas ici. De plus , le détail de la gravure au burin appartient à l'Art du Graveur proprement dit , & demanderoit une très- longue defcription pour être rendu avec la précifion & la clarté dont cette matière eft fufceptible. Le cuivre , l'étain , l'argent , l'or & la nacre de perle , fe gravent au burin plein, repréfenté^û^. i 2 de cette Planche ; mais l'écaillé & la corne ne peu-- vent guère fe graver qu'au burin évuidé , dont on peut voir la figure FL 299 , I o, 1 1 , 1 3 ê 13 , parce que ces matières étant compofées de plufieurs cou- ches pofées les unes fur les autres , le burin plein les fait éclatter , quelque précaution qu'on puilTe prendre ; ce qui n'arrive pas lorfqu'on fait ufage du burin évuidé , comme je l'ai démontré en parlant de l'ufage de cet outil , page 884. Quand la Marqueterie eil gravée on en remplit toutes les tailles avec de la colophane fondue , ou toute autre drogue dont j'ai parlé , pages 863 887 ; après quoi on achevé de la polir , ce qui fe fait de la manière fuivante. On prend de la pierre de ponce bien unie , qu'on trempe dans de l'huile d'olive ; puis on en frotte l'ouvrage fur tous les fens , en obfervant de n'y pas mettre trop d'huile , qui, en s'imbibauc dans le placage , pourroit le faire lever ; après quoi on prend de cette même pierre ponce réduite en poudre & palfée au tamis de foie , on la mêle avec un peu d'huile , & on l'étend fur l'ou- vrage avec un bois à polir , en appuyant fortement delTus , & en faifant mou- voir ce dernier de différents fens. A la place d'un bois à polir , on pourroit , fur-tout dans les parties plates, fe fervir d'un polilîbir de jonc , ou bien d'une efpece de molette de bois plein & moyennement dur , comme du poirier ou tout autre bois de cette elpece , qui étendroit très-bien cette potée. Après la pierre ponce , fi la Marqueterie étoic compofée d'ébene & de cuivre , on prendroit le charbon comme pour polir le cuivre , ainfi que je l'ai enfeigné ^izff^pj'î. Après la pierre ponce & le charbon , on fait ufage du tripoli pulvérifé &' délayé avec un peu d'huile d'olive , & appliqué fur l'ouvrage avec des bois à polir ou une molette garnie de bufle ou de chapeau. Enfin on fait ufage du tripoli à fec , & du blanc d'Elpagne enfuite , pour achever de polir l'ouvrage & qu'il n'y refte aucune tache. Quelles que foient les matières qu'on emploie dans la conftruâion de la Mar- queterie ou Mofaïque en métaux , on fuit toujours , à peu de chofe près , les mêmes procédés dont je viens de faire la defcription ; il n'y a de différence que quelques précautions qu'il faut prendre en railbn de la nature de ces Menuisier , ///. Pan, lll. Secl^ D la I020 MENUISIER, m. Pan. 111. SeEl. Chap. XIV. rs différentes matières, dans le détail defquelles je n'entrerai pas , parce que c'eft Planche ^^j^g affaire qui feroit d'une trop longue difcuffion , fans pour cela être abfolu- ment néceiîàire. Quand on fait entrer l'argent ou l'or dans la conftruéfion de la Marqueterie, il faut avoir grand foin en découpant ces métaux , d'entourer le bas de l'axe ou étau d'une peau de mouton , dans laquelle tombent les fciures & la limaille > laquelle efï très-précieufe , vu la cherté de ces métaux , fur-tout de l'or , qui vaut près de cent livres l'once. Comme en général les métaux ne prennent pas bien la colle , il faut , quand ils feront de grandes maffes , les arrêter dans le bois avec de petites pointes de même métal , qu'on fera entrer le plus jufle pofTible , & dont on refoule un peu la tête pour qu'elles joignent mieux ; & on fera enforte , autant qu'il fera pofTible , de placer ces pointes fous les ornements de bronze , ou bien dans les enroulements des gravures , de manière qu'elles ne foient pas apparentes. A la place de la Mofaïque en bois , en cuivre , dont je viens de faire la defcription , on revêtit quelquefois les meubles avec de la laque ou vernis de la Chine ou du Japon , dont ordinairement le fond efl noir & rehauffé d'or- nements d'or. La laque qu'on emploie ordinairement en Ebénifterie, fe prend dans des feuilles foit de cabinet ou de paravent venu de la Chine ou du Japon , qui , pour la plupart , font vernies & peintes des deux côtés , & qu'on refend au milieu de leur épaiffeur pour les diminuer enfuite au rabot & les mettre en état d'être plaquées fur des fonds de Menuiferie ordinaire. Il faut prendre beaucoup de précautions , tant pour refendre ces feuilles , que pour les diminuer , de crainte de faire fendre ou éclatter le vernis ; c'eft pourquoi , lorfqu'on les re- fend , il faut les mettre dans la prefTe entre des couffins ou des couvertures de laine. Il faut avoir la même précaution lorfqu'on les rabote par derrière , c'eft -à-dire , qu'il faut mettre fur l'établi une couverture ployée en double , pour que les inégalités qui font à la furface du vernis à l'endroit des fleurs ou autres ornements , entrent dans l'épai/Teur de cette couverture. En diminuant l'épaifTeur des bois qui portent la laque ou vernis de la Chine,- il faut prendre garde de leur lailTer atfez de confiftance pour qu'ils ne fe rom- pent pas ; c'efl pourquoi il faut leur laiffer au moins une ligne d'épaiffeur j après quoi on les plaque fur l'ouvrage à l'ordinaire , en prenant toutefois la précaution de les faire chauffer , ainli que les bâtis qui doivent les recevoir , & d'étendre fur la laque des couvertures , par-defTus lefquelles on mec des couffms ou des calles de bois avec des goberges ou des prelTes à coller , félon qu'on le juge néceffaire ; mais il ne faut jamais fe fervir de valets pour faire ces collages , de crainte qu'en frappant deflîis pour les ferrer , on n'étonne le vernis , & qu'on ne le faffe fendre. Sect. if . Manière de conjlruire la Marqueterie ÔC la terminer. 102.1 Autant qu'il eft polTible , on entoure les joints des ouvrages de laque de rapport avec des ornements ou des cadres de cuivre , parce que quelques précautions qu'on prenne en coupant les feuilles de laque, il eft bien diffi- cile de n'y pas faire quelques éclats , qui font paroître la place des joints , ce qui fait un très-mauvais effet; de plus , quand on pourroit parvenir à cou- per la laque avec toute la propreté poffible , les arêtes des ouvertures qui ne feroient pas ainfi garnies , ne tarderoient pas à être gâtées , ce qui feroit toujours mal. On imite en France les vernis de la Chine ( du moins autant bien qu'il à été poiTible jufqu'à préfent ) ce qui fait de l'ouvrage plus folide que celui où on plaque ceux de la Chine. Dans ce dernier cas , c'eft-à-dire , quand on vernit les meubles , il faut avoir grand foin que leurs bâtis foient conftruits debonboistrès-fec, & avec toute la folidité poiTible , comme je l'ai enfeigné dans le cours de cet Ouvrage. Ce que je viens de dire renferme , à peu de chofe près , tout ce qu'il eft elTentiel de fayoir touchant la théorie pratique de la Marqueterie ou Mofàïque en métaux , m'étant uniquement borné , dans la defcription de cette dernière elpece d'Ebénifterie , ainfi que dans celle des deux autres, à donner des règles générales applicables à tous les cas , fans donner d'exemples particuliers de l'application de ces mêmes règles. Je ne parlerai pas non plus du mélange des différentes matières qui entrent; dans la conftruélion de la Marqueterie , parce que cette matière eft inépuilàble, & que ce mélange dépend abfolument du goût de l'Artifte , de la nature & de la plus ou moins grande richelFe des différents ouvrages , qui , lorfqu'ils font d'une très-grande richeffe, dépendent , pour leur conftruélion , du travail de différents Ouvriers , comme les Ebéniftes , les Tabletiers , les Marbriers , les Peintres, les Orfèvres, les Metteurs-en-œuvre , les Fondeurs-Cifeleurs ,&c, à moins qu'un Ebénifte ne polfédât toutes les connoilîànces relatives à ces diffé- rents talents , ce qui eft très-rare à trouver , fans cependant être impofTible. Mais comme ce détail eft abfolument au-defTus de mes forces , je vais donc finir cette Seâion par donner une idée générale des différentes efpeces de Mofaïques dont on fait ufage avec la Mofaïque dont je viens de parler ; après quoi j'entrerai dans quelques détails fur les bronzes dont on orne les ouvrages d'Ebénifterie en général , ce qui terminera cette Troifieme Partie de mon Ouvrage , afin de paffer tout de fuite à la defcription de l'Art du Treillageur, ou Menuiferie des Jardins, qui fera le fujet de la Quatrième & dernière Partie de r Artdu Menuifier , comme je l'ai déjà annoncé à la fin de la defcription de la Menuiferie des Voitures , page Jp5. MENUISIER, m. Pan. SeS. III. Chap. XIK Planche I. Idée générale des différentes efpeces de Mofdiques. 33^- L'Art des Mofaïques efl: de la plus haute antiquité ; il a pris fon origine dans l'Afie , d'où il fut apporté en Grèce , delà chez les Romains Se dans tout le refie de l'Europe. Cet Art , ainfi que tous les autres , fut très-fimple dans fon origine ; il n'avoit pour objet que la décoration des planchers des Appartements , Se confiftoit dans l'arrangement de quelques briques diverfement taillées , ou de pierres , ou de marbres coloriés, placés fymmétriquement fur l'enduit de ces mêmes planchers. Peu-à-peu cet Art fe perfe£lionna , & on parvint à repréfenter divers fujets , en employant des pierres d'une très-petite capacité , ôc dont les diverfes cou- leurs rendoient ces derniers avec beaucoup de vérité. A la chute de l'Empire Romain, cet Art fut anéanti, ainfi que beaucoup d'autres ; & ce ne fut qu'après un très-long efpace de temps que plufîeurs chef-d'œuvres de Mofaïques furent retrouvés parmi les décombres des édifices des anciens Romains : ce fut alors qu'on admira la fameufe Mofaique du Temple de la Fortune à Pra;nefte ou Paleftrine , faite fous Sylla ; celle de la maifonde Cicéronà Tufculum, aujourd'hui Frafcati ; celles de la ville Adrienne, près de Tivoli , anciennement Tibur , qui , toutes méritent l'attention des Connoilleurs , & font voir jufqu'à quel point de perfeélion les Anciens avoient porté l'art des Molâïqucs. On a auffi retrouvé des Mofaïques dans les ruines d'Herculanum , Colonie Grecque, enfevelie fous les laves du Véfuve depuis le commencement de l'Ere Chrétienne , dont une entr'autres qui eft compofée de très-petites pierres , 8c n'a que dix-huit pouces de long fur douze de large , dans laquelle font lepréfentées quatre figures mafquées , dont une d^nfe , l'autre joue du tambour de bafque , l'autre de deux flûtes , & la dernière des caftagnettes. On y a aufïï retrouvé une armoire dans laquelle étoient pluCeurs manu- fcrits ; cette armoire , dont il ne refte que quelques fragments ( le refie ayant été détruit par le laps du temps & par la chaleur des matières qui couvrirent Herculanum ) , étoit faite de Marqueterie en divers compartiments ; c'eft le feul monument qui nous refte de la Marqueterie des Anciens , qui fârement avoit fait autant de progrès que la Mofaïque en pierres & en marbres , mais dont on n'en a pas trouvé d'exiftante , ainfi que de cette dernière , parce que les bois ne font pas d'une nature à durer auflî long-temps que la pierre ou le marbre. On a aulTi trouvé des Mofaïques en France , auprès de Nîmes à Reims & à Cépoy près de Montargis , qui , fans être auïTi belles que celles trouvées à Rome ou aux environs, font connoître que cet Art étoit répandu par tout l'Empire Romain. A la première èfpece de Mofaïque dont je viens de parler , fuccéda celle des Sect. TV. §. i. Idée générale des différentes efpcces de Mofaiques. 1023 des verres teints, dans le temps du bas Empire; cette Mofaïque étoit com- pofée de dés de verre doublés d'une feuille colorée & collée delTus , de ma- nière qu'elle ne peut s'en féparer que par le moyen de l'eau bouillante ( ce qui revient allez aux cornes qu'on emploie dans les contre-parties de Marque- terie). La plupart des Mofaïgues de l'Eglife de Saint Marc de Venife , font dans ce genre : elles font compofées de petits cubes ou doublets de verre colorié , Se ont été exécutées par des Grecs venus de Conftantinople , vers l'an 1071 ou 512. Cette Mofaïque donna naiflânce à celle appellée communément la Mofaïque de Rome : cette dernière eft la plus belle de toutes, par la facilité qu'elle donne de rendre avec précifion toutes fortes de fujets , tant pour la couleur que pour la forme: elle eft compofée de petits parallélipipedes d'émaux incruftés , ou, pour mieux dire , placés fur un fond de maftic , comme je fexpliquerai ci- après. Cette efpece de Mofaïque prit nailTance à Conftantinople , on en faifoit déjà dès le neuvième fiecle ; mais c'eft à Rome qu'elle s'eft perfeélionnée , & qu'on peut voir les plus beaux ouvrages dans ce genre , à compter du Portrait du Pape Nicolas IV , fait en 1239 , jufqu'aux ouvrages qu'on fait encore de nos jours dans l'Eglife du Vatican , autrement dite Saint Pierre de Rome , où les chefs-d'œuvre de Peinture dont ce magnifique Temple étoic orné , font la plupart copiés en Mofaïque avec une vérité étonnante. Non-feulement les Artiftes qui font les Mofaïques modernes font parvenus à rendre avec précifion de grands morceaux de Peinture , tels que les grands Tableaux de Saint Pierre de Rome , dont il y en a qui ont jufqu'à lèize pieds de hauteur, fur huit à neuf de largeur, mais aulïï des petits Tableaux de chevalet, repréfentant des fleurs, des fruits & même des portraits, comme, par exemple , celui de la Reine Chriftine de Suéde , qui eft à Saint Pierre de Rome , au delFus du tombeau de cette PrincefTe ; celui du Pape Paul V , dont le vifage eft, dit-on, compofé de plus d'un million fept cent mille mor- ceaux, qui fûrement doivent être très-petits. Les émaux dont on conftruit les Mofaïques de Rome fe font avec du verre qu'on fait fondre, Se dans lequel on mêle des matières colorantes , foit mi- nérales ou métalliques , qui en fe mêlant avec le verre , le teignent de diverfes couleurs & le rendent opaque , parce qu'elles ne fe vitrifient pas entiè- rement. On fait des émaux en petits pains plats de cinq à fix pouces de dia- mètre , & fis à fept lignes d'épailFeur , tels que les émaux de Hollande <Sc de Venife , qui paffènt pour être les meilleurs, & dont les Emailleurs de Paris font ufage ; mais pour de grandes Mofaïques , on coule l'émail par tables & on le débite , pendant qu'il eft chaud , en petits parallélipipedes de trois à quatre lignes en quarré, fur un pouce & demi à deux pouces de longueur; d'au- tres coupent les émaux à froid en les pofant fut un coin d'acier, & en frap- pant fur l'émail bien à-plomb au-delîùs du coin, avec un marteau dont ua Menuisier , ///. Parc. III, SeU. E 13 1034 MENUISIER, m. Pan. SeR. III. Chap. XIV. ' côté eft tranchanc & d'acier trempé , ainfi que le coin ; ou bien on fait tenir Planche 1 email par quelqu'un, & prenant de la main gauche le marteau tranchant, 357' on frappe deflus avec un autre marteau qu'on tient de la main droite. En fendant l'émail , il faut avoir attention que les paraliélipipedes foienc d'une forme un peu conique , afin qu'ils joignent mieux à leur extrémité fupérieure , qui eft la face du tableau , & que le maftic faffe liaifon entr'eux. Il faut cependant obferver qu'ils ne foient pas trop coniques , parce qu'en polifTant l'ouvrage , on découvriroit les joints , qu'il eft efFentiel de faire le plus fins polTibles. Les tableaux de Mofaïques fe font fur des tables de pierres creufées dans toute leur furface à la profondeur de deux à trois pouces , félon la grandeur de l'ouvrage ; le fond de ces pierres eft coupé par des canaux creufés en queue d'aronde, & taillés en divers fens pour retenir le maftic fur lequel on place les émaux ; ce qui fe fait de la manière fuivante. On commence d'abord par placer la pierre verticalement à côté du tableau qu'on veut copier , & dont on calque les contours fur le maftic ; enfuite on prend des émaux dans une boîte oià ils font rangés par cafés , félon la dégra- dation des couleurs , & on les place dans le maftic , où on les enfonce avec un maillet de bois , en obfervant que la furface de la Mofaïque foit la plus unie polTible. Quand l'ouvrage eft terminé , on le laiffe fécher , puis on le polit en paflànt deflùs des morceaux ou meules de grès arrêtés dans une planche qu'on nomme bois à poiir -, cette planche eft terminée par Tes extrémités en forme de manche, que tiennent deux Ouvriers qui la font mouvoir fur la JMofaïque, & qui y fement de temps en temps du grès très-fin pour hâter l'ouvrage ; après quoi on vifite la Mofaïque pour voir s'il n'y a pas de défaut , qu'on répare, foit en mettant d'autres émaux , ou bien feulement du maftic compofé de cire & de la poudre d'émaux choifis d'une couleur convenable ; enfuite on acheva de polir avec de l'émeri & de l'huile de lin , à-peu-près comme on polit les glaces. Les petits fujets de Mofaïque fe font fur une table de tôle , dont les bords font relevés d'environ deux pouces ; le dedans de cette table eft parfemé de petits crampons qui y font adhérents , & qui fervent à retenir le maftic , qu'il faut avoir grand foin de tenir toujours frais & dans un état de molelTe propre à recevoir les émaux ; c'eft pourquoi , dans de grandes Mofaïques , on ne met du maftic qu'à mefure que f ouvrage avance ; & à chaque fois qu'on quitte l'ouvrage , on le couvre avec des linges mouillés qui empêchent le maftic de fécher trop vite. Outre les Mofaïques dont je viens de parler , il en eft encore une autre efpece qu'on nomme Mofaïque de Florence , laquelle eft conftruite avec des cailloux , des marbres , des pierres dures , & même des pierres précieufes , qu'on emploie , non pas en petites parties de trois à quatre lignes de diamètre. Sect. IV . §. I. Idée générale des différentes efpecesde Mofaïques. 102 ; plus ou moins , comme dans les autres Mofaïques , mais dans toute leur gran- • — — — ~ deur , félon que les nuances de leurs couleurs & les formes des chofes qu'ils Planche doivent repréfenter peuvent le permettre. 337» Cette Mofaïque fut inventée à Florence ; & la belle Table odogone qu'on y voit dans une des pièces de la Gallerie nommée la Tribune, a été faite fous le Grand-Duc Ferdinand II , dont elle porte les armes , lequel a régné depuis 1621 jufqu'à 1670 où il eft mort. Cette Mofaïque efl: la plus précieufe de toutes , tant par la richeflè des ma- tières qu'on y emploie , que par la longueur & la grande difficulté du travail, les pierres dures qu'on y emploie ne pouvant être débitées qu'avec des eipeces de fcies don: la lame eft de cuivre , & n'a pas de dents , de même que les fcies de nos Scieurs de pierres ; & pour aider à l'aélion de la fcie , on fe fert d'émeri broyé dans de l'eau, au lieu du grès dont fc fervent ces derniers. Une des grandes difficultés de cette efpece de Mofaïque , eft de trouver des pierres dont les nuances s'accordent bien avec le ton du deffin , ou , pour mieux dire , du tableau que l'on copie , ce qui oblige les Artiftes qui travaillent à ces beaux ouvrages , d'avoir une infinité de pierres débitées de toutes les couleurs & nuances poffibles , pour choifir entr'elles celle qui leur paroît le plus convenable ; auffi voit-on à Florence des échantillons de marbres & de pierres fciés de 12J différentes elpeces. Il n'y a qu'à Florence où on faffe de cette elpece de Mofaïque ; & tous les Ouvriers qui y travaillent , au nombre de quarante , font au compte du Grand-Duc , & ne lui font pas beaucoup d'ouvrage ; ce qui n'eft pas fort éton- nant , vu la grande diiïiculté du travail , qui rend ces ouvrages extrêmement chers. Un pied quarré d'une médiocre exécution , y vaut , dit-on , fix à lèpc cents livres. On a fait de ces fortes de Mofaïques à Paris, dans la Manufacture Royale des Gobelins , dans le temps que le fameux Boule y failbit ces beaux ouvrages d'Ebénifterie de toute elpece ; mais après la mort de Louis XIV , ou pour mieux dire, de M. Colbert , ces beaux établiflements ont été abandonnés , & le travail des Mofaïques en pierres dures eft retourné aux Florentins , qui l'ont confervé avec honneur jufqu'à ce jour. J'ai cru ne pouvoir pas me dilpenfer de donner ici ce petit détail touchant les Mofaïques , tant anciennes que modernes , vu le grand rapport que ces dernières ont avec la Marqueterie ou Mofaïque en métaux , avec laquelle on les emploie quelquefois. Au refte , ceux qui voudroient avoir une connoiflànce plus détaillée de ces fortes d'ouvrages , pourront confulter la Diffenacion fur La. fabrique des Mofaïques , par M, Fougeroux de Bondaroy , le Voyage d'un François en Italie , l' Encyclopédie , & le Diclionnaire du Commerce , au mot Mojàïque, 1026 MENUISIER, m Pan. SeB. 111. Chap. XIK Planche §■ !!• Des Ornements de Bronze en général. 337. t) E quelque nature que foient les ouvrages d'Ebénifterie , ils font prefque toujours ornés de Bronzes , foit rapportés deffus comme les rinceaux , les agrafFes , les guirlandes , &c , ou bien qui font partie même de l'ouvrage , dans lequel ils font quelquefois incruftés , ou y forment des cadres, des bor- dures à compartiments , &c. Le travail des premières efpeces de Bronzes , dépend abfolument du Mode- leur , du Fondeur, & des autres efpeces d'Ouvriers qui les flniffent ; cependant ces premiers , c'eft-à-dire , le Modeleur & le Fondeur , ne doivent travailler que de concert avec l'Ebénifte , qui doit diriger leurs opérations , quant à ce qui a rapport à la forme des Bronzes , fur-tout à leur intérieur , c'eft-à- dire, du côté où ils font appliqués fur l'ouvrage , dont ils doivent fuivre très- exadement les contours, les Ebéniftes doivent auffi décider du relief ou faillie de ces mêmes Bronzes , des endroits où ils peuvent ou doivent être coupés pour faciliter les diverfes ouvertures de f ouvrage , qui fouvent fe trouvent recouvertes par ces derniers , c'eft-à-dire , les Bronzes ou ornements de cuivre. Ces Bronzes,^^. 6, s'attachent ordinairement fur l'ouvrage avec de petits clous de cuivre , ou , ce qui eft plus folide , avec des vis en bois à tête ronde & dorées , qu'on place dans les endroits qui font les moins apparents , comme dans des fonds , des revers de feuilles , &c ; cependant dans le cas de grands ornements , on fait très-bien , lorfque la place le permet , de faire réferver par le Fondeurdes jets ou goujons placés de diftance en diftance derrière les Bronzes comme celui C,fig. 7 : on taraude ces goujons qui paffent au travers de l'ouvrage, pour être arrêtés en dedans avec des écrous , comme le repréfente la fig. 8, Les autres efpeces de Bronzes font les filets & les plates-bandes , les cadres ornés de moulures , & généralement toute partie foit incruftée ou rapportée fur l'ouvrage. Les filets qu'on incrufte dans les ouvrages d'Ebénifterie , fè tirent à la filière plate , à telle largeur & épaiflèur qu'on le juge à propos , & s'incruftent ainfi que ceux de bois ; c'eft pourquoi je n'en parlerai pas davan- tage. Quant aux plates-bandes , on les refend à la largeur néceflaire avec une fcie trempée, puis on achevé de les dreffer & de les mettre de largeur avec la var- lope-onglet à femelle de fer & à fer renverfé. Il eft cependant bon d'y donner quelques coups de lime fur les rives , après qu'elles ont été drelTées , afin qu'elles prennent mieux la colle , ou du moins que cette dernière s'accroche avec les inégalités faites avec la lime , lefquelles inégalités ne doivent cependant pas être apparentes au dehors , c'eft-à-dire , à l'endroit des joints , qui doivent toujours être les plus fins & les plus droits qu'il eft poifible. Les moulures de cuivre fe font de deux différentes manières ; favoir , à la filière,' Sect. If . §. IL Des Ornemens en Bronie en gém'ral. 1027 filière , ou à la fonte , par le moyen des moules. Celles qui font faites à la filière , font les plutôt faites & les plus parfaites ; mais elles ont le défaut Fianche d'être gâtées de diftance en difiance , par la preffion des tenailles ou pinces qui mordent deffijs ; de plus , lorfqu'on a befoin d'une moulure qui ait peu de lon- gueur , & que le profil de cette moulure ne fe trouve pas dans ceux de la filière j ce qui arrive très-fouvent , il vaut mieux faire un modèle de la moulure donc on a befoin , & la faire fondre, ou , pour parler plus jufte, la faire couler en cuivre , ce qui coûte beaucoup moins cher que de faire une filière tout exprès. Les moulures fondues ont cependant leurs inconvénients , parce qu'elles viennent peu propres , & qu'elles ont fouvenc à leur furface des inégalités ou cavités qu'on nomme foufflures ; & qu'on ne peut réparer qu'en y mettant des lardon? de cuivre ajuftés le plus proprement poflîble. Pour que les moulures fondues viennent bien , il faut difpofer leurs modè- les de manière qu'ils lai/Fent plus de matière qu'il ne faut, fur-tout du côté où la moulure doit être apparente. Ces modèles doivent aulïï être faits en dépouille , c'eft-à-dire , que tous leurs angles rentrants foient gras , & qu'en général toutes leurs arêtes foient un peu arrondies , afin qu'en les retirant de dedans le moule , ils n'en enlèvent aucune partie. Il eft aufli bon que ces modèles foient faits de bois plein & uni, & que loifqu'ils font finis, on les verniffe pour en boucher tous les pores , & empêcher qu'ils ne foient moins adhérents à la terre du moule. Koj/q les fig. ^& 10, qui repréfentent l'un© le profil d'une moulure achevée , & l'autre celui du modèle de cette même moulure. Quand les moulures font fondues , on les répare à la lime & aux écouenes ou grêles de toutes fortes ,dont j'ai parlé ci-devant, page^^^ ; &pour qu'elles fuflent plus parfaites , on feroit très-bien de fe fervir des limes coudées, comme on le fait quelquefois , mais encore d'alTujétir ces mêmes limes dans des elpe- ces de fûts femblables à ceux des outils de moulures, ce qui rcndroit l'ouvrage beaucoup plus précieux , & en même-temps moins long ÔC moins fujet à faire. Comme les moulures de cuivre tirées à la filière , 8c celles qui font fondues , ont chacune leur inconvénient , on a cherché un autre expédient pour les faire plus promptement & plus propres , & on n'en a pas trouvé d'autre que de tourner dans une table de laiton des cercles d'un profil femblable à la mou- lure qu'on avoir à faire; Quand on a tourné ces cercles , on les coupe à un endroit quelconque de leur circonférence , & on les redrelTe enfuite , de manière qu'ils faffent une ligne droite , ce qui donne de très-belles moulures à la vérité , mais ce qui ne réuffit pas toujours bien , parce qu'on ne peut faire ainfi des moulures que d'un très-petit profil, tant en largeur qu'en faillie , vu la difficulté de les bien redreffer , fur-tout quand le diamètre de ces cercles Menuisier , III. Fan. III. Seci, E la îoaS ME NU ISIER, m. Part. SeS. III. Chap. XIV. n'efl: pas très-confidérable ; alors la matière de leur extérieur ne fe refoulant pas aflèz fur elle-même , il arrive fou vent qu'il fe fait des caffures à l'intérieur, ou du moins que la moulure ne devient pas parfaitement droite fur fa longueur; c eft pourquoi je crois qu'il vaut mieux s'en tenir aux deux premières manières de faire les moulures de cuivre ; & fi j'ai parlé de cette troifieme manière de les faire , ce n'a été que pour indiquer une reffburce qui pourroit quelquefois être utile en certaines occafions. Je ne m'étendrai pas davantage fur la conftruâion des Bronzes , parce que leur travail regarde d'autres Ouvriers que l'Ebénifte , du moins pour l'ordi- «aire , & que cela fera traité dans d'autres Arts avec toute l'étendue convena- ble , ce que je ne pourrois pas faire ici fans m'écarter de mon fujet. Cependant comme ce font les Ebéniftes qui font les modèles des fontes , je ne faurois trop les exhorter à les faire avec tout le foin & l'attention poffi- bles , tant pour qu'ils fe dépouillent aifément , que pour laifTer de la matière aux endroits convenables , ainfi que je l'ai dit plus haut , ce qui peut s'appliquer à toutes fortes d'ouvrages de cette nature. Après avoir traité fommairement des différentes fortes de Bronzes , il me relie préfentement à traiter des différentes manières de fouder les différents métaux dont on fait ufàge en Ebénifterie , ce qui fera l'objet du paragraphe fuivant. §. III. De la manlen de fouder les Métaux qu'on emploie aux différents ouvrages d' Ehénijhrie. P A R le terme de fouder , on entend l'aâion d'affujétir ou arrêter enfemble deux pièces de même ou de différents Métaux , & cela par le fecours d'un agent ou métal compofé , nommé foudure , dont j'ai fait la defcription ci- deffus (*). Il y a deux manières de fouder , l'une qu'on appelle foudure a froid, ou, pour mieux dire , au fer ; & l'autre , qu'on appelle foudure à chaud, qui fe fait par le moyen du charbon allumé, ou d'une lampe. On ne foude guère à froid que l'étain , foit avec du cuivre ou avec lui- même , parce que comme c'eft un métal mou , il entreroit trop vîte en fufion fi on le mettoit fur le feu ; ce qui fait qu'on ne fe fort que de fers chauds , lefquels font fondre la foudure , dont la chaleur eft fuffifànte pour échauffer l'étain au point qu'elle s'incorpore aifément avec lui. (*) En général , tous les Métaux fe foudcnt ainfi que je viens de le dire ; cependant lorf- qu'on unit enfemble deux pièces de fer par le moyen du cuivre , on ne dit pas une fouiure^ mais une hrâfure ; Se on ne die jfoudure , en par- lant de ce métal , que lorfque l'on unit deux morceaux de fer fans fecours d'aucun agent , en les faifant feulement chauffer à un degré de clialeur convenable , & en les appliquant l'un fur l'autre fur l'enclume, où on les forge comme s'ils ne faifoient qu'un , ainfi que Fécaille , ayant la propriété de fe réunir par le moyen de U chaleur feulement. Sect. IV. §. m. Manière de fonder les Métaux pourVEbénîfterie. 1029 Les fers à fouder font de deux fortes ; les uns, comme la fig. 12 , fervent à • faire des foudures dans les angles ; & les autres , r 3 (& 14 , ne fervent qu'à faire des foudures plates. II faut que ces différents fers foient étamés pour en faire ufige , fur-tout les derniers , dont la maffe eft toute de fer , au lieu qu'à l'autre on la fait ordinairement de cuivre. Quand on veut fouder de l'étain avec lui-même , on commence par enduire les pièces aux environs des joints, avec une efpece de blanc ou de colle faite avec du blanc d'Efpagne & de la colle-forte : il faut mettre deux couches de ce blanc, qui empêche la foudure de prendre ailleurs qu'à l'endroit du joint, & qui en même-temps arrête les progrès de la chaleur du fer; puis quand le blanc eft bien fec , on avive le joint , & prenant delà foudure avec le bout du fer chaud , on l'applique delTus le plus promptement poffible , pour ne pas trop échauffer l'étain , auquel , comme je l'ai déjà dit , la foudure en fufion communique toujours affez de chaleur, Lorfqu'on foude au fer , il faut avoir près de foi une brique ou une efpeca de palette garnie de fer-blanc , nommée étamoir , fur laquelle on frotte de temps en temps le fer , après l'avoir fait toucher à un morceau de poix-réfine , par le moyen de laquelle la foudure s'y attache plus aifément. Quand la foudure d'une pièce d'étain doit être apparente, il faut fe fervir du même étain que la pièce pour la fouder , afin que quand elle eft polie , la 'foudure n'y paroi/Iè en aucune manière. Quand on foude une pièce de cuivre avec une piccc d'étain , on le fait toujours ainfi que je viens de le dire ci-defTus , en obfervant feulement qu'il eft bon de chauffer un peu la pièce de cuivre , & de la frotter de fel ammoniac , afin que la foudure d'atain s'y attache mieux. La féconde manière de fouder , ou la foudure à chaud , fe fait ou par le moyen des charbons ardents ou d'une lampe allumée , comme je l'ai die plus haut: dans l'un ou l'autre cas, on difpofe toujours les pièces à fouder de la même façon , ce qui fe fait de la manière fuivante. On commence par difpofer les joints tels qu'ils doivent être, foitboutà bout, ou en recouvrement fun fur fautre ( ce qui eft la meilleure manière , quand cela eft poffible ) ; enfuite on lie les pièces enfemble avec du petit fil de fer bien recuit, de façon qu'elles ne puiffent pas fe déranger, comme \-&fig. 11 ; puis or» mouille fendroit qui doit être foudé, pour y fixer les paillons de foudure, & fur-tout le borax , dont on couvre le tout ; après quoi on met la pièce ainfi difpofée , fur des charbons allumés dans une poêle de fer , & on la recouvra avec d'autres charbons , de manière cependant qu'on puilfe voir l'endroit qui doit être foudé. Quand tout eft ainfi difpofé , on foufïle le feu en dirigeant fon aélion de manière que la partie qui doit être foudée , chauffe également & en même temps par-tout. Cette opération demande beaucoup d'attention & d ufage , parce que d'abord qu'on voit la foudure entrer en fufîon ( ce qui PtANCHS 337. tojo MENVlSIE R, m Part. SeÛ. lîl. Chap. XlF. fe fait très-prompcement ) il fautcefler de fouffler tout aufli-tôt, fans quoi ort courroit grand rilque de faire fondre la pièce , ou de brûler la foudure. Quand les pièces qu'on veut fonder , font d'une nature à ne pouvoir pas Être liées enfemble , mais que leurs foudures font à leurs extrémités , foit que ces mûmes pièces doivent être mifes bout à bout l'une de l'autre ou en retour d'équerre , comme , par exemple , la fig. 15 , on affujétit les pièces à foudet for de la tôle, ou, ce qui eft encore mieux, for du gros fil de fer applati , de deux à trois lignes de diamètre , auquel on a donné une forme femblable à celle des pièces qu'on veut fouder. Foye^ la fig. 16 , qui repréfente le fil de fer for lequel eft placé la partie du cadre repréfente ly. Quand les pièces font trop petites pour être fondées for un grand feu , on les foude à la lampe ; ce qui fo fait de la manière fuivante. La pièce qu'on veut fouder étant apprêtée , comme je l'ai dit ci-deffijs , on la pofo for un gros charbon applati & difjjofé de manière que la pièce y tienne folidement ; on prend le charbon ( & par conféquent la pièce ) de la main gauche , & de la droite un chalumeau ou tuyau de cuivre recourbé par le bout ; on approche la pièce de la lampe , & on foufBe dans le chalumeau , afin d'exciter la flame de la lampe , & de la porter for l'endroit de la pièce qu'on veut fouder , en prenant la même précaution que quand on foude au feu , c'eft-à-dire , de celfer de fouffler d'abord que la foudure commence à entrer en fufion. Comme les pièces qu'on foude à la lampe font la plupart très-petites , & qu'il ne faut y mettre qu'une très-petite quantité de borax , on met ce dernier dans une boîte de fer-blanc ou de cuivre , fig. 17 , nommée Rochoir , au bas de laquelle eft un petit tuyau dont l'orifice ou ouverture eft très-petite , pour ne lailîèr fortir qu'une très-petite quantité de borax à la fois. S'il arrivoit que les pièces qu'on veut fouder enfemble , euflènt des aftem- blages par le moyen defquels on pût en retenir les joints , on pourroit les fou- der à l'étain , comme je vais l'enfeigner. , On commence d'abord par faire chauffer la pièce à l'endroit de l'aflemblage qu'on frotte de fel ammoniac , & qu'on étame enfuite avec le fer , fig. 12, en obfervant de bien étendre l'étain dans toutes les parties de l'affemblage. On fait la même chofe, s'il eft poffible , aux deux pièces qui doivent aller enfem- ble ; & quand elles font bien étamées , on les fait chauffer toutes deux juf- qu'à ce que f étain foit prefque en fufion ; puis on les aflTemble & on les lailTe refroidir ; alors elles font parfaitement fondées intérieurement fans qu'il en paroifFe rien au dehors. Cette manière de fouder les pièces affemblées , eft très-avantageufe , parce que fi on vouloir les féparer , on n'auroit qu'à les faire chauffer pour molifier l'étain qui les tient , ce qu'on ne peut pas faire avec les autres efpeces de foudures. Voilà, SECT.IV.^AV.Defcnption ÔC uf âge d'un Vernïs , SCc. 1031 Voilà, en abrégé, tout ce qui regarde la manière de fouder les différents métaux dont on fait u%c en Ebénifterie ; & je vais terminer ce Chapitre & cette Partie de mon Ouvrage, par la defcription du Vernis propre à mettre fur les ouvrages de cuivre , connu en France fous le nom de Venus d'Ang/aerre. §. IV. Deferlpdon & ufage d'un Vernis propre à vernir & dorer le cuivré & les autres métaux. Lorsque j'ai parlé du poli du fer & du cuivre page , j'ai avancé que je donnerois la compofition & fufage du Vernis connu fous le nom de Verms d' Angleterre , ce quine ^pem pas être mieux placé qu'ici, puifque je Viens de terminer ce qm regarde les bronzes , ou, pour mieux dire, les cuivres dont on orne les différentes efpeces d'Ebénifterie. Comme on ne trouve pas le Vernis chez les Marchands , & que ceux qui en favent la compofition en font un fecret, j'ai cru devoir donner ici un détail des drogues dont il eft compofé, ainfi que la manière de les réduire en li- queur , ce qui fe fait de la manière fuivante. Il faut prendre une demi-once d'Ambre jaune ou Karabé jaune , ou de Succin (ce qui eft la même chofe , l'Ambre jaune étant fouvent indiqué fous l'un de ces deux derniers noms ) , qu'on réduit en poudre très-fine & paffée au tamis de foie; une demi-once de Gomme laque en grain, mife en poudre comme l'Ambre jaune ; neuf grains de Safran en poudre ; dix grains de Sang de dragon en larme concaffé, & dix onces d'Efprit-de-vin parfaitement déphlegmé, à l'épreuve, de la poudre , ce qui fe fait ainfi qu'il fuit. ' On met une pincée de poudre à tirer dans une cuillier ordinaire , & on la remplit de f Efprit-de-vin dont on veut faire l'épreuve ; puis on allume ce dernier avec un morceau de papier ; & quand il eft bon , il faut que d'abord qu'il eft entièrement confumé , la poudre prenne comme fi elle n'avoit pas été imbibée. Si au contraire la poudre ne s'enflammoit pas fubiteraent , ce feroic une marque que l'Efprit-de-vin ne feroit pas affez parfait pour faire ce Vernis. Toutes ces drogues étant bien choifies, il faut prendre une bouteille de pinte,feche& très-propre, dans laquelle on verfeta l'Efprit-de-vin & l'Ambre jaune, en obfervant de remuer la bouteille pour mêler ces deux drogues; après quoi on coëffera la bouteille avec un parchemin mouillé , qu'on affujétiri autour du goulot avec une ficelle bien ferrée , Se on fera un trou au parchemin avec une épingle qu'on y laiffera , pour donner de l'air à la bouteille quand il fera néceffaire ; enfuite on mettra fur le feu un chaudron d'une grandeue convenable pour contenir la bouteille , & on mettra du foin au fond du chau- dron , pour que la bouteille n'y touche pas & foit en quelque manière ifolée au milieu de l'eau qu'on met dans le chaudron en quantité fuffifante , pour Menuisier , ///. Pan. III. Sccl. G 12, 1032 MENUISIER, III. Part. Sect III. Chap. XIV. que la bouteille trempe bien dedans ; & pour que cette dernière ne fe renverfe pas , on en aflujétic le goulot foit à un bâton , ou toute autre chofe , placé en travers du deffus du chaudron , deflbus lequel on fera un feu fufBfant pour que l'eau foit toujours très-chaude , fans cependant qu'elle bouille. A mefure que l'eau chauffera , on ôtera de temps en temps l'épingle , pour que l'Efprit-de-vin qui fe raréfie ne falfe pas cafler la bouteille , qu il faut reti- rer du chaudron de demi-heure en demi-heure , & toujours près du feu , de crainte que Fair froid ne faffe caffer la bouteille ; & à chaque fois qu'on l'ôtera du chaudron , il faudra l'agiter un moment, en obfervant toujours d'ôter l'épingle pour y donner de fair : on continuera la même manœuvre pendant quatre à cinq heures , après quoi on ne fera plus de feu , pour lailTer refroidir f eau du chaudron , & par conféquent la bouteille. Quand elle fera bien refroidie , on l'ôtera du chaudron , & on la découvrira pour y mettre les autres drogues , c'eft-à-dire , la Gomme laque , le Safran & le Sang de dragon , & on la rebouchera comme auparavant ; on la remuera 8c on la remettra dans l'eau , qu'on fera chauffer un peu auparavant, & on recom- mencera comme ci-deffus pendant quatre à cinq heures ; après quoi on lailfera refroidir la bouteille fans la remuer davantage; & au bout de quatre ou cinq jours , on verfera bien doucement le Vernis dans une autre bouteille tant qu'il viendra clair; &ce qui reftera, on pourra lepafTer au travers d'un linge fin; après quoi on bouchera bien exaélement la bouteille. Si on vouloit faire une plus grande quantité de Vernis , il faudroit prendre une bouteille ou tout autre vafe Je verra , grand à proportion , en obfervant toujours que le Vernis n'occupe que le quart de la capacité du vafe , fans quoi il calTeroit lorfque les drogues feroient échauffées. Si on vouloit dorer de l'argent ou de f étain avec ce Vernis , il faudroit doubler ou même tripler la dofe du Safran ou du Sang de dragon. Quant à la manière d'employer le Vernis , on s'y prend ainfi qu'il fuit. Quand la pièce aura été bien polie, il faut la dégrailTer en la frottant avec de la poudre à poudrer , détrempée dans un peu d'efprit-de-vin, ou bien, au lieu de poudre, on peut fe fervir de blanc d'Efpagne, réduit, comme cette dernière , en poudre impalpable ; puis on la fera chauffer fur une plaque de tôle placée fur un fourneau , en obfervant qu'elle chauffe bien également partout , & à tel degré de chaleur qu'on ne puiffe pas aifément la toucher du de/fus de la main ; puis on verfera du Vernis dans un petit vafe , dans lequel on trempera un pinceau de poil de blaireau bien doux ; & après l'avoir un peu efîiiyé fur le bord du vafe, on le paffera légèrement fur la pièce fans beaucoup l'appuyer; il faut le faire affez adroitement , pour que les reprifes ne paroiflent point, & qu'il n'y ait point d'ondes ni de taches fur la pièce vernie. Si cependant il arrivoit qu'il y eût quelques ondes , on les feroit difparoî- tre , du moins en partie , en approchant la pièce vernie de la plaque de tôle du ^ Sect if. §. IV. DefcripÙon êC ufage d'un Vernis , SCc. 1033 côté où feroient les ondes , en évitant fur-tout que la pièce touchât à la plaque. S'il arrivoit qu'on voulût vernir des pièces qui , par leurs formes ou pour toute autre raifon , ne puffent pas être chauffées , on les verniroic à froid , &. on les approcheroit tout de fuite du feu , pour qu'elles prilTent une chaleur capable de faire cuire également le Vernis , & de donner le luftre à la pièce. Lorfque le poli viendra à fe falir , on le nétoyera avec de l'eau tiède & un linge blanc & fin ; mais il ne faut jamais fe fervir d'aucunes pierres ou poudres à polii', comme le blanc d'Efpagne , le tripoli , &c. Ce Vernis eft dur & très-beau ; il ôte l'odeur du cuivre , lui donne une belle couleur brillante approchant de celle de l'or ; & , ce qu'il y a de plus avantageux , il le préferve du verd-de-gris , en empêchant l'effet de l'humidité : de forte qu'on peut toucher une pièce de cuivre ainfi vernie , fans craindre d'y faire de taches , ni d'en gâter le poli. Les Anglois ont long-temps fait un grand myftere de la compofîtion de ce Vernis, & de la manière d'en faire ufage ; cependant il fut communiqué à des Artiftes François en 1720 & en 1738; & en 1751 , il fut décaillé dans les Mémoires de l'Académie Royale des Sciences, où il feroit encore inconnu aux Artiftes , ainfi que beaucoup d'autres découvertes qui feroient très-utiles à une infinité d'Ouvriers , fans les recherches que fit le Révérend Pere Dom Bedds , qui ne s'eft pas contenté de copier la recette de ce Vernis telle qu'elle eft donnée dans les Mémoires de l'Académie , mais qui a joint la pratique à la théorie , en faifant Ini-mêmp Au Vernis , lequel ne le cède pas à celui d'An- gleterre en aucune façon ; c'eft de lui que je tiens la manière de faire ce Vernis & de le mettre en ufage. Fin de l'An de l'Ebénifiem. 1034 ■^s^g^^^ ' ' """""" ' I * TABLE DES CHAPITRES ET ARTICLES D U MENUISIER ÉBÉNISTE. TROISIEME SECTION DE LA TROISIEME PARTIE DE l'Art du Menuisier. Chapitre dixième. De^ différents Bois propres à l'Ebémfterie. Page ']66 Section Première. r)e/cr;;?r/on des Bois des Indes de leurs qualités , relativement à l'EhéniJierie. 767 TABLE Alphabétique des Bois étrangers connus fous le nom de Bois des Indes , & qui font propres à l Ebénilierie ; leurs couleurs , leurs qualités , dures ou tendres , ou aromatiques , Scie nom des Pays où i]s croïiîent. 71^8 ^. I. Defcription des Bois François , propres à l'Ebéniflerie. 782 TABLE Alphabétique des Bois de France , dif pofée comme celle des Bois de<; Indes, ibid. §. n. Des Couleurs en général ; Se des Bois des Indes & de France , par rap- port à leurs différentes couleurs & à leurs nuances. 7^7 TABLE des Bois des Indes & de France, fuivant leur couleur. 7^^ §. lit. Des différentes Compofitions de Teintures propres à ceindre les Bois , iScla manière d'en faire ufage. 7^2 Manière de teindre les Bois en Bleu. 797 Manière de teindre en Jaune. 79^ Manière de teindre en Rouge. ibid. Manière de teindre en Fauve , en Noir & en Gris. 797 Manière déteindre les Couleurs compofées. ibid. Section IL De la refente des Bois propres à VE- bénijhrie. 799 §. I. Defcription des outils des Ebénifîes. 802 Section Jll. Des Bâiis propres à recevoir les rêvé- tijjements d'EbéniJïerie ; de la manière de Us difpo- fer & de les contraire. 811 CHAPITRE XL De l'Ebénifteriefimple .ou du Placage à compartiments en général. 8 i J Section I. Des diverfes fortes de Compartiments en général ; du détail tir de la difpofition des bois de placage. S 17 §. I. Des diverfes fortes de Compartiments, tant droits que circulaires. 822 §. IL De la manière de découper <Sc d'ajuf- ter les pièces droites, & des Outils qui y font propres. 852 §.IIL De la manière de découper les pièces cintrées, & des Outils qui y font propres. 8-j-i Section IL Delà manière de coller & plaquer la Marqueterie. 848 Section III. De la manière de finir VEbénifîerie de placage , &- des différentes efpeces de polis. 857 CHAPITRE XII. De l'Ebémjlerie ornée , appellée Mofaïque oh Peinture en Eois , en général, 8(55 Section L Principes élémentaires des règles de PerfpeBïve , dont la connoiffance ejl abfolument né- ceffaire aux Ehénijîes. S6y Section IL De la manière de découper , d'ombrer , d'incrujler les Ornements bois de rapport. 87S §. 1. De la manière de graver ôc de finir les Ornements de bois de rapport. 884 Section III. De la manière de repréfenter les Fleurs ^ les Fruits , les Payfagcs Cr les Figures en bois de rapport, 888 CHAPITRE XIII. De l'Ebémfîerïe pleine ou d'ajfemblage en général. 8(3 5 Section l. Defcription de quelques Outils propres à la conflru^ion de VEbéniJîerie d'affèmblage , ù'ia manière de j'en fervir. 8<?S Section IL Notions élémentaires de la partie de V^rt du Tour néceffaire aux Ebénifies. po2 §. L Des Taraux Se des Filières en bois à l'ufage des Ebénifies. 912 §, II. Des Machines propres à faire des Cannelures, tant furies Cylindres que fur les Cônes. (jiô §.1 Defcription de la Machine appellée communément Outil à ondes , & la manière d'en faire ufage de diffé- rentes façons. 5)25" Section III. Defcription des Outils de Serrurerie dont l'ufage ejî néceffaire aux Eb.nijîes, 932 §. I. Manière de ferrer TEbéniflerie. 545 §. IL De la manière de polir le fer & le cui- vre relativementâ l'Ehéniflerie. pja Section IV. Defcription de différents Ouvrages d'E' béniflerie pleine ou d'affemblage , en général. §. L Defcription de différentes fortes dê Métiers à broder. 51^6 §. IL TABLE DES C H A PI T R E S , &c. §. ir. Defcription d'une Imprimerie de Ca- binet, p^-j §. III. Defcription de différentes cfpcces de Guéridons Ôc de Tables. 972 §. IV. Defcription de différentes fortes de Pupitres. ^75" §. V. Defcription de différentes Boîtes de toilette, 078 CHAPITRE Xiy . De la mifieme efpece d'E- bénifierïe eu général, 5 82 Section 1. Defcription cks différentes matierts qu an emploie dans la conjlru^ioa ds La iroifianz efpece à'Ebénifîerie. cjg^ §. I. De l'EcailIe. 5184 §. II. De l'Ivoire. 5>g5 $.111. De la Corne. ^87 §. IV. De la Nacre de perle, ibid. §. V. De la Baleine. jiSS §. VI. Du Cuivre. ibid. §. VII.Dc i'Etain. 589 §. VIII. De l'Argent; ogo §. IX. De rOr. ' âid. I03X §. X. De la Colle de Poiffbn. ogr §. XI. Du Ciment ou Maftic. 003 §. XII. Des différentes fortes de Soudures. Section IL p« Ouvrages auxquels on emploi^ u troifieine efpece d Ebénij} me. -, - Section II!. De la tmniere de travailler ks différen- tes matières qui entrent dans la conflruSlion de la Marqueterie j cemme VEcailU , l'Ivoire , la Cnrnc , Section IV. De la manière de conftruîre la ^M^f- queterieijr de la terminer. 1014. §. I. Idée générale des différentes crpeccs de Mofaïquc;. J021 §. IL Des Ornements de Bronzes en gé- néral. jo2(î §, IIL De la manière de fouder les Métaux qu'on emploie aux différents ouvra- ges d'Ebénifterie. 1028 §. IV. Defcripiion;. ufaged'un Vernis pro- pre à vernir & dorerle cuivre & les autres métaux. xq^i Fin de la Table des Chapitres* Additions et Corrections. TaGE-j6^ , a^rhlen'.r ,&fas;e 771, UfautajSmer; Bamèou. Ce bois croît dans les Pays maritimes des Indes Orientales: c'efl: mie efpece de rannc ,dont la ^loiïeur vient jLifqu'à huic àd.ix pouces de diamètre, en Jii.il,<uflni ^^)u;uu.^ jufiju'â fon fommet , qui s'élcve queltjucfois juft]u',i trente pieds de hameiir. Le bois de Bambou elt très-dur , plein & de fil ; fa couleur cfl Hancliâtre , tirant fur le rouge , quelquefois elle eft d'un gris vineux , & toujours parfemée de petites veines un peu plus foncées que le rcfte. Les Indiens font un très- grand ulage de ce bois , tant pour la batiffe que pour les meubles , tk fur-tout pour faire des efpcces de féaux, dans leC- quels l'eau & les liqueurs fe confervcnt , dit-on , très-bien. La couleur du Bambou chan2;e en vcilliïïant ; Se de blanc lougeâtre ou de gris viuciix, il devient brun rouf^cdtre , du moins à l'extérieur j car lî on racle fa furface , il reprend fa première couleur , . à très peu de chofe prés , comme j'en ai fait l'expérience fur des efpeces de féaux ou barriques venus des Indes. Pagej^S , ligne , Lapire : tîfex ,Lapiré. Piigf 735, ligne 31 , oprè/ /e mo/ pinte , il faut fupprimer le rejle de la ligne & lafcûvanie, à la place de quoi il faut lire ce qui fuit : fur une once ou une demi-once d'indigo , {'car il y en a qui mettent la première de ces deux quantités , & d'autres !a féconde , ce qui efl , je crois , le mieux , parce que moins il y a d'indigo, mieux la ceinture s'introduit dans les pores du bois ) , & il faut avoir foin que l'indigo foit bien pulvcrifé , pour que l'aftion du vitriol £e faffe plus aifémenc ; puis on bouche crès-exa£lement la bouteille , & on lute , &c. Tage 800 , ligne 3 , fur environ trois pieds : Itfez, crois a crois pieds & demi de longueur. làem. ligne , fg- 1 1 : Ufez ,fig. 10. Page 81 1 , ligne 6 , de chaque côte : lifez,des deux côtés. Page S47, %ne Ïj après le mot ^mi^^nabU i ajoasez : ou du ïiioins bien folide. page 867 j à la fn de la note , page : Hfez , page 8ri. Page 870 , ligne 11 ,a le défaut: ''lifez , l'avantage. Page 894, ligne 3 1 , le reportent . Hjez , le rapportent. Page 901 , apret ta cinquième ligne , il faut ajout t r : Quand l» la lame de ces fortes de fcics efi très-étroite, on doit faiic leurs dentures à rebours , c'crt-à-dire , inclinée:; vers le man- che de la fcie , afin qu'elle ne ploie pas lorfqu'on en faic ufage i ce qui ne peut être , puifqu'étant ainfi dentée , elle ne peut mordre que lorfqu'on la retire à Coi. ' Page 901 , ligne 34 , après Ici mou ces derniers , il faut ajouter: c'efi-à -dire, les affemblrtges. Va^e 910 , ligne 39 , eufuite de quoi : lifez , puis. Ibid. 40 , cintré: lifez, centré. A la ligne fiiivame cefl la même faute- Page 916, ligne ja h : lifez , a d. PiJgepii , ligne 16 , d'égalclargcur , il faut ajouter , à'mi bout à l'autre. Page 9'{-',^Ç>'ès lali^nc ^7, il faut lire: Outre les différents outils de Serrurier dont je viens de parler, il faut encore que les Ebéniftes ayent une bigorne, elpece de petite enclume montée fur un billot de bois , ou du moins un tas au détkuc de cette dernière , pour pouvoir forger à froid & re— dreifer les différentes pièces de ferrures qui pourroient en avoir befoin. Je n'ai pas donné de figures de ces deux for- tes d'outils , qui d'ailleurs font très-Connus , & fe trouvent tout faits chez les Marchands. Page 958 , il faut faire attention que la Planche 313 , ne com- mence qu'à la dix-huitîeme ligne de cette page. Page 10 10, à la fin de la ligne 17, après le wof pince, il faut fupprimer & , & y fubjlituer une virgule. Page 10T4 , PL 334 : ^'T" 33Ï- Pag? !oi8, à la note féconde colonne , ligne 4, s'ils ne hi- foient qu'un , ainli que l'écaille : lifez , le fer ainli que l'é- caille, &c. CorreSions des Planches» A la Tlanche zSo , il manque les lettres î & / à la figure 6. A celle 183 , la lettre m , figure 4 , eft fur la ligne a côté de celle oi\ elle doi: être. A celle 194, la ^^are 11 efl: faite, mais elle n'eft pas cotée. A la figure iz , Pl. fj? , il manque un p au bout de la ligne a. Ala planche ^ao, figure 6 , il manque la lettre G. Meui/isier , ///. Part, IIL Seci. H 12 ro3<S EXTRAIT DES REGISTRES DE L'ACADËMIE ROYALE DES SCIENCES» Du y Mars 1774. JVÏerTieurs Duhamel & GuETTARD,qui avolent été nommés pour examïiiei la Troifieme SeSlion de la Tnifieme Partie de (Art du Menuifser , par M. R O u B o le fils, qui comprend l'An du Memifier-Ebênifle , en ayant fait leur rapport; l'Académie à jugé que cette Partie étoit en général bien détaillée , qu'elle contenoit des recherches curieu- fes , & des réflexions judicieufes fur cet Art , & qu'elle méritoit d'être imprimée avec la Defcription des Arts publiés fous fes aufpices 6c fous fon approbation : en foi de quoi j'ai ttgné le préfenc Certificat. A Paris le ly Avril i774' 5ign«'. GRANDJEAN DE FOUCHY, Secrétiiite perpétuel de l'Académie Royale des Sciences. DE L'IMPRIMERIE DE L. F. DELATOUR. 1774.